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Quand j'ai découvert L’Étranger, l'émerveillement. Pour la première fois, j'ai senti à quel point l’écriture était en accord avec le récit pour exprimer, avec la même force, l'extranéité, « l'étrangeté » au monde du héros. Impression retrouvée à chaque nouvelle lecture.
A propos de La Chute, Albert Camus a dit « J'ai adapté la forme au sujet ». Cela paraît encore plus vrai pour L’Étranger. Nombreux sont ceux qui ne peuvent en oublier les premières phrases.
Certains ont voulu faire de La mort heureuse, le brouillon de L’Étranger. Mais La mort heureuse est seulement un premier essai de roman, abandonné par Camus et non publié de son vivant. A la lecture de ces deux livres, on ne peut qu'être frappé par la différence des styles. Prose poétique, lyrique, de La mort heureuse, sécheresse de L’Étranger, dés les premières lignes. Mais l'écriture de L’Étranger ne se limite pas à cette sécheresse.
Il suffit pour le vérifier de comparer les premières : « Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J'ai reçu un télégramme de l'asile : « Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués. » Cela ne veut rien dire. C'était peut-être hier.
L'asile de vieillards est à Marengo, à quatre-vingts kilomètres d'Alger. Je prendrai l'autobus à deux heures et j'arriverai dans l'après-midi. Ainsi, je pourrai veiller et je rentrerai demain soir. J'ai demandé deux jours de congé à mon patron et il ne pouvait pas me les refuser avec une excuse pareille. Mais il n'avait pas l'air content. »
Et les dernières lignes du livre : « Et moi aussi, je me suis senti prêt à tout revivre. Comme si cette grande colère m'avait purgé du mal, vidé d'espoir, devant cette nuit chargée de signes et d'étoiles, je m'ouvrais pour la première fois à la tendre indifférence du monde. De l'éprouver si pareil à moi, si fraternel enfin, j'ai senti que j'avais été heureux, et que je l'étais encore. Pour que tout soit consommé, pour que je me sente moins seul, il me restait à souhaiter qu'il y ait beaucoup de spectateurs le jour de mon exécution et qu'ils m'accueillent avec des cris de haine. »
Camus ne se contente pas seulement de la relation factuelle, aux phrases courtes, sèches. Il entretient le sentiment d'étrangeté, il maintient le lecteur à distance en utilisant aussi le style indirect.
« Il [le juge d'instruction] a voulu savoir si j'avais choisi un avocat. J'ai reconnu que non et je l'ai questionné pour savoir s'il était absolument nécessaire d'en avoir un. « Pourquoi ? » a-t-il dit. J'ai répondu que je trouvais mon affaire très simple. Il a souri en disant « C'est un avis. Pourtant, la loi est là.Si vous ne choisissez pas d'avocat, nous en désignerons un d'office. » J'ai trouvé qu'il était très commode que la justice se chargeât de ces détails. Je le lui ai dit. Il m'a approuvé et a conclu que la loi était bien faite. »...
« Les gendarmes m'ont dit qu'il fallait attendre la cour et l'un d'eux m'a offert une cigarette que j'ai refusée. Il m'a demandé peu après « si j'avais le trac ». J'ai répondu que non. Et même, dans un sens, cela m'intéressait de voir un procès. Je n'en avais jamais eu l'occasion dans ma vie ».
Les paroles sont rapportées et en plus, Meursault commente « objectivement », par petites phrases, la situation ou les échanges avec des réflexions logiques, de « bons sens ». Il s’efforce, à chaque fois, y compris dans des situations de tension, de rester au plus près de la vérité, sans ajouter de considérations sentimentales. Comme s'il n'était pas question de lui-même. Ici de son procès.
On peut retrouver une forme proche de celle de L’Étranger dans la façon dont le « narrateur », derrière lequel se cache le Docteur Rieux, écrit la chronique de La Peste.
A cause du style et du personnage de Meursault dans L’Étranger, on a voulu faire de Camus, le précurseur du nouveau roman. Mais pour Alain Robbe-Grillet, « Seuls les objets déjà chargés d'un contenu humain flagrant sont neutralisés avec soin... » mais, « la campagne est 'gorgée' de soleil, le soir est 'comme une trêve mélancolique', la route défoncée laisse voir la 'chair brillante' du goudron, la terre est 'couleur de sang', le soleil est une 'pluie aveuglante'... « le principal rôle est occupé par la Nature »... et« Le monde est accusé de complicité d'assassinat. » Les petites choses sont neutralisées, la nature éclate, surhumaine.
Comprendre, le mot revient plus de 60 fois. Comprendre les choses, les faits de la vie quotidienne, mais que peut la faible raison humaine face à la toute puissance du monde, de la nature, le soleil pousse-au-crime : le soleil cité plus de 40 fois, surtout dans la première partie du livre.
Pour Camus, le sentiment d'étrangeté, l'absurde naît d'une « confrontation de l'homme et du monde, entre l'appel humain et le silence déraisonnable du monde », du « divorce entre l'homme et sa vie, l'acteur et son décor », du « désir éperdu de clarté » devant un monde incompréhensible. L'homme muni de sa seule raison, « Cette raison si dérisoire, c'est elle qui m'oppose à toute la création. »
Dans sa cellule de condamné à mort, Meursault décrit les affres de tous les condamnés à mort. Il sent, à la fois, l'intensité de la vie, par bouffées, dans tout son corps et la force implacable de la ridicule justice des hommes qui l'a condamné à mort. Ridicule car tous les hommes sont condamnés à mort. L'échafaud n’est qu'un des instruments pour accomplir l'inévitable destin de l'homme.
Meursault, après avoir rejeté avec colère l’aumônier qui voulait le ramener à Dieu, vidé de toutes les illusions humaines, passé de l'autre coté, peut s'ouvrir « pour la première fois à la tendre indifférence du monde ». Pour que sa mort soit réussie, il faut que la machine des hommes continue à jouer son rôle de rejet, d'exclusion, « avec des cris de haine ».
Au delà de raisons philosophiques, peut-on trouver dans la vie de Camus des événements, des circonstances qui pourraient expliquer la force de ce sentiment d'étrangeté ?
Une première source, dés son tout jeune âge, dans sa vie familiale. Né en novembre 1913, dans une famille très pauvre, Camus n'a pas connu son père, mort en octobre 1914 des suites d'une blessure de guerre. Il sera élevé.par une mère à moitié sourde, analphabète, femme de ménage et surtout par une grand-mère autoritaire autant avec lui qu'avec sa mère.
De multiples citations peuvent étayer cette première proposition. Dans un brouillon de L'Envers et l'endroit, Camus écrit : « Il y avait une fois une femme que la mort de son mari avait rendue pauvre avec deux enfants. Elle avait vécu chez sa mère, également pauvre, avec un frère infirme qui était ouvrier. Elle avait travaillé pour vivre, fait des ménages, et avait remis l'éducation de ses enfants dans les mains de sa mère. Rude, orgueilleuse, dominatrice, celle-ci les éleva à la dure. » (Albert Camus, Roger Grenier, cité par Wikipedia).
Et aussi :« Il commence à sentir beaucoup de choses. À peine s’est-il aperçu de sa propre existence. Mais il a mal à pleurer devant ce silence animal. Il a pitié de sa mère, est-ce l’aimer ? Elle ne l’a jamais caressé puisqu’elle ne saurait pas. Il reste alors de longues minutes à la regarder. À se sentir étranger, il prend conscience de sa peine. Elle ne l’entend pas, car elle est sourde. Tout à l’heure, la vieille rentrera, la vie renaîtra... Mais maintenant, ce silence marque un temps d’arrêt, un instant démesuré. Pour sentir cela confusément, l’enfant croit sentir dans l’élan qui l’habite, de l’amour pour sa mère. Et il le faut bien parce qu’après tout c’est sa mère. » (L'envers et l'endroit, 1937).
Dés son enfance, dans son milieu familial, il se sent « étranger » et la dernière phrase ci-dessus annonce déjà le style de « L’Étranger » : il « croit sentir de l'amour pour sa mère. Et il le faut bien parce qu'après tout c'est sa mère. »
Distingué et poussé par son instituteur, auquel il rendra hommage, quand il recevra le Prix Nobel de Littérature en 1957, il sera reçu au concours des bourses ce qui lui permettra de continuer les études malgré l'opposition de sa grand-mère. Au lycée Bugeaudd'Alger, Albert Camus, demi-pensionnaire, échappe à son milieu « naturel », se retrouve avec des enfants plus favorisés : « J'avais honte de ma pauvreté et de ma famille… Auparavant, tout le monde était comme moi et la pauvreté me paraissait l'air même de ce monde. Au lycée, je connus la comparaison », (Notes pour un roman, citées par Roger Grenier, 1982, : cité par Olivier Todd, 1996, Wikipedia).
Étranger dans le milieu familial, honteux dans le milieu lycéen, la nature, la maladie, va contribuer encore à son isolement. En 1930, à l'âge de 17 ans, à l'adolescence, au moment où tout est indécis, la tuberculose le sépare, une nouvelle fois, des siens, de ses copains, de l'équipe de football où il avait trouvé sa place. Elle l'empêche de vivre et de suivre ses études comme les autres. Encore « isolé », au propre comme au figuré, il est confronté à la mort, la sienne et celle des autres malades - la tuberculose, maladie surtout des pauvres, pouvait être mortelle à l'époque.
Plus tard, une rechute l'empêchera aussi de présenter l'agrégation et, nouvelle exclusion, il sera rejeté par l'armée qui refuse son engagement en 1939.
Fidèle à son origine sociale et à ses convictions, Albert Camus militera pendant deux ans au Parti communiste, bref passage, et il s'en écarte ou en est exclu. Une fois de plus, la greffe n'a pas pris.
Comment ne pas éprouver un sentiment de forte solitude après ces ruptures répétées, cette proximité avec la misère et la mort, pendant toute sa formation, en contradiction avec la belle indifférence de la terre algérienne, gorgée de soleil, de couleurs et d'odeurs ?
Certains ont voulu trouver une origine politique à ce sentiment d'étrangeté. Par sa situation d'étranger dans son propre pays, l'Algérie, étranger à la majorité de la population colonisée, en « porte-à faux », mal à l'aise, par son origine sociale, dans le milieu européen. Finalement, doublement minoritaire.
Partant de l'absence ou de la rareté de personnages algériens, arabes, musulmans, dans son œuvre littéraire, le sentiment d'étrangeté de Camus a été mis en relation avec sa situation de pied-noir, d'étranger en Algérie. Ainsi Ahmed Taleb Ibrahimi :« Je n’irai pas jusqu’à dire, avec certains, qu’en tuant l’Arabe, Meursault, et partant Camus, se défoule d’un complexe de petit blanc contracté depuis que sa mère fut brutalisée par un Algérien dans leur maison de Belcourt. Mais je pense qu’en tuant l’Arabe, Camus réalise de manière subconsciente le rêve du pied-noir qui aime l’Algérie mais ne peut concevoir cette Algérie que débarrassée des Algériens ».(
Dans l’œuvre littéraire de Camus, si l'Algérie est omniprésente par ses villes, Alger, Oran, ses sites, particulièrement Tipaza, sa nature, le soleil, la mer, et décrite de façon lyrique, le peuple algérien en est presque absent. Et quand des Algériens apparaissent, c'est de façon impersonnelle, anonyme, sans nom patronymique et même sans prénom : « l'arabe » ou la « mauresque ». De façon paradoxale, Camus qui se proclame algérien, ne parle des Algériens que sous le terme d'arabe alors qu'il connaît la diversité ethnique de l'Algérie.
Dans La Peste,son roman le plus célèbre, avec L’Étranger, Camus décrit une épidémie à Oran. Contacté par un journaliste « envoyé d'un grand journal de Paris », Raymond Rambert, qui veut faire un reportage sur l'état sanitaire du peuple algérien, le Docteur Rieux, narrateur et principal personnage du roman, refuse de témoigner. Parce que le journaliste ne veut pas s’engager à dire toute la vérité sur la désastreuse situation sanitaire de cette population. Parce qu'il refuse de porter une « condamnation totale » dont il pense qu'elle serait sans doute « sans fondement ». Ensuite, tout le roman tournera autour de la population européenne, aux noms français ou espagnols. Certes, La Peste est une allégorie mais située à Oran et dont le peuple algérien est absent. Qui meurt pendant La Peste ? Peut-être des « Arabes » mais ce n'est dit nulle part !
Dans L’Étranger, apparaissent des images bien différentes des Algériens, plus positives dans la seconde partie que dans la première.
A la maison de retraite de la mère de Meursault, apparaît « une infirmière arabe ».« A la hauteur du nez, le bandeau était plat. On ne voyait que la blancheur du bandeau dans son visage. »... « A ce moment, le concierge m'a dit : 'C'est un chancre qu'elle a'. »
Après l'enterrement de la mère de Meursault, l'auteur décrit son milieu, ses relations de travail, son quartier, ses fréquentations, sa rencontre avec Marie... Dans son petit monde, toutes ses relations sont européennes, avec des noms, ici aussi, d'origine française ou espagnole. Parmi elles, Raymond Sintès, nom d'un « ami », aux fréquentations douteuses, habitant le même immeuble que Meursault, qui va le conduire au meurtre. (Sintès est aussi le nom de jeune fille de la mère de Camus). Unmeurtre commis, presque par hasard, sans haine, sans motif réel, pour un coin d'ombre sur la plage - une portion du territoire algérien ? .
Raymond Sintès, le voisin, a une maîtresse : « Quand il m'a dit le nom [que le lecteur ne connaîtra pas]de la femme, j'ai vu que c'était une Mauresque. ». C'est à cause des relations avec cette Mauresque qu'il frappe, que son « ami » a des problèmes avec les Arabes. Qui le suivent. Qui les regardent « en silence, mais à leur manière, ni plus ni moins que si nous étions des pierres ou des arbres morts ». Qui se retrouveront à la plage où aura lieu le drame lors d'une altercation qui aurait dû rester banale, sans la pression du soleil.
Dans la seconde partie, Meursault retrouve des Arabes lors de son emprisonnement : « Le jour de mon arrestation, on m'a d'abord enfermé dans une chambre où il y avait déjà plusieurs détenus, la plupart des Arabes. Ils ont ri en me voyant. Puis ils m'ont demandé ce que j'avais fait. J'ai dit que j'avais tué un Arabe et ils sont restés silencieux. Mais un moment après, le soir est tombé. Ils m'ont expliqué comment il fallait arranger la natte où je devais coucher. En roulant une des extrémités, on pouvait en faire un traversin. »
Isolé ensuite, il ne reverra des Arabes qu'au parloir où des « Mauresques » viennent les voir. Il observe les comportements. Dans le brouhaha du parloir, certains parlent fort, les Européens, « à cause de la distance entre les grilles » qui les séparent. Tandis que « la plupart des prisonniers arabes ainsi que leurs familles s'étaient accroupis en vis-à-vis. Ceux-là ne criaient pas. Malgré le tumulte, ilsparvenaient à s'entendre en parlant très bas. Leur murmure sourd, parti de plus bas, formait comme une basse continue aux conversations qui s'entrecroisaient au-dessus de leurs têtes ».
Meursault ne parlera plus des Arabes. Et lors du procès, si tous ses amis apparaissent à la barre en témoins, aucun témoignage des amis de l'Arabe assassiné n'est rapporté.
Comment expliquer cette quasi absence des Algériens, Arabes ou juifs d'ailleurs, ou cette séparation des populations ? Simple constat de la situation réelle en Algérie ? De Camus en Algérie ? Pourquoi aucune œuvre de Camus ne se déroule jamais en milieu algérien ? Avec des personnages algériens ? Ce n'est pas que Camus ignore le peuple algérien et sa pauvreté. Son engagement au Parti communiste témoigne de son intérêt pour lui, de même que les onze articles « Misère en Kabylie » que, journaliste à Alger républicain, « le journal des travailleurs », il a écrits en1939.
Comment expliquer une telle séparation de Camus, le militant, et de Camus, l'homme de lettres.
La lettre qu'il a envoyé à son instituteur lors de l'attribution du prix Nobel en témoigne. Il est le fruit, social et politique, de l'école publique dans un département français d'Algérie. Cette école de la liberté, de l'égalité, de la fraternité, de l'universalisme... français. Dans ses Carnets , il note à l’automne de 1950 : « Oui, j’ai une patrie : la langue française. » Pas seulement. Et cettelangue française est minoritaire, peu partagée, à l'époque, par les Algériens. Camus n'apprend pas l'arabe. Cette école de la méritocratie républicaine ne l'empêchera pas, bien au contraire, de prendre conscience de la misère des Algériens qui ne pourra être combattue, efficacement selon lui, que par l'intégration dans la République. Elle lui permettra de prendre conscience de l'injustice faite à la population algérienne mais lui rendra très difficile la prise en considération du peuple algérien, de la nécessaire séparation, la solution ne pouvant être que dans la justice français : « Mon préjugé est que la France ne saurait être mieux représentée et défendue que par des actes de justice » (Préface d'Actuelles III). Par son engagement, il peut aller au peuple « arabe » mais par son origine, il appartient à la partie européenne, française du peuple algérien.
Ce n'est pas du nationalisme, du moins du nationalisme étroit. Plutôt de l'universalisme abstrait, françaisde 1789 enseigné par l'école et qui a quelques difficultés à s'appliquer à l'Algérie. D'où sa grande difficulté à reconnaître l’existence d'un peuple algérien : « Il n’y a jamais eu encore de nation algérienne. Les Juifs, les Turcs, les Grecs, les Italiens, les Berbères, auraient autant de droit à réclamer la direction de cette nation virtuelle » Comme Ferhat Abbas, une autre réussite de l'école du mérite, qui a pu dire « J’ai beau scruter, interroger les cimetières algériens, nulle part je ne trouve trace de la nation algérienne ». Découverte tardive du fait de leur éducation, pour l'un et pour l'autre. Par leur situation, ils n'auront pas la même trajectoire.
Quand Camus se rapproche des nationalistes, c'est, normalement, comme la majorité de la gauche française à une certaine époque, de Messali Hadj, le père du nationalisme algérien et des messalistes avec lesquels il aura des relations suivies.
S'il a bien compris depuis longtemps, que le danger de l'immobilisme de la politique française pouvait mener à la violence en Algérie, il ne reconnaîtra l'existence d'un peuple algérien, paradoxalement et, comme beaucoup, qu'à la suite des actions du FLN dont il ne pourra accepter la radicalité ni de la position, ni des méthodes même.
Lors d’une rencontre avec des étudiants suédois, un jeune algérien lui reproche son silence sur ce qui se passe en Algérien. En réalité, de ne pas prendre position en faveur de la lutte du peuple algérien pour son indépendance au nom de la justice. Sa réponse a été diversement rapportée et commentée. « En ce moment, on lance des bombes dans les tramways d’Alger. Ma mère peut se trouver dans un de ces tramways. Si c’est cela la justice, je préfère ma mère. »Dans le compte rendu du Monde,cette phrase devient : « Je crois à la Justice, mais je défendrai ma mère avant la Justice. »Et habituellement, encore plus simplifié : « Entre la justice et ma mère, je choisis ma mère. » Au delà du glissement des mots, il y a un important changement de sens.
Du fait de sa formation, de ses origines, de son attachement à une solution française, il ne pourra jamais faire le saut et condamner la France coloniale. Il ne pourra envisager pour l'Algérie qu'un avenir dans un cadre français amélioré. Ce qui permettra à tous ceux qui ont empêché toute amélioration de ce cadre, qui se réclament encore aujourd'hui de l'Algérie française, y compris de l'OAS, de vouloir l'annexer cinquante ans après l'indépendance.
Le livre est paru en 1942. Il fait partie selon Camus de sa tétralogie de l'absurde* avec l'essai Le Mythe de Sisypheet les pièces de théâtre Caligulaet Le Malentendu.
Luchino Visconti a fait une adaptation cinématographique de L’Étranger en 1957, Jacques Fernandez une bande dessinée (Gallimard) en 2013 et une adaptation théâtrale, mise scène de Sissia Buggy, est actuellement à l'affiche à Paris.
En 1978, L’Étranger a inspiré au groupe The Cureune chanson dont le titre, malheureux, Killing an Arab, a fait problème (Ce titre a été plusieurs fois modifié par la suite en Kissing an Arab ou Killing another ou Killing an Englishman). Voici le texte de la chanson.
Killing An Arab | Tuer Un Arabe |
Standing on the beach
I can turn [Chorus] I feel the steel butt jump [Chorus]
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Debout sur la plage [ Refrain] Je peux me retourner [Refrain] Je sens le sursaut de la crosse d'acier [Refrain] |
Cette chanson n'est en aucun cas raciste. Paroles et traduction de « Killing An Arab » (Wikipedia)
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Paul ORIOL
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