. Ils sont employés dans les champs, les commerces ou exploités par leurs propres parents.
Ils sont victimes de la pauvreté, de la malvie, de l'exclusion et de la maltraitance parentale. Leur âge varie entre six et quinze ans, ils sont pour la plupart scolarisés, mais dans quelles conditions ! Nous les trouvons aux abords des routes, dans les parkings, sur les plages et dans les champs. Plus grave, ils exercent au noir dans de nombreuses entreprises, ateliers ou commerces au vu et au su de l'Etat. Du côté de Douaouda, dans la wilaya de Tipaza, une trentaine d'enfants se sont installés aux abords de l'autoroute, non loin d'un barrage de la Gendarmerie nationale. Ils vendent de la galette aux nombreux automobilistes qui empruntent cette route. Le cas de la petite fille Khaoula est très significatif. Cette adolescente de 13 ans a à sa charge trois sœurs et deux frères, elle est l'aînée de la famille. Orpheline de mère, son père s'est remarié et a changé de résidence, abandonnant ses enfants à leur triste sort. «Sa femme lui refuse tout contact avec nous, mais il vient quand même nous voir une fois par mois, il me donne chaque mois 3000 DA. Que puis-je faire avec une telle somme ?», nous explique la petite Khaoula qui s'est retrouvée par la force des choses à assumer des tâches trop lourde pour son âge. Elle s'occupe de ses frères et sœurs, elle cuisine, elle lave leur linge et travaille pour eux dehors. Elle raconte son histoire : «J'ai quitté l'école très jeune, et je n'avais que 8 ans quand ma mère est morte, elle était très malade. Durant sa maladie, je ratais souvent l'école pour être à ses côtés, la plus petite de mes sœurs avait à peine 3 ans, et c'est moi qui m'occupais d'elle. Une année après la mort de ma mère, mon père s'est remarié, il a vécu environ trois mois avec nous, ensuite sa femme l'a obligé à construire un gourbi ailleurs. L'épouse de mon père ne voulait pas de nous. La seule solution qui restait pour moi, c'était d'abandonner l'école et de prendre en charge mes frères et sœurs. J'ai commencé à pétrir du pain chez une voisine que ses enfants se chargeaient de vendre sur la route, c'est de la que j'ai appris ce métier qui me permet de vivre et de faire vivre ma famille.» Un automobiliste s'arrête et appelle l'adolescente par son nom : «Khaoula cinq galettes, s'il te plaît.» Le client qui semble connaître la fille nous livre ses impressions : «je passe tous les jours par là, je n'achète mon pain que chez Khaoula, j'ai connu cette fille en 2008 et son histoire est terrible. D'ailleurs, même mes voisins me demandent de leur acheter la galette chez Khaoula.» . ve avec une brouette chargée de galettes encore chaudes. Il a 10 ans à peine. Il s'installe à quelques mètres de Khaoula. Le soleil de plomb de cette journée d'été ne les décourage pas, ils savent qu'ils n'ont pas le choix. A 25 DA la galette, les enfants ne s'enrichissent pas, les maigres bénéfices sont justes suffisants pour subvenir aux besoins élémentaires de leur famille. A midi, à l'heure du déjeuner, les enfants se contentent qui d'un œuf dur, qui d'une tomate ou quelques pommes de terre bouillie et d'un morceau de galette. Le père du petit Omar est maçon, il est atteint d'une maladie qui le cloue des journées entières sur son lit. Son frère aîné est appelé sous les drapeaux. C'est donc la mère qui a la lourde charge de faire vivre toute la famille en faisant cuire du pain de campagne que le petit Omar se charge de vendre. Elève brillant, Omar qui vient d'être admis au collège, doit travailler non seulement l'été mais durant toute l'année. «Ses parents sont trop pauvres», nous dit un de ses camarades. .
Il dit qu'il travaille dans les champs au moment de la récolte de la pomme de terre. Il perçoit 50 DA sur chaque caisse qu'il remplit. «Le travail dans les champs est très dur, en tout cas, c'est plus facile de vendre du pain sur la route», nous dit-il. L'enfant de l'Ouest nous a montré ses doigts, ils sont usés, ses ongles sont rongés à force de retourner la terre, sèche et dure, à la recherche d'une patate. «Nous déterrons la pomme de terre avec les mains nues, contrairement aux agriculteurs qui utilisent des outils. Le propriétaire de l'exploitation nous refuse ce luxe. Il nous dit que si vous utilisez la fourche, vous allez blesser la pomme de terre et son prix va baisser. Autrement dit, il nous faut beaucoup de temps pour remplir une caisse et pouvoir empocher les 50 DA», a ajouté le gamin. .
Il travaille de 8h du matin à 16h pour 200 DA la journée. «Je ne peux pas vous parler, mon patron me surveille, c'est l'homme à la chemise rouge. Si vous voulez qu'on parle, on se retrouve au virage de Megtaâ Kheira, j'habite juste à côté. Mais là, je travaille», nous dit-il, presque en tremblant. Le patron du jeune garçon que nous avons abordé accepte de nous parler : «Azzedine est très doué, il manie le couteau avec dextérité, en plus c'est un garçon très sérieux.» Le patron ajoute «moi, je rends service à ce petit gamin, il est pauvre, ses parents sont divorcés, et il vit avec sa mère qui ne travaille pas.» Le travail des enfants dans notre pays est devenu monnaie courante. Au lieu de s'interdire cette pratique, les employeurs légitiment leur acte en prétextant aider ces enfants. Les parents sont-ils devenus aussi irresponsables au point de livrer leur progéniture à tous ces prétendus patrons ? L'Etat est plus que jamais appelé à réprimer le travail des enfants et à assurer dans le même temps une vie décente et un avenir meilleur à ces hommes et femmes de demain.
Par Elias Melbouci |
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