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Lors de l’expédition d’Oran le capitaine Louis de Bourmont arriva le 24 juillet 1830 devant cette place, dont deux bricks, le Voltigeur et l’Endymion faisaient le blocus. Le bey on était encore maître ainsi que des forts voisins; huit cents Turcs restaient attachés à sa cause, mais au dehors son autorité était méconnue. Informés de ses négociations avec le chef de l’armée française, les Arabes s’étaient déclarés contre lui sans oser faire encore aucune manifestation hostile, car son artillerie les tenait en respect. Le défaut de vivres pouvait seul réduire Hassan, et il était sur le point d’en manquer lorsque l'escadre arriva; aussi, exprima-t-il le désir d’être promptement secouru. Son projet était de remettre Oran et les forts aux troupes françaises, et d’aller terminer dans l’Asie Mineure une carrière déjà fort avancée. Le capitaine Leblanc, qui commandait le Dragon, ne crut pas devoir attendre l’issue des négociations entamées pour s’emparer d’un point aussi important: Mers El-Kébir surtout lui paraissait une position très avantageuse à occuper, et ce fort n’était alors gardé que par une soixantaine de Turcs. A peine les envoyés du bey furent-ils partis, qu’il mit à terre cent dix hommes pris dans les équipages du Voltigeur et de l’Endymion lesquels se portèrent vers le fort avec une grande rapidité, en enfoncèrent la porte qui était en mauvais état, et arborèrent le pavillon français sur ses remparts. Les Turcs, surpris, n’opposèrent aucune résistance, et se retirèrent vers la ville. Cet événement n’altéra en rien les bonnes dispositions du bey; il ne cessait de manifester le désir de se placer sous la protection de la France. Le capitaine de Bourmont, n’ayant pas assez de troupes pour lui offrir cette protection, crut devoir se rendre auprès de son père pour lui faire connaître le véritable état des choses. Les cent dix hommes établis dans le fort de Mers El-Kébir continuèrent de l’occuper, soutenus par les bricks le Voltigeur et l’Endymion qui restaient mouillés dans la rade.
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Les renseignements donnés par M. Louis de Bourmont déterminèrent le maréchal à envoyer des troupes à Oran. Le colonel Goutefrey reçut l’ordre de s’embarquer avec le 21e de ligne cinquante sapeurs et deux obusiers de montagne.
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Par sa situation maritime, qui commande à l’égal de Gibraltar et mieux encore l’entrée et la sortie de la Méditerranée, par ses nombreuses fortifications, par sa magnifique rade de Mers El-Kébir qui peut offrir en tout temps un refuge assuré aux plus grands vaisseaux, Oran était, après Alger, un des points les plus importants à occuper sur le littoral algérien, quelle que pût être la pensée ultérieure du gouvernement français. « La position de la place et du port d’Oran, disait Philippe V dans son manifeste du 6 juin 1732, donne à la régence des avantages formidables sur les provinces méridionales de mon royaume. » En occupant ce point, nous augmentions notre ascendant sur l’Espagne, et pouvions imposer à l’Angleterre; car d’après des observations nautiques faites depuis 1830, il a été reconnu que les courants du littoral, secondés par les vents d’ouest qui règnent dans ces parages les deux tiers de l’année, poussent vers la rade de Mers El-Kébir les navires qui viennent du détroit, tandis qu’ils arrêtent la marche de ceux qui cherchent à débouquer dans l’Océan. Les vents, presque toujours parallèles au canal, sont également larges pour se rendre en Espagne comme pour en revenir, et poussent indifféremment les navires, en moins de quinze heures, d’Oran à Carthagène ou de Carthagène à Oran. Avec ce concours de circonstances, des croisières établies entre ces deux ports intercepteraient bien mieux que Gibraltar le passage de la Méditerranée à l’Océan.
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Au fond du grand enfoncement qui existe à l’ouest de Cap Ferrant, on trouve deux plages sablonneuses, entre lesquelles s’élève Oran. Cette ville est assise au pied de Sainte Croix ou Mergiagio, des deux côtés du ruisseau de l’Oued-el-Rahhi (rivière du moulin), qui coule dans une petite gorge et dont la source est légèrement thermale. La partie qui est située sur la rive gauche de ce ravin est mal percée, ruinée même en quelques endroits; c’est l’ancienne ville, celle qu’habitaient les Espagnols, et qui fut détruite par tremblement de terre de 1790. Sur la rive droite sont la citadelle et la nouvelle cité. Malgré un cours fort peu étendu, l’Oued-el-Rahhi a un fort volume d’eau et assez de pente pour arroser les jardins, servir aux besoins de la ville et faire tourner six ou sept petits moulins. Ce cours d’eau si précieux, l’heureux site du ravin, ont sans contredit déterminé l’établissement de la ville en cet endroit, de préférence à Mers El-Kébir où est le port.
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Quoique Shaw et Marcus estiment qu’Oran occupe à peu près la position de Quiza-Castellum, on ne trouve point à la surface de son sol de vestiges sensibles de la domination romaine. Les constructions élevées par les Maures ont aussi presque entièrement disparu. il ne reste aujourd’hui de trace de leurs premières fortifications qu’une portion du Château Vieux, une tour bâtie en pisé, sur un rocher au-dessus du quai Sainte-Marie, qui protége la plage. La nouvelle ville, dont les Espagnols peuvent être regardés comme les véritables fondateurs, était circonscrite dans l’enceinte élevée au pied du Mergiagio, sur la berge gauche du ravin; elle était défendue par des ouvrages considérables qu’on avait laissés sous le feu du plateau inoccupé d’Almeyda (la table), d’où se détache, après une forte dépression, le pic de Sainte-Croix. On y voit encore de belles ruines des monuments construits par les derniers conquérants le palais du gouverneur, la cathédrale, les casernes. Des travaux prodigieux en communications souterraines et en galeries de mines, un magnifique magasin voûté, avec un premier étage sur le quai Sainte-Marie, une darse et sept autres magasins taillés dans le roc, trois églises, une salle de spectacle tel est l’ensemble des ouvrages élevés par les Espagnols pendant une possession de près de trois siècles, dans un lieu qui avait mérité d’être appelé, pour ses agréments et son luxe, la Corte-Chica (la petite cour). Le mélange des constructions mauresques avec les leurs donne à Oran un aspect tout original que ne présente aucune des villes de la côte.
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La force de la garnison d’Oran et de ses châteaux sous la domination espagnole était de six à sept mille hommes; elle servait à repousser les ennemis du dehors et à maintenir 5,000 presidiarios ou galérienschebek qui faisait l’office de courrier. La garnison ne s’éloignait jamais au-delà d’une portée de canon; les presidiarios et quelques esclaves cultivaient les terrains qui s’étendent vers la Sebkha (lac Salé). Telle était la position des Espagnols dans ce pays, position comme on voit purement onéreuse et qui ne pouvait exercer la moindre influence sur la civilisation des tribus voisines. que l’on y déportait d'Espagne, et employés aux fortifications. On ne tirait rien de l’intérieur du pays; tous les approvisionnements, même la viande, venaient de Séville, Almeria et Carthagène: chaque semaine, il partait de ce dernier port un
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Les Turcs, devenus une fois maîtres d’Oran, s’empressèrent de démolir les constructions qui avaient coûté tant de peine à leurs prédécesseurs. Ce fut un élan général pour changer ces demeures élégantes et commodes en maisons de boue, en galeries étroites, ne prenant jour que dans l’intérieur, et destinées à un autre ordre de mœurs et d’idées. Les beys se succédèrent dans cette nouvelle résidence avec Une effrayante rapidité, succombant généralement à des intrigues, comme ils devaient au même moyen leur élévation. Le gouvernement, pour eux, se réduisait à tirer du pays le plus de revenus possible. Le bey et le khalifat se partageaient la province pour aller tous les ans lever l’impôt, qui n’était guère payé qu’à la condition de combats acharnés.
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Le corps expéditionnaire était parti d’Alger le 6 août; mais à peine l’escadre eut-elle mouillé dans la rade de Mers El-Kébir, qu’un contre-ordre arriva pour arrêter le débarquement. M. de Bourmont venait de recevoir de France de tristes nouvelles, et par le même sentiment de prévoyance qui l’avait porté à s’étendre alors que tout était tranquille, il s’empressa de concentrer ses forces sur Alger dès qu’il put craindre pour les destinées politiques de son pays. On fit savoir au bey que le signal du départ allait être donné, et que, s’il le désirait, une frégate le transporterait à Smyrne avec les Turcs qui lui étaient restés fidèles; mais ses négociations avec les Arabes lui faisant espérer une prompte soumission de leur part, il abandonna son premier projet, sans que toutefois ses dispositions cessassent d’être amicales. Il déclara même au colonel Goutefrey qu’il se considérait toujours comme sujet du roi de France. Avant de s’éloigner, le colonel fit sauter un des fronts du fort Mers El-Kébir; puis le bateau à vapeur le Sphinx et les bricks le Voltigeur et l’Endymion se dirigèrent vers Alger avec six cents hommes du 21e de ligne. Les autres bâtiments mirent à la voile deux jours après. Ainsi, par une déplorable fatalité, les premières tentatives d’occupation en Algérie furent empreintes d’un caractère d’irrésolution qui détruisit en quelques jours l’ascendant moral qu'avait donné la rapide conquête de la capitale.
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