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Sur le fil du rasoir. Roman de Mohamed Ifticène.

 


Livre

 

 

Bien entendu qu’il y rit, l’indigène du malheur ! N’était-il pas ce Méditerranéen hilare et nonchalant ? Et, à cet égard, il se riait du trop plein d’humiliations qui s’engrangeait dans la grange de la patience et ce, jusqu’au choc de la rupture de l’éternel Novembre 1954.

 

https://www.liberte-algerie.com/culture/l-odyssee-de-lyes-le-rebelle-375985

 


Une saga algéroise. Sur le fil du rasoir. Roman de Mohamed Ifticène. Editions Frantz Fanon, Alger 2022, 399 pages, 1200 dinars.
Voilà un hasard qui fait très bien les choses... littéraires. Au départ, confiait l'auteur à la presse, il y avait un scénario. Et, pour ne pas changer (dans notre champ audiovisuel... et tout particulièrement en ce qui concerne les réalisateurs peu ou prou iconoclastes et Ifticène en fait partie ), rude est (fut et sera) l'accession en Ligue 1, c'est-à-dire ceux qui arrivent à avoir accès aux financements soit étatiques soit autres. De plus, avec un marché national de la diffusion quasi-fermé et de la consommation contractée (peu de salles), il y a de quoi décourager les meilleurs volontés du monde. Tout particulièrement chez les «anciens» qui vivent encore sur les réalisations des «glorieuses» années 60 et 70.
A quelque chose malheur est bon. Le scénario est transformé en... livre... et un jour, peut-être, en film («peut-être avec l'étranger, car il y a plus de moyens»).
Le contenu ? Presque en souvenir d'un vécu à Alger, de la vie à Alger... à l'époque de la colonisation... et juste après.
Une famille habitant La Casbah d'Alger (celle de Lyès, le très beau gosse, garçon blond aux yeux bleus, presque un «roumi» égaré dans l'école indigène, bagarreur, pas peureux ni timide pour un «sourdi», tisseur impénitent de relations intimes avec les filles, les femmes et les maîtresses des puissants, préparant sa vengeance contre ceux qui ont assassiné son père...)... une famille avec des racines (au départ un peu oubliées) en Kabylie. Une famille qui, n'oublions pas que c'est le temps de la domination coloniale dont les effets sont ressentis parfois directement à l 'intérieur de La Casbah elle-même. Une ville dans la ville avec des familles honorables mais aussi ses truands musulmans... et européens, parfois s'acoquinant, ses maisons dites de «tolérance» et de jeux clandestins, ses règlements de comptes et ses trafics... plus pour survivre que pour bien vivre ! Il y a donc de la politique, de l'amour, de la bagarre, de la mort violente, de la joie, de la peine... tout ce qui fait la vie d'un individu et d'une communauté. Une cité devenue forteresse assiégée et martyrisée durant la guerre de Libération nationale, avec ses héros et héroïnes, ses traîtres, ses lâches et ses «observateurs». C'est à la fois la vie d'une famille mais aussi d'une communauté, durant toute cette période. Une période à la fois exaltante et douloureuse.
Les premières années de l‘Indépendance apporteront certes un vent de liberté mais, aussi, hélas, pas mal de désillusions avec ses «marsiens», la lutte au sommet pour le pouvoir, les dérapages sécuritaires et sociétaux... et à la base, avec la course aux avantages matériels immédiats. La «grande désillusion» et l'échec des utopies ! On ne pouvait moins attendre, d'un jeune Algérien devenu adulte avant l'âge.
L'Auteur : Né en 1943 à Bir-Djebah en Haute Casbah (Alger). Réalisateur et scénariste de cinéma... et enseignant en audiovisuel. Etudes à Alger (Institut national du cinéma) et en Pologne (Lodz). Une vingtaine de films (fiction) à son actif (dont Qorine, Jalti le gaucher, Les rameaux de feu, Le grain dans la meule, Le sang de l'exil, «Les enfants du soleil, Les marchands de rêves...) et autant de documentaires. C'est là son premier roman.
Extraits : «Les musulmans ne savent pas aimer. Avant le mariage, ils courent les maisons closes, vite fait mal fait, ils en sortent soulagés, mais frustrés. Une fois mariés, ils saillent leurs épouses et exigent des garçons alors que c'est l'homme qui porte la semence» (p17), «Zakya dénonça l'alliance entre les colons qui limitent la scolarité des indigènes au cycle primaire afin qu'ils sachent peu et les musulmans qui l'interdisent à leurs filles afin qu'elles ne sachent rien» (p82), «L'entrée triomphale de l'armée des frontières à Alger annonça les tyrannies à venir «(p244) «La vie à Alger en ces premières années d‘indépendance était entièrement vouée au culte de la personnalité et aux activités du rais» (p 57)
Avis : Passionnant. Une fin d'ouvrage un peu trop «accélérée». Il est vrai que l'écriture cinématographique prend souvent le dessus chez l'auteur. Mille et une vérités. Vivement une ou plusieurs suites... avec un titre plus court. «Une saga algéroise» suffisait
Citations : «La voyance est un monde de ténèbres où la raison et la lumière ne rentrent pas» (p17), «Terribles sont les mœurs des Kabyles, effrayant est leur code d'honneur. Ils condamnent à mort des amoureux et baissent la tête devant des assassins» (p107), «Les chemins de l'amour sont pavés de grands renoncements «(p123), «L'amour est la plus belle des libertés.... mais il ne faut pas en faire une obsession» (p203), «Quand une seule personne souffre d'illusion, on dit qu'elle est folle mais quand c'est des millions qui en souffrent, on dit qu'elles sont croyantes. Les religions sont des fabriques de fous» (p205), «Se taper la femme d'un grand voleur qui tape dans les caisses du trésor public est un bras d'honneur adressé à tous les corrompus de son pays» (p398)
Nomade brûlant. Roman de Amina Mekahli. Anep Editions, Alger 2017. 750 dinars, 222 pages (Fiche de lecture déjà publiée. Pour rappel)
Une histoire compliquée d'un tout jeune enfant de nomades, ni orphelin, ni abandonné, «enlevé» à ses parents biologiques durant la guerre de Libération pour être «adopté»... «enlevé» - grâce (?) à un jeune soldat aux yeux bleux (l'officier de Sas) l'ayant choisi au détriment des autres de sa classe... une véritable «roulette russe»- par une famille européenne de France. Plutôt par une institutrice stérile raciste sur les bords et nymphomane (Claire). Le temps passe, mais l'enfance est là, avec ses souvenirs et avec ses déchirures profondes. On n'arrache pas impunément une jeune pousse de sa terre naturelle.
Bien sûr, les fruits paraissent beaux, tout particulièrement au jardinier (la mère adoptive). Ainsi, le hasard a fait que l'enfant devenu grand s'est transformé en illustre médecin psychiatre... et comme tout bon psy', il ne manque pas de s'auto-psychanalyser. Il se découvre apatride, exilé, damné, ayant changé de nom et de langue, oubliant (obligé !) presque tout : sa mère biologique (Dhawya) qui, elle, ne l'a pas oublié, sa dune, son désert, son palmier... toute son identité profonde.
C'est là tout le drame d'un pan tragique de la colonisation et de sa «lutte» contre les combattants pour la libération du pays. En enlevant leurs enfants pour les transplanter ailleurs. Un pan qui commence seulement à être abordé, écrit et décrit par des Algériens (voir le dernier ouvrage de Slimane Zeghidour... édité en France et présenté dernièrement in Médiatic)«.Celui des «Centres de regroupement» ! Car l'enfant des étoiles et du soleil a connu, avec ses parents et bien d'autres nomades, de véritables camps de «concentration» ne disant par leur nom: «attachés comme des chiens avec des chaînes longues comme un village et hautes comme un mirador»... Des prisons à ciel ouvert («limité par des frontières, des vraies, par-delà lesquelles la mort seulement guette ceux qui osent les franchir sans autorisation..»)... que même les anciens officiers (des Sas) n'ont osé aborder. Trop de remords certainement. comme le personnage de Serge, l'officier qui a organisé le «kidnapping».
A la fin, il y a bien un retour au pays... mais le «regroupement», volontaire cette fois-ci, ne s'est pas passé comme prévu...
L'Auteure : Née à Mostaganem. Romancière, chroniqueuse, poète, traductrice. Plusieurs ouvrages. Premier roman, «Le secret de la girelle». Note complémentaire : Décédée suite à une longue maladie, dimanche 8 mai 2022, à l'âge de 55 ans.
Extraits : «Je n'y comprends rien à ces phénomènes de mode. Tous ces types sont pareils pour moi; ils utilisent la réalité des autres pour devenir célèbres et puis hop ! Ils se coupent de cette même réalité«en s'en éloignent le plus possible en faisant appel à nous pour faire barrière entre eux et ceux qui les aiment» (Un agent de sécurité, p 16), «Le mode de vie nomade de la plus grande partie de la population a été le plus grand obstacle que la France ait rencontré en Algérie, pour asseoir sa domination et prendre «possession des meilleures terres cultivables... Le première étape a été«de tenter de déstabiliser ces nomades en modifiant leurs modes de vie ancestrales» (p. 138),«Les camps de regroupement... n'ont fait qu'achever le processus de «dépossession» commencé en 1830» (p 140), «La France ne nous a pas seulement enfermés dans des camps nous et nos familles non ! Elle a enfermé l'Algérie tout entière pendant 130 ans dans son passé avec ses ancêtres. Pendant 130 ans, personne«n'a eu de présent et encore moins de futur, personne n'a évolué normalement comme l'a fait le reste du monde entretemps. Et, nous voilà aujourd'hui décalés et tiraillés entre ces ancêtres qui nous ont quand même aidés à survivre à l'horreur et un avenir qu'on ne sait pas dessiner. Et, c'est le pauvre présent qui trinque et qu'on veut fuir» (p 200)
Avis : Ecriture au parcours «nomadisant», difficile à suivre, tout particulièrement au début. Un véritable cours de psy' clinique ! Un peu trop, peut-être ?
Citations : «Brûler son identité n'est pas du tout facile à faire, c'est un suicide plus laborieux, plus lent et plus définitif que la mort elle-même. Mais brûler l'identité d'un peuple est le crime ultime : celui qui tue par-delà la mort elle-même» (p 69), «Le désert, c'est un peu comme Dieu, personne ne demande ce que c'est, car tout le monde croit le connaître. C'est pratique, c'est comme Dieu : tu n'as rien à expliquer. Sans doute parce qu'il est, lui aussi, grand devant la douleur des hommes» (p 80), «Nous utilisons«souvent des expressions entières pour dire de petites choses insignifiantes... C'est cela aussi le mystère de notre langue. Les sens cachés, suggérés, insinués, les évocations subtiles. Notre langage est un exercice du mystère» (p 87)

 

 

Belkacem Ahcene Djaballah

Publié dans Le Quotidien d'Oran le 19 - 05 - 2022

https://www.djazairess.com/fr/lqo/5312395

 

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Rédigé le 19/05/2022 à 17:04 dans Culture, Poésie/Littérature | Lien permanent | Commentaires (0)

L’Algérie mon beau pays de Slimane Azem

 

Oeuvre réservée à un public averti  :-) 

 

 

Je me rappelle cette nuit d’orage
Entouré de mon père et de ma mère
En exil dès mon jeune âge
J’ai préparé mes affaires
Pour mon premier voyage
M’exiler au-delà des mers
Je revois d’ici mon village
Et tous ceux qui me sont très chers
Pour moi ce paysage
Est le préféré de la Terre

L’Algérie, mon beau pays
Je t’aimerai jusqu’à la mort
Loin de toi, moi je vieillis
Rien n’empêche que je t’adore
Avec tes sites ensoleillés
Tes montagnes et tes décors
Jamais je ne t’oublierais
Quel que soit mon triste sort

Seul, je me parle à moi-même
J’ai failli à mon devoir
J’ai mené une vie de bohème
Et vécu dans le cauchemar
Quand je chante ce poème
Je retrouve tout mon espoir

L’Algérie, mon beau pays
Je t’aimerais jusqu’à la mort
Loin de toi, moi je vieillis
Rien n’empêche que je t’adore
Avec tes sites ensoleillés
Tes montagnes et tes décors
Jamais je ne t’oublierais
Quel que soit mon triste sort

 

Slimane Azem

 

 

 

https://www.achac.com/artistes-de-france/slimane-azem/

 

 

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Rédigé le 19/05/2022 à 14:34 dans Algérie, Poésie/Littérature | Lien permanent | Commentaires (0)

LES MANIFESTATIONS DE RAPPELÉS DE LA GUERRE D’ALGÉRIE À GRENOBLE

 

Mars 1956, voilà plus d’un an qu’a débuté la guerre d’Algérie. Élu président du conseil, suite à une campagne de la gauche pour «  la paix en Algérie  », le socialiste Guy Mollet devient rapidement partisan d’une politique de «  maintien de l’ordre  ». Le 12 mars, son gouvernement obtient du parlement les pouvoirs spéciaux, lui permettant de prendre «  toute mesure exceptionnelle en vue du rétablissement de l’ordre  ». Les communistes, opposés depuis le début à la guerre, votent eux aussi en faveur de cette mesure, afin de préserver l’unité de la gauche. Ils plongent ainsi dans l’incompréhension de nombreux militants communistes qui ne comprennent pas cette légitimation de la répression en Algérie. Un mois plus tard, le conseil des ministres ordonne le rappel des disponibles : les jeunes gens ayant déjà accompli leur service militaire, et libérés depuis 18 mois sont rappelés sous les drapeaux. Il s’agit de doubler le nombre de soldats français sur le sol algérien. La guerre d’Algérie fait véritablement irruption dans la vie des français. À Grenoble, le préfet écrit au ministre de l’Intérieur : «  La question algérienne reste évidemment la préoccupation presque unique de la population ».

Partout en France, cette mesure va donner lieu à des protestations : manifestations, refus de monter dans les trains, blocage des trains par les familles... Ces mouvements sont généralement soutenus par les sections locales des partis communistes, mais non sans quelques ambiguïtés. Il faut dire que la position du PC national n’est pas bien claire. Partisan de la paix en Algérie, il ne s’est jamais prononcé pour l’indépendance (sous prétexte que l’Algérie serait une «  nation en formation  », qui ne serait pas encore prête à se prendre en charge). Et puis surtout Thorez, secrétaire général du PCF, a déclaré au début de la guerre : «  Le soldat communiste part à toute guerre, même à une guerre réactionnaire, pour y poursuivre la lutte contre la guerre. Il travaille là ou il est placé  ». Hors de question donc que les communistes refusent d’aller à la guerre.

Depuis quelques années déjà à Grenoble, les idées anticolonialistes gagnent les milieux étudiants et intellectuels. La section grenobloise de l’UNEF est l’une des premières à prendre partie en faveur de la paix en Algérie. Dans les milieux politiques, à côté des communistes (PC, CGT et tous les groupes satellites du PC) traditionnellement opposés à la colonisation, apparaissent alors ceux que les RG qualifient de «  chrétiens progressistes  ». Mais c’est surtout dans des associations de solidarité avec les peuples nord-africains que se mêlent les militants anticolonialistes français et algériens. Les liens avec le FLN grenoblois, né en 56 d’une scission des organisations communistes, s’amenuisent petit à petit, car les militants français sont mis mal à l’aise par les méthodes violentes qu’emploi le FLN.
C’est dans ce contexte qu’à partir d’avril 1956 émergent en Isère des protestations contre le rappel des disponibles. Des comités contre la guerre ont fleuri un peu partout, souvent à l’initiative des communistes ou des chrétiens de la nouvelle gauche, et les protestations se font de plus en plus nombreuses. Pour le seul mois de mai, les RG recensent pas moins de 18 manifestations, blocages de trains... en Isère. Cette agitation culmine à Grenoble, le 18 mai 1956.

«  On avait appris qu’un train de rappelés devait arriver en gare de Grenoble en début de soirée, le 18 mai, vers 18h30. C’est pour ça que le comité d’organisation avait appelé à un rassemblement devant la gare à ce moment là  » raconte Ezio Goy, ouvrier qui milite à l’époque aux Jeunesses Communistes. L’appel est lancé par le «  Comité des jeunes pour une solution pacifique au problème algérien  », organisation satellite du parti communiste. La section grenobloise du PCF et la CGT-jeunes se joignent à l’appel. Des milliers de tracts sont distribués dans les usines.

Vers 18 heures, quelques centaines de personnes se rassemblent devant la gare SNCF de Grenoble, puis investissent les quais et les rails, bloquant entièrement la circulation des trains. Un important dispositif policier avait été mis en place, et les grenades lacrymogènes délogent les manifestants qui répondent à coup de pierres. Ils refluent alors vers la rue Nicolas Chorier, puis vers le quartier de l’Aigle, et continuent de bloquer, à plusieurs niveaux, les voies des trains à l’aide de matériel de chantier. A l’époque, plusieurs passages à niveau coupent les rues grenobloises. De violents affrontements s’engagent avec les forces de l’ordre. C’est la sortie des ateliers, et le nombre de manifestants augmente rapidement, ainsi que la violence des combats. Dans sont rapport au ministère de l’intérieur sur la situation de mai, le directeur des Renseignements Généraux écrit : «  Un millier de manifestants, dont 300 formés en véritable groupes d’assaut ont arrêté le trafic SNCF au sud de la gare et lapidé brutalement le service d’ordre de 18h47 [sic !] à 23h30  ». Il poursuit : «  Les évènements du 18 mai à Grenoble ont parfois pris un véritable caractère d’émeute localisée, tant était flagrante la virulence des attaquants lapidant le service d’ordre avec une audace grandissante et une technique sans cesse accrue, les manifestants trouvant le long des ballasts un inépuisable ravitaillement de projectiles...  »
Beaucoup des manifestants présents n’ont jamais été appelés sous les drapeaux. Ils sont venus par solidarité avec des copains qui doivent partir, et parce qu’ils savent que ce sera bientôt leur tour. Parmi les rappelés, une bonne partie, constituée principalement de communistes et de chrétiens progressistes, sont fermement opposés à une guerre coloniale. Des cris «  Paix en Algérie !  » «  Non à la Guerre  » se font entendre. D’autres en revanche ne s’intéressent pas vraiment à la guerre, et refusent tout simplement de devoir partir alors qu’ils viennent de se marier, de trouver du travail...

Des signaux et du matériel de la SNCF sont détruits. Vers 21 heures une grue de chantier est renversée sur les voies. Le train qui partait pour Chambéry fait marche arrière et retourne en gare de Grenoble. Un train en provenance de Chambéry est lui aussi stoppé. Le train pour Paris ne peut pas démarrer, et des trains devant transiter par Grenoble sont détournés de leur itinéraire. Les voitures, dont certaines sont endommagées par les affrontements, sont bloquées à leur tour et de gros embouteillages se forment dans les rues voisines. Le Daubé fait état de grosses grenades fumigènes lancées par les manifestants sur les forces de police, «  jetant l’émoi dans la population  ». Il s’agit en fait des grenades offensives lancées par la police, et qui coûteront une jambe à l’un des manifestants. Des sabotages de signalisation ont lieu dans les gares voisines, notamment celle de Voreppe. Du ciment prompt est coulé dans une aiguille commandant les voies de Gap et de Chambéry. Pour prévenir d’autres actes de ce genre, une partie des forces de l’ordre se replie sur la gare de Grenoble. Relativement dépassée, la police doit faire appel à des renforts de Lyon et de Bourgoin-Jallieu, qui arrivent petit à petit. Les affrontements se poursuivent, avec leur lot de blessés et d’arrestations. Vers minuit la police parvient enfin à disperser les manifestants. Place maintenant au nettoyage. Le préfet est obligé de réquisitionner une compagnie du génie militaire pour déblayer les voies et rétablir la circulation des trains pendant la nuit. Ironie de l’Histoire, le train de ce soir ne comporte aucun rappelé...

On dénombre 51 arrestations et une cinquantaine de blessés chez les manifestants, dont certains le sont gravement. Un manifestant a notamment eu un pied arraché par une grenade offensive. Du côté de la police, Le Daubé dénombre 73 blessés, dont 3 officiers de police. Le lendemain, une instruction est ouverte contre la section locale du PCF, la CGT jeunes et le comité des jeunes. 3 personnes sont condamnées à de la prison, et 7 étrangers impliqués dans la manifestation sont expulsés. Le PC local ne s’attendait pas à une manifestation si violente. Accusé de sabotage dans Le Daubé, qui évoque «  une savante organisation préméditée  », le PC dément fermement dans son journal local. D’après le directeur des RG : «  Les incidents autour des rappels ont vivement inquiété la population, et il n’est pas jusqu’à des communistes qui aient pensé que l’affaire était tout de même allée un peu loin, si loin que les dirigeants du PCF ont mis les déprédations sur le compte «  d’agents provocateurs  » censés avoir également lapidés le service d’ordre  ».

Après le 18 mai, quelques manifestations ont encore lieu en Isère, mais les RG notent une diminution de leur intensité. Petit à petit, les disponibles reçoivent leur ordre de rappel et partent pour l’Algérie. D’après le préfet : «  Les manifestations redeviennent calmes, mais les trains sont bloqués par l’usage systématique du signal d’alarme, ce qui rend le travail du service d’ordre particulièrement délicat  ». Tant bien que mal, les trains arrivent tout de même à destination. Au final, quasiment aucun rappelé ne refuse de se soumettre et de partir. Ceux qui le feront, ne seront pas soutenus, ou seulement du bout des lèvres par le Parti Communiste. Le mouvement des rappelés aura buté entre autres sur l’absence de soutien massif de la part de la population et des partis politiques. Il n’en représente pas moins la première forme d’insoumission à la Guerre d’Algérie. En cela, il a marqué et parfois été un élément déclencheur, pour la poignée de personnes qui dénoncera l’usage de la torture et prendra fait et cause pour l’indépendance algérienne, en s’engageant notamment dans les réseaux de soutien au FLN.

Le journaliste Jean-Marie Boeglin explique : « J’ai couvert toutes les manifestations de rappelés. Je me suis baladé dans la France entière. [...] J’ai vu à Grenoble le béton coulé dans les aiguillages. La presse n’en parlait pas. Je pondais des papiers de 400 lignes, il en paraissait à peine quarante. Personne ne voulait partir. C’était terrible de constater que le mouvement ouvrier réagissait aussi peu à une protestation de cette ampleur. Pour moi, le printemps 56 fut déterminant  ». Un an après, il commençait à travailler pour le FLN et à organiser le réseau lyonnais de soutien au FLN.

Principales sources :
Archives du Dauphiné Libéré, du Monde, des Allobroges. Archives du cabinet du préfet de l’Isère.
T. Quemeneur, «  réfractaires dans la guerre d’Algérie  », in J.C Jauffret et M. Vaïsse, Militaires et guérilla dans la guerre d’Algérie, 2001, éd. Complexe.
P. Rotman, B. Tavernier, La guerre sans nom, Les appelés d’Algérie 54-62, 1994, Point Actuels (témoignage d’appelés et de rappelés de la région grenobloise).
Hamon H., Rotman P., Les porteurs de valises, 1982, Point Histoire.
Emprin G. «  Militants de la décolonisation en Isère  » in R. Branche et S. Thénault, La France en Guerre 1954-1962.
Buton F. «  Quand les disponibles ne veulent pas l’être. Le « mouvement des rappelés » pendant la guerre d’Algérie.  », disponible sur son site in

 

 

Publié dans le numéro de Mai 2011
https://www.lepostillon.org/Les-manifestations-de-rappeles-de.html
 
 
 

Rédigé le 19/05/2022 à 09:55 dans France, Guerre d'Algérie | Lien permanent | Commentaires (0)

« En Algérie, on nous appelait les Français de France », ce Vannetais se souvient

 

Michel Le Hur, habitant Vannes (Morbihan), fait partie des centaines de soldats envoyés en Algérie, pour une guerre qu’ils ne cautionnaient pas. Il souhaite que l’Histoire se souvienne des « rappelés ».

 

  TÉMOIGNAGE. « En Algérie, on nous appelait  les Français de France », ce Vannetais se souvient

A 3 h du matin, les gendarmes de Vannes ont cherché Michel Le Hur dans son appartement du troisième étage de ce petit immeuble, pour l’envoyer servir en Algérie. | OUEST-FRANCE

 

 

Près de 70 ans après son incorporation de force dans les rangs de l’armée française et son envoi en Algérie, Michel Le Hur, 93 ans, ne comprend toujours pas que l’épisode des « rappelés de la guerre d’Algérie » soit passé sous silence. « De nombreux reportages sont diffusés en ce moment à la télévision sur ce conflit de 1954 à 1962. Aucun ne parle de nous », s’offusque cet habitant de Vannes (Morbihan).

Si l’histoire de ces militaires est tombée dans l’oubli, la mémoire de Michel ne le trahit pas. Il se souvient des moindres détails de son enfance, puis des années d’avant-guerre. De sa naissance à La Roche-Bernard, à son arrivée à Vannes, où lui, son frère et ses parents emménagent au troisième étage d’un petit immeuble situé place de la Préfecture. « Ma mère tenait une épicerie au rez-de-chaussée. Lorsque j’ai eu 14 ans, elle est tombée malade. J’ai tenu la boutique tout seul pendant quatre mois. »

Appelés, mais contre la guerre

Brevet élémentaire en poche, le jeune garçon commence à enseigner au Faouët (Finistère) puis à l’école Saint-Joseph de Vannes. « J’avais soixante gosses sous ma responsabilité, à 16 ans et demi. En parallèle, je prenais des cours particuliers et je suis finalement entré aux ponts et chaussées, à 18 ans ».

Alors en poste comme dessinateur auxiliaire, Michel est envoyé au 3e Génie de Metz, pour y effectuer son service militaire. A son retour à Vannes, la guerre sévit en Algérie. Les gendarmes frappent aux portes des hommes mobilisables. Il en fait partie. « Un jour de 1954, ils ont toqué chez ma mère. Elle avait perdu son premier fils, elle a donc dit qu’elle ne savait pas où j’étais. Ils m’ont cherché pendant trois jours. Un matin, ils sont venus à 3 h et m’ont embarqué. »

Sur le quai de la gare de Vannes, les freins du train ont été sabotés. Premier acte de résistance des opposants au conflit algérien. Avec du retard, le convoi finit par rejoindre Angers. « Là-bas, on a récupéré d’autres jeunes rappelés. Il y avait des CRS partout pour éviter qu’on s’échappe. » Les contingents finissent par arriver à Marseille, dernière étape avant l’Algérie. « Tout le long du trajet, les gens nous faisaient des signes de soutien. On avait noté Paix en Algérie sur le wagon. »

Appliquer la loi de France

Quelques jours plus tard, Michel et ses camarades de régiment foulent le sol algérien, sans illusion. « En France, on lisait le Nouvel Obs, et L’Express. On savait ce qu’il se passait en Algérie. On était contre la guerre. On voulait en sortir par la négociation avec le FLN (Front de libération nationale, NDLR). »

Les appelés déjà sur place, à Sidi-Aïch dans le nord du pays, les accueillent avec soulagement et leur racontent les horreurs du conflit. « Leur capitaine était un fou furieux. Un vrai tueur. Nous, on était dans le génie civil. On avait six mois pour construire une piste d’aviation. Mais on a vite déchanté. » Une cinquantaine de Kabyles, censés travailler avec eux, ne viennent plus sur le chantier. « On a su qu’ils n’étaient pas payés depuis le début de la guerre. C’était une aberration. »

Les militaires français découvrent avec révolte le traitement réservé aux Algériens. Aucun salaire, pas de pension versée aux anciens combattants qui ont pourtant servi en France pendant la Seconde Guerre mondiale et aucune infrastructure pour la population. « Les locaux ne connaissaient pas un mot de français. Il n’y avait pas une école à 90 km à la ronde ! »

Quelques actes militants

Par leur détermination, Michel et les autres appelés font bouger les lignes : « Pour protester, on a stoppé le chantier. Le lendemain, un hélicoptère est arrivé avec à son bord un colonel. On lui a expliqué tout ce qu’on avait vu. Vingt-quatre heures plus tard, un télégramme est arrivé à l’administration. Tous les salaires ont été versés aux ouvriers kabyles. »

En six mois passés en Algérie, Michel a su se faire apprécier des locaux par son humanité. « On nous appelait les Français de France. Simplement parce qu’on appliquait la loi française. » Pour lui, les rappelés de la guerre d’Algérie méritent une mise en lumière : « Notre conviction et notre position très claire contre la guerre ne doivent pas être oubliées. »

 

 

 

Ouest-France  Luca SALVATORE.Publié le 19/03/2022 à 06h27
https://www.ouest-france.fr/bretagne/vannes-56000/temoignage-vannes-en-algerie-on-nous-appelait-les-francais-de-france-e6b7465e-a6c8-11ec-bb5f-259079a5b0f7
 
 

Rédigé le 19/05/2022 à 09:17 dans France, Guerre d'Algérie | Lien permanent | Commentaires (0)

La Guerre d’indépendance, les Accords d’Evian

 

 

 

Ce mois de mars a été extrêmement riche en activités auxquelles Coup de soleil ne pouvait manquer de participer, puisqu’il s’agissait de l’Algérie et de la Guerre d’indépendance à laquelle les Accords d’Evian ont mis fin il y a soixante ans. Pour parler de cet événement La Lettre vous propose une mise au point très éclairante de Tahar Khalfoune, extraite de sa conférence du 16 mars à Sciences Po Lyon.
Il n’empêche que la littérature et la vie des gens telle qu’elle la raconte ont leur place dans cette Lettre, sous la forme de trois romans, « L’amour des choses invisibles » de Zied Bakir, « Amour extérieur nuit » de Mina Namous, « Tous les mots qu’on ne s’est pas dits » de Mabrouk Rachedi. Et comme l’actualité en bande dessinée est riche ces dernières semaines, nous vous invitons de faire connaissance avec le dernier album de Zac Deloupy et Swann Meralli « Appelés d’Algérie » .
Il y a certainement un peu de malice dans le rapprochement des deux films dont il est question dans cette Lettre, car ils sont on ne peut plus différents, celui de Guiraudie  « Viens je t’emmène » comportant une part de provocation tandis que celui de la Tunisienne de Salma Baccar »El Jaïda » est un bel exemple de cinéma humaniste et militant.
Nous terminons par un article que nous a confié Claude Bataillon sur le dernier roman de Leïla Slimani, en fait le 2e de ce qui est annoncé comme un trilogie. Ne manquez pas de lire l’appel qui est adressé à la fin de cet article à tous les lecteurs et lectrices de La Lettre de Coup de Soleil RA, y répondre serait un moyen pour tout le monde de participer au réveil post-covidien longtemps attendu.

Denise Brahimi

Merci à Julia Andersson, stagiaire Erasmus suédoise dans notre association, pour la saisie et le mise en page de cette Lettre.

De quelques aspects juridiques des Accords d’Evian par Tahar Khalfoune
Conférence du 16 mars 2021 à Sciences Po Lyon)
 
Soixante ans après leur signature le 18 mars 1962 à Évian-les-Bains en Haute Savoie par Krim Belkacem et Louis Joxe, représentants respectivement le Gouvernement Provisoire de la République Algérienne (GPRA)
 
et le gouvernement de Michel Debré, les Accords d’Évian, 
dont le cessez-le-feu est entré en vigueur le 19 mars à 12h00, ont scellé officiellement la fin de la guerre d’Algérie qui a duré plus de sept ans et d’une longue nuit coloniale de 132 ans. Le processus des négociations, ayant abouti à leur signature, fut loin d’être un long fleuve tranquille, cet accord de paix fut préparé par de nombreuses rencontres secrètes sans succès tant en France qu’en Suisse et en Égypte…, à commencer par celle de Melun (25-29 juin 1960), puis de Lucerne le 20 février et de Neuchâtel le 5 mars 1961, d’Evian I (20 mai-13 juin 1961), en passant par les rencontres de Lugrin (20-28 juillet 1961), de Bâle, (28 octobre, puis le 10 novembre qui connurent des avancées décisives), des Rousses (18 – 25 février 1962) jusqu’à l’ultime rencontre qui a eu lieu de nouveau à Évian du 7 au 18 mars 1962. Tous ces rendez-vous ont préparé en quelque sorte l’accord final, et les ultimes négociations n’ont fait en vérité qu’entériner ce qui a été décidé quelques semaines auparavant lors de la réunion décisive des Rousses.
 
Pendant sa négociation et après sa conclusion, cet accord a suscité de graves conflits et désaccords au sein de chaque partie. Les officiers de l’état-major général (EMG) de l’Armée de libération nationale (ALN) l’ ont sévèrement dénoncé dans une espèce d’alliance objective avec l’Organisation Armée Secrète (OAS), une organisation politico-militaire clandestine, dirigée par le général Raoul Salan, fondée le 11 février 1961, pour la défense de la présence française en Algérie par tous les moyens, y compris le terrorisme. Les ultras de l’OAS reprochèrent au général de Gaulle et son gouvernement d’avoir capitulé et abandonné l’Algérie aux Algériens, alors que l’armée a triomphé sur le terrain de la guerre depuis, notamment le déploiement des redoutables opérations du général Challe (février 1959- avril 1961), et organisèrent des attentats visant aussi bien les forces de l’ordre que la population algérienne. De leur côté, les dirigeants de l’EMG (Houari Boumediene, Ali Mendjeli, Ahmed Kaïd et le commandant Mokhtar Bouyezem) accusèrent le GPRA d’avoir trahi et offert l’Algérie à la France.
 
Six décennies plus tard, ils continuent de susciter nombre de questions sur le plan juridique, notamment les modalités de leur entrée en vigueur en ce qui concerne l’Algérie. Notons d’abord qu’en droit international « le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » est consacré par la Charte des Nations unies (art. 1-2) adoptée aux États-Unis (San Francisco) en juin 1945. Puis l’Assemblée générale de l’ONU lors de sa 15eme session du 20 décembre 1960, a adopté une résolution 1514 (XV) sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples colonisés. Rappelons que l’Émir Khaled (petit-fils d’Abdelkader) fut le premier nationaliste à évoquer, dans sa lettre adressée le 23 mai 1919 à Thomas Woodrow Wilson, président des États-Unis d’Amérique, l’injustice du système colonial et à lui rappeler son message (Wilson) à la Russie de mai 1917 « aucun peuple ne peut être contraint de vivre sous une souveraineté qu’il répudie » dans l’espoir que le président Wilson intervienne en faveur des Algériens indigènes et que son message, devenu plus tard un principe onusien, profite aux Algériens.
 
En France, le référendum sur l’autodétermination de l’Algérie, intervenu le 8 janvier 1961, a prévu que le destin politique de l’Algérie sera décidé par les populations algériennes. Après la signature de ces Accords le 18 mars 1962, ils ont été publiés au journal officiel de la République française le 20 mars 1962, puis ratifiés d’abord par les Français par le référendum du 8 avril 1962 (90, 7 %), les Français d’Algérie n’étant pas associés, ensuite par les Algériens grâce au référendum du 1er juillet (99,72 %) de la même année.
L’indépendance fut reconnue le 3 juillet 1962 par une déclaration du président de la République, Charles de Gaulle. Le GPRA, lui, a choisi la date symbolique du 5 juillet – date anniversaire de la prise d’Alger par les troupes du maréchal de Bourmont en 1830 – pour sa proclamation. Précisons que la France n’a pas reconnu le GPRA ; Jean de Broglie, secrétaire d’État chargé des affaires algériennes, a déclaré au Sénat le 21 mars 1962 que ces Accords ne sont pas le fait de deux gouvernements et que la France n’a pas reconnu le GPRA et l’accord n’est pas un engagement international (J.O, Sénat, 21 mars 1962, p. 112). Le secrétaire d’État a tenu à préciser que la France a signé un cessez-le-feu avec le FLN.
 
En effet, il n’était pas possible pour la France de reconnaître l’existence de deux gouvernements au sein d’un même État. Par conséquent, il est, politiquement, plus correct pour le gouvernement français d’admettre que l’accord de paix est signé avec une organisation politique indépendantiste, le FLN. L’historien Charles-Robert Ageron, avisait que les Accords d’Évian sont juridiquement un accord signé par les deux parties, un cessez-le-feu qui engageait le gouvernement français et le FLN. Quant aux déclarations dites gouvernementales accompagnant l’accord, « elles n’étaient pas signées bien que délibérées d’un commun accord », elles n’engageaient pas le GPRA puisque non reconnu par le Gouvernement français.
 
Soulignons aussi que, contrairement au droit français, ces Accords n’ont pas fait l’objet d’une publication au journal officiel de la république algérienne. (L’accord de cessez-le-feu ne fut publié que par le journal El Moudjahid du 19 mars 1962). Même la loi du 31 décembre 1962 qui pourtant reconduit la législation antérieure à l’indépendance est adoptée sous bénéfice d’inventaire puisque les dispositions contraires à la souveraineté nationale et celles qui sont d’inspiration colonialiste ou discriminatoire, ou encore celles qui sont de nature à porter atteinte à l’exercice normal des libertés démocratiques en sont exclues. Or les Accords d’Évian furent condamnés et qualifiés par le programme de Tripoli, issu des travaux de la dernière session (28 mai-7 juin 1962) du Conseil National de la Révolution Algérienne (CNRA), de « plate-forme néocolonialiste ». Ces accords tombent donc sous le coup des dispositions qui ne doivent pas être reconduites.
Alors la question qui se pose d’elle-même est par quel procédé ces accords étaient-ils entrés en vigueur ? Si pour la France la question semble résolue par leur publication dans le journal officiel du 20 mars 1962 et leur ratification par le peuple le 8 avril 1962, en ce qui concerne  l’Algérie le GPRA s’est engagé dans la déclaration générale sous le titre V « Des conséquences de l’autodétermination » que dès l’annonce des résultats officiels du référendum sur l’autodétermination « les règles énoncées par la présente déclaration générale et les déclarations jointes entreront en même temps en vigueur ». Etant donné que la France n’a pas reconnu le GPRA, la déclaration générale des Accords publiée par le Monde du 20 mars, le sigle GPRA est remplacé par celui du FLN. La ratification populaire de l’autodétermination du 1er juillet 1962 est donc le procédé d’entrée en vigueur des dispositions de ces Accords. Ainsi le résultat de ce référendum, en vertu des dispositions de ce même accord, engage en principe l’État algérien.
 
En dernière analyse l’on peut dire que, malgré leurs insuffisances, les dénonciations et les suspicions dont ils continuent de faire l’objet, ces accords revêtent le caractère d’un traité international, ne serait-ce que parce qu’ils ont produit des effets dans les deux pays quand bien même ils les ont modifiés de fait, partiellement appliqués et enfreints sur certains aspects. Ils n’en ont appliqué que ce qui leur convenait en fonction de leurs intérêts. Il s’agit en quelque sorte d’un traité à la carte, c’est-à-dire que l’on en a choisi de part et d’autre ce que chacun a bien voulu appliquer et ce qu’il a entendu rejeter. En vérité, l’ineffectivité de certaines dispositions de cet accord ne le distingue ni de certains traités internationaux appliqués partiellement ni du droit algérien en général parce qu’il n’est pas rare de voir l’État algérien se soustraire aux engagements internationaux auxquels il a souscrit et aux normes qu’il a lui-même édictées, et au premier rang desquelles les normes constitutionnelles.
 
 

 

Posted on 2022-03-30 by Coup de soleil en Rhône-Alpes

https://www.coupdesoleil-rhonealpes.fr/lettre-culturelle-franco-maghrebine-64

 

 

 

 

 

Rédigé le 18/05/2022 à 17:16 | Lien permanent | Commentaires (0)

80 ans de « L’Étranger » d'Albert Camus : les 10 émissions indispensables

 

Le 16 mai 1942, paraissait le premier livre d’Albert Camus. Rédigé dans un petit hôtel, pendant l’occupation, cet ouvrage allait marquer la littérature par son propos, et son style. Il s'est vendu à 10 millions d'exemplaires, et connu un destin mondial. Sélection d'émissions.

 

Albert Camus

 

1- A l’origine de « L’Étranger », l'ennui d'Albert Camus

Avant la parution de L'Etranger, l’écrivain avait fait une première tentative : « La mort heureuse », un livre dans lequel il consignait tout ce qu’il faisait… Et qui s’était écoulé à 300 exemplaires ! En 1940, Albert Camus a quitté son Algérie natale pour Paris. Mis à la porte du journal où il travaillait à Alger en raison de ses activités anti-coloniales, il rejoint la rédaction du journal Paris-soir. Comme il s’ennuie, il commence à écrire. La rédaction a lieu dans un hôtel sombre en face du bateau-lavoir à Montmartre. Mais cette fois-ci, la rédaction va couler de source.

🎧 ECOUTER | La Marche de l’Histoire de Jean Lebrun sur L’Étranger

 

2 - « L’Étranger », ou la dénonciation de l’absurde

Que raconte ce livre publié au printemps 1942, entre autres grâce à l’intervention d’André Malraux ? « La voix du narrateur est celle d'un jeune homme qui vit à Alger, travaille dans un bureau, il enterre sa mère, couche avec une copine, est mêlé à une histoire louche et tue un Algérien – tout ça raconté au même niveau, d'une voix calme et sans affect. Après son crime, il est condamné à mort, et c'est là, dans sa cellule, que l'absurde lui saute aux yeux : l'absurde du système judiciaire et de la condition humaine... »

🎧 ECOUTER | Livres et châtiments de Clara Dupont-Monod

3 - « L’Étranger », œuvre majeure

En 2020, Laure Adler consacrait quatre émissions au livre d’Albert Camus. Au début de chacune, Albert Camus lit lui-même L’Étranger. La première émission évoquait l’engagement politique de l’écrivain. Lorsqu'il était un jeune homme engagé du côté des communistes, Albert Camus a œuvré pour combattre l’inégalité et la pauvreté du peuple algérien sans pour autant comprendre l’importance de la question nationale.

🎧 ECOUTER | L’Heure bleue avec le regard de l’historien Benjamin Stora

La seconde met le projecteur sur l’aspect littéraire de L’Étranger avec Alberto Manguel écrivain et critique littéraire argentin, et surtout un bibliophile insatiable. L’Étranger est un livre qui a marqué toute sa génération. Il l'a lu comme un texte surréaliste, avec cette idée que quelque chose d’essentiel peut nous arriver sans explication et sans cause évidente.

🎧 ECOUTER | L'Heure bleue avec Alberto Manguel

Dans la troisième, il est question de l'influence d'Albert Camus dans le milieu littéraire avec Atiq Rahimi. À l’université, l’écrivain afghan a été puni pour une conférence sur l'auteur de l'Etranger. Pour le gouvernement, Albert Camus n’était qu'un écrivain engagé auprès des Soviétiques. Aujourd'hui, il retient de L'Étranger le style littéraire particulier avec peu d’adjectifs, des phrases courtes, limpides et transparentes.

🎧 ECOUTER | L'Heure bleue avec Atiq Rahimi

Enfin, dans la quatrième, il est question avec Marc Crépon de l'aspect philosophique du livre d'Albert Camus. L'histoire de L’Étranger rappelle la possibilité toujours ouverte que la vie nous échappe et que notre propre vie peut tomber hors de nous.

🎧 ECOUTER | L'Heure bleue avec Marc Crépon

4 - Quand Vincent Lindon lit le Le Discours de Stockholm » d'Albert Camus

En 1957, Albert Camus reçoit le Prix Nobel de Littérature. À cette occasion, il prononce un discours. Il remercie son enseignant, et précise la place de l’artiste dans la Cité.

🎧 ECOUTER | Vincent Lindon, invité de l’émission Boomerang d’Augustin Trapenard, et aussi : Le discours de Stockholm dans l’émission Affaires sensibles de Fabrice Drouelle

5 - Albert Camus de l’Algérie à Paris

La pauvreté à Alger, le choix d'être écrivain à 17 ans, son attachement à l'Algérie... Agnès Spiquel, professeur émérite de littérature française à l’Université de Valenciennes et qui fut aussi présidente de la Société des Études camusiennes revient sur la première partie de la vie de l'écrivain.

🎧 ECOUTER | Autant en emporte l'histoire avec Stéphanie Duncan.

6 - La vie et l'oeuvre d'Albert Camus

Dans 2000 ans d’Histoire, Patrice Gelinet recevait Yves Guerin l’auteur du dictionnaire Camus chez Robert Laffont. Il retrace la vie et l’œuvre de l’écrivain philosophe. La jeunesse pauvre à Alger, l’engagement auprès des communistes, le succès de L’Étranger... Une archive rediffusée en 2020

🎧 ECOUTER | Albert Camus, épisode 1, dans France Inter + en 2020

7- « La Peste », l'autre monument d'Albert Camus

Le comédien Reda Kateb lit des extraits du roman de 1947 d'Albert Camus. Une dénonciation des régimes totalitaires. Le récit qui se déroule dans les années 1940 à Oran. Il retrace l’apparition, l’apogée, puis le déclin d’une épidémie de peste qui frappe la ville, la coupe du monde extérieur, et agit comme révélateur de comportements très contrastés dans la population.

🎧 ECOUTER | Ca peut pas faire de mal, l'émission de Guillaume Gallienne

8 - Albert Camus par lui-même

Le 10 décembre 1957, Albert Camus va recevoir le Prix Nobel de Littérature, mais il ne le sait pas encore quand il répond, le 11 mars 1957, sur la Radio-Télévison-Française , à une série d’entretiens menés par le journaliste, Jean Mogin, sur son travail d’écrivain et d’auteur dramatique. Au cours de l'émission, il revient également sur les deux thèmes importants de son œuvre : l’absurde et la révolte.

🎧 ECOUTER | France Inter + avec des archives

9 -La correspondance entre Maria Casarès et Albert Camus

En mars 1944, Michel Leiris organise une petite réunion chez lui, à l'occasion d'une lecture d'un texte de Picasso. C'est là que vont se rencontrer la comédienne, Maria Casarès, et l'écrivain, Albert Camus. Ils deviennent amants le 6 juin 1944. Commence un voyage de quinze ans où l’un et l’autre joueront, en alternance, Ulysse et Pénélope.

🎧 ECOUTER | La correspondance Camus-Casarès dans la Marche de l'Histoire de Jean Lebrun

10 - La mort tragique d'Albert Camus

Camus disparaît au moment même où, de partout, s’échangeaient les vœux pour l’année 1960. On a retrouvé un manuscrit dans une sacoche dans la voiture accidentée. Ce sera : Le Premier Homme.

🎧ECOUTER | La Marche de l'histoire sur la mort d'Albert Camus

 

 

 

par France Inter publié le 18 mai 2022 à 8h06

https://www.franceinter.fr/culture/80-ans-de-l-etranger-de-camus-les-10-emissions-indispensables

 

 

 

Rédigé le 18/05/2022 à 16:09 dans Camus | Lien permanent | Commentaires (0)

Mémoires d'Algérie 1962-2022 : "A l'indépendance, beaucoup de harkis auraient préféré rester chez eux"

 

Vidéo :

https://vodinfo.tv5monde.com/upload/2022/03/VFINALE_memoires_dAlgerie_-_Fatima_Besnaci-Lancou_V8.mp4

 

Fatima Besnaci-Lancou est née en Algérie quelques semaines avant le début de la guerre qui a commencé le 1ᵉʳ novembre 1954. Historienne, éditrice à la retraite, elle travaille sur la question de la guerre d'Algérie en général et plus particulièrement sur la question des harkis. Elle est elle-même fille de harki.  

 

TV5MONDE : Vous êtes issue d’une famille d’agriculteurs sans aucune attache en métropole. Vous êtes née en 1954. Comment et pourquoi votre père se retrouve-t-il dans le “camp” des harkis, qui vont se battre aux côtés de l’armée française contre les indépendantistes algériens ?  

Fatima Besnaci-Lancou : En fait, je pense que son histoire est très banale. C'est l'histoire des paysans algériens. Les harkis ne sont pas des urbains, c'étaient des ruraux, donc isolés. Il se trouve que le FLN avait besoin de ces paysans pour se nourrir, pour trouver de l'argent, pour avoir un lieu de repli. Il s’est donc tourné vers ces paysans isolés dans des fermes. Cela se passait la nuit. Et puis dans la journée, c'étaient les militaires qui allaient voir aussi ces paysans pour vérifier qu’ils n'aidaient pas les indépendantistes. Ces paysans vont donc basculer d'un côté ou de l'autre. Soit du côté FLN ou de son bras armé l’ALN, soit en rejoignant l'armée française.  

Ma famille aidait les indépendantistes et l’armée, qui était très présente autour de chez nous, l’a su. 

Un jour, début 1957, les militaires sont venus dans la ferme, ils ont ramassé les hommes de la famille pour les emmener dans le village, où il y avait une caserne française. On ne sait pas très bien ce qui s'est passé. On parle de sévices corporels, etc. Puis ils ont fini par les relâcher parce que mon grand-père était chef de tribu et s'il avait été tué, les militaires avaient compris que c'était toute la tribu qui allait rejoindre les indépendantistes. 

A leur retour à la ferme, le FLN a condamné à mort mon grand-père et ses deux fils. Pour le FLN, s’ils n’avaient pas été tués, c’est soi-disant parce qu’ils avaient parlé. Heureusement, comme ils avaient nourri certains jeunes gens du maquis pendant plusieurs années, il y a eu une espèce de reconnaissance du ventre. Certains de ces hommes sont donc allés voir mon grand-père en lui disant de nous mettre à l'abri parce qu’ils avaient reçu l’ordre de tuer hommes, femmes et enfants. 

Mon grand-père a donc demandé aux militaires qui nous avaient mis dans cette situation de nous protéger. 

C’est mon premier souvenir, très flou, celui de militaires armés qui nous ont descendus vers le village où nous avons été logés dans une petite maison qui appartenait à mon arrière grand-mère et à ma grand-mère. Se sachant menacés, mon père et mon oncle, qui étaient plus jeunes, se sont engagés dans l'armée. Ils se sont armés, non pas pour se venger ou pour défendre le système colonial, mais simplement pour être sûrs d'avoir des armes en cas de besoin. Pour se protéger. 

TV5MONDE : Cet engagement ne s’est donc pas fait par convictions. 

Non, pas du tout. Et vous ne trouverez pas beaucoup de harkis qui ont fait ça par convictions.  

Harki est un mot d'origine arabe qui trouve sa source dans le mot harakat, qui signifie déplacement, mouvement. Souvent considérés comme des traîtres, ils ont été chassés lors de l’indépendance algérienne. Ils sont près de 100.000 à avoir fui l’Algérie dès 1962 direction la France, sans que rien ne soit prévu pour les accueillir. 

TV5MONDE : Faisons un bond vers 1962. C’est l’indépendance. Et vous, vous partez à ce moment-là, c'est ça ? 

En fait, à l'indépendance, beaucoup de harkis auraient préféré rester chez eux. D'abord, un paysan est attaché à sa terre. Un paysan part, quitte ses terres parce qu'on le violente, parce qu'on veut le tuer, parce qu'on a empoisonné son puits. Donc le choix, c'était de rester. Mais il s'est passé quelque chose, c'est qu'on a massacré une partie de ma famille. Donc l'été 62, on a commencé par tuer mon grand-père. Il a été enlevé, torturé, tué. Et on ne nous a pas rendu son corps. L'idée de rester en Algérie n'était plus possible. Et voilà pourquoi ma famille est partie avec l'aide de militaires français. 

On est parti assez discrètement. D'abord parce que ma maman n'avait pas le cœur à dire au revoir à ses parents et puis à ses frères et sœurs qui allaient rester en Algérie.  

Entre octobre 62 et février 63, près de 90 000 personnes ont quitté l'Algérie pour fuir les violences et est à peu près la moitié ont été rapatriés par des militaires et l'autre moitié est arrivée par la voie de l'immigration économique.  

TV5MONDE : Lorsque vous mentionnez ce rapatriement “par des militaires”, c’est un élément très important... 

Paris avait dit non, on ne veut pas des harkis. Il faut les laisser sur place. Leur pays c'est l'Algérie. Le général de Gaulle a dit “ce ne sont pas des rapatriés, ce sont des réfugiés”. Mais certains militaires ont désobéi. Certains ont dit “écoutez, si on ne peut pas partir avec les harkis et leurs familles qu'on connaît, on reste sur place tant qu’ils ne sont pas à l’abri”. Il y a tout de même eu des massacres. Dès les premiers jours de l'indépendance, des hommes ont été ramassés, jetés dans des camps d'internement où ils ont été torturés, parfois violés. Dans un camp en Kabylie, on a jeté de l'essence sur près d'une centaine d'hommes, puis on a mis le feu. Il y a eu des massacres terribles. Certains sont restés dans les prisons ou dans les camps d'internement jusqu'en 1969. 

TV5MONDE : A quel moment quittez-vous l’Algérie finalement ? 

Le 21 novembre 72, on nous a mis dans les cales d'un bateau, direction Port-Vendres, dans le sud de la France, à une soixantaine de kilomètres du camp de Rivesaltes. Une noria de camions nous attendait. On nous a alors emmenés vers le camp de Rivesaltes. 

TV5MONDE : Aujourd'hui, rétrospectivement, comment est-ce que vous regardez cette histoire qui est la vôtre ? 

Je me dis je me dis quel gâchis ! Je pense qu'on aurait dû décoloniser très vite. Et il y a une responsabilité des gouvernements français, une responsabilité accablante parce qu'ils ont détruit la vie de millions de personnes.  

60 ans après, de ce côté de la Méditerranée, des descendants de harkis luttent pour qu'on reconnaisse ce qu'on leur a fait. Et de l'autre côté de la Méditerranée, ce sont des jeunes aussi qui luttent pour avoir plus de justice, plus de droits. C'est beaucoup, beaucoup de gâchis pour moi. 

60 ans après, de ce côté de la Méditerranée, je pense qu'il y a encore des personnes qui ne comprennent pas pourquoi l'Algérie est indépendante, et du côté algérien, ils se servent encore de l'histoire, ils en font parfois une question centrale. En fait, c'est juste incompréhensible.  

 

Des harkis, ici dans un atelier du camp de Rivesaltes vont rejoindre des hameaux de forestage après leur séjour dans des camps d'internement.
Des harkis, ici dans un atelier du camp de Rivesaltes vont rejoindre des hameaux de forestage après leur séjour dans des camps d'internement.
© Mémorial camp de Rivesaltes

 

 

18 MAR 2022
Mise à jour 20.03.2022 à 10:59  
Matthieu Vendrely

https://information.tv5monde.com/afrique/memoires-d-algerie-1962-2022-l-independance-beaucoup-de-harkis-auraient-prefere-rester-chez

 

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Rédigé le 18/05/2022 à 11:05 dans France, Guerre d'Algérie | Lien permanent | Commentaires (0)

Harkis L'exil ou la mort Taouss Leroux Moissons noires

 

Harkis, L'exil ou la mort

 

Un roman sur l’exil forcé, sans liberté de choix et sur le traitement de tous ces hommes et ces femmes qui ont tout perdu du jour au lendemain à l’occasion d’un événement politique indépendant de leur volonté.
Amelle a grandi dans un village en Algérie jusqu’au jour où la guerre est venue bouleverser sa vie. Après avoir combattu aux côtés de la France, contre son gré, son mari Wassim et son père n’ont pas eu d’autre choix que de fuir l’Algérie car tous deux étaient devenus des traîtres pour leur pays. Ils partirent donc en famille pour un voyage mouvementé.
Tout d’abord parqués dans un camp dans des conditions déplorables, ils arrivent en ville. Dans cet univers Wassim travaille pour subvenir aux besoins de sa famille et tenter de survivre à l’inconcevable et à la culpabilité.
Entre détresse et courage, tradition et liberté, amour et trahison, Amelle va se battre contre le mal du pays et contre les obstacles qui viennent la freiner dans son intégration en France qu’elle sait vitale pour ses proches.

 

 

https://www.lalibrairieniort.com/livre/20501288-harkis-l-exil-ou-la-mort-taouss-leroux-moissons-noires

 

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Rédigé le 18/05/2022 à 10:23 dans France, Guerre d'Algérie | Lien permanent | Commentaires (0)

Fidel Castro, un héros africain oublié

 

Fidel Castro

 

 

Parmi plus de 380 000 soldats cubains qui ont combattu pour les indépendances africaines, au moins 12 000 sont morts. Fidel Castro a été un acteur important des décolonisations africaines. Une Histoire que les Africains ont tendance à oublier…

Le 13 août 2016, pour son 90e et dernier anniversaire, le chef de la révolution cubaine, Fidel Castro, portait le survêtement de l’équipe de football nationale de l’Algérie. C’était alors la dernière apparition publique d’«el Comandante ». Un peu plus de trois mois plus tard, Castro décède. En Afrique, de nombreux pays ont décrété un deuil national en son honneur.

Incompréhensible pour l’Occident. Mais incompréhensible aussi pour une grande partie de la jeunesse africaine. Si l’on n’est pas Angolais, Algérien, ou Bissau-Guinéen, difficile de comprendre la relation entre le leader cubain et l’Afrique. Certains médias africains annonçaient la mort du « tyran cubain », une narrative que même les médias occidentaux n’osaient pas.

Mais, si l’on ne doit pas pour autant oublier les figures de la libération de l’Afrique du joug de la colonisation européenne, Fidel Castro a, lui aussi, une place indéboulonnable dans l’Histoire africaine du XXe siècle.

La politique nationale de Fidel Castro ne regarde pas outre-mesure les Africains. Il faut toutefois dénoter le système de santé à Cuba, salué d’ailleurs par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui considère les soins publics cubains comme « un exemple pour le monde entier ». L’ère Castro a laissé aussi le plus haut taux de vaccination contre les maladies virales du monde entier — l’immunisation à Cuba s’élève à plus de 96 % contre 27 maladies selon une recherche américaine. Puis, si on en croit l’Unicef, l’alphabétisation à Cuba s’élevait à 100 % à la mort de Fidel Castro.

Si tous ces indicateurs de gouvernance peuvent être mis en doute, la contribution cubaine à la libération de l’Afrique, elle, demeure un fait largement documenté.

Afrique-Cuba, une amitié née dans le sang des martyrs

En 1987, le Los Angeles Times affirmait que 10 000 soldats cubains avaient été tués en Angola depuis 1976. « Un chiffre proportionnellement plus grand que le nombre d’Américains morts au Vietnam », affirmait le journal américain.

Selon Fidel Castro lui-même, « 381 432 soldats cubains se sont battus main dans la main avec des soldats africains pour l’indépendance nationale ou contre une agression étrangère ». Une estimation d’un Fidel Castro qui était friand de précisions, que personne n’a jamais niées.

Car la lutte anticoloniale afro-cubaine fait partie de ce peu de romantisme révolutionnaire que les indépendances africaines ont pu, un jour, revendiquer. Aujourd’hui, l’amitié afro-cubaine, tout autant que l’indépendance africaine, sont également incertaines.

Si on peut rappeler la répression de l’opposition à Cuba pendant le long mandat de Castro, « l’une des plus grandes ironies est que les mêmes personnes qui exigent la reconnaissance de ses torts, étaient du mauvais côté de l’Histoire ou ont parrainé des dictatures dans de nombreux pays africains », écrit l’auteur Sean Jacobs.

Après avoir libéré Cuba du règne corrompu de Batista en 1959 et pris le pouvoir, Fidel Castro s’est rapidement retrouvé aux antipodes des Etats-Unis et des pays occidentaux en général. Mais contrairement à ce que l’on pourrait penser, son rapprochement de l’Union soviétique s’était opéré par élimination. Pour Fidel Castro, la diplomatie relevait d’un facteur : la décolonisation et l’intérêt commun.

La campagne militaire africaine de Fidel Castro

Pour cette raison, ainsi que son activisme dans les réseaux antiracistes depuis l’adolescence, Fidel Castro s’était rapidement tourné vers l’Afrique. Il faut préciser qu’une majorité de Cubains étaient aussi descendants d’Afrique.

Le premier « acte africain » concret de Castro a été son soutien à l’indépendance algérienne pendant la guerre d’Algérie au début des années 1960. Trois ans plus tard, Cuba avait envoyé des soldats pour entraîner les guérilléros d’Amílcar Cabral au Cap-Vert en en Guinée-Bissau. C’était d’ailleurs ce dernier qui avait déclaré : « Quand les combattants cubains rentreront chez eux, ils n’emporteront que les restes de leurs compagnons morts ».

Le 24 avril 1965, le compagnon de Fidel Castro, Ernesto « Che » Guevara a débarqué dans l’est de l’actuelle République démocratique du Congo (RDC). Accompagné de soldats, de docteurs et d’infirmiers, le contingent cubain a mené une guerre sanglante contre les troupes américaines et belges déployées alors du Tanganyika jusqu’au Kasaï.Plus tard, entre 1966 et 1974, les forces cubaines ont combattu avec le PAIGC pour l’indépendance de la Guinée-Bissau. Puis, depuis 1976 et jusqu’à la fin de l’apartheid en Afrique du Sud, des dizaines de milliers de soldats cubains ont arpenté l’Afrique australe, infligeant des défaites humiliantes à l’armée sud-africaine et ses alliés rebelles angolais.

Nelson Mandela écrivait d’ailleurs, depuis sa prison de Robben Island : « C’est la première fois qu’un pays d’un autre continent vient, non pas pour prendre quelque chose, mais pour aider les Africains à obtenir leur liberté ».

 

 

 

 
mercredi 18 mai 2022, à 14:22
Dans L'Afrique d'hier
https://lejournaldelafrique.com/fidel-castro-un-heros-africain-oublie/
 
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Rédigé le 18/05/2022 à 09:57 dans Divers | Lien permanent | Commentaires (0)

Plusieurs pays du Moyen-Orient touchés par des tempêtes de sable

 

Plusieurs pays du Moyen-Orient touchés par des tempêtes de sable

Un jeune Iranien se tient sur une colline qui surplombe Téhéran, recouverte par un épais nuage de poussière, le 17 mai 2022. Photo AFP

 

 
 

Des tempêtes de sable ont provoqué des hospitalisations, des fermetures d’écoles et des perturbations du trafic aérien dans plusieurs pays du Moyen-Orient.

Mardi, un épais nuage de poussière a recouvert la capitale saoudienne, Riyad, dont la tour emblématique Kingdom Centre est devenue invisible à plus de quelques centaines de mètres. Le centre météorologique du royaume avait prévu des « vents poussiéreux », « réduisant la visibilité » dans la capitale, l’est du pays et plus à l’ouest, dans les villes saintes de La Mecque et de Médine, selon l’agence officielle SPA.

Des conditions similaires étaient observées dans d’autres pays du Golfes comme à Bahreïn, au Qatar et aux Émirats arabes unis.

Le phénomène n’est pas rare dans une région connue pour ses déserts, mais sa fréquence a augmenté ces derniers mois, alimentée par les sécheresses et les faibles précipitations liées au changement climatique.

L’Irak a connu huit tempêtes de sable depuis la mi-avril. La dernière en date a entraîné lundi l’hospitalisation de près de 4 000 personnes pour des troubles respiratoires, et la fermeture de l’aéroport à cause « d’une visibilité de 300 mètres », des écoles et des administrations publiques dans tout le pays. À Bagdad, les toits, les voitures et même les meubles dans les maisons étaient recouverts d’une couche de sable jaune très fin.

En Iran, les administrations, les écoles et les universités étaient fermées mardi dans plusieurs provinces en raison de tempêtes de sable, selon les médias d’État.

Au Koweït, le trafic aérien a été suspendu pendant une heure et demie lundi, et le trafic maritime dans les trois ports est resté suspendu mardi après-midi. Le ministère de l’Éducation a annoncé la réouverture des écoles mercredi.

Aggravation du phénomène

L’arrivée de masses d’air sec et froid hors saison contribuent à la prolifération des tempêtes de sable dans l’est de la Syrie et en Irak « puis leur transmission à la péninsule Arabique », a expliqué Hassan Abdallah, du centre météorologique WASM, en Jordanie. Lorsqu’elles atteignent l’Arabie saoudite, les tempêtes ont tendance à perdre en intensité, a-t-il ajouté.

L’aggravation du phénomène s’explique par plusieurs facteurs, comme le faible niveau des eaux du Tigre et de l’Euphrate, la fluctuation des précipitations annuelles et la désagrégation des sols, a-t-il ajouté.

Pour y faire face, les pays de la région doivent planter davantage d’arbres et « s’attaquer de toute urgence au faible niveau du Tigre et de l’Euphrate », a estimé Hassan Abdallah.

Dans le centre-ville de Riyad mardi, le sable recouvrait tous les voitures et les bâtiments.

« Travailler à l’extérieur est très difficile à cause de la poussière, mais le chantier doit être livré aujourd’hui », a confié un ouvrier pakistanais se présentant sous le nom de Kalimullah. « J’essaie de me laver le visage de temps en temps », a-t-il ajouté.

« Les tempêtes de sable font partie de notre culture, nous y sommes habitués mais certaines sont violentes », a constaté Abdullah al-Otaibi, un employé saoudien, se dépêchant d’entrer dans son bureau en se frottant les yeux.

 

 

 

Source : AFP

OLJ / le 18 mai 2022 à 00h00

https://www.lorientlejour.com/article/1299945/plusieurs-pays-du-moyen-orient-touches-par-des-tempetes-de-sable.html

 

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Rédigé le 18/05/2022 à 08:55 dans Climat | Lien permanent | Commentaires (0)

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