Les origines du mouvement nationaliste algérien remontent aux années vingt et à
Messali Hadj, fondateur, en 1926, de L’Étoile nord-africaine.
Entre les deux guerres, Messali Hadj avait flirté avec le communisme et le
trotskisme, mais, en 1945, son Mouvement pour le triomphe des libertés
démocratiques (MTLD) était un mouvement nationaliste musulman. En 1954,
jugeant sa ligne politique trop modérée, une partie des membres du
MLD,partisans d’une action violente, firent sécession et fondèrent le Front de
libération nationale (FLN). Messali Hadj avait eu un concurrent plus modéréen
la personne du docteur Ferhat Abbas, qui avait fait ses études en France.
Son mouvement, l’Union démocratique du manifeste algérien (qui devait
son nom à un manifeste publié en 1943), avait eu à l’origine un programme
très modéré, réclamant seulement l’égalité des droits pour les musulmans à
l’intérieur d’une Algérie française. Mais après la guerre, ce mouvement était
rapidement devenu, lui aussi, nationaliste et musulman, prônant l’autonomie
de l’Algérie, tout en travaillant, à l’intérieur du système, en faveur des droits
démocratiques. Dans toute l’Afrique du Nord, la Seconde Guerre mondiale
avait donné une extraordinaire impulsion au nationalisme arabe : avec le
débarquement américain de novembre 1942 et l’occupation qui s’en était suivie, le
protecteur » français était devenu lui-même, aux yeux des musulmans, un protégé
et l’autorité exercée par la France s’en était trouvée délégitimée.Qui plus est,
les Américains n’avaient pas caché leur solidarité anti coloniale.
En fait, les premiers coups de feu de ce qui allait devenir la
guerre d’Algérie furent tirés le 8 mars 1945. Ce jour-là, des émeutes éclatèrent
à Sétif, dirigées contre l’autorité française. Les désordres durèrent quatre
jours et s’étendirent à tout le Constantinois, faisant 103 morts parmi les
Européens.
S’ensuivit une répression brutale : les Français firent donner la
marine et l’aviation et bombardèrent des villages pour « donner une leçon »
aux musulmans. Les autorités françaises firent état de 300 morts musulmans,
le chiffre avancé plus tard par les nationalistes étant de 45 000 et les historiens
d’aujourd’hui s’accordant sur un total allant de 3 000 à 10 000. Mais
peu importe le chiffre exact. Par cette répression la France s’était gravement
aliéné la population musulmane. Ce retour brutal de la domination coloniale
se fit sous l’autorité du général de Gaulle, sans doute plus attentif, à
ce moment-là, à la victoire sur l’Allemagne qu’aux événements d’outre-mer,
mais bien décidé à empêcher l’Algérie, selon ses mots, de « nous filer entre
les doigts ». C’est son gouvernement aussi qui élabora ce qui devait devenir
le statut de 1947, en vigueur jusqu’en janvier 1958 où il fut remplacé par une
nouvelle loi-cadre, non appliquée. Ce statut créait en Algérie deux « collèges »
électoraux de soixante membres chacun, l’un pour les musulmans, l’autre
pour les Européens, et prévoyait trente députés pour représenter l’Algérie à
l’Assemblée nationale. Système de représentation en soi inéquitable, ce qui
n’empêcha pas que, pendant la décennie où il fonctionna, les élections fussent
manipulées pour exclure les nationalistes et faire élire des musulmans dociles,
qu’on devait surnommer les Béni-oui-oui.
Si l’on considère la politique américaine vis-à-vis de l’Afrique
du Nord dans sa continuité, durant l’ensemble des années d’après-guerre,
on s’aperçoit qu’à quelques nuances près, celle de John Foster
Dulles et du président Eisenhower ne fut pas plus indulgente à l’égard du colonialisme
français que celle de leurs prédécesseurs, Dean Acheson et le président Truman.
Après la guerre, les Américains avaient estimé que le meilleur moyen de
garantir la sécurité de l’Afrique du Nord était d’y maintenir la tutelle française,
mais ils ne cessèrent de plaider pour une attitude libérale à l’égard des
demandes des musulmans. Parallèlement, les Français tendirent à rejeter sur
Washington la responsabilité des problèmes grandissants rencontrés dans une
Afrique du Nord où ils soupçonnaient les États-Unis de vouloir substituer leur
influence à celle de la France. Ainsi, dès les émeutes de Sétif, on voit le cabinet
du Résident général rendre les Américains et les Britanniques responsables des
désordres, sans que cela empêche Paris de mener la répression que l’on sait.
Par la suite, Washington ne cessa de presser Paris d’engager des réformes et, à
l’origine de quasiment toutes celles que la France tenta de mettre en œuvre,
on trouve directement l’influence américaine. L’Afrique du Nord est aussi à
l’origine de l’une des plus graves crises franco-américaines de l’après-guerre,
en 1952. Paris ayant déposé le gouvernement tunisien, trop nationaliste à ses
yeux, et ayant exilé le leader nationaliste Habib Bourguiba, les Tunisiens
portèrent l’affaire devant l’ONU et, lors du vote de la motion appelant à une
solution pacifique de la crise, les États-Unis se contentèrent d’une abstention
qui mit Paris en fureur. Par ailleurs, en dépit des protestations répétées de la
France, les États-Unis entretinrent régulièrement des contacts informels avec
les nationalistes de l’Istiqlal au Maroc et du Néo-Destour en Tunisie. Mais on
voit la pression américaine sur Paris se relâcher au moment du déclenchement
de la guerre de Corée et l’on sait que la guerre d’Indochine, dans la mesure où elle
pouvait être considérée comme une guerre anticommuniste, fut de plus
en plus largement financée par Washington. Enfin, les États-Unis désirant
installer des bases militaires au Maroc, la France leur demanda, en contrepartie,
de cesser de s’ingérer dans les affaires de l’Afrique du Nord française.
C’est ce qui amena Dulles, contre l’avis des diplomates américains sur place,
à ne pas intervenir au moment de la déposition du sultan Mohammed V en
1953. Mais Washington continua à presser la France d’accorder l’autonomie
au Maroc, tout en essayant en même temps de modérer les revendications
d’indépendance des nationalistes.
se rendait donc bien compte que toute tentative pour influencer la politique
dans leurs affaires intérieures. Dès 1952, la CIA avait averti l’administration
compte les demandes de la majorité indigène musulmane le déclenchement de la
comme pour Paris.Par ailleurs les Américains n’avaient jamais compris
française était d’accord sur la nécessité de conserver l’Algérie à la France,
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