La guerre pendant son enfance, passée dans un camp de regroupement contrôlé par l’armée française, ou pendant sa carrière de reporter sur le terrain.
Né en Kabylie en 1953, ce journaliste et écrivain a grandi dans un camp de regroupement, en pleine guerre d’Algérie. En 1974, il pose ses valises à Paris et commence sa carrière en tant qu’illustrateur.
Il deviendra ensuite reporter de guerre pendant 25 ans pour Le Monde, Le Nouvel Observateur, Géo ou encore El Pais, publiant régulièrement des ouvrages inspirés de son expérience des conflits mondiaux.
La guerre, une horreur
«La guerre est une horreur inutile, mais sans elle, je n’aurais certainement pas connu l’école», explique-t-il. La même institution qui organisait son enfermement lui permettait aussi d’accéder à l’éducation, la médecine, le progrès.
Son attrait pour le voyage, il l’a cultivé dès l’adolescence auprès d’intellectuels réfugiés argentins et brésiliens qu’il côtoyait lors d’un stage de dessinateur en Algérie.
Pendant toutes ces années sur le terrain, Slimane Zeghidour s’est intéressé à quinze conflits en Amérique du Sud, à de nombreuses guerres civiles ainsi qu’à plusieurs différends au Moyen-Orient, en Afrique ou encore en Asie centrale.
En 2000, il décide d’arrêter le terrain après une scène qui le marquera à vie devant un barrage militaire en Israël: en faisant connaissance avec le soldat qui le menaçait de son arme, il a réalisé qu’il avait aussi peur que lui.
Le métier a changé
Aussi étrange que cela puisse paraître, Slimane Zeghidour découvre à peine le Canada. Et ce, dans le cadre de cette tournée de conférences dans les Alliances françaises.
Depuis ses débuts en tant que journaliste, dit-il, la nature des conflits et la manière d’exercer ce métier ont changé. Les fronts sont devenus de plus en plus urbains et fluctuants, la production journalistique est désormais concurrencée par l’immédiateté d’internet et des réseaux sociaux.
Dans les années 1990, les protagonistes percevaient le champ médiatique comme un champ de bataille, lui octroyait une grande importance. Aujourd’hui, les reporters sont confrontés à une violence accrue et se transforment parfois en boucs émissaires très rentables pour les ravisseurs.
Sans oublier que, désormais, les pays développés mettent en place un «plan média». Des communicants présentent la guerre sous un angle technique: «missile intelligent», «frappes chirurgicales», etc.
Journalisme plus que nécessaire
«La présence du journaliste, du témoin, reste fondamentale pour l’humanisation des rapports entre les gens. C’est une nécessité indispensable pour comprendre», nuance tout de même Slimane Zeghidour.
La relation entre la presse et la guerre est déterminante. Les médias permettent de montrer l’horreur de la guerre, de renforcer le droit (de la guerre, humanitaire, international), et de concerner l’opinion publique.
Face à la désinformation de plus en plus présente sur la toile, le métier de journaliste «restera une nécessité pour filtrer et authentifier les images recueillies», soutient-il fermement.
Acteur d’un conflit
S’il fallait répondre au thème de la conférence – Reporter de guerre: témoin ou acteur? – Slimane Zeghidour pencherait pour ce second rôle. «Le journaliste est acteur dans un conflit: ses images ont un impact sur l’opinion publique et ainsi une probable incidence sur le conflit.»
La qualité première pour un reporter est son honnêteté, quitte à utiliser le conditionnel lorsqu’il n’est pas certain.
Sur le terrain, il faut en permanence prendre garde à ne favoriser aucun des protagonistes. «J’avais l’habitude de prendre ma chambre d’hôtel côté israélien lorsque je passais ma journée à travailler en territoires palestiniens», précise-t-il avec humour.
Aujourd’hui, grâce à la presse, «les dictateurs sont honteux de torturer, ils doivent mentir car ils ont peur de la lumière», conclut ce grand journaliste.
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