Cet homme portait son enfance
sur son visage comme un bestiaire
il aimait ses amis
l’ortie et le lierre l’aimaient
Cet homme avait la vérité
enfoncée dans ses deux mains jointes
et il saignait
À la mère qui voulut enlever son couteau
à la fille qui voulut laver sa plaie
il dit « n’empêchez pas mon soleil de marcher »
Cet homme était juste comme une main ouverte
on se précipita sur lui
pour le guérir pour le fermer
alors il s’ouvrit davantage
il fit entrer la terre en lui
Comme on l’empêchait de vivre
il se fit poème et se tut
Comme on voulait le dessiner
il se fit arbre et se tut
Comme on arrachait ses branches
il se fit houille et se tut
Comme on creusait dans ses veines
il se fit flamme et se tut
Alors ses cendres dans la ville
portèrent son défi
Cet homme était grand comme une main ouverte.
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JEAN SENAC
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