.
.
.
.
.
.
.
.
.
La
guerre déclarée en 1939, ne se déclenchait effectivement qu’en 1940. La
France envahie et occupée signait le 7 juin, séparément de
l’Angleterre, l’armistice avec l’Allemagne. Le gouvernement de Vichy
acceptait, outre le désarmement des armées françaises, la collaboration
à outrance avec l’occupant.
En Algérie, de même qu’en Métropole,
des commissions italo-allemandes supervisaient le désarmement. Le 3
juillet, une escadre française à l’ancre à Mers El-Kébir ayant refusé
l’ultimatum de la marine anglaise d’avoir à continuer la guerre contre
l’Allemagne ou à se laisser désarmer fut bombardée par cette même Royal
Navy, faisant périr 1.300 marins français.
L’esprit
insurrectionnel latent, se réveillait comme insufflé par le souvenir de
la grande révolte de Mokrani et Cheikh El-Haddad, après la défaite de
Napoléon III, le 2 septembre 1870, à Sedan, devant le chancelier
prussien Bismark.
En 1942, dès le débarquement des Alliés en
Afrique du Nord, de jeunes Algériens furent appelés ou rappelés pour
combattre auprès des Anglais et des Américains, en Tunisie, occupée par
les troupes allemandes puis, en Europe pour libérer les peuples sous le
joug nazi. Ce qui avait valu, entre temps, à leur héroïsme, cette
déclaration de Winston Churchill, parue sur une feuille unique par
pénurie de papier, à «La dépêche de Constantine».
«Nous rendons hommage aux divisions algériennes encadrées par des officiers français» (des officiers dissidents des colonies).
Cette
déclaration apparaissait en filigrane comme un pas envers la scission
entre la Métropole engluée en majeure partie de nazisme et l’Algérie
inébranlable auprès des Alliés, ce qui laissait croire à leur gratitude.
Parallèlement
à ces faits, le PPA dissous, seul parti à l’époque dont la doctrine
strictement nationaliste, activait dans la clandestinité. Structuré en
régions, secteurs, sous-secteurs et groupes de cinq, il imposait par
mesure de sécurité un rigoureux cloisonnement entre les militants.
Ceux-ci cotisaient 20 francs par mois et payaient 2 francs pour le
journal «l’Action», lu en cachette.
Moralement, le parti était
épaulé par le mouvement de réforme de Cheikh Ben-Badis luttant contre
les maux qui accablaient notre société: alcoolisme, paupérisation,
analphabétisation, déculturation, faux dévots et même sourdement, le
dithyrambisme des «Beni oui-oui» pour le système colonial.
Les
alliés qui ne pouvaient occulter l’évolution politique du peuple
algérien, souhaitaient prendre contact avec ses représentants.
Mais avec qui?
Messali Hadj, le chef incontesté du nationalisme était interné au Gabon et ses lieutenants inconnus.
Les
élus? Promus par l’administration coloniale au seul usage des conseils
municipaux et généraux, pouvaient-ils opter pour le nationalisme
radical?
Abbès Ferhat qui calculait les chances de succès du
nationalisme auprès des Alliés, rédigea immédiatement «Le Manifeste du
Peuple algérien» et élabora le parti des AML (Amis du Manifeste et de
la Liberté). En tolérant le parti jugé modéré, les colonialistes
espéraient, sans doute, débusquer tous les nationalistes et les
surveiller de près. En même temps le PPA, toujours dans l’ombre
préparait l’après-guerre. Il fallait d’abord ressusciter l’Emblème
national. Le quel? A l’Est, celui de Bey Ahmed réfugié à Constantine
jusqu’à la chute de la ville en 1837.
A l’ouest, celui de l’Emir
Abdelakder, arboré en 1832, après la capitulation du Dey d’Alger en
1830, puis tombé en 1847 devant Lamoricière.
Après consultation
dans le plus grand secret de tous les comités régionaux, le comité
central les fusionna à Alger en un seul (l’actuel) avec les
recommandations suivantes:
«L’emblème sera hissé pacifiquement
le jour de l’Armistice et du grand défilé prévu avec les scouts (SMA)
et toutes les associations patriotiques. Il flottera au milieu des
drapeaux alliés: anglais, américain, russe et français. Attention, pas
de désordre! Pas de dépassements! Le monde nous observe»
Pendant
ce temps, le parti de Abbès Ferhat (des AML) prenait une ampleur
considérable, recevant des adhésions de partout. Pareil à une lame de
fond surgie inopinément, ce parti troublait le bon fonctionnement de la
politique coloniale et suscitait l’angoisse de ses dirigeants.
Du
4 au 11 février 1945, s’est tenue, à Yalta, une conférence entre
Churchill, Roosevelt et Staline, en vue de régler les problèmes posés
par la proche défaite de l’Allemagne. Parmi ces problèmes celui de la
décolonisation. Le principe de l’autodétermination pour les peuples
assujettis, fut proclamé.
C’est la panique en Algérie, les
ultras commençaient à s’agiter. Contrairement à cette agitation, les
Algériens restaient calmes.
Auparavant, Si Abdallah Filali,
membre de la fédération de Constantine, avait été délégué auprès de
notre comité régional à Jijel. Il nous avait réunis secrètement la nuit
au bois de l’Oasis.
Nous étions sept: Ben Bourhane Mohamed,
Mékidèche Ahsène, Boumaza Mohamed, Khellaf Abdelakder, Aberkane
Abdelakder, Kouras Hocine et moi-même. Ce délégué confirmait les
recommandations de la centrale et ne cessait de répéter: «Défilé le
jour de l’armistice avec le drapeau mais défilé pacifique, sans
débordements, ni violence».
A Alger, le 1er mai 1945, une
manifestation syndicaliste pacifique, encadrée par des éléments
nationalistes, fut réprimée dans le sang.
Le 8 mai, Abbès Ferhat
se rendit à Alger féliciter les Alliés de la victoire en commun et le
gouverneur Chataignau, pour la libération de la France, se vit arrêté
sur les lieux.
Le carnage commençait...
Les Européens
levés en milices armées, assassinaient sans retenue. Les tribunaux
civils et militaires condamnaient sans pitié. Pour bombarder la
population jusqu’aux douars les plus reculés, on utilisa deux croiseurs
(Triomphant et le Duguay-Trouin) et l’aviation. Une population qui
fêtait pacifiquement la fin d’une guerre atroce et la fin, annoncée,
des servitudes dans le monde.
Le général Duval qui basait la
souveraineté de le France, exclusivement sur la force, déclarait l’air
triomphant sur plus de 40.000 morts: «Je vous ai donné dix ans de paix»
Et
le sous-préfet de Guelma Achyari, initiateur des fours crématoires
d’Héliopolis, renchérissait impudemment sur le général: «La France,
c’est moi!»
D’après ce modeste témoignage, une question se pose.
Qui? Oui, qui a commencé? Qui a tiré le premier? Miliciens haineux? Manigances politiques?
Manigances
des seigneurs de la colonisation, ayant soudoyé de tristes individus,
sans honneur et sans foi, à leur dévotion pour assassiner aveuglement
et justifier la répression préparée à l’avance?
Quoi qu’il en
fût, ni l’association des Oulémas, ni le PPA, ni les AML, n’avaient
prôné ou ordonné des manifestations qui allaient tourner à l’émeute.
.
.
par Salah Bousseloua
8 mai 2008
.
.
.
.
.
.
Le message de Bouteflika à la France
L'Algérie
a, une nouvelle fois, appelé la France à reconsidérer son passé
colonial, particulièrement en ce qui concerne le volet des violations
des droits de l'homme et les crimes contre l'humanité commis contre le
peuple algérien. Le président Abdelaziz Bouteflika l'a, en fait,
clairement suggéré, sinon souhaité, lors de la commémoration des
massacres du 8 mai 1945.
Bien plus, le président n'a fait
qu'exprimer tout haut un souhait de tous les intellectuels, des
moudjahidine et victimes et parents de victimes de certains pogroms
commis en terre algérienne par la colonisation française.
En
appelant à une «reconstitution historique, réaliste et sincère, d'un
passé colonial qui a laissé des blessures profondes au sein du peuple
algérien», il a suggéré aux nostalgiques de l'Algérie française de
regarder la réalité en face, et de reconnaître, une fois pour toutes,
tous les crimes contre l'humanité commis en Algérie entre 1830 et 1962,
particulièrement les massacres de mai 1945, au lendemain d'une seconde
guerre mondiale où les tirailleurs algériens, marocains et tunisiens
avaient contribué à libérer la France du joug des Nazis. Une exigence
officielle algérienne devenue réalité dès lors que la France officielle
avait plébiscité le fait colonial en février 2006 et souligné qu'il
s'agissait d'une oeuvre positive. Mais, durant ces derniers mois, de
plus en plus de voix officielles françaises commencent à s'élever pour
tordre le cou à certains tabous, et reconnaître certains massacres
commis en Algérie par l'armée coloniale française. L'exemple de
l'ambassadeur français à Alger qui a reconnu, plus que par le bout des
lèvres, les atrocités commises contre le peuple algérien au lendemain
de la fin de la seconde guerre mondiale à Kherrata, Sétif, Guelma
notamment, peut-il, en fait, absoudre la frilosité officielle française
à faire un pas en avant pour une vraie reconstitution de ce qui s'est
passé en Algérie ?
A Alger, pourtant, les milieux officiels
restent attentifs à ces ''bruissements politiques parisiens''. Le
président de la République s'est, par ailleurs, dit «extrêmement
attentif à toutes les voix qui s'élèvent en France» contre le déni de
l'histoire, tout en s'interrogeant sur l'»étrange révisionnisme» qui
s'est emparé de certains secteurs de l'opinion française.
»Nous sommes extrêmement attentifs à toutes les voix qui s'élèvent en
France pour rompre avec le déni de l'histoire, en particulier en ce qui
concerne le 8 mai 1945", a-t-il dit. Il s'agit là, en réalité, d'un
premier pas, important mais pas suffisant, vers la reconnaissance de ce
qui s'est passé en Algérie. Pour le président Bouteflika, ''ces voix
ouvrent la voie à une réconciliation véritable et durable entre les
peuples algérien et français», ajoutant que «depuis la reconquête de
son indépendance, il y a presque un demi-siècle, l'Algérie s'est
efforcée de construire, avec ses voisins et notamment avec la France,
des rapports de coopération et de partenariat fondés sur la proximité
géographique, l'intérêt mutuel et le respect de la souveraineté
nationale», a-t-il souligné. Une réconciliation entre l'Algérie et la
France est possible, il y a pour cela l'exemple des Allemands qui ont
reconnu les crimes des Nazis. Il s'agit, dès lors, pour la France
politique actuelle et à venir de faire ce geste si important et si
civilisé, de reconnaître ce qui s'est passé de ''moche'' dans cette
sauvage colonisation de l'Algérie, et le déni de l'identité de son
peuple pendant un siècle et demi. L'Allemagne a été forcée de
s'excuser, et la France s'est montrée bien aise. Pourquoi ne
condescend-elle pas, à son tour, de s'excuser pour le fait colonial et
l'asservissement de tout un peuple, le pillage de ses richesses et
l'effacement de son identité culturelle ? »Il est clair, cependant, que
le déni de l'histoire, cet étrange révisionnisme , qui s'est emparé de
certains secteurs de l'opinion française, ne contribue pas à
approfondir des relations qui devraient privilégier la construction des
solidarités du futur», a laissé entendre le président Bouteflika plus
que jamais favorable à une Vraie réconciliation entre les deux peuples.
.
.
Les commentaires récents