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L'autorité du roi est représentée en Algérie par un gouverneur général, investi de la direction suprême des affaires, tant civiles que militaires, sous le contrôle immédiat du ministère de la guerre, près duquel a été instituée une division spéciale, qui s’occupe de tout ce qui est relatif à la colonie d’Afrique. Les attributions du gouverneur général, ainsi que celles des chefs de service placés sous ses ordres, et du conseil d’administration, ont été réglées par les arrêtés ministériels des 1er septembre 1838 et 2 octobre 1836, et par une ordonnance royale du 31 octobre 1838. Celle-ci, en maintenant l’administration des services civils en Algérie sous l’autorité du gouverneur, a placé sous ses ordres un directeur de l’intérieur, un procureur général et un directeur des finances, dont elle a déterminé en même temps les attributions et les rapports.
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Le gouverneur général a auprès de lui un conseil composé du directeur de l’intérieur (intendant civil avant le 31 octobre 1838), de l’officier général commandant la marine, du procureur général, de l’intendant militaire et du directeur des finances. Suivant la nature des questions soumises au conseil, le gouverneur général y appelle les chefs des services spéciaux, civils ou militaires, que l’objet des discussions peut concerner. Il a été placé, en outre, près du gouverneur, un secrétaire général qui centralise la correspondance administrative, conserve le dépôt des archives du gouvernement, tient la plume au conseil d’administration, et en rédige les procès-verbaux, dont le registre reste en sa garde. Quatre auditeurs au conseil d’état ont été attachés aussi aux services civils de l’Algérie: un au secrétariat général du gouvernement, les trois autres sont répartis entre la direction de l’intérieur, le parquet du procureur général et la direction des finances. Il a été institué enfin auprès du gouverneur général une direction des affaires arabes, qui sert d’intermédiaire entre les indigènes et les différentes branches de l’administration, et soumet au gouverneur les demandes et les réclamations de toute nature formulées par les Arabes.
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Par arrêté du 18 juin 1842, le ministre de la guerre a décidé que les possessions françaises dans le nord de l’Afrique, comprenant les provinces d’Alger, d’Oran et de Constantine, sous la dénomination actuelle d’Algérie, formeront, jusqu’à nouvel ordre, trois divisions militaires ou circonscriptions administratives composées comme suit :
Division D’ALGER : Alger, Maison-Carrée, Pointe-Pescade, Koleah, Cherchell, Douera, Bouffarik, Blidah, Medeah, Miliana.
Division DE CONSTANTINE : Constantine, la Calle, Bône, Guelma, Sétif, Philippeville, Djijelli, Bougie.
DIVISION D’ORAN : Oran, Mers-el-Kebir, Mostaganem, Mazagran, Arzew, Mascara. Messerghin, Tlemcen, île de Rashgoun.
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L’organisation administrative ne pouvait s’établir et se développer dans un pays où l’autorité de la France est vigoureusement contestée, qu’en s’appuyant sur une force militaire imposante. C’est parce qu’on n’a pas compris tout d’abord cette nécessité, que les commencements de l'occupation ont présenté des résultats si fâcheux. En 1831, année de troubles et de graves inquiétudes pour la métropole, l’effectif de l’armée ne dépasse pas dix-sept mille hommes; de 1832 à 1833, il s’élève de vingt et un à vingt-six mille hommes; avec le second gouvernement du maréchal Clausel, il est porté à vingt-neuf mille; le désastre de Constantine prouve que ce chiffre est insuffisant, et en 1838 il est presque doublé; la reprise des hostilités de la part d’Abd-el-Kader, en novembre 1839, le fait augmenter encore, et au commencement de 1840, notre armée se trouve composée de soixante mille hommes. L’activité du général Bugeaud et les poursuites à outrance qu’il entend diriger contre l’émir démontrent la nécessité d’accroître ces forces; le nouveau gouverneur demande et obtient, en 1841, un effectif de soixante-douze mille hommes ; enfin. en 1842, son système inspire assez de confiance pour que les chambres et le ministère se décident à mettre à sa disposition une armée de quatre-vingt mille hommes, et ce n’était pas trop. Voici, au reste, comment le maréchal Bugeaud justifie l’emploi d’un effectif si nombreux; ses observations méritent d’être prises en sérieuse considération. « Pourquoi s’étonne-t-on si fort de ce chiffre de quatre-vingt mille hommes ? Que l’on veuille donc considérer que l’Algérie a deux cent quarante lieues de longueur sur cinquante de largeur; que la topographie en est des plus difficiles sur une très grande partie de sa surface; qu’elle est occupée par des populations bien plus nombreuses qu’on ne le croyait, et, sans contredit, les plus belliqueuses du monde. Dans ce peuple, tous les hommes sont guerriers depuis leur adolescence jusqu’à leur extrême vieillesse; chacun, pris individuellement, est un homme de guerre redoutable. Il ne manque aux Arabes que cette force d’ensemble qui résulte de l’organisation, de la discipline et de la tactique. On ne peut les contenir et les dominer par aucun de ces grands intérêts, au moyen desquels on fait si aisément capituler les nations de l’Europe, quand on a vaincu leurs armées permanentes. Ils n’ont point de ces grands centres de gouvernement, de population et de commerce, qu’il suffit d’occuper pour tenir en réalité le cœur d’un pays; ils n’ont point de ces grandes artères où circule la vie des nations civilisées, point de navigation intérieure, point de grandes routes, point de fabriques, point de villages, point de fermes; mais tous ont un fusil et un cheval. Si l’Autriche croit avoir besoin d’une armée de soixante mille hommes pour contenir la Lombardie, où les arts libéraux sont beaucoup plus en honneur et en usage que les armes, pourquoi penserait-on que c’est trop de quatre-vingt mille pour dominer le peuple arabe et exécuter ces grands travaux qui doivent un jour faire de l’Algérie un des plus beaux pays du monde ? ».
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