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En 1938 alors qu'il commencela rédaction de l'Etranger, Camus note : ''Un roman n'est jamais qu'une philosophie mise en images. Et dans bon nombre de romans , toute la philosophie est passée dans les images'' (II, 1417). L'Etranger qui est un roman, illustre la philosophie à laquelle se référait Albert Camus dans les années 1938-1941. Cette philosophie, ou conception de la vie, est explicitée dans le Mythe de Sisyphe, essai rédigé en même temps que l'Etranger et ''sur le même thème'' selon Camus (AC-JG, 39). pour comprendre le personnage de Meurseault, il convient de se référer au Mythe de Sisyphe.C'est ce que beaucoup ont compris, notemment Jean-Paul Sartre qui, comme le note Olivier Todd, chercha la clé de l'Etranger, en lui appliquant la grille du Mythe. (1)
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Selon la mytologie grecque , Sisyphe fut condamné par les dieux à transporter au sommet d'une montagne un rocher qui, une fois hissé au point culminant, retombait aussitôt. Sisyphe devait descendre pour le hisser à nouveau et cela sans fin. L'effort qui est demandé à Sisyphe est inutile, son destin est absurde. Ce destin, selon Camus, serait celui de l'homme qui -vivant sans l'espoir d'une survie au delà de la mort- prendrait conscience de l'inutilité de tout ce qu'il entreprend.
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Dans le Mythe, Albert Camus remarque que les sentiments de l'absurdité de l'existence n'a rien d'exeptionnel. Il peut naître de la lassitude qui accompagne un travail répététif, jugé ininteressant. Il peut naître auusi de l'angoisse qui nous saisit lorsque nous pensons au temps qui s'écoule et la mort qui est au terme (II, 106-107). Il peut également accompagner la perception du divorce qui existe entre les aspirations que nous portons -désir de vivre, de comprendre, d'être heureux- et la condition réelle qui est la nôtre(II, 135). Si ce constat envahi tout le champ de la conscience, alors cette absurdité devient la seule réalité perçue. c'est ce qui alieu dans le Mythe. Le propos de Camus est alors d'en tirer des conséquences pratiques. ''Ce qui m'intéresse, écrit-il, ...ce ne sont pas tant les découvertes absurdes. Ce sont leurs conséquences'' (II, 109).
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De fait Camus en tire trois conséquences, ou trois attitudes qui devraient être, selon lui, adoptées par celui qui a conscience de l'absurdité de sa vie :
La première est d'entretenir en soi une révolte.
Le seconde est une libérté d'indifference à l'égard de tout. L'homme qui pense que tout est absurde juge que tout est indifferent. Il ressent un i''ncroyable desinteressement à l'égard de tout'' (II, 142).
La troisième conséquence est d'épuiser avec passion tout ce que la vie permet de vivre. ''Ce qui compte, écrit Camus, ce n'est pas de vivre le mieux mais de vivre le plus'' (II, 143).
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N.B. :
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(1) O. Todd "Albert Camus une vie", Gallimard, 1996, p. 309.
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Les citations des écrits d'Albert Camus, sont extraites de deux volumes de la "Bibliothèque de la Pléiade". Ces citations sont notées des chiffres romains I ou II, suivis de la numérotation de la page (ou des pages) :
I - Thêatre; Récits, nouvelles, 1962 (réédition du 4èmetrimestre 1974).
II - Essais, 1965 (réédition du 1er trimestre 1981) .
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Les réflexions de Camus sont extaites de ses Cahiers :
C1 - Carnets I - Réflexionx de mai 1935 à février 1942 (Gallimard, 1962).
C2 - Carnets II - Réflexionx de janvier 1942 à mars 1951 (Gallimard, 1964).
C3 - Carnets III - Réflexionx de mars 1951 à decembre 1959 (Gallimard, 1989) .
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(AC-JG) - Albert Camus - Jean Grenier, Correspondance 1932-1960, Gallimard, 1981.
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