.
Chenoua, le bougainvillier pleure chaque jour...
A Chenoua, à l’ouest de Tipasa, le bougainvillier est là, débordant des villas situées à deux pas de la plage. Comme dans un beau roman d’été, le bougainvillier défie la chaleur mais ne fait pas oublier la laideur qui se dégage des lieux.
Rose ou violet, la fleur de cet arbuste grimpant semble pleurer chaque jour dans cette région côtière, célébrée jadis par les poètes. Pleurer le sort triste réservé à une petite ville qui a tant inspiré l’écrivain Tahar Ouettar, aujourd’hui disparu. A l’anarchie urbaine s’est ajoutée une incroyable saleté. Des tonnes de bouteilles en plastique, des cannettes de bière ou de Coca-Cola, des sachets en plastique bleus ou blancs, des restes de nourriture, des amas de gravier et de terre accueillent les estivants à l’entrée de la plage. L’odeur des égouts, forte et agressive, dissuade les plus excités à plonger dans les eaux bleu azur de la Méditerranée. A côté, se trouvent deux postes de la gendarmerie et de la Protection civile.
Ces deux services de l’Etat ont-ils «signalé» dans leurs rapports le manque flagrant d’hygiène dans cette partie de la plage ou cela fait-il partie du paysage «touristique» de Chenoua Beach ? Plus loin, les responsables des campings Essalem, Hanane, le Grand Bleu et l’Etoile de mer font ce qu’ils peuvent pour garder la propreté autour de ces lieux de repos. Les agents de nettoyage du Grand Bleu, par exemple, nettoient chaque matin la plage louée par le camping pour la saison estivale. Des poubelles sont installées en permanence pour permettre aux vacanciers de jeter les déchets.
Mais, il est évident que les services de la commune de Tipasa, dont dépend Chenoua, sont défaillants. Il n’y a visiblement aucun effort pour nettoyer les quartiers proches de la plage ou la plage elle-même. Les terres agricoles voisines n’ont pas échappé à «la vague» de saleté, puisque les bouteilles de plastique se bousculent la place aux rares plantes de haricots verts encore en «vie». La petite ruelle menant vers «le cœur» de Chenoua est déjà un exemple de ce que peut être le manque de civisme et le laisser-aller des «citoyens» ! A côté du centre de vacances de Naftal, des villas, un restaurant, des pizzerias et des boutiques, des ordures constituent des petites montagnes colorées où les baigneurs s’y faufilent pour reprendre le chemin poussiéreux de la plage.
Personne ne semble gêné par ce décor hideux, y compris les saisonniers qui habitent les villas. La saleté sur la voie publique est-elle un mal national ? Une malédiction ou une seconde nature ? Abandonnées pendant des années, les ruelles situées sur le côté droit de la chaussée n’ont été goudronnées que cette année. Et, bien entendu, on s’est arrangé pour commencer les travaux pendant la saison estivale : situation qui a causé beaucoup de désagréments aux automobilistes et aux riverains.
Des bouteilles vides et des vagues
A quelques encablures de là, une grosse bâtisse orange est plongée dans un profond silence. C’est le centre culturel de Chenoua, ouvert après des années d’oubli et de bureaucratie. Géré par l’Office national de la culture et de l’information (ONCI), ce centre, équipé de tout, ne connaît aucune activité artistique alors que les estivants ne demandent que cela. Ni exposition de peinture, ni concert de musique, ni pièce théâtrale, ni projection de films, rien ; l’ONCI devrait réserver «une place» à ce centre dans son programme national d’été, sinon il faut lui changer de vocation. Une cafétéria-terrasse, située à côté du centre culturel, assure un tant soit peu un service pour ceux qui veulent admirer la mer et la falaise. On y sert crêpes salées ou sucrées, des beignets italiens, des sorbets glacés, des pizzas, du thé et des boissons fraîches.
C’est déjà pas mal dans l’aridité ambiante ! Regardons en bas. Que voit-on ? Un festival de bouteilles d’eau minérale vides dansant au rythme des vagues. La plage est dans un état d’insalubrité à couper l’appétit. Cela n’empêche pas les estivants de marcher en bord de mer poussant à peine d’un pied mouillé les bouteilles pour avancer et «savourer» le charme du paysage. Mais qui osera dire aux uns et aux autres que la plage doit être propre et que le respect de l’environnement est un acte noble ? Qui a la charge de nettoyer les lieux ? Trêve d’interrogations dans un pays où il n’existe pas de réponses. Avançons. On se retrouve déjà à la rue des Galets. Joli nom pour un bel endroit.
Ici, et sous des pins maritimes, on peut voir, avec grand plaisir, la baie souriante de Chenoua. La plage déborde de baigneurs. Derrière nous, l’hôtel Chenoua, un nouvel établissement plongé dans une belle couleur verte. Les prix des chambres ou des suites varient de 9000 à 15 000 DA en haute saison. La terrasse du restaurant donne sur la baie. Là, aussi, c’est une idée à saluer dans une Algérie où les villes côtières donnent leur dos à la mer, Alger et Skikda en sont l’exemple. Plus en bas, la falaise est «décorée» par des rejets. Faut bien, c’est inévitable dans cette dirty city ! Des eaux usées grisâtres se déversent sur la roche avant de rejoindre la mer.
La petite plage située à une dizaine de mètres de là est dans un état mélancolique d’abandon. Les algues dressent presque le tapis à une nuée de bouteilles (décidément !), de canettes et de sachets en plastique. Une barque solitaire assiste au spectacle désolant sans mot dire... Poussons vers la corniche. Ici, on vient prendre des photos souvenirs ou acheter quelques objets d’artisanat. Mais, les mains sales de l’homme sont venues tout gâcher. Un amas de canettes de bière et d’autres emballages couvrent presque la falaise jusqu’en bas... Que dire alors : vive le tourisme national !
.
Les commentaires récents