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Le 23 octobre, le canon des Invalides annonçait aux habitants de Paris la prise de Constantine ; et déjà cette nouvelle conquête, comme celle d’Alger, jetait de l’anxiété dans les esprits. Les irrésolutions que le gouvernement montrait depuis sept années , dans toutes les affaires d’Afrique, donnaient cours aux bruits les plus sinistres. Conservera-t-on Constantine ? se demandait-on de toutes parts, et les deux principaux organes du ministère répondaient à cette question d’une manière tout opposée. Dans les chambres, même sollicitude et même indécision. Le discours d’ouverture avait bien annoncé, en termes pompeux, la conquête de Constantine. « Si la victoire, disait la Couronne, a plus fait quelquefois pour la puissance de la France, jamais elle n’a élevé plus haut la gloire et l’honneur de ses armes. » Mais, comme toujours, le ministère avait pris à tâche de ne rien préciser, de n’annoncer aucune détermination positive sur la conservation de la nouvelle conquête. « Dans l’est de l'Algérie, ajoutait-il, comme dans l’ouest, nous avons voulu la paix; mais l’opiniâtreté du bey qui commandait à Constantine nous a obligé à prouver une fois de plus aux indigènes qu’ils devaient renoncer à nous résister. » Voilà tout. A la Chambre des pairs, M. de Gasparin, sans crainte de heurter la susceptibilité nationale, proclamait tout haut l’incapacité de la France à coloniser, et proposait d’abandonner Constantine après l’avoir démantelée. M. Mérilhou, au contraire, sommait le ministère de conserver l’Algérie et demandait une loi qui déclarât celte province définitivement unie à la France.
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A la Chambre des députés, les antipathies pourla possession d’Algérie se manifestaient avec plus de violence encore. Aux yeux de M. Duvergier de Hauranne, le gouvernement s’était engagé dans une voie déplorable par son ardeur belliqueuse, et il taxait l’expédition de Constantine de funeste et d’impolitique. MM. Jaubert et Desjobert, ces deux implacables adversaires de la conquête de l’Algérie, dont les discours ont été aussi funestes à la domination que des batailles perdues, vinrent ensuite faire entendre leur plaidoyer systématique contre tout ce qui se passait en Afrique. Pour eux, l’Algérie était un gouffre où toutes les ressources de la France se consommaient en pure perte; ils comptaient avec affectation et souvent exagéraient le nombre des morts et des blessés; ils supputaient aussi la balance du commerce, et comme ils la trouvaient peu favorable à la métropole, ils ne cessaient de dire que l’Algérie ruinait la France. Étroite et absurde manière de calculer! Comme si la civilisation n’a pas toujours imposé aux grandes nations des devoirs impérieux, stériles dans leurs résultats immédiats, féconds dans leurs conséquences éloignées. Et nous aussi nous voudrions que cette grande expérience fût conduite avec plus d’économie et de volonté; mais, malgré les fautes qui ont été commises, nous ne cesserons d’engager la France à persévérer dans la voie qu’elle s’est tracée; car, à toutes les époques, ce sera pour elle une véritable gloire que d’avoir entrepris le rétablissement de la civilisation et du christianisme en Afrique.
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