La Wilaya 4 était Si M’Hamed et Si M’Hamed était la wilaya 4
On appela Wilaya 4, la zone de l'Algérois. C'était l'une des 6 Wilaya résultant du découpage territorial décidé lors du Congrès de la Soummam en 1956.
La Wilaya 4 était elle-même divisée en 3 zones (mintaka). Chaque zone était divisée en régions (nahia), chaque région en secteur (kasma), chaque secteur en douar..
Des six wilayas de l’organigramme révolutionnaire, la wilaya 4 était le pivot autour duquel la guerre d’Algérie évoluait. Sous le leadership du colonel M’Hamed, cette région devint la wilaya modèle de la révolution algérienne. Elle fut le centre de tous les événements dont les dénouements ont transformé l’Algérie et la France. L’auteur y était officier des services de renseignements.
La wilaya 4 s’étendait sur le centre du pays, de l’ouest de la Kabylie à la région d’Orléansville et d’Alger au Sahara (voir la carte d’époque de la wilaya 4). C’était la wilaya la plus riche du pays et de ce fait elle en était le centre économique : l’essentiel de l’industrie se trouvait à Alger et dans ses environs, les plaines fertiles de la Mitidja et du Chélif nourrissaient l’Algérie et exportaient des céréales vers l’Europe. Alger était aussi la base du pouvoir militaire et politique français où siégeaient la Xe Région militaire, le gouvernement général de l’Algérie, l’assemblée algérienne, les principales fortunes et les grands lobbies du système colonial.
Vu son importance et sa position stratégique, la wilaya 4 devint aussi pour l’armée française un terrain de choix pour expérimenter les techniques contre-révolutionnaires et de la contre-guérilla. La wilaya dut affronter également le maquis communiste et celui des messalistes ainsi que réduire une sédition en wilaya 6 (Sahara).
L’implantation à la lettre de la «constitution révolutionnaire» issue de la Plate-forme de la Soumam, en wilaya 4, créa une démocratie exceptionnelle. Elle fit aussi de la wilaya algéroise un terrain de combat entre les partisans d’une paix négociée et les radicaux du FLN dont l’objectif était le contrôle de la révolution et la prise des pouvoirs à l’indépendance. Dans un premier temps, cette lutte mena à l’ «Affaire Si Salah»; l’auteur a participé à cet épisode tragique de la guerre d’Algérie en tant qu’officier du FLN.
Jusqu’à la fin de 1959, la Wilaya 4 a pratiqué une démocratie révolutionnaire en plein coeur de l’Algérie en guerre. La mort au combat de M’Hamed et l’échec de l’« Affaire Si Salah » ont sonné le glas de cette unique et seule expérience démocratique dans l’histoire de l’Algérie.
L’étude des insurrections (Histoire) et le retour d’expérience
On se réfère aux écrits sur les insurrections du passé, on essaye de comprendre la guerre irrégulière et d’en déduire des leçons applicables aux événements actuels. On dépoussière des ouvrages allant des théories révolutionnaires de Mao Tsé Toung en passant par les guerres d’Algérie, du Viet Nam et autres. Sur ces (re) découvertes, on élabore de nouvelles théories, doctrines, stratégies qui risquent d’engendrer des conséquences contraires aux objectifs voulus. Bien que l’histoire des insurrections soit un trésor inestimable, il faut la prendre avec beaucoup de scepticisme. L’honorable historien britannique, Sir Michael Howard, a reconnu que le passé, qu’il avait dénommé avec justesse « une réserve inépuisable d’événements », peut être utilisé pour « prouver n’importe quoi et son contraire ».1
Il n’existe aucune méthode fiable de déterminer avec précision si un événement est enraciné dans une approximation proche du passé ou dans l’imagination de l’écrivain. Chaque événement dans cette «réserve inépuisable d’événements » a été causé par d’uniques circonstances qui ne peuvent jamais être répliqués ou complètement captés. Conséquemment, les leaders militaires doivent apprendre à sonder «l’histoire » en développant une habitude de scruter rigoureusement les faits et sources, de détecter les raisonnements biaisés et spécieux, et de développer une capacité pénétrante à déceler les mythes qui entourent le passé au lieu de se limiter à des incidents anecdotiques de l’histoire.
L’écrivain, le chercheur et surtout l’expert en contre-insurrection doivent partir du principe que l’histoire est un ensemble de connaissance incomplète, profondément partielle dans certains cas et essentiellement et inéluctablement dynamique. Les analystes et les praticiens de la contre-insurrection doivent examiner analytiquement le passé, plutôt que par procuration, pour développer des compétences critiques rationnelles.
L’histoire, contrairement aux suppositions populaires, n’est pas le passé. Ces termes sont employés d’une manière interchangeable, incorrectement. Le passé veut simplement dire ce qui c’est passé. L’histoire, par contre, est l’interprétation de ce qui c’est passé par l’écrivain.2 Comme le fait remarquer l’historien américain, Carl Becker, l’histoire n’est qu’un peu plus que la « mémoire collective des choses dites et faites. »3
Par conséquent, l’histoire est très proche de la mémoire humaine : faillible et sujette à un rappel sélectif. En tant que telle, elle est aussi manifestement l’idiosyncrasie de l’écrivain et inévitablement imparfaite. Par conséquent, il faut « étudier l’historien [l’écrivain] avant d’étudier les faits », tel que le préconise l’historien E. H. Carr.4
Rémy M. Mauduit, éditeur
Air & Space Power Journal, en français
Maxwell AFB, Alabama
Notes
- Michael Howard, “ ‘The Lessons of History’: An Inaugural Lecture given in the University of Oxford, March 1981,” inThe Lessons of History(New Haven, Conn.: Yale University Press, 1991), p.11.
- Howard, “Lessons.” P. 11.
- Carl L. Becker, “What is Evidence? The Relativist View–‘Everyman His Own Historian,’ ” inThe Historian as Detective: Essays on Evidence, ed. Robin W. Winks (New York: Harper & Row, 1968), p. 7.
- E. H. Carr,What is History?(2d ed.: London: Palgrave, 1987), p. 30.
Rémy M. Mauduit, éditeur
Air & Space Power Journal, en français
Maxwell AFB, Alabama
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