Tipaza, ville de Maurétanie césarienne.
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Située sur la cote, au pied du mont Chenoua, a l'extrémité des collines du Sahel, Tipasa a le charme que confère la proximité de la montagne et de la mer.
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L'HISTOIRE :
De 'son histoire on sait peu de chose ; on vient tout récemment d'acquérir la preuve qu'un comptoir carthaginois y était établi vers le cinquième siècle avant notre ère.. Il se trouvait aux abords du petit port actuel, là où, de nos jours, les pêcheurs tirent encore leurs barques à terre. Quelques tombes au mobilier intact lampes, poteries, verreries d'importation grecque et orientale, sont les plus anciens vestiges de la présence historique de l'homme. Plus tard, il faut descendre jusqu'au milieu du premier siècle de notre ère pour trouver une précision nouvelle : Tipasa était, en 40, ap. J. C., lorsqu'une province romaine, la Maurétanie Césarienne, remplaça le royaume de Juba et de Ptolémée, une colonie latine, tout comme sa voisine Icosium. (Alger), et elle fut élevée au rang de colonie romaine sous Hadrien ou Antonin, au milieu du deuxième siècle de notre ère, promotion que n'a peut-être pas connue Alger. Le silence à nouveau se fait sur son histoire, puis, avec le christianisme, elle reparaît à la lumière. C'est d'abord par le martyre de la petite Sakba, mise à mort pour avoir brisé une idole et dont le corps, retiré des flots, fut pieusement enseveli sur la colline qui domine la ville à l'Est. C'est ensuite le siège infructueux du révolté Firmus, qui, vainqueur à Césarée (Cherchell) et à Icosium (Alger), dut s'avouer vaincu à Tipasa (372 ap. J.C.). Ce furent les luttes entre les catholiques et les donatistes, où les premiers l'emportèrent. C'est l'invasion vandale, la fuite de la population en Espagne. dit-on, le martyre de quelques habitants qui étaient demeurés là : poing droit et langue coupés ; ils n'en continuèrent pas moins à proclamer leur religion. C'est sur' ce miracle que se clôt l'histoire ancienne de Tipasa qui fut, peut-être, réoccupée par les Byzantins et habitée, dans ses ruines, pendant des siècles, par des Berbères. Des Maures, expulsés d'Espagne, ne purent s'y maintenir à cause du voisinage incommode, du Chenoua..
Cette solitude et cet abandon expliquent la conservation des vestiges antiques et, aussi, jusqu'à présent, en dépit de certaines laideurs, la beauté du site.
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LES FOUILLES
Si l'on ne possède que de maigres renseignements sur Tipasa, cela
tient essentiellement à ce que les recherches archéologiques y ont
commencé seulement vers 1895 - trop tard malheureusement pour empêcher
bien des destructions et des actes de vandalisme. En 1859, d'après un
document officiel, quatre fours à chaux fonctionnaient sur l'ancienne
ville. On imagine de quoi ils s'alimentaient. Les premières fouilles
méthodiques furent faites en 1891 par Stéphane Gsell et l'abbé
Saint-Gérand. Elles furent interrompues assez brusquement - à la mort
de ce dernier et c'est seulement en 1913 que le Service des 'Monuments
Historiques entreprit d'une façon plus suivie des recherches sur ce
site. Depuis, elles ont été poursuivies avec une certaine régularité et
plusieurs monuments témoignent à l'heure .actuelle de l'importance et
aussi de l'intérêt dés vestiges de la ville antique.
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Louis LESCHI, Correspondant de l'Institut, Directeur des Antiquités de l'Algérie
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Le parc archéologique de Tipaza : Tipaza fut une des plus belles villes
résidentielles de la côte méditerranéenne; ses ruines témoignent de son
ancienne splendeur.
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Bien abritée par le Chenoua, cette ville-port, fut un site idéal, choisi par les Phéniciens sur la route des Colonnes d'Hercule (Gibraltar), pour établir un de leurs fameux comptoirs. Les vestiges de l'époque démontrent l'importance de Tipaza qui connut un essor remarquable sous le règne du souverain numide juba.ll. Tipaza devint le prolongement de Césarée, et il y fut créé un véritable foyer d'Art et de Culture gréco-latine, où fleurirent aussi des éléments de la culture numide
Au I er siècle de notre ère, sous le principat de Claudius, Tipaza devint colonie latine, pour se transformer, au II ciècle,en colonie romaine et s'agrandir vers l'ouest au dépend d'une ancienne nécropole .la muraille qui entourait la ville était longue de plus de 2 km. Tipaza fut aussi un des grands foyers du christianisme africain, religion nouvelle qui aura d'importantes répercussions sue la vie politique de l'époque. Les monuments religieux ,les basiliques et les inscriptions attestent de l'ampleur prise par le christianisme à Tipaza ,comme d'ailleur dans toutes les autres villes africaines.
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La partie la plus importante du parc archélogique est constituée par les ruines et monuments romains, mais il recèle aussi des vestiges de la période punique, qui datent des Ve et VI' siècles avant J.C. La localisation de la nécropole punique, en dehors de l'enceinte de la ville, laisse supposer que les dimensions de la ville, à cette époque, étaient importantes et que les Numides y trouvèrent des assises pour l'implantation d'un centre urbain, complémentaire de sol devenue Césarée, capitale de la Maurétanie césarienne... La porte monumentale de l'Ouest, appelée la a Porte Césarée nous montre l'intérêt porté par Juba Il a cette ville qui connut, sous son règne, une véritable splendeur. Comme toutes les villes romaines, Tipaza a deux rues principales le Decumanus Maximus et le Cardo.
Le Decumanus Maximus, part de la porte monumentale de l'Ouest et constitue un tronçon de la route qui reliait Césarée (Cherchell) à Icosium « l'île aux mouettes »(Alger). Le Cardo est la voie perpendiculaire, qui lait angle avec le Decumanus au centre de la ville; il se prolonge vers la mer. Cette voie, pavée de dallages, donne un aperçu souterrain des remarquables égouts et des canalisations. Du Cardo qui surplombe la mer, la vue est d'une extraordinaire beauté.
Le Decumanus Maximus
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Le Cardo
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L'entrée du parc archéologique 'Ouest' se trouve à l'Est des ruines, dans une rue parallèle à la route nationale. On accède au parc national archéologique de Tipaza à la hauteur des restes d'un imposant amphithéatre.
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LES MONUMENTS ET LEUR VISITE
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------Les monuments antiques les sites lès plus pittoresques de Tipaza se répartissent en deux ensembles distincts, situés de part et d'autre du village actuel :
- la colline de l'Ouest, du côté de Cherchell,
-la colline de l'Est -dite de Sainte-Salsa-, du côté d'Alger.
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1.-LA COLLINE OUEST-
côté Cherchell
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L'AMPHITHEATRE
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Theatre
Amphitheatre
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------Dès son entrée dans le parc national, le visiteur prend contact avec les restes d'un des plus vastes monuments de la cité antique : les arènes
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------Le sentier invite à s'engager dans le couloir de la porte orientale. En face de soi, on voit les trois mètres d'épaisseur de terres d'alluvions accumulés, tandis qu'à droite, au-dessus du mur vertical destiné à retenir les bêtes sauvages dans l'arène, des voûtes ruinées représentent les restes de supports des gradins sur lesquels s'entassaient les spectateurs venus assister aux jeux.
------Une deuxième porte,marquait l'extrémité Ouest du grand axe du monument long d'une centaine de mètres. Cette porte donne une idée des proportions de tout l'ensemble, malheureusement disparu. Elle fut obstruée précipitamment, aux époques d'angoisses, sans doute pour transformer l'amphithéâtre en une sorte de réduit défensif, par la construction de trois murs successifs, constitués avec des pierres prélevées sur le pourtour de l'arène et sur les environs immédiats : fragments d'arcs, fûts de colonnes et caissons funéraires y voisinaient.
------On sera sans doute surpris de voir, à la porte de l'Ouest, tant de caissons funéraires remployés dans les murs et dans les masses de maçonnerie : nous nous trouvons ici hors de l'enceinte primitive et en pleine nécropole païenne, désaffectée au moment de la création de l'enceinte extérieure et du développement de Tipaza dans la zone intermédiaire.
------On peut donc se demander, en voyant le petit columbarium dégagé au sud de la porte occidentale, s'il s'agit encore d'un simple remploi, ou si, au contraire. on ne se trouve pas à l'endroit où étaient déposées les urnes contenant les cendres des gladiateurs tués dans l'arène.
------On ne peut non plus donner actuellement une explication définitive du couloir qui se trouve au nord de la porte et de l'aqueduc paraissant déboucher dans l'arène : peut-être s'agit-il d'une canalisation ayant permis d'inonder cette dernière et d'y donner des joutes nautiques ?
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LES TEMPLES ET LE DECUMANUS
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------Si l'on monte sur un talus remplaçant les supports des gradins de l'arène, immédiatement au nord de la porte occidentale de l'amphithéâtre, on découvre un ensemble impressionnant, enserré dans un écrin de verdure : au premier plan, le " Temple Anonyme, et, au fond, le " Nouveau Temple "" dont le magnifique escalier aux pierres dorées ne conduit plus qu'à un décor sylvestre. Entre les deux, se devine la voie décumane sur laquelle ils s'ouvraient : c'est là que nous irons pour les voir et pour les mieux comprendre.
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------Le decumanus maximus, axe principal de la ville (découvert en 1949), n'est autre, en réalité, que la grande route côtière venant de Caesarea (Cherchel), capitale de la Province : on voit immédiatement à quel état d'usure fut réduite l'une des principales voies impériales de Maurétanie dont le dallage a disparu en de nombreuses places et où les roues des chars étaient contraintes de sauter de dalles arrondies en ornières creusées dans le rocher. Quel contraste entre cet état de désagrégation, symbole de l'empire romain du Ve siècle, et le sens de la grandeur qui avait inspiré la construction de ce point central de la ville, trois siècles plus tôt !
---Le decumanus avait été bordé ici par deux portiques : des marches de différentes hauteurs en permettaient l'accès depuis la voie.
---La beauté majestueuse de l'ensemble, due surtout à l'équilibre des proportions, se complétait, du côté Ouest, par la présence d'un arc monumental quadruple, dont les piédroits et de nombreux motifs décoratifs ou architecturaux viennent d'être retrouvés. Par les deux grandes ouvertures centrales, correspondant à la voie, circulaient les voitures ; les piétons empruntaient les passages latéraux faisant suite aux portiques extérieurs des temples.
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------Le Temple Anonyme donnait sur le portique Sud du decumanus par trois portes ouvrant sur une cour à triple portique ; les bases de colonnes sont encore en place au-dessus de deux marches intactes. Du temple lui-même, il ne reste que le soubassement et le départ de l'escalier d'accès à la cella, masse rectangulaire sur laquelle s'élevait le Temple proprement dit, et où était conservée la statue de la Divinité ; une jambe colossale de marbre y a été découverte.
--Quant à l'autel des sacrifices, situé au centre de la cour, il a disparu ; seules ses fondations viennent d'être retrouvées.
Un portique a été accolé tardivement à l'extérieur du temple, du côté Ouest, en bordure du cardo, découvert en 1951, le long duquel il était construit.
---On est immédiatement frappé par la différence de conservation que présente le Nouveau Temple ; plus de quatre mètres de dénivellation séparent les parties dégagées que l'oeil peut embrasser aujourd'hui dans leur magnifique ensemble et qui font l'orgueil des nouvelles fouilles.
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---Tandis que le visiteur circule sur le beau dallage du decumanus, l'écrin de végétation luxuriante entourant le grand escalier lui donne le niveau du sol en 1948. Aucun mur, aucun pilier, aucune pierre ne laissaient alors deviner l'ensemble actuel que, seul, décelait la densité du fourré impénétrable de lentisques dû au dallage sous-jacent et à l'humidité relative qu'il conservait à la végétation arbustive.
------Comme le Temple Anonyme, le Nouveau Temple s'ouvrait par trois portes sur le portique de la voie décumane. Comme pour lui, une belle cour précédait l'escalier montant au temple proprement dit. Comme pour lui encore, un portique intérieur entourait la cour sur trois côtés. Mais, ici, la cour était magnifiquement dallée et l'escalier, presque in-tact, peut donner une idée de ce que fut celui du Temple anonyme. L'autel des sacrifices a disparu, mais son emplacement se retrouve à une réfection du dallage exécutée à l'endroit où il s'élevait.
---L'escalier monumental, flanqué de deux perrons, permettait d'accéder à un portique surélevé présentant sans doute un front de quatre colonnes dont un chapiteau, déposé à droite de l'escalier, donne idée des dimensions.
---Quant à la salle s'ouvrant sur ce portique - ou aux salles, si le temple était consacré à plusieurs divinités, elle était en dehors des limites de l'actuel Parc national.
---Le Temple, désaffecté, fut utilisé à des fins différentes, ce qui n'en simplifie pas la compréhension pour le visiteur pressé.
---Le côté du portique opposé à l'escalier servit à faire la nef latérale droite d'une basilique : une colonnade à éléments cruciformes la séparait - comme la nef gauche du très large vaisseau central.
---Mais la forme allongée d'une basilique nécessitait l'abatage d'un des murs latéraux de la cour du temple : la basilique déborda du côté droit à l'extérieur de l'aire païenne.
---La demi-abside actuellement visible, ainsi que la petite chambre aménagée à l'Est, appartiennent vraisemblablement à la crypte du monument. Un certain nombre de lampes chrétiennes y a été retrouvé.
---Mais les deux ensembles, temple et basilique, superposés dans l'espace comme ils le furent dans le temps, et faciles à comprendre maintenant que les fouilles en sont achevées, disparaissaient sous une épaisse couche de terre, de cendres, de charbon, et de blocs épars mordus autrefois par le feu. Ils étaient surtout encombrés par une multitude déroutante de petites chambres, ayant utilisé comme appuis pour leur construction les murs et les piliers, tant qu'il y en eut de disponibles ; puis les chambrettes avaient envahi presque toute la cour dallée et le portique du decumanus. Balances, poids, grands dolia à huile et à grains, jarres et amphores à vin, outils de fer, mortiers et pilons, dépôts de blé carbonifié par les siècles, témoignaient de la transformation en marché des édifices sacrés qui l'avaient précédé avant d'être détruits. Quelques-uns des magasins du marché ont été conservés comme témoins.
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DES TEMPLES AU FORUM
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-----Deux chemins se présentent :
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---a) Si l'on ne craint pas d'allonger le trajet de 200 mètres environ, on prendra le sentier (jaune) qui s'amorce entre le nouveau temple et les restes de l'arc du decumanus ; on descendra dans un cadre romantique d'essences méditerranéennes au milieu duquel se dressent quelques ruines, jusqu'à ce que l'on rencontre, sur la droite, un autre sentier (marques rouges). On traversera la cour d'une maison particulière qui donne, en quelque sorte, une synthèse de Tipaza : dans cette cour très ruinée, on a laissé subsister les quelques pins et oliviers qui, tout en conservant la beauté du site, laissent encore imaginer ce que fut le coeur de cette habitation aujourd'hui envahie par la végétation.
-On continuera de suivre le sentier (marques rouges) en traversant perpendiculairement l'allée qui conduit vers la mer.
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---b) On aurait gagné du temps en se contentant de prendre, à l'angle Ouest du Nouveau Temple, l'allée descendant vers la mer et en quittant cette allée au bout de 80 mètres pour prendre, à droite, un sentier (marques rouges).
-Le sentier s'élève en traversant d'abord une zone de gros blocs effondrés ; un peu plus loin, il contourne la base intacte d'un bastion avec des assises d'énormes pierres surmontant le rocher taillé verticalement. Il est à peu près certain que l'on se trouve là en présence d'un des restes de l'enceinte primitive qui entoura le promontoire du Forum, jusqu'au milieu du IIe siècle, - époque où elle fut remplacée par la vaste enceinte dont on verra notamment la jonction avec les falaises : du côté Ouest, à la poterne de la grande basilique Chrétienne, et, du côté Est, à la limite du cimetière chrétien de Sainte-Salsa.
-Depuis une belle habitation (en cours de fouilles), on découvre à gauche, en avant de la masse du Chénoua qui s'avance longuement dans la mer, le promontoire de l'Ouest, sur lequel se dresse la cathédrale.
-Puis on s'élève doucement au milieu d'un maquis de lentisques, de pins et d'oléastres rabougris ou courbés par les vents pour atteindre l'angle Nord-Ouest du Forum.
--Cœur de la cité antique, occupant une position centrale et élevée de la ville primitive, le forum montre son dallage parfait, long de 50 mètres, parmi les armoises, les lentisques, les oliviers sauvages et la végétation qui, sans cesse, voudrait en reprendre possession.
--En dehors de ce dallage intact, où l'on voit encore la trace des anneaux servant à dresser les tentes des marchands et les caniveaux d'écoulement des eaux de pluie, le reste a cruellement souffert du temps et plus encore des hommes : presque tout ce qui était utilisable a disparu. Du portique qui l'entourait sur trois côtés, il ne reste qu'un fragile témoignage. Des colonnes qui dominaient l'aire à ciel ouvert et portaient les toitures des galeries, il ne reste rien ; rien non plus des bases des statues aux empereurs ou aux personnalités de la ville. Et il faut faire preuve d'une grande imagination pour se représenter, sous le portique de l'Est, la Curie, grande salle ornée de marbre où siégeait l'Ordre des Décurions, conseil municipal de la cité, et, un peu plus au nord, la tribune d'où les orateurs et les hérauts haranguaient le peuple.
--Du Capitole, qui servait de fond au petit côté du forum en dominant ville et mer de sa masse imposante, il reste seulement les assises monumentales de l'escalier et le sou-bassement des trois chapelles accolées. Les lentisques géants ont heureusement remplacé certaines masses architecturales disparues, et la Méditerranée offre entre les pins des échappées admirables sur les criques rocheuses et sur la baie du Chenoua.
--A l'opposé, le squelette d'un escalier double, sur lequel se dresse un olivier tordu, sert de premier plan au petit port moderne, successeur du port antique vers lequel il permettait de descendre.
--Revenant vers l'Ouest, on franchira la voûte restaurée d'un crypto-portique, et l'on arrivera à l'escalier permettant d'accéder obliquement à la basilique judiciaire.
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LA BASILIQUE
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---C 'est un édifice à trois nefs, long d'une quarantaine de mètres. Au fond, s'ouvre, entre deux pilastres, une abside à laquelle on accédait par trois marches et qu'une grille isolait de la nef principale. Deux salles latérales flanquaient l'abside : chacune d'elles contenait une statue dont la trace du socle est encore visible sur le sol.
---Annexe couverte du forum les jours où les intempéries invitaient à s'y abriter, la basilique civile jouait à la fois le rôle de " Chambre de commerce ", de " Bourse " où se discutaient les affaires, et de Tribunal. Dans ce cas, les magistrats prenaient place dans l'abside, et la superbe mosaïque gui couvrait le sol devait contribuer puissamment à rehausser le prestige du représentant de l'autorité impériale. Cette mosaïque sera transportée au musée de Tipaza.
---Au centre d'un bel ensemble décoratif dont il éclipse tous les détails par son puissant réalisme, un tableau carré représente trois captifs accroupis, les mains liées : un homme découragé ayant déposé son bouclier, une femme prostrée et un enfant au visage affligé. Douze petits cadres disposés autour du motif principal enferment des têtes d'hommes et de femmes, types de ces autochtones et de ces Maures
---La basilique civile fut utilisée comme basilique chrétienne : un chapiteau orné du monogramme du Christ, d'une part ; les empreintes creusées dans le béton de 1a nef centrale, devant l'abside, pour y fixer les pieds de la table en bois constituant l'autel, d'autre part, en sont les preuves incontestables.
---Cette réutilisation d'une basilique civile est un fait très rare. Et, cependant, les chrétiens adoptèrent presque immédiatement pour leur culte le type, la forme et le nom de ces bâtiments classiques dont la construction ne posait aucun problème nouveau aux maçons comme aux charpentiers : il convenait admirablement aux besoins subits d'une collectivité sortant brusquement de la clandestinité pour affirmer sa foi au grand jour, en présence de son chef, l'Evêque, auquel l'abside surélevée fournissait la place correspondant à son rang spirituel par rapport aux fidèles placés dans les nefs.
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LE FORUM, LE CAPITOLE, LA CURIE ET LA BASILIQUE
Cet ensemble, découvert en 1914-1916, couronne la colline centrale qui s'appelait, dans l'Antiquité, la colline des Temples.
Une place de 50 mètres sur 27, au dallage intact, et encore bordée de son caniveau d'écoulement' des ,eaux, le Forum occupe le centre d'un groupe de monuments et forme le cœur de la vie civile de la petite cité. A l'Est, précédé d'un perron qui servait de tribune aux harangues, c'est la Curie, siège du Conseil Municipal ; au Nord, c'est le soubassement d'un Capitole, à trois chapelles : Temple de Jupiter, Junon et Minerve, ;à l'Ouest, en contrebas de quelques marches et au delà d'une galerie couverte ou cryptoportique, c'est une basilique civile, tribunal et siège de la vie économique. Une belle mosaïque représentant des Maures captifs en ornait l'abside. Au Sud, enfin, le Forum donnait sur la ville 'étendue à ses pieds 'et un vaste escalier monumental à deux rampes permettait d'y accéder.
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Plus à l'OUEST de la BASILIQUE
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---Nous sortirons de la basilique à gauche de l'abside, et nous nous dirigerons vers la mer en laissant à droite les énormes assises des trois cellae du Capitole (sentier vert). Nous ne pourrons, au cours d'une visite rapide, voir tout un ensemble de constructions qui s'étageaient en dominant la baie du Chénoua et notamment, à une centaine de mètres à droite, les ruines d'une maison contenant les restes d'une chapelle chrétienne dont l'abside est bien conservée. La majeure partie de la colline n'a pas été fouillée : on y voit surtout les vestiges de quelques vastes citernes ou de murs, encore anonymes.
---Le sentier longe le bord de la mer puis traverse une rue et une demeure : on y remarquera les chambres ouvertes sur un portique entourant la cour dans laquelle s'ouvrent deux citernes béantes ; on retrouvera plus difficilement l'emplacement des salles ou terrasses qui dominaient la mer et que les tempêtes ont rongées petit à petit.
---Un peu plus loin, on verra l'aboutissement de deux égouts taillés dans le rocher et l'on arrivera, à travers les armoises, à un petit ensemble de fouilles déjà anciennes ayant incomplètement mis au jour un établissement industriel et des petits thermes.
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ETABLISSEMENT INDUSTRIEL
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Fabrique de Garum
Fabrique de Garum
Le garum, ou liquamen
(qui veut dire « jus » ou « sauce » en latin) était une sauce, le
principal condiment utilisé à Rome dès la période étrusque et en Grèce
antique. Il s'agissait de poisson ayant fermenté longtemps dans une
forte quantité de sel, afin d'éviter tout pourrissement. Il entrait
dans la composition de nombreux plats, notamment à cause de son fort
goût salé.
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---Quatre cuves profondes, carrées avec des angles arrondis, construites en maçonnerie et alignées au pied d'un bassin rectangulaire que dominait un château d'eau, aujourd'hui à moitié basculé sur la partie des thermes qui lui servait de support ; une aire bétonnée où se voient les bases des charpentes de hangars (dont un abritait les cuves) ; tel est l'aspect d'un petit établissement industriel. Il contenait un certain nombre de grandes jarres intactes, dont plusieurs ornent aujourd'hui le musée-jardin ; quantité de débris de poterie gisaient autour.
---On peut d'ailleurs espérer que l'élargissement des fouilles d'autrefois permettra de définir plus exactement les productions de cet établissement industriel.
Pres de la Fabrique de Garum
Pres de la Fabrique de Garum
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PETITS THERMES
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---Juste au Nord se dressent les restes de petits thermes, partiellement fouillés et bien détériorés. Situés sur le trajet de l'égout venant du decumanus et allant, peu après, se jeter dans la mer, ces thermes possédaient de vastes bassins permettant d'accumuler l'eau nécessaire à leur alimentation.
---Ils comportent, malgré leurs dimensions restreintes, toutes les normes de thermes classiques : piscines et chambres chauffées, tièdes ou froides, se distinguent sans trop de difficultés à travers les buissons et les débris qui les encombrent, laissant apercevoir, de-ci de-là, quelques restes de mosaïque commune et grossière.
---L'achèvement des fouilles de ces thermes et leur présentation seront entrepris dès que le programme des travaux en cours le permettra.
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LES THERMES
Tipasa en possède au. moins quatre les grands Thermes, en bordure du Parc Trémaux, et dégagés seulement en partie ; les petits Thermes, au bord de la mer, à l'ouest de la crique, ; d'autres encore, en. arrière du 'bâtiment. industriel aux quatre cuves. Le dernier enfin, à côté du baptistère chrétien., Sans avoir,. même pour les premiers, qui, d'ailleurs, étaient publics, l'ampleur des établissements de Cherchel, de Timgad et de Djeniila, ils sont intéressants par leur état de conservation et la disposition du système de chauffage à air chaud.
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THERMES PRIVES
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---En continuant vers l'Ouest, on passe sous des oliviers sauvages couchés par les vents du large et on longe une crique charmante qui servit malheureusement - sous les Barbaresques - à embarquer les pierres prélevées sur les ruines pour les constructions de la région d'Alger. L'étroit sentier bordé de lentisques, débouche sur un rivage rocheux et permet de voir des petits thermes privés.
---Sans doute sont-ils de construction tardive et assez médiocre. Mais ils offraient dans un espace réduit, au riche propriétaire de la maison voisine, tous les bienfaits des thermes romains les plus vastes. On remarquera la salle de chauffe avec son entrée séparée, les fourneaux à charbon de bois placés sous les baignoires chaudes (l'une quadrangulaire, précédée de trois marches, et l'autre semi-circulaire), les salles de sudation dont le sol était supporté par des piles de briques entre lesquelles circulaient les flammes et les gaz chauds avant de s'élever dans la double cloison de poterie des murs, afin de porter le caldarium à la température voulue. Enfin, à quelques mètres, le frigidarium montre sa piscine froide et sa salle rectangulaire pourvue d'une banquette où l'on pouvait s'asseoir. Une baignoire tiède ou chaude, en quart de cercle, utilisait un recoin disponible, tandis que les latrines étaient situées un peu plus loin.
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COLLINE DE L'OUEST : GRANDE BASILIQUE CHRETIENNE
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---Deux sentiers s'offrent ici au visiteur pour escalader la colline de l'Ouest.
---L'un (marques vertes) suit de très près le littoral abrupt : il permet de voir les restes de pans de murs antiques, sapés par les grandes tempêtes, et d'admirer l'étonnante transparence de la mer où les fragments architecturaux servent de support aux algues et aux oursins.
---L'autre (rouge) gravit d'abord l'escalier par lequel on accédait aux thermes privés et décrit quelques lacets parmi les armoises.
---Tous deux débouchent sur une vaste plateforme limitée sur deux côtés par les falaises abruptes et par la muraille d'enceinte de la ville. Cette plateforme est presque entièrement occupée par la cathédrale de Tipaza, le plus vaste édifice chrétien de l'Algérie antique (52 mètres sur 42), et par ses différentes dépendances.
---Construite sans doute au IVe siècle, avec des éléments architecturaux prélevés sur divers édifices païens, - ce qui explique en partie l'état de destruction du Capitole ou des temples, - la cathédrale occupa la totalité de l'espace qui s'offrait aux constructeurs : à l'ouest, son porche est appuyé au rempart de la ville, tandis que, à l'est, l'abside, construite sur une pente proche des falaises, était soutenue par de forts soubassements. L'intérieur a été partagé primitivement en sept nefs séparées par des piliers en pierre (qui, d'ailleurs, ne sont pas disposés symétriquement et ne correspondent pas exactement entre eux). La nef centrale était très large. Aussi éprouva-t-on le besoin, sans doute pour diminuer la portée des pièces de charpente, de la diviser en trois parties séparées par des colonnes : la cathédrale eut alors neuf nefs. L'emplacement du siège épiscopal, au fond de l'abside, dont il ne reste que l'amorce, a aujourd'hui disparu.
---Le vaisseau central était entièrement revêtu d'une mosaïque ornementale dont les motifs se répétaient à l'infini : tresses colorées formant des carrés, entourant des lignes de petits triangles enfermés dans des filets. Il reste peu de chose des 700 mètres carrés que représentait cette mosaïque construite sans doute un peu rapidement, sur laquelle ont été posés, à même, les piliers des nefs centrales, et que la dégradation du temps et des hommes - limitée seulement aujourd'hui - ont soumise à une terrible épreuve. Mais, à certaines époques de l'année, des milliers de petites pâquerettes et de fleurs minuscules viennent se substituer aux cubes de marbre disparus pour constituer le tapis le plus délicat et le plus ravissant (photo 22).
---Pour les nefs latérales, le sol était simplement bétonné. Les rangées de piliers et d'arceaux, de hauteurs décroissantes en allant de l'intérieur vers l'extérieur, soutenaient des toits inclinés, dont les tuiles étaient supportées par une charpente.
---Au nord de la basilique, s'étendaient les dépendances destinées à l'exercice du culte et aux besoins du clergé.
---Tout d'abord une chapelle, réduite à une seule nef, destinée à la confirmation des fidèles qui venaient d'être baptisés : le consignatorium.
---On peut voir, quelques mètres plus loin, une salle oblongue. La partie Ouest, carrée, contient le baptistère. Elle était pavée autrefois d'une mosaïque ornementale, transportée au Musée d'Alger : une inscription en vers y recommande à ceux qui veulent acquérir la vraie science de la vie, de venir se laver ici dans l'eau du baptême, don céleste. La partie Est, aujourd'hui détruite, se terminait par une abside et contenait une mosaïque représentant des oiseaux, des fruits et des poissons.
---Plus au nord, des thermes, dont on peut voir l'ouverture des chaufferies et une piscine, avaient sans doute pour dessein de laisser seulement des corps purs approcher du sacrement purificateur du baptême.
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TOUR CYLINDRIQUE ET DU NORD-OUEST
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--- A l'ouest de la basilique, la muraille d'enceinte de la ville, partiellement dégagée seulement, montre bien la façon dont elle a été sapée et basculée pendant l'occupation vandale (photo 21, p. 42).
--- Les restes d'une puissante tour cylindrique marquent l'angle nord-ouest de l'enceinte : on y remarquera le départ de l'escalier hélicoïdal intérieur et des deux arcs qui soutenaient cet escalier.
--- A l'est de cette tour, la muraille obliquait presque perpendiculairement pour venir aboutir aux falaises à pic.
On traversera l'enceinte par la poterne découverte autrefois, mais dont les fouilles récentes montrent bien les marches de descente, le banc de repos du corps de garde, et l'étroit sentier, serré entre la falaise et la tour qui le commandait .D'un côté du rempart s'étendait la ville, de l'autre la vaste nécropole de l'Ouest.
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HYPOGEES ET MAUSOLEE CIRCULAIRE
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--- La partie supérieure de la falaise est toute creusée de cavités. Les unes sont de courts puits verticaux et constituaient des caveaux taillés dans le roc. Les autres sont de véritables hypogées, de types variés. Ces hypogées ont leurs ouvertures dans la partie verticale, face à la mer.
--- Du point le plus haut du promontoire de l'Ouest (à une cinquantaine de mètres de la poterne), on a une vue splendide sur la côte profondément entaillée par la mer. On domine aussi les restes d'un monument, d'une vingtaine de mètres de diamètre, connu sous le nom de mausolée circulaire. C'était en réalité un ares à ciel ouvert dont le mur, vraisemblablement bas, se décomposait du côté interne en quatorze arcosolia dont chacun abritait un sarcophage. Si celui de l'Est est le mieux conservé, celui du Sud (en face de la porte du monument) contenait un sarcophage de marbre brisé, dont l'angle gauche a été transporté au musée-jardin Trémeaux.
--- Il n'est pas impossible qu'il y ait une relation étroite entre ce monument funéraire construit pour recueillir les restes de quatorze personnages précédemment ensevelis ailleurs, et les hypogées voisines. Un rapprochement avec ce que nous allons voir dans l'area de la basilique d'Alexandre permet de se demander si les corps, primitivement cachés dans les hypogées pendant la période de lutte et de souffrance de l'Eglise, n'ont pas été transférés dans l'area circulaire au moment du triomphe du christianisme.
--- Ici, comme pour toutes les areae, de nombreux fidèles ont cherché à être ensevelis, ou à ensevelir les leurs, le plus près possible des tombes de personnages vénérés : et les sarcophages se sont entassés à l'intérieur comme à l'extérieur du monument.
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At Mausolée romain
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DU MAUSOLEE CIRCULAIRE A LA BASILIQUE DE L'EVEQUE ALEXANDRE
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--- On a le choix entre deux sentiers : celui aux marques rouges, le plus direct ; et celui aux marques vertes, qui permet de zigzaguer dans la nécropole envahie par une végétation touffue de lentisques, de palmiers nains et de pins couchés par les vents marins.
--- Je conseillerai aux visiteurs peu pressés, de suivre le sentier rouge au départ et le sentier vert au retour.
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NECROPOLE DE L'OUEST - BASILIQUE D'ALEXANDRE
- CATACOMBE DES EVEQUES - ENCLOS DES MARTYRS
Entrée des catacombes, fermées au public pour protéger les fresques s'y trouvant
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Nous sommes ici sur le site du cimetière
chrétien (en pierres), qui se superpose à un cimetière phénicien
antérieur (en briques). Le sol est constituée d'une terre meuble et de
roches douces, rongé par la mer au nord, et dilluvé par les pluis au
sud. Lorsqu'on y prête attention, on remarque que le sol est jonché
d'ossements humains, ici un morceau de bras.
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--- Après avoir traversé une partie de la vaste nécropole de l'Ouest, on arrive brusquement devant un ensemble qui constitue le plus saisissant témoignage du culte des reliques entre le IIIe et le Ve siècle.
--- Il ne faut pas encore s'attarder à regarder la basilique de l'évêque Alexandre, que l'on comprendra mieux dans un instant : il faut immédiatement se diriger vers l'angle Nord-Est, où se découpe l'entrée obscure d'une grotte taillée dans le roc en forme de chambre funéraire. Dans cette catacombe saisissante, où la lumière tombe verticalement par un étroit lucernaire, nous voyons au fond, sous le rocher transformé en niche cintrée, un tombeau qui servit d'autel. A ses pieds, dix sarcophages taillés dans le roc. Là reposèrent, pendant un temps, les corps des premiers dignitaires de l'Eglise locale persécutée.
--- Autour de cette grotte, s'étend un enclos funéraire (area), où, dès l'époque des persécutions, on ensevelit à proximité de la cachette vénérée des " Justes ", les martyrs de la nouvelle Foi qui les avaient suivis dans la mort. Certains sarcophages étaient surmontés par des mensae, tables d'agapes funéraires où les fidèles se réunissaient aux jours anniversaires pour honorer les plus vénérés et les martyrs. Un portique recouvrit ensuite une partie de l'area, puis, vers l'an 400, l'évêque Alexandre fit construire, immédiatement au nord de l'hypogée, et en pleine area, une basilique dont la forme fut imposée par ce qui existait. On y ensevelit, sous une estrade rectangulaire occupant le chevet, les neuf principaux dignitaires : la mosaïque qui recouvrait les sarcophages (aujourd'hui au musée d'Alger) ne laisse aucun doute sur cette translation honorifique.
---- Alexandre lui-même reposait à l'opposé du chevet, et trois sarcophages sont venus se placer sous sa protection immédiate, dans la contre-abside. Une partie des mosaïques qui recouvraient entièrement le sol de la basilique de l'évêque Alexandre, a été transportée cm musée d'Alger (salle chrétienne). Des fragments de mosaïques communes ou dont l'ensemble était détruit, ont été laissés sur place.
--- En quittant la basilique, mais toujours à l'intérieur de l'area, on verra, à 20 mètres au sud de la contre-abside, l'entrée d'une autre caverne funéraire artificielle dans la-quelle on descendra. On sera saisi par son caractère poignant : autour de quatre sarcophages noyés dans le sol et occupant la position centrale, se voient douze alvéoles funéraires rayonnantes. Des restes de peinture primitive subsistent sur certaines parois de la catacombe.
--- Enfin, vers le nord, un escalier de quelques marches, situé entre une chambre voûtée et un puits, donne accès à une area rectangulaire entourée par un mur de pierres de taille. Quatre-vingts sarcophages y reposent. Mais les tombes les plus vénérées, celles des martyrs des persécutions du IIIe siècle, ont été recouvertes par des tables d'agapes.
--- Et tout autour de cet ensemble, les tombes sont venues se serrer pour se mettre sous la protection de ceux qui leur avaient tracé la voie à suivre, comme nous le verrons à la basilique de la porte orientale et à celle de Sainte-Salsa.
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DE LA BASILIQUE DE L'EVEQUE ALEXANDRE AU THEATRE
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--- On a le choix, pour revenir de la basilique à la poterne du Nord-Ouest, - par laquelle il faut repasser pour pénétrer à nouveau dans la ville antique, - entre celui des deux sentiers (marques rouges ou vertes) que l'on n'a pas utilisé à l'aller.
On longera, à l'intérieur, le mur d'enceinte portant encore les traces de la destruction vandale. A l'angle Sud-Ouest de la cathédrale, on suivra le sentier aux marques bleues : il permet de voir au passage quelques coins très beaux, typiques de ce mélange intime de végétation luxuriante et de restes antiques. Servant de premier plan à des sites spécifiquement méditerranéens. On ne manquera pas, en passant à côté de la piscine d'une maison privée, de jeter un premier coup d'oeil d'ensemble sur le théâtre
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LE THEATRE
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Théâtre romain
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---Le théâtre de Tipaza n'est ni le plus grand, ni le mieux conservé de ceux que l'on peut admirer en Algérie : c'est, incontestablement, le plus charmant et celui dont les proportions sont les plus heureuses comme les mieux équilibrées.
---Sans doute, des oliviers et des plantes grasses ont-ils remplacé les gradins enlevés précipitamment en 1847 pour construire à Marengo un hôpital de cholériques : son caractère s'en harmonise peut-être mieux encore avec un cadre de verdure magnifique auquel la masse du Chénoua sert de fond.
---Comme dans tous les théâtres romains, nous retrouvons ici la fosse de scène avec ses piliers ayant servi de supports à la charpente du plancher ; nous trouvons le mur en briques qui bordait la scène et dont les saillants et rentrants (de section demi-circulaire ou rectangulaire), autrefois recouverts d'un placage de marbre, servaient non seulement à séparer la scène de l'orchestre, mais encore à améliorer l'acoustique en brisant les échos.
---Le mur de scène qui, du côté Nord, fermait l'édifice, a été déménagé pierre par pierre, comme les gradins ; il n'en reste que juste assez pour permettre de rétablir le plan de l'édifice. Les statues et tout le décor architectural ont disparu. Par contre, les larges couloirs dallés conduisant des entrées latérales à l'orchestre, les beaux piliers qui soutenaient les voûtes supportant les gradins supérieurs, les quatre escaliers extérieurs conduisant à la galerie médiane de circulation et d'où les spectateurs montaient ou descendaient pour rejoindre leur place, conservent à ce théâtre mutilé un aspect de noblesse.
---Mais la grande particularité du théâtre de Tipaza, c'est qu'il n'a pas utilisé la forme naturelle d'un mouvement de terrain pour s'y tailler un emplacement facile et y asseoir ses gradins. Nous nous trouvons en présence du seul théâtre d'Afrique du Nord, avec celui de Madaure et celui de Sabratha en Tripolitaine, où le monument a été construit sur un noyau entièrement artificiel : ici, sur une masse de blocage pour les gradins de la moitié inférieure et sur des arcades ou des voûtes (rappelant celles des amphithéâtres classiques) pour les gradins de la partie haute.
---Plus vaste que les théâtres de Djemila ou de Timgad, malgré l'impression de grandeur majestueuse que donnent ceux-ci depuis leur adroite restauration, le théâtre de Tipaza était fait pour contenir de trois mille à quatre mille spectateurs.
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LE THÉÂTRE
Ce même souci esthétique appairait dans le théâtre, voisin 'du nymphée. L'édifice, au lieu d'être adossé à une colline comme tous les autres théâtres antiques de l'Afrique du Nord, excepté ceux de Madaure et de Sabratha, en Tripolitaine, a été construit en élévation. S'il n'avait servi de carrière pour la construction de l'hôpital de Marengo, nous aurions sans doute encore les 25 rangées de gradins qu'il devait compter à l'origine, le mur de scène et, les dépendances. Tel qu'il est, avec ses arceaux du rez-de-chaussée, ses voûtes, à demi-ruinées, qui supportaient les gradins supérieurs, les escaliers menant au premier étage, les, couloirs d'accèsà l'orchestre,, le mur qui supportait la scène et la fosse profonde de celle-ci, ce théâtre, de 3.000 places environ, reste, sous -sa couronne d'oliviers et dans son cadre de verdure et de montagne, un des monuments les plus évocateurs de Tipasa.
L'AMPHITHÉÂTRE
Amphithéâtre
Amphithéâtre
Un autre monument important était les arènes. contiguës au temple du ',parc Trémaux. Des sondages faits en 1916 ont révélé des, couloirs souterrains qui semblent attester la bonne conservation des .sous-sols, si intéressants dans les édifices de cette catégorie. On vient d'en avoir' une preuve à LambèseBien qu'on puisse craindre que l'amphithéâtre ait' en partie~ connu le sort du théâtre et servi de carrière. on peut imaginer qu'il en subsiste encore assez poufo former un bel ensemble.
Bas relief représentant un cavalier, près de l'amphithéâtre
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LE NYMPHEE
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LE NYMPHÉE
Le nymphée de Tipasa (IVè AD):
C'était une fontaine imposante, d’où l’eau ruisselait en cascades, sur
les marches, entre les colonnes de marbre. Considéré comme le plus beau
d’Afrique du Nord.
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Sur le même alignement que le temple, alignement fait par la voie romaine qui conduisait à Cherchel et qui est ici enterrée, se dresse, vers l'ouest, un hémicycle à colonnes et bordé de bassins, qui est un château d'eau ou nymphée. C'est une fontaine monumentale placée à l'arrivée dans la ville de l'aqueduc qui amenait l'eau d'une source située à plusieurs kilomètres au sud-ouest. Décoré de statues, entre lesquelles l'eau tombait en cascade, c'est un des plus beaux monuments du même genre qu'on ait retrouvé en Afrique. Il atteste le désir des habitants de décorer leur ville d'une façon monumentale et jolie à la fois.
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---Au bord de la magnifique voie décumane se dressent les restes d'un nymphée : fontaine monumentale, théâtre d'eau, édifice consacré aux Nymphes, seules capables en cette terre d'Afrique de donner aux hommes fraîcheur, vie et richesses.
---Déblayé, ce monument ne montre ses très belles proportions que depuis 1950: il est possible aujourd'hui de le voir sous l'angle sous lequel il devait être vu en circulant sur les dalles profondément usées par les charrois allant de l'ouest à l'est, de la capitale Caesarea (Cherchel) vers Icosium (Alger).
----Théâtre par sa forme, le nymphée présente une acoustique étonnante : l'eau y cascadait sur les marches de l'hémicycle, entre des colonnes de marbre bleuté du Chénoua et des statues, et jouait en chantant avant de retomber dans les bassins inférieurs. Malgré la mutilation de la partie haute et la disparition de tout le placage en marbre polychrome, dont seuls quelques fragments ont été retrouvés, c'est encore un des plus beaux monuments africains de ce genre.
---On voit, en arrière du Nymphée, les restes des piliers en pierres de taille qui supportaient à plusieurs mètres au-dessus du sol une conduite creusée dans la pierre : cette conduite reliait une canalisation demi-circulaire à ciel ouvert (visible à l'extérieur, en haut et à droite du nymphée) à la partie supérieure de l'ouvrage de répartition des eaux de la ville, situé un peu en arrière. Le répartiteur, dominant une profonde chambre de décantation d'où partaient diverses canalisations, constituait en fait l'extrémité d'un aqueduc long de plus de 10 kilomètres. Il amenait les eaux du Sud-Ouest en suivant un tracé très étudié où les couloirs souterrains, largement pour-vus de bouches d'aération et de nettoyage, alternaient avec une canalisation supportée soit par un remblai, soit par de
petites arcades.
---Immédiatement à l'est du Nymphée, on voit les piédroits d'un arc triple qui enjambait le decumanus : arc orne-mental complétant la placette demi-circulaire de la fontaine, il devait en outre avoir un caractère utilitaire. Tout semble prouver qu'il servait de support à une canalisation d'eau franchissant ici la voie pour alimenter la partie Nord de la ville.
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La Basilique civile
NPres de la Basilique civile
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DU NYMPHEE AUX TEMPLES
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---Pour regagner la sortie, depuis le Nymphée, on a le choix entre trois solutions :
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----a) Voie décumane. - La plus courte consiste à retourner aux temples en suivant la magnifique voie décumane et conserve constamment sa largeur, extrêmement rare, de quatorze mètres. Elle est bordée de trottoirs qui sont, en réalité, le revêtement supérieur de ses égouts .
Cardo maximus
---b) Mausolée et sentier bleu. - Un sentier, qui prend à droite du nymphée et passe devant le répartiteur des eaux, est le plus ombragé, le plus plat et le plus romantique sans doute. Il permet de voir au passage (à une cinquantaine de mètres du nymphée) les restes d'un monument funéraire constitué par un colombaire de forme carrée dont les niches cintrées contenaient les urnes enfermant les restes des morts incinérés. Certains des pilastres cannelés des angles ont cédé sous le poids de la haute pyramide pleine à base octogonale qui les surmontait et qui s'est couchée, presque intacte, à côté du monument. La construction de ce tombeau remonte vraisemblablement au Ier siècle, c'est-à-dire à une époque où l'enceinte extérieure n'était pas construite.
---Le sentier paresse sous les oliviers, dans une région émaillée pendant des mois par un fouillis de fleurs champêtres. Il montre des pans de murs, des restes d'absides ou de citernes à moitié cachés par les lentisques ou habillés de lianes. Il aboutit entre les deux temples par lesquels a commencé le circuit de visite.
---c) Sentier jaune. - En face du Nymphée, s'ouvre sous les oliviers un sentier charmant et pittoresque qui, lui aussi, ramènera aux temples celui qui voudra bien se laisser guider par sa fantaisie en découvrant sans cesse des coins ravissants, où une nature luxuriante et les restes du passé se disputeront pour retenir son attention.
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'Visite de Tipaza' Mosaïque
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LE JARDIN-MUSEE -rarement accessible-
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---Son entrée est à quelques mètres de celle du Parc National. On y verra, dans un cadre charmant de verdure et de fleurs, sous les arbres magnifiques d'un coin de la propriété privée où ils sont déposés et où les visiteurs sont autorisés à circuler, une collection de fragments architecturaux mis ici à l'abri du vandalisme moderne.
---Toute une collection de chapiteaux ioniques ou corinthiens, des colonnes, des fenêtres en pierre découpée à jour, un magnifique linteau de porte avec l'anagramme du Christ accosté de l'alpha et de l'oméga, un sarcophage portant le très ancien symbole chrétien de l'ancre, alternent avec les amphores à vin et les grandes jarres ou dolia destinées à contenir l'huile ou à stocker le grain. Des moulins à huile rappellent que cette contrée était particulièrement riche en oliviers.
---Mais il convient surtout de détailler quelques sarcophages qui prendront bientôt place dans le musée de Tipasa.
Le plus proche de l'entrée (à droite) est magnifique. En marbre blanc, païen par sa forme, par sa composition, par ses motifs latéraux de lions parés pour les jeux du cirque et égorgeant des gazelles, par les strigiles qui encadrent le motif central, il est essentiellement chrétien par ce dernier : nous y voyons en effet le sujet si souvent traité du Bon Pasteur portant sur ses épaules la brebis égarée qu'il vient d'aller chercher, tandis que les autres brebis du troupeau, qui l'entourent, lèvent la tête vers lui.
---Un peu plus loin et toujours à droite, un tombeau païen s'inspire d'un thème classique. Les Dioscures, Castor et Pollux, figurés dans les deux registres latéraux, veillent sur le dernier sommeil des deux époux qui reposaient ici : les scènes centrales représentent respectivement, celle de droite la célébration du mariage, celle de gauche le sacrifice des adieux. Sur la face latérale, un taureau est tenu par le victimaire, dont le sculpteur a détaillé les instruments sacrés.
---Presque en face de ce monument, mais dans l'allée proche du Parc national, on verra un troisième sarcophage, chrétien celui-là et de moins bonne facture ; il est aussi moins bien conservé. Au centre, le Christ, assis, enseigne la Nouvelle Loi ; autour de lui, quatre personnages facilement identifiables par leurs attributs traditionnels, reproduisent les types classiques des saisons.
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LES GRANDS THERMES
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---C'était, très certainement, un des édifices les plus importants de la ville, dont il occupait à peu près le centre. Cette position centrale est aussi celle du village moderne certaines de ses installations le recouvrent en partie. Aussi, malgré ses grandes dimensions, ne peut-on voir actuelle-ment qu'une partie du frigidarium (grande piscine pour les bains froids, à laquelle on accédait par trois larges marches en venant d'une vaste salle pavée de mosaïques orne-mentales en noir sur blanc).
---Ce qui reste des thermes est encore impressionnant par sa hauteur, par la masse de ses murs de blocage alternant avec des assises de briques, par la portée de ses voûtes d'où la pierre de taille a été exclue et par les deux étages que comportait le bâtiment.
---L'ensemble des locaux et chaufferies destinés aux étuves de sudation et aux bains chauds devait se trouver à l'ouest de la partie fouillée, sous l'angle du jardin-musée.
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LE MUSEE
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---Lle musée s'élève sur la place dominant le port, gracieusement offerte par la Municipalité de Tipaza pour y établir une agence des Monuments Historiques. Ce musée contient la collection d'objets conservés et préservés par M. Trémaux, ainsi que ceux trouvés depuis le début des fouilles de Tipasa : grande mosaïque de la basilique civile, couvercle de sarcophage décoré de mosaïques provenant de Sainte-Salsa, collection de monnaies, de lampes, de poteries et de verrerie. A ces collections s'ajouteront les objets découverts au cours des nouvelles fouilles et ceux qui, au fur et à mesure de l'extension des travaux, permettront au visiteur de mieux imaginer quelle fut la vie antique du petit port qui conserve toujours son nom vieux de vingt-cinq siècles., mais qui malheureusement -modernisation oblige- est entrain de changer compltement de physionomie....
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Mosaique: Les captifs
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Inscription sur mosaique
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Jean Baradès, archéologue. Directeur des Fouilles de Tipaza, et
Louis LESCHI, Correspondant de l'Institut, Directeur des Antiquités de l'Algérie.
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