Le paradoxe du romancier n’est pas moindre que celui du comédien selon Diderot. Comment les auteurs de romans peuvent-ils se réclamer de deux principes logiquement incompatibles, de la fiction et de la vérité, de l’imaginaire et de la réalité ? Pourtant, m’avait assuré l’un de mes premiers professeurs, « c’est dans les romans qu’on apprend l’histoire ». Et au début de mes recherches en « histoire immédiate » sur un sujet très peu défriché, j’avais dû me résoudre à faire flèche de tout bois en recourant à toutes les sources écrites disponibles, sans exclure les romans que j’avais décidé de considérer comme des témoignages déguisés en retenant les passages qui me semblaient « sonner vrai » [1]. Mais je conservais des objections de principe contre le fait de m’intéresser à des personnages imaginaires, alors que tant de personnages vivants ou ayant réellement vécu restaient ensevelis sous le linceul de l’oubli. Bientôt, la masse croissante des sources m’a tiré d’embarras, en m’obligeant à essayer de lire tous les témoignages authentiques sur les événements qui m’intéressaient. Combien de fois ai-je maudit ce genre hybride qui s’intitule « récit » sans préciser si l’auteur s’était octroyé ou non la fameuse « liberté du romancier » interdite à l’historien ! Mais depuis quelques années pourtant, deux romans ont retenu mon attention . Le premier d’entre eux est Le premier homme, roman posthume d’Albert Camus, paru en 1994, trente-quatre ans après la mort accidentelle de son auteur [2].
Le premier homme d’Albert Camus : un roman vrai.
Peu de romans se donnent aussi peu la peine de camoufler le caractère autobiographique de leur matière. L’auteur n’a pas pris ou pas trouvé le temps de changer partout sur son manuscrit les noms des modèles de ses principaux personnages, et les noms des personnages eux-mêmes renvoient très clairement à ceux de leurs inspirateurs. Le héros s’appelle Jacques Cormery, nom de la grand-mère paternelle de l’auteur, et le premier prénom donné à sa mère, Lucie, évoque le prénom de son père, Lucien Camus. L’auteur hésite d’ailleurs sur leurs prénoms, comme s’il continuait de les appeler intérieurement suivant leur identité originelle. Et il identifie clairement les deux hommes qui ont tenu pour lui la place de son père mort à la guerre, l’instituteur Monsieur Germain (appelé Monsieur Bernard), et le professeur de philosophie Jean Grenier (appelé Malan). Comme il l’a noté : « En somme, je vais parler de ceux que j’aimais. Et de cela seulement. Joie profonde » [3].
En effet, la plus grande partie de la matière des chapitres rédigés est fournie par les souvenirs d’enfance et d’adolescence d’Albert Camus : souvenirs de la vie familiale, de l’école, du lycée, de la rue, à Alger de 1914 au début des années 1930. Ceux qui s’y trouvaient s’y retrouvent parfaitement, selon Evelyne Joyaux-Brédy : « Chacune des pages de l’ouvrage décourage le commentaire de celui qui a connu la réalité à laquelle renvoie Le premier homme. « C’était cela, exactement cela », pense le lecteur né en Algérie, pour qui les scènes s’assemblent, lui restituant sa jeunesse passée et son pays perdu » [4]. Mais le lecteur y trouve également un contenu beaucoup plus intime : la recherche désespérée d’une communication intégrale avec une mère toujours bien aimée, mais que son fils croit avoir trahie en la quittant pour vivre dans un autre monde une vie qu’elle ne pourra jamais comprendre, isolée par son analphabétisme et son ignorance. Significatif est le début du manuscrit : à gauche de la feuille, l’en-tête imprimée « Albert Camus » transformé en « Intercesseur : Vve Camus », et plus loin à droite la dédicace : « A toi qui ne pourras jamais lire ce livre » [5]. On y trouve également la quête de son père par un orphelin, pupille de la nation, qui ne l’a jamais connu et qui découvre le sens de sa pauvre vie : « La vie de L. C.. Tout entière involontaire, sauf sa volonté d’être et de persister. Orphelinat. Ouvrier agricole obligé d’épouser sa femme. Sa vie qui se construit ainsi malgré lui - et puis la guerre le tue » [6]. On y trouve enfin la quête des racines de sa famille dans le peuple dont elle est issue, et dont il évoque l’épopée collective depuis les premiers temps de la conquête et de la colonisation.
Comme l’a remarqué Jacques Frémeaux [7], Albert Camus a renoncé à rechercher la véritable histoire de ses aïeux, installés dans deux villages de l’Algérois, Ouled-Fayet et Chéragas : il a préféré emprunter celle de son village natal Mondovi près de Bône, où ses parents n’avaient passé que quelques mois, dans le livre de Maxime Rasteil, Le calvaire des colons de 1848. On peut regretter qu’il ait ainsi pris le risque de ratifier une mémoire collective toute faite (et de lui prêter l’appui de son talent), au lieu de rechercher la vérité sur ses origines, faute de disposer d’une véritable mémoire de ses racines rurales (contrairement à d’autres écrivains, fils de colons de la Mitidja, Jean Pélégri et Jules Roy). De même, il a donné à Henry Cormery une origine alsacienne, comme pour conforter un mythe patriotique [8] cher à ses compatriotes, celui de l’Algérie nouvelle Alsace-Lorraine et substitut des provinces perdues. Recherchant des témoins de sa naissance dans son village natal, Jacques Cormery confond son père mort avec tous les immigrants et leurs descendants : « les Français perdus dans la foule se ressemblaient tous, avaient le même air sombre et tourné vers l’avenir, comme ceux qui autrefois étaient venus ici par le Labrador, ou ceux qui avaient atterri ailleurs dans les mêmes conditions, avec les mêmes souffrances, fuyant la misère et les persécutions, à la rencontre de la douleur et de la pierre. Tels les Espagnols de Mahon, d’où descendait la mère de Jacques, ou ces Alsaciens qui en 71 avaient refusé la domination allemande et opté pour la France, et on leur avait donné les terres des insurgés de 71, tués ou emprisonnés, réfractaires prenant la place chaude des rebelles,persécutés-persécuteurs d’où était né son père qui, quarante ans plus tard, était arrivé sur ces lieux, du même air sombre et buté, tout entier tourné vers l’avenir, comme ceux qui n’aiment pas leur passé et qui le renient, émigrant lui aussi comme tous ceux qui vivaient et avaient vécu sur cette terre sans laisser de trace, sinon sur les dalles usées et verdies des petits cimetières de colonisation pareils à celui que, pour finir, Jacques avait visité » [9]. Bien que l’auteur ait tenu à rappeler l’injustice faite aux « Arabes » (en fait, surtout des Kabyles) révoltés en 1871, il est clair qu’il s’identifie totalement à son peuple, né de la colonisation, et que ceux-ci n’en font pas partie. Il y a donc deux peuples en Algérie, les Français et les Arabes, au lieu d’un seul peuple algérien, et Camus sait bien auquel des deux il appartient.
Albert Camus, auteur algérien, ou auteur colonial ?
Les Algériens musulmans et les sympathisants de leur cause ont reproché à « Camus l’Algérien » d’avoir refusé de reconnaître la légitimité de l’indépendance, parce qu’il aurait « préféré sa mère à la justice », opérant ainsi un choix « coupant comme une lame de sabre » (selon Mouloud Mammeri) entre sa mère et sa terre. Ahmed Taleb Ibrahimi, moins véhément à son égard que dans ses Lettres de prison en 1959 [10], persiste à lui refuser la qualité d’Algérien, en le définissant ainsi : « écrivain d’un réel talent, être sensible marqué à jamais par une solidarité de race avec la communauté au sein de laquelle il est né et a grandi et dont sa mère faisait toujours partie ». Il constate l’absence significative des « Arabes » dans son œuvre, et propose une interprétation symbolique du meurtre de l’Arabe inconnu par le héros de L’étranger : « Je n’irai pas jusqu’à dire, avec certains, qu’en tuant l’Arabe, Meursault, et partant Camus, se défoule d’un complexe de petit blanc contracté depuis que sa mère fut brutalisée par un Algérien dans leur maison de Belcourt. Mais je pense qu’en tuant l’Arabe, Camus réalise de manière subconsciente le rêve du pied-noir qui aime l’Algérie mais ne peut concevoir cette Algérie que débarrassée des Algériens ». L’invraisemblable condamnation à mort du meurtrier ne serait rien d’autre que « l’annonce de la fin d’un régime coupable et injuste » [11]. Comme lui, Kateb Yacine a comparé Camus à l’écrivain sudiste William Faulkner : « il a des accents racistes que Camus dissimule » [12].
Albert Camus était-il un raciste camouflé ? J’ai récemment entendu reprendre cette accusation, sous forme de suggestion ou d’affirmation. Lors de l’Université d’été organisée à Toulouse en juillet 1999, Séloua Boulbina a mis en exergue un passage de Noces, où Camus exaltait les qualités élémentaires de la « race » française d’Algérie, en inversant les jugements de valeur souvent portés à son encontre : « Cette race est indifférente à l’esprit. Elle a le culte et l’admiration du corps. Elle en tire sa force, son cynisme naïf, et une vanité puérile qui lui vaut d’être sévèrement jugée. On lui reproche communément sa « mentalité », c’est-à-dire une façon de voir et de vivre. Et il est vrai qu’une certaine intensité de vie ne va pas sans injustice. Voici pourtant un peuple sans passé, sans tradition, et cependant non sans poésie (...). Ces barbares qui se prélassent sur des plages, j’ai l’espoir insensé qu’à leur insu peut-être ils sont en train de modeler le visage d’une culture où la grandeur de l’homme trouvera enfin son vrai visage » [13]. Refusant de caricaturer Camus, elle estime néanmoins que cet auteur « honorable et honoré, estimé des Français, mais méprisé des Algériens », appartient à la littérature coloniale au sens large, c’est-à-dire l’ensemble des littératures produites dans la situation coloniale. Allant plus loin, un éminent collègue (qui se reconnaîtra), participant au colloque Sud-Nord, de l’emprise aux confluences (Toulouse-Le Mirail, mars 2001), n’a pas hésité à parler du « racisme d’Albert Camus ».
La question doit être examinée sans tabou. Le témoignage du Premier homme permet-il d’étayer cette grave accusation ? Plusieurs passages semblent s’y prêter. Et d’abord une annexe, non intégrée dans la rédaction, qui a toutes les apparences d’un aveu : « Demain, six cents millions de Jaunes, des milliards de Jaunes, de Noirs, de basanés, déferleraient sur le cap de l’Europe... et au mieux la convertiraient. Alors tout ce qu’on avait appris, à lui et à ceux qui lui ressemblaient, tout ce qu’il avait appris aussi, de ce jour les hommes de sa race, toutes les valeurs pour lesquelles il avait vécu, mourraient d’inutilité. Qu’est-ce qui vaudrait encore alors ?... » On retrouve ici un vieux fantasme démographique et racial, qui synthétise toutes les grandes peurs des Européens devant le « flot montant des races de couleur », bien antérieures à la prétendue « lepénisation des esprits ». Mais pour juger exactement de la signification de ce passage, il faudrait savoir dans quel contexte l’auteur l’aurait utilisé.
Mais ce passage n’est pas le seul. Ailleurs dans le manuscrit rédigé, après l’explosion d’une bombe dans la rue, le héros Jacques Cormery voit sa mère se calmer soudainement et lui sourire « de son beau sourire vaillant » : « Elle avait grandi, comme toute sa race, dans le danger, et le danger pouvait lui serrer le cœur, elle l’endurait comme le reste » [14]. Ce danger permanent, le fils l’avait lui-même ressenti dès son enfance au voisinage des Arabes, « ce peuple attirant et inquiétant, proche et séparé, qu’on côtoyait au long des journées, et parfois l’amitié naissait, ou la camaraderie, et, le soir venu , ils se retiraient pourtant dans leurs maisons inconnues, où l’on ne pénétrait jamais, barricadées aussi avec leurs femmes qu’on ne voyait jamais ou, si on les voyait dans la rue, on ne savait pas qui elles étaient, avec leur voile à mi-visage et leurs beaux yeux sensuels et doux au-dessus du linge blanc, et ils étaient si nombreux dans les quartiers où ils étaient concentrés, si nombreux que par leur seul nombre, bien que résignés et fatigués, ils faisaient planer une menace invisible qu’on reniflait dans l’air des rues certains soirs où une bagarre éclatait entre un Français et un Arabe ». L’auteur exprime ici un mélange complexe de curiosité frustrée et de crainte. Il reconnaît que cette crainte n’était le plus souvent pas justifiée, même dans les bagarres, sinon par le nombre des spectateurs : « les Arabes du quartier, vêtus de leurs bleus de chauffe délavés ou de leur djellabah misérable, approchaient lentement, venant de tous côtés d’un mouvement continu, jusqu’à ce que la masse peu à peu agglutinée éjecte de son épaisseur, sans violence, par le seul mouvement de sa réunion, les quelques Français attirés par des témoins de la bagarre et que le Français qui se battait, reculant, se trouve tout d’un coup en face de son adversaire et d’une foule de visages sombres et fermés qui lui auraient enlevé tout courage si justement il n’avait pas été élevé dans ce pays et n’avait pas su que seul le courage permettait d’y vivre, et il faisait face alors à cette foule menaçante et qui ne menaçait rien pourtant, sinon par sa présence ». Le fils n’en restait pas moins marqué par la peur : « après leur départ, la menace, la violence, la peur rôdaient pour l’enfant dans la rue, lui séchant la gorge d’une angoisse inconnue » [15].
Mais dans d’autres passages, cette peur chronique est présentée comme justifiée par des actes d’une horreur traumatisante : égorgements, mutilations sexuelles, viols, reprochés aux Arabes, à la fois dans le passé plus ou moins lointain de la conquête [16], et dans l’actualité du terrorisme [17]. L’exemple le plus caractéristique, et le plus développé, évoque un épisode de la pénétration militaire française au Maroc, à laquelle le père du héros a participé durant son service militaire. Cet exemple mérite une étude approfondie, parce qu’un lecteur pressé et superficiel pourrait y voir la preuve décisive du racisme d’Albert Camus.
« 1905. Son père avait vingt ans. Il avait fait, comme on dit, du service actif contre les Marocains. Jacques se souvenait de ce que lui avait dit le directeur de son école lorsqu’il l’avait rencontré quelques années auparavant dans les rues d’Alger. M. Levesque avait été appelé en même temps que son père. Mais il n’était resté qu’un mois dans la même unité. Il avait mal connu Cormery selon lui, car ce dernier parlait peu. Dur à la fatigue, taciturne, mais facile à vivre et équitable. Une seule fois, Cormery avait paru hors de lui. C’était la nuit, après une journée torride, dans ce coin de l’Atlas où le détachement campait au sommet d’une petite colline gardée par un défilé rocheux. Cormery et Levesque devaient relever la sentinelle au bas du défilé. Personne n’avait répondu à leurs appels. Et au pied d’une haie de figuiers de Barbarie, ils avaient trouvé leur camarade la tête renversée, bizarrement tournée vers la lune. Et d’abord ils n’avaient pas reconnu sa tête qui avait une forme étrange. Mais c’était tout simple. Il avait été égorgé et, dans sa bouche, cette boursouflure livide était son sexe entier. C’est alors qu’ils avaient vu le corps aux jambes écartées, le pantalon de zouave fendu et, au milieu de la fente, dans le reflet cette fois indirect de la lune, cette flaque marécageuse. A cent mètres plus loin, derrière un gros rocher cette fois, la deuxième sentinelle avait été présentée de la même façon. L’alarme avait été donnée, les postes doublés. A l’aube, quand ils étaient remontés au camp, Cormery avait dit que les autres n’étaient pas des hommes. Levesque, qui réfléchissait, avait répondu que, pour eux, c’était ainsi que devaient agir les hommes, qu’on était chez eux, et qu’ils usaient de tous les moyens. Cormery avait pris son air buté . « Peut-être. Mais ils ont tort. Un homme ne fait pas ça . » Levesque avait dit que pour eux, dans certaines circonstances, un homme doit tout se permettre et tout détruire. Mais Cormery avait crié comme pris de folie furieuse : « Non, un homme, ça s’empêche. Voilà ce qu’est un homme, ou sinon... » Et puis il s’était calmé. « Moi, avait-il dit d’une voix sourde, je suis pauvre, je sors de l’orphelinat, on me met cet habit, on me traîne à la guerre, mais je m’empêche. - Il y a des Français qui ne s’empêchent pas, avait dit Levesque. - Alors, eux non plus, ce ne sont pas des hommes. » Et soudain il cria : « Sale race ! Quelle race ! Tous, tous... » [18]
Il serait facile d’accuser l’auteur d’exprimer le racisme colonial sans le dénoncer, voire de tenter de le justifier en l’expliquant, et de participer à la perpétuation d’un thème caractéristique de l’imaginaire colonial, ainsi défini par Cornélius Castoriadis : « Entre les Français et les Algériens, il y a un couteau. Et ce couteau, c’est tout l’imaginaire français sur les Maghrébins, les Algériens en particulier, à la fois sur le plan du meurtre et sur le plan sexuel » [19]. Mais la validité de la démonstration dépend de celle du concept d’imaginaire. Selon tous les dictionnaires, l’imaginaire est une pure création de l’imagination, donc le contraire de la réalité. Attribuer l’épisode rapporté ci-dessus à l’imaginaire colonial, c’est donc, littéralement, reprocher à l’auteur de justifier le racisme visant les Maghrébins par une accusation calomnieuse. Or, les faits allégués sont-ils fondés ou non ?
Malheureusement oui. La pratique des mutilations sexuelles au Maghreb est attestée par de nombreux témoignages et documents, avant, pendant et après la domination coloniale. Dès 1830, selon Daniel Rivet, « les combats tournent à l’atroce immédiatement. En novembre, des moudjahidin mutilent une cinquantaine de canonniers surpris dans un combat d’arrière-garde dans la Mitidja. Une cantinière a les entrailles arrachées, le nez, les oreilles et les seins coupés et fourrés dans l’abdomen. La sauvagerie des indigènes rejaillit sur l’occupant, par un effet de contagion mimétique » [20]. Pendant la guerre d’Algérie de 1954-1962, Raphaëlle Branche reconnaît que « les réactions qui suivent la surprise de l’embuscade, de l’expérience du feu et de la sensation de camarades qui tombent, sont encore accentuées par la découverte de corps émasculés et/ou égorgés. (...) Ces violences démonstratives viennent alimenter l’imaginaire ancien des Occidentaux à propos des Arabes qui, depuis les Sarrasins, sont assimilés à des tueurs sanguinaires armés de lames coupantes et égorgeantes » [21]. Mais l’indépendance de l’Algérie n’a pas mis fin à cette violence extrême ; selon la presse algérienne, les soldats du poste frontière de Guémar attaqué par un groupe islamiste armé le 28 novembre 1991 ont été pareillement décapités et mutilés [22]. Comme l’a reconnu Mohammed Harbi, « en occultant l’existence de pratiques cruelles enracinées dans une culture paysanne archaïque dominée par un code particulier de l’honneur et de la blessure symbolique à imposer au corps de l’ennemi, on s’interdit de voir dans la cruauté actuelle des actions des terroristes islamistes un ‘retour’ qui en vérité traduisait une permanence culturelle » [23].
En effet, l’occultation de faits horribles ne fait que conforter les convictions des racistes, qui voient dans cette occultation la preuve que l’ explication par une barbarie congénitale est la seule possible. Il faut donc en fournir une autre explication plus convaincante, permettant de comprendre pourquoi des actes qui seraient ressentis, en France, comme des preuves manifestes de démence, ont pu apparaître en Algérie comme des manifestations de violence presque normales.
Mohammed Harbi en a déjà suggéré une, qui doit être explicitée et complétée. Raphaëlle Branche estime que les combattants algériens « atteignent leurs ennemis au-delà de la mort. (...) En les émasculant, ils s’attaquent au siège de la virilité et signifient, une seconde fois après les avoir tués, qu’ils ont gagné ce combat entre hommes. (...) Enfin, plaçant dans la bouche des cadavres leurs parties génitales ainsi découpées, il les rendent grotesques et manifestent un ultime mépris pour eux et pour leurs camarades » [24]. Mais il faut préciser que, dans une société patriarcale fondée sur la domination masculine, ce double geste vise à déshonorer un corps masculin en l’identifiant à un corps féminin. Les femmes ne sont pas pour autant à l’abri de tels traitements. Un autre passage du roman d’Albert Camus évoque un souvenir des débuts de la colonisation de l’Algérie, « ce char embourbé sur la route de Bône, où les colons avaient laissé une femme enceinte pour aller chercher de l’aide et où ils retrouveraient la femme le ventre ouvert et les seins coupés » [25]. Ces actes effroyables ne traduisent pas une obsession sexuelle recherchant le plaisir individuel au prix de la souffrance d’autrui, comme chez les maniaques sexuels. Ils expriment avec outrance la mentalité archaïque d’une société patriarcale qui ne considère les individus que comme de simples maillons d’un lignage. C’est pourquoi il ne suffit pas de tuer son ennemi : encore faut-il anéantir symboliquement et réellement sa descendance, en s’acharnant sur les organes de la génération.
Enfin, au-delà de l’explication scientifique, il convient de condamner moralement de tels actes si l’on veut éviter qu’ils ne se perpétuent d’une génération à l’autre comme un comportement normal ou glorieux. Tel est l’avis de Mohammed Harbi : « L’idéalisation de la violence requiert une démystification. Parce que ce travail a été frappé d’interdit, que le culte de la violence en soi a été entretenu dans le cadre d’un régime arbitraire, l’Algérie a vu ressurgir avec l’islamisme les fantômes du passé » [26]. Et c’est exactement ce que fait le père du héros dans le roman d’Albert Camus : rejetant le relativisme culturel que tente de lui expliquer l’instituteur, il exprime avec la maladresse des humbles une protestation morale absolue contre un comportement que des hommes dignes de ce nom ne devraient pas se permettre ; mais il finit par la traduire malencontreusement dans un langage raciste, par incapacité de formuler exactement ses sentiments. Albert Camus veut bien expliquer les réactions racistes des siens par des traumatismes anciens ou récents, transmis ou vécus (par exemple dans l’épisode de l’attentat à la bombe dans une rue d’Alger, après lequel Jacques Cormery protège un passant arabe innocent et tente de calmer la colère aveugle d’un ouvrier français qui veut « tous les tuer » [27]). Il les excuse ainsi dans une certaine mesure, mais il ne les légitime jamais ; au contraire, il ne cesse de répéter que les Arabes et les Français ont « le même sang d’hommes » [28], et que, depuis Caïn, et en temps de guerre, « les hommes sont affreux, surtout sous le soleil féroce » [29]. Voir dans ce texte la preuve du « racisme colonial » de l’auteur serait donc un contresens absolu.
Race et racisme.
Comme le concept d’imaginaire colonial, celui de racisme colonial doit être discuté historiquement. Il est fondé, depuis 1957, sur les analyses devenues classiques d’Albert Memmi, dans son Portrait du colonisateur et son Portrait du colonisé [30]. D’après celui-ci, le « colonialiste » est « le colonisateur qui s’accepte comme tel », et qui est donc obligé de justifier la situation coloniale dont il bénéficie aux dépens du colonisé, pour s’épargner les troubles de conscience qui tourmentent le « colonisateur de bonne volonté », sensible à la contradiction entre cette situation coloniale et ses convictions humanistes. Le racisme est le meilleur moyen de justifier à ses yeux cette situation injuste, en expliquant les différences et les inégalités entre les colonisateurs et les colonisés par une supériorité de nature des premiers sur les seconds, et en même temps de le rassurer sur sa pérennité naturelle. Cette idéologie est donc un produit de la situation coloniale, et non pas un trait de nature, un « racisme congénital », des colonisateurs.
Cette analyse philosophique a été complétée par des recherches historiques sur l’origine du racisme. Dans un récent article [31], l’historien canadien Pierre H. Boulle part d’une définition précise dont il amende seulement le début : « Le racisme est une idéologie selon laquelle des différences organiques (réelles ou imaginées) entre les groupes humains, transmises génétiquement, sont intrinsèquement associées à la présence ou à l’absence de certaines capacités ou caractéristiques socialement pertinentes ; que donc ces différences forment une base légitime pour des distinctions odieuses entre des groupes socialement définis en tant que races ». Le racisme proprement dit est donc très nettement postérieur à l’apparition du mot race en français, vers la fin du XVe siècle. Il est le produit d’une convergence entre deux faits historiques : le développement de l’économie de plantation esclavagiste, alimentée par la traite des esclaves noirs, dans les Antilles, et la formulation d’une théorie prétendue scientifique, visant à expliquer les différences observées par les voyageurs européens entre les groupes humains de toutes les parties du monde, par les écrits des biologistes Linné et Buffon. Cette convergence, accomplie dès le milieu du XVIIIe siècle, a permis de légitimer dans l’esprit des classes dirigeantes les mesures discriminatoires et contraires au droit commun métropolitain prises à la demande des planteurs et des négriers. Ainsi, cette étude solidement argumentée vérifie par des faits la théorie d’Albert Memmi.
Il en ressort également que l’usage du mot « race » n’est pas une preuve suffisante de racisme. En effet, le sens le plus courant au XVIe et au XVIIe siècle était celui de lignée, et plus particulièrement de lignée royale ou aristocratique, à laquelle étaient attachéesdesvertushéréditaires. Il ne s’agissait pourtant pas d’une conception proprement raciste, dans la mesure où ces vertus étaient supposées transmissibles par une éducation spécifique fondée sur l’exemple de glorieux ancêtres à imiter autant que par le sang. Et même après l’apparition de l’idéologie raciste, le mot race a continué d’être employé abusivement, comme synonyme de peuple, de population ou de nation, sans critère biologique particulier.
On abusait naguère du mot race, mais aujourd’hui on abuse du mot racisme, parce que le nazisme l’a rendu définitivement déshonorant. Même si l’idéologie coloniale a tendu à créer un « indigène type », on peut discuter l’application du concept de racisme historiquement défini plus haut à la situation coloniale algérienne, qui n’a jamais été fondée sur l’esclavage des « indigènes ». Est-il donc justifié de regarder la colonisation de l’Algérie à travers le prisme d’une situation coloniale différente ? C’est pourtant ce que l’on fait couramment, en parlant de « petits blancs » en Algérie : on suppose ainsi à tort que les Européens se distinguaient des indigènes par la couleur de leur peau, comme Guy Mollet déclarant en 1948 au comité directeur du parti socialiste SFIO [32] : « l’état d’esprit de la population blanche est anti-musulman », ou comme Le canard enchaîné caricaturant les insurgés du Rif sous des traits négroïdes en 1925 [33]. L’ordre colonial algérien était bien fondé sur une inégalité fondamentale entre deux catégories d’habitants, les sujets et les citoyens, mais cette discrimination traduisait la supériorité de la loi française sur la loi musulmane, une supériorité culturelle et non raciale, et les indigènes pouvaient demander à devenir des citoyens français à part entière à condition de renoncer au bénéfice de la loi musulmane. Les préjugés anti-arabes et anti-musulmans n’en existaient pas moins, mais ils n’avaient rien à voir avec la traite des Noirs : ils étaient le produit d’une longue histoire conflictuelle, remontant aux premières conquêtes de l’Islam, et dans laquelle les ancêtres des Français et des Européens n’avaient pas été les seuls fautifs, ni les premiers responsables. Les Arabo-musulmans avaient d’ailleurs très longtemps pratiqué la traite des esclaves blancs en Méditerranée, et celle des esclaves noirs à travers le Sahara, la Mer rouge et l’Océan indien, et avec les conséquences idéologiques prévisibles d’après la théorie d’Albert Memmi : Bernard Lewis a démontré l’existence de préjugés raciaux contre les Noirs en pays musulman [34], que le théoricien de la solidarité anticolonialiste des « damnés de la terre », Frantz Fanon, a lui-même ressentis à ses dépens [35].
La « race » dont se réclamait Albert Camus n’avait aucune définition biologique. Dans son roman, il évite tout jugement péjoratif sur l’ensemble des Arabes, contrairement à d’autres défenseurs des Français d’Algérie qui ont opposé « l’indigène paresseux de nature » ou « l’Arabe destructeur » à « l’Européen qui défriche et construit » [36]. Il voit dans la race de ses ancêtres tout le contraire d’une « race de seigneurs » : méditant sur les tombes des premiers colons dans le vieux cimetière de son village natal, Jacques Cormery évoque le destin de son père « rendu lui aussi à l’immense oubli qui était la patrie définitive des hommes de sa race, le lieu d’aboutissement d’une vie commencée sans racines », et il généralise son cas en rappelant « tant de mémoires dans les bibliothèques de l’époque pour utiliser les enfants trouvés à la colonisation de ce pays, oui, tous ici enfants trouvés et perdus qui bâtissaient de fugitives cités pour mourir ensuite à jamais en eux-mêmes et dans les autres » [37]. Albert Camus a voulu écrire une « épopée des fils de personne ». On peut lui reprocher d’avoir, subjectivement, confondu la défense et illustration de son humble famille (« arracher cette famille pauvre au destin des pauvres qui est de disparaître de l’histoire sans laisser de traces ») et celle de son peuple entier, pour combattre l’image répandue par la propagande anticolonialiste du « colon à cravache et à cigare, monté sur Cadillac » [38]. Il s’en est justifié dans l’avant-propos des Chroniques algériennes : « Je résume ici l’histoire des hommes de ma famille qui, de surcroît, étant pauvres et sans haine, n’ont jamais exploité ni opprimé personne. Mais les trois quarts des Français d’Algérie leur ressemblent et, à condition qu’on les fournisse de raisons plutôt que d’insultes, seront prêts à admettre la nécessité d’un ordre plus juste et plus libre » [39].
Albert Camus n’a jamais caché qu’il devait donner la priorité à la défense des siens : « Mon métier est de faire mes livres et de combattre quand la liberté des miens et de mon peuple est menacée », nota-t-il dans ses Carnets le 29 mai 1958 [40]. Mais il ne s’est pas rallié à la devise du chauvinisme, « Right or wrong, my country ». On évitera un nouveau contresens en rapprochant deux réflexions en annexe de son roman, où il semble s’avouer solidaire des tortionnaires [41], de ce qu’il avait écrit dans l’avant-propos d’Actuelles III, Chroniques algériennes : « Les représailles contre les populations civiles et les pratiques de torture sont des crimes dont nous sommes tous solidaires. Que ces faits aient pu se produire parmi nous, c’est une humiliation à quoi il faudra désormais faire face » [42]. Et il ne s’est pas pour autant désintéressé des « autres ». Si les Arabes paraissent absents, ou relégués dans des rôles de figurants, dans les chapitres rédigés du roman, on sait par les annexes qu’un rôle de premier plan était réservé à un nommé Saddok, ami de Jacques Cormery qui l’héberge au nom du devoir sacré d’hospitalité bien qu’il désapprouve l’action terroriste à laquelle celui-ci s’est rallié [43]. L’ébauche de la fin du roman ne laisse aucun doute sur le sens que l’auteur voulait lui donner : « Rendez la terre. Donnez toute la terre aux pauvres, à ceux qui n’ont rien et qui sont si pauvres qu’ils n’ont même jamais désiré avoir et posséder, à ceux qui sont comme elle dans ce pays, l’immense troupe des misérables, la plupart arabes et quelques-uns français et qui vivent et survivent ici par obstination et endurance, dans le seul honneur qui vaille au monde, celui des pauvres, donnez leur la terre comme on donne ce qui est sacré à ceux qui sont sacrés, et moi alors, pauvre à nouveau et enfin, jeté dans le pire exil à la pointe du monde, je sourirai et mourrai content, sachant que sont enfin réunis sous le soleil de ma naissance la terre que j’ai tant aimée et ceux et celle que j’ai révérés. Alors le grand anonymat deviendra fécond et il me recouvrira aussi - Je reviendrai dans ce pays. » [44] Cette conclusion évangélique et utopique est-elle d’un colonialiste raciste ?
Non, tout en prenant la défense des siens et de son peuple, Camus n’avait rien renié de ses principes humanistes, qui nous apparaissent aujourd’hui plus actuels que jamais [45]. C’est pourquoi Mouloud Feraoun lui avait conservé jusqu’au bout sa fidèle et respectueuse amitié [46], en dépit de leurs divergences politiques sur la solution du problème algérien. Et c’est pourquoi des Algériens de plus en plus nombreux ont réappris à le comprendre et à l’aimer.
Guy Pervillé.
NB : Ce volume de 327 p, préfacé par René Rémond, rassemble trente deux études. Sur l’Algérie, on lira notamment, en plus de cet article, ceux de
Benjamin Stora : La solitude des incomprises. La guerre d’Algérie dans les écrits des femmes européennes (1960-2000), et de
Jean-Pierre Peyroulou : Le roman comme production d’Histoire et d’espace légitime : le Constantinois dans Nedjma de Kateb Yacine.
Il peut être commandé au GRHI, Maison de la recherche, 5 allées Antonio Machado, 31058 Toulouse Cedex 9, pour 30 euros.
[1] Par exemple, les souvenirs de la répression du 8 mai 1945 dans Nedjma de Kateb Yacine, Le Seuil, 1957.
[2] Le deuxième est Le serment des barbares, de Boualem Sansal, Gallimard, 1999.
[3] Albert Camus, Le premier homme, Gallimard, 1994, p. 312.
[4] Evelyne Joyaux-Brédy, « Une lecture du roman inachevé d’Albert Camus, Le premier homme », in L’Algérianiste, n° 100, 2002, pp. 70-83.
[5] Camus, op. cit., Gallimard, 1994, pp. 10 et 11.
[6] Op. cit., p. 316.
[7] Jacques Frémeaux, « Le premier homme ou la mémoire fracassée », in Déracinés, actes du colloque du Centre d’études pied-noir, Nice, 1996, pp. 77-82.
[8] Mythe dans la mesure où le gros de la migration alsacienne est antérieur à la guerre de 1870-1871, et ne se différencie guère de la migration allemande (dont la mémoire a été effacée). Voir la thèse de Fabienne Fischer, Alsaciens et Lorrains en Algérie, histoire d’une migration, 1830-1914, et le livre de Jean-Maurice Di Costanzo, Allemands et Suisses en Algérie, 1830-1918, Nice, Editions Jacques Gandini, 1999 et 2001. Sur la confusion entre les mémoires allemande et alsacienne, voir René Mayer, Algérie, mémoire déracinée, L’Harmattan, 2000.
[9] Camus, op. cit., pp. 177-178.
[10] « Lettre ouverte à Albert Camus », Fresnes, le 26 août 1959, in Ahmed Taleb, Lettres de prison, 1957-1961, Alger, SNED, 1966.
[11] « Albert Camus vu par un Algérien »(1967), in Ahmed Taleb Ibrahimi, De la décolonisation à la révolution culturelle, 1962-1972, Alger, SNED, 1973, pp. 161-184.
[12] Lettre de Kateb Yacine à José Lenzini, 31 mars 1986, in Panoramiques n° 62, 1er trimestre 2003, p. 226.
[13] Albert Camus, Noces (« L’été à Alger »), Alger, Charlot, 1939, in Essais d’Albert Camus, présentés par Roger Quilliot, Paris, Gallimard, La Pléiade, 1965, p. 74.
[14] Le premier homme, p. 76.
[15] Op. cit., pp. 257-258.
[16] Op. cit., pp. 176-177.
[17] Op. cit., pp. 74-75 et 167.
[18] Op. cit., pp. 65-67. Cf. la phrase rajoutée p. 19 : « J’ai fait la guerre contre les Marocains (avec un regard ambigu) les Marocains ils sont pas bons ».
[19] Cornélius Castoriadis, cité par Raphaëlle Branche, La torture et l’armée pendant la guerre d’Algérie, 1954-1962, Gallimard, 2001, pp. 312-313..
[20] Daniel Rivet, Le Maghreb à l’épreuve de la colonisation, Hachette, 2002, p. 113.
[21] Branche, op. cit., p.44.
[22] Gilles Kepel, Jihad, expansion et déclin de l’islamisme, Gallimard, 2000, p. 179.
[23] Mohammed Harbi, « La tragédie d’une démocratie sans démocrates », in Le Monde, 13 avril 1994.
[24] Branche, op. cit., p. 44.
[25] Camus, op.cit., p.177.
[26] Mohammed Harbi, L’Algérie et son destin, croyants ou citoyens, Arcantère, 1993, p.155.
[27] Camus, op. cit., pp. 74-75.
[28] Camus, op. cit., p.168.
[29] Camus, op.cit., p.177.
[30] Albert Memmi, Portrait du colonisé, précédé du Portrait du colonisateur, Paris, Buchet-Chastel, 1957, 199 p.
[31] Pierre H. Boulle, « La construction du concept de race dans la France d’Ancien régime », in Outre-mers, revue d’histoire, n° 336-337, 2ème semestre 2002, pp. 155-175.
[32] Compte rendu de la séance du comité directeur du 7 avril 1948, archives de l’OURS.
[33] Allen Douglas, « Between Racism and Antimilitarism : The Canard enchaîné and France’s colonial wars of the 1920s », in Franco-Arab encounters, Rencontres franco-arabes, edited by L. Carl Brown and Matthew S . Gordon, American University of Beirut, Lebanon, 1996, pp. 70-92.
[34] Bernard Lewis, Race et couleur en pays d’islam, Payot, 1982.
[35] Alice Cherki, Frantz Fanon, portrait, Le Seuil, 2000, p. 191.
[36] Francine Dessaigne, Journal d’une mère de famille pied-noir, L’esprit nouveau, 1962, pp. 73-75.
[37] Camus, op. cit ., p. 179.
[38] « La bonne conscience », article paru dans L’Express en octobre 1955, repris dans Chroniques algériennes, in Essais d’Albert Camus, op. cit., p. 973.
[39] Essais d’Albert Camus, p. 897.
[40] Cité par André Rossfelder, Le onzième commandement, Gallimard, 2000, p. 458.
[41] Le premier homme, pp. 287 et 308.
[42] Essais d’Albert Camus, p. 893.
[43] Voir dans les annexes du Premier homme, pp.277, 279, 312 à 314,
[44] Camus, op. cit., pp. 319-321.
[45] Albert Camus, Reflexions sur le terrorisme, textes choisis et introduits par Jacqueline Lévi-Valensi, commentés par Antoine Garapon et Denis Salas, Editions Nicolas Philippe, 2002.
[46] Cf. G. Pervillé, « La communauté algérienne des écrivains face à la guerre d’Algérie », dans les actes du colloque Des hommes et des femmes en guerre d’Algérie, Editions Autrement, 2003, pp. 94-110.
Guy Pervillé.
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