Un illustre monarque et un grand conquérant
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Souleimane le Magnifique (ou Souleimane Ier) est né, en 1495, à Trébizonde (port turc sur la mer Noire conquis en 1461). Il est considéré comme le plus célèbre sultan ottoman, lui-même fils d’un autre grand roi, Sélim 1er (1466-1520) -- dit le Cruel ou le Terrible -- le véritable fondateur de l’empire ottoman et qui aurait reçu du calife abbasside d’Egypte le titre de calife.
C’est tout à fait logiquement que le jeune Souleimane succéda à son père, en 1520 (donc à l’âge de vingt-cinq ans), et monta sur le trône pour entreprendre de poursuivre l’œuvre paternelle que ce soit dans le domaine de la conquête de nouveaux territoires ou dans la consolidation de l’Etat qui se transforma rapidement en un très vaste empire à l’instar de l’empire espagnol ou de la Russie tsariste.
Sous son long règne (1520-1566), l’Empire ottoman est devenu une grande puissance mondiale, tout en continuant à s’étendre pendant encore un siècle avant de connaître un (long) déclin irrémédiable durant les siècles suivants et de mériter l’appellation -- méprisante et ironique de l’«homme malade de l’Europe» donnée par le chancelier autrichien, Metternich, qui a constaté comme tout le monde l’état de faiblesse et de décrépétude dans leque se trouvait ce grand empire musulman au XIXe siècle.
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Les débuts d’un long règne
A l’âge de sept ans, Souleimane fut envoyé par son père dans la capitale, Istanbul, pour y suivre ses qui consistaient, à l’époque, en l’étude des sciences, de l’histoire, de la littérature, de la théologie etc. Son père, Selim le Terrible, y ajouta les techniques militaires. Il fit ses premières expériences en matière de gouvernement dans différentes provinces qu’il administra sagement et avec beaucoup de compétence.
Dès le début de son règne, en 1520, il entreprit plusieurs campagnes de conquêtes militaires dans toutes les directions. Dans les Balkans, il occupa la Serbie en 1521 en prenant sa capitale, Belgrade. L’année suivante, il assiégea et prit l’île de Rhodes, qui était sous la botte des chevaliers de Saint Jean venus auparavant de Jérusalem (El Qods). Chassé de cette île, ils iront se réfugier à Malte près des côtes italiennes.
En août 1526, le jeune monarque remporta un décisif succès dans la grande victoire de Mohács contre le roi Louis II de Hongrie. A l’issue de cette bataille, il occupa la majeure partie de ce pays dont il donna le trône à un prince de Transylvanie, un vassal. Charles-Quint, empereur du Saint empire romain germanique, et son frère Ferdinand Ier, archiduc d’Autriche, reprirent la Hongrie. Une contre-attaque de Souleimane se termina par un échec en raison du mauvais temps. Il menaça alors Vienne, en 1529 et en 1532. Finalement, en 1533, il signa un traité de paix avec Ferdinand, coupant en deux la Hongrie dont une partie revint à la grande dynastie des Habsbourg, et l’autre à un prince hongrois, Jean Zápolya. A la mort de ce dernier, Ferdinand resta dans sa partie de la Hongrie, donnant à Souleimane l’impression de pouvoir annexer l’autre partie. Il s’en suivit de nouveaux combats et un nouveau traité pour revenir au point de départ.
De 1533 à 1536, il conquit l’est de l’Anatolie et l’Azerbaïdjan en guerroyant contre l’empire perse. Dans la même période, les troupes ottomanes occupèrent le Yémen. Les marins turcs installés à Alger, eux, prirent Tunis aux émirs hafsides en son nom en 1534. Leur royaume de ces derniers fut conquis par le pacha turc de Tripoli (Libye) qui prit Kairouan, en 1557, et par le pacha d’Alger qui s’empara de Tunis en 1569. Profitanr de sa suprématie, Souleimane consolida ses conquêtes en signant une série de traités de paix avec ses voisins. En 1540, il signa avec Venise un traité de paix assorti de capitulations. En 1541, il installa une régence ottomane en Hongrie pendant l’enfance du nouveau roi. En 1547, il signa un traité de paix avec Charles-Quint. Dans le même temps, il entretint de bonnes relations avec la France, autre adversaire de Charles-Quint. En gage de ces bonnes relations, il permit à François Ier de France d’avoir une représentation permanente à Istanbul.
C’est alors qu’il menait une campagne contre l’empereur germanique Maximilien II du Saint empire que le sultan mourut en 1566, la veille de la bataille de Szigetvár en Hongrie, remportée, d’ailleurs, par les Turcs. Il fut enterré au côté de son épouse préférée Roxelane, une princesse ukrainienne, dans le mausolée attenant à la Mosquée Souleymaniyé d’Istanbul.
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Souleimane le magnifique vu par l’Histoire
Vu de l’étranger, Souleimane paraissait un danger pour tout le monde en raison de sa puissance et de son ambition, mais dans ses territoires il était considéré comme un bon souverain, combattant la corruption, et comme un mécène envers les artistes, les poètes, les savants et les philosophes. En vérité, c’est au XVIe siècle, sous son règne que l’Empire ottoman connaîtra son apogée, lorsque ses armées s’avanceront jusqu’à la capitale autrichienne, en 1529 et 1532, qu’ielles assiègeront, en vain. Pour les chroniqueurs de l’époque, le siège de Vienne causa, en Occident, un traumatisme très profond et si important qu’ils le plaçaient à un niveau équivalent à celui des invasions des Vikings ou de la grande Peste qui a sévi longtemps dans ce continent.
Souleimane a créé un ensemble de lois et d’institutions pour administrer son immense empire (organisation de l’armée, de la féodalité militaire, des impôts). Il fit bâtir de nombreux complexes religieux, comprenant mosquées, médersas, bibliothèques, cantines et mausolées, dont le plus célèbre est la mosquée Souleymaniyé d’Istanbul. Par ailleurs, il fit construire des complexes de ce genre à Damas, à Médine et au Yémen.
Sur le plan maritime, sa marine domine la Méditerranée et les actions de la flotte ottomane dans la mer Rouge étendent la puissance turque au-delà du Yémen (1538) et d’Aden (1547). Pénétrant dans l’océan Indien, elle gêne les Portugais qui avaient la mainmise dans ces mers.
Héritage de Souleimane
L’Empire ottoman, sous son temps, avait atteint sa plus grande expansion, l’Etat était organisé et prospérait grâce au contrôle des voies commerciales et à un système d’imposition approprié : droit de douane, tributs payés par les territoires vassaux, dîmes versées par les sujets musulmans, capitations pour les non-mulsulmans. Cette richesse permettait d’entretenir la plus puissante armée de l’époque, forte de plus de 300 000 hommes aguérris au sein de laquelle cependant les janissaires prenaient de plus en plus de pouvoir avec le temps. Une période de paix s’en est suivie, qui permit à Souleimane de prendre en main les principes du gouvernement. L’armée féodale est reconstituée et les finances assainies. Ce brillant administrateur a porté l’Empire turc à son apogée malgré la présence d’ennemis de tous les côtés. Mais son rêve de voir ses étendards flotter sur l’orgueilleuse Vienne ne s’est jamais réalisé, malgré ses efforts soutenus et qu’il dirigea même en personne sans aboutirmalheureusement. Dixième sultan ottoman, Souleimane est resté le plus célèbre de la dynastie. C’est sous son règne que l’Empire ottoman a atteint son apogée, aussi bien dans le domaine territorial que dans celui de l’influence politique ou du rayonnement artistique et intellectuel.
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08-11-2008
Mihoubi Rachid
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