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Un brave père de famille, maçon de son état, a trouvé la mort après une chute dans le chantier des «102 logements promotionnels», situé sur la route de Koléa, dans la wilaya de Tipaza.
L’information aurait pu être banale, un fait divers, comme on dit. A Tipaza, comme ailleurs, il n’y a pas grand monde à s’émouvoir de la mort d’un maçon, en dehors de sa famille et de ses voisins les plus proches.
La vie est injuste mais elle est ainsi. Les échafaudages chancelants parce que faits de bois pourri ou de métal mal ajusté et les conditions générales de sécurité dans lesquelles travaillent nos ouvriers du bâtiment, ce n’est pas vraiment une préoccupation pour ceux qui devraient… s’en préoccuper.
Des morts sur chantier, ce n’est pas ce qui doit manquer et ça ne mobilise ni les syndicats, ni les citoyens ordinaires. Les premiers ont d’autres priorités et d’autres centres d’intérêt pour leur action, les seconds ont appris à se résigner.
On meurt comme il est «écrit» qu’on meure. Mais on peut mourir sur un chantier et ne pas passer inaperçu quand même. Pour preuve, ce brave maçon qui a fait une chute d’un immeuble en construction au chantier des «102 logements promotionnels» près de Tipaza.
Il y a beaucoup de maçons qui perdent la vie en tombant d’un échafaudage chancelant mais ce n’est pas tous les jours que l’ambulance envoyée sur les lieux de l’accident pour évacuer un blessé dans un état critique est bloquée par la voiture d’un… député qui obstrue le passage depuis prés de deux semaines.
Après avoir vainement interpellé l’«élu du peuple» pour déplacer son véhicule et libérer la route qui mène au chantier, le promoteur du projet aurait même saisi le président de l’Assemblée nationale dans l’espoir de lui faire entendre raison !
Manifestement trop occupé à… empêcher le débat sur la corruption en organisant le chahut des questions orales au gouvernement autour du sujet, M. Ould Khelifa n’a pas répondu.
On ne dérange pas un si haut responsable de l’Etat pour si peu. Sinon, le député de la «majorité» ne se serait pas découvert le droit de garer sa voiture où il veut.
On n’achète pas un véhicule haut de gamme avec le crédit… non remboursable accordé aux parlementaires pour être obligé de le garer comme tout le monde.
Sinon, la grande famille de Monsieur le député ne serait pas sentie au-dessus de tous au point d’engager une bagarre générale avec le reste de la localité qui leur demandait de déplacer la voiture.
Sinon, l’ambulance serait passée et le brave maçon monté sur un échafaudage chancelant pour nourrir sa petite famille serait encore en vie !
Et le wali de Tipaza n’aurait pas attendu pour qu’il y ait un sacrifié, des enfants orphelins, une veuve éplorée et une population en ébullition à la brigade pour… ordonner à la brigade de recherche de la police locale «d’ouvrir une enquête sur le dossier» ! Un homme est mort sur un chantier.
Il serait peut-être mort même si l’ambulancier n’avait pas attendu un temps fou avant de pouvoir l’évacuer. Mais c’est connu, on a plus de chance de survivre en arrivant à l’hôpital en quelques minutes qu’en attendant une heure le corps écartelé sur un terrain de chantier.
C’est connu aussi, les ambulances arrivent plus rapidement sans les voitures de députés. Si en plus des échafaudages en bois pourri ou en métal bricolé, on meurt de bolides mal garés, c’est l’hécatombe assurée.
Une question, juste comme ça : si l’enquête établit la responsabilité de M. Ferdi Miloud – c’est le nom du député en question –, est-ce qu’on lèvera son immunité parlementaire ?
Allons, ne rêvons pas. Déjà que personne ne lui a demandé gentiment d’aller déplacer sa voiture qui a entravé un chantier pendant deux semain
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[email protected] 26-06-2013
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