Les derniers actes commis – le terme d’« événement » ne doit plus servir de camouflage pour masquer la réalité comme ce fut le cas dans notre propre histoire à propos de la guerre d’Algérie – par l’État d’Israël à l’encontre de populations civiles dans la bande de Gaza ces dernières semaines doivent être regardés avec lucidité. Il faut, en effet, en terminer avec l’impuissance de l’émotion face à des actes délibérés et parfaitement assumés par les autorités israéliennes. Nous avons tous échoué avec les accords d’Oslo devenus par une étrange captation non pas ceux de l’ONU mais ceux de Washington signés en septembre 1993 entre Messieurs Rabin, Arafat et Peres.
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Seul maître de son destin
Cet échec prévisible, déjà à l’époque par la clairvoyance d’Edward Said lequel avait relevé qu’Israël conservait la maîtrise de l’air et de l’eau sur ces territoires désormais déclarés palestiniens, suit la constante d’un vrai fil rouge tenu depuis l’origine par l’État d’Israël. Être et demeurer seul maître de son destin et de ses besoins territoriaux. Comme un État hors-sol c’est-à-dire hors le droit commun et international. Cette année 2018 correspond au 70e anniversaire de la création de l’État d’Israël ce qui oblige à convoquer les faits, à substituer à l’émotion la raison comme condition préalable à tout devoir de vérité. Le 29 novembre 1947 la résolution 181 de l’ONU recommandait un plan de partage de la Palestine, qui était alors sous mandat britannique, en deux États indépendants l’un « arabe » et l’autre « juif ». On doit à l’ouvrage de Sylvain Cypel les Emmures, la société israélienne dans l’impasse (Paris, la découverte, 2005) un précieux rappel des faits.
Dès le mois de juillet 1948 Israël s’est octroyé, au mépris de la lettre et de l’esprit de la résolution 181, des terres situées en dehors des limites onusiennes et correspondant déjà à 60 % de son propre territoire avant de procéder à l’expropriation de 82 % des Palestiniens qui y vivaient, terres dévolues par l’ONU à l’État arabe à naître. Aux actes d’expulsion s’ajouteront les destructions physiques de 400 des 500 villages palestiniens. Sylvain Cypel rappelle les propos tenus par Ben Gourion, fondateur de l’État d’Israël, dès 1948 : « (…) nous nous emparerons de la Galilée occidentale et des deux côtés de la route vers Jérusalem (allouées par le plan onusien du 47 à la future Palestine) et tout ça deviendra partie de notre État, si l’on en a la force. Alors pourquoi s’engager sur des frontières ? ». Les différentes cartes produites par l’auteur de cet ouvrage suffisent à démontrer la volonté originelle d’Israël à torpiller délibérément le droit au motif de justifier sa propre existence.
Israël, un État hors le droit
Comme le rappelait fort justement dans ces mêmes colonnes Marie Verdier le 26 décembre 2006, depuis la création de l’État d’Israël le conseil de sécurité de l’ONU a pris pas moins de 226 résolutions dont la plupart n’ont été suivies d’aucun effet de la part d’Israël. Tout le monde a en mémoire la plus déterminante d’entre elles dite résolution 242, consécutive à la guerre des six jours de juin 1967, qui faisait injonction à Israël de retirer ses forces armées des territoires occupés lors du récent conflit. Cette résolution sera suivie en Mai 68 de la résolution 252 laquelle rappelait que l’acquisition de territoires par la conquête militaire est inadmissible et considérait comme non valides au regard du droit international les mesures qu’Israël prenait savoir l’expropriation de terres et de biens immobiliers dans le but de modifier le statut juridique de Jérusalem.
On doit rappeler que le statut en question concernait le caractère international de la cité. Résolutions toujours en vigueur. Ces résolutions s’appuyant sur les différentes conventions de Genève qui prohibent notamment l’installation par un État d’une partie de sa propre population sur le territoire d’un autre État. C’est la raison pour laquelle dans le langage d’Israël n’apparaît plus le terme de « colonie » pour parler de cette occupation territoriale mais de simples implantations comme s’il s’agissait d’un mouvement naturel et spontané de civils israéliens hors de tout contrôle. Sans omettre la décision unilatérale du gouvernement israélien, toute récente, de déclarer Jérusalem désormais capitale de L’État.
La marche forcée et donc résolue d’Israël vers la multiplication des implantations et les décisions unilatérales illégales ne vise qu’à rendre irréversible un état de fait, contraire au droit international, et porte un coup d’arrêt aux accords de Washington de 1993 : il n’y aura pas deux États indépendants sur le territoire de l’ancienne Palestine.
La montée en puissance des groupes religieux au sein de la société politique israélienne est une trahison de l’esprit et de la volonté des initiateurs du projet de la création de cet État qui étaient au départ socialistes et laïques. En appeler aujourd’hui à une légitimité biblique pour justifier un droit d’antériorité sur la Palestine est une aberration historique ; antérieurement à la naissance du premier monothéisme, juif, ces territoires étaient bien occupés sans discrimination par une population de Palestiniens… habitants de la Palestine de l’époque.
La violence pour vivre
En se plaçant ainsi résolument hors le droit, l’État d’Israël a fait le choix de la violence comme moyen de « coexistence », si ceci n’est pas une perversion de l’esprit les mots n’ont plus de sens. À l’impuissance constatée des États à faire respecter le droit, on doit ajouter que les citoyens notamment français sont condamnés à assister impuissants à leur tour aux scènes de violence d’un État contre des populations civiles. En effet, depuis deux arrêts de 2015 et 2016 la Cour de cassation française a déclaré illégal le boycott des produits israéliens – instrument pacifique par excellence afin de contraindre un État à respecter le droit international – quand il est décidé par un groupe de citoyens. Sans les opérations de boycott à l’encontre de l’Afrique du Sud que serait-il advenu de Nelson Mandela ?
Cette position de la Cour de cassation viole l’autorité de la chose jugée de la Cour Internationale de Justice de La Haye qui, dans sa décision du 9 juillet 2004, a reconnu le caractère illégal de l’implantation du mur décidé par Israël puisque celle-ci empiétait sur le territoire palestinien. Israël est bien un État hors du droit. Alors quand des juges français viennent à considérer que la liberté d’expression et de protestation de citoyens doit céder le pas devant la liberté du commerce, c’est une nouvelle version des marchands du temple qui nous est servie. Aux citoyens ne reste plus dès lors que le silence comme une punition collective. Punition par essence injuste et injustifiable, n’en déplaise à certains juges.
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