Le monarque républicain a pris une décision seul, il se retrouve maintenant seul. En son pouvoir souverain et sans partage, le roi avait joué la France en un coup de poker, il l'a fracassée. Il voulait une majorité absolue, il a pulvérisé son parti. Il voulait la stabilité institutionnelle de son pouvoir, il se retrouve face à un risque de désordre encore pire qu'il ne l'était auparavant.
La France est passée à côté du désastre, le parti fasciste n'a pas la majorité absolue tant espérée par lui. Mais je souhaiterais me prononcer avec un recul et une parole extérieurs à la liesse des partisans et électeurs qui se sont mis en barrage pour contrer la peste noire de l'histoire. La porte a été fermée, au loup mais il n'a pas fui, il est encore plus fort et attend son heure. Pourquoi un tel pessimisme, ou une réserve ? Car la joie qui s'exprime n'est en fait qu'un soulagement que le RN n'ait pas obtenu la majorité absolue. Cette joie n'a pas encore laissé place à la raison qui va lui remettre le regard sur la réalité. Regardons les résultats avec un esprit distancié et analysons le comment et le pourquoi un homme seul a tenté une telle folie. Il s'agira beaucoup plus de lui, dans cet article, car c'est l'homme qui dirigera la France pour encore trois ans.
Le Rassemblement National a perdu ?
Je n'ai peut-être pas compris l'arithmétique. Il avait 89 sièges, il en a maintenant 143. Curieuse défaite. Le camp présidentiel comptait 245 sièges, il se retrouve avec 156 sièges. Le Président a porté un coup fatal à ce qu'il restait encore de viable dans le parti qui l'avait porté au pouvoir. Le RN n'attendait que cela, c'est déjà un obstacle qui n'est plus sur son chemin pour la suite.
Quant au grand gagnant de ces élections, Le Nouveau Front Populaire compte désormais 174 sièges. Le NFP, ce n'est pas celui dont les membres s'écharpent, depuis des mois, avec des noms d'oiseaux et qui se sont mis d'accord en quatre jours avec des tas de bisous? Pourtant les longs gourdins cachés derrière leur dos sont visibles à un kilomètre. Un siècle de bagarre dans la gauche, les fameuses « deux gauches irréconciliables », et quatre jours pour une réconciliation, ce n'est pas un mariage précipité ?
Le dernier mariage que la gauche avait célébré datait du début du règne de Mitterrand en 1981. Il avait fini très rapidement par un divorce violent.
Le Président Macron a joué la France par un coup de poker, elle n'a pas été ruinée, a évité la catastrophe mais hypothéqué ses chances dans un avenir incertain.
Un décompte en sièges plus catastrophique que ce qu'il était avant la dissolution, il me faut beaucoup d'imagination pour qualifier le résultat de victoire.
Une déraison incompréhensible
Il n'avait prévenu personne si ce n'est informer la Présidente de l'Assemblée Nationale et le Président du Sénat comme l'impose la constitution. Ils n'avaient aucun pouvoir de bloquer sa décision. De plus il ne les avait avertis que très tardivement, à la vieille de sa décision. Puis la colère de la classe politique comme celle de la population s'était manifestée dès l'annonce d'une dissolution incomprise et dangereuse. Aucun espoir qu'elle ne cesse désormais, juste après la fête.
Emmanuel Macron avait pris acte des résultats catastrophiques des élections européennes. Il avait alors pensé que la nouvelle force du Rassemblement National allait décupler sa capacité de blocage. Mais comment cela se peut-il puisque l'élection européenne n'avait absolument aucun effet sur le nombre de sièges dans l'Assemblée nationale ?
Jupiter redescend de l'Olympe
L'image du dieu mythologique et son règne absolu est assez classique et nous pouvons la reprendre à bon compte. C'est d'ailleurs le Président Emmanuel Macron lui-même qui souhaitait être un « Président jupitérien » dans un entretien en 2016, accordé au magazine Challenges' au moment de sa conquête du pouvoir.
Ses deux prédécesseurs avaient eux aussi été poursuivis par une qualification qui collera à leur image. Nicolas Sarkozy avait été « l'hyper président », celui qui avait théorisé qu'il fallait « créer chaque jour un événement pour que chaque jour nécessite une intervention de la parole présidentielle ». Il était partout, se mêlant de tout et ne laissant aucun espace d'intervention à son gouvernement. C'est pourtant exactement ce que fera Emmanuel Macron.
Quant à François Hollande, il s'est qualifié lui-même de Président « normal » pour se démarquer de l'exubérance de son prédécesseur. Emmanuel Macron, son ministre de l'Economie, avait vécu une normalité du Président qui avait provoqué la fronde de ses partisans et le harcèlement des journalistes qui ont fini par l'étouffer (en amplifiant le rejet populaire à son égard) jusqu'à son abandon d'une nouvelle candidature. C'est la raison pour laquelle Emmanuel Macron avait estimé qu'il fallait éviter les deux écueils et redonner à la fonction la dignité de son rang. Il voulait restaurer l'horizontalité jupitérienne du pouvoir et prendre de la hauteur par rapport aux médias avec lesquels il souhaitait avoir « une saine distance ».
Il voulait se démarquer des deux autres Présidents mais il a créé une déclinaison commune en devenant un « hyper président anormal et rejeté ». Tout cela est démoli, Jupiter redescend de son Olympe.
Le syndrome du premier de la classe
La montée fulgurante d'un homme jeune et sa stupéfiante réussite, en si peu de temps, pour devenir Président de la République avait été jugée comme exceptionnelle. L'homme avait été salué dans son exploit et une route lui était désormais tracée.
Selon ses propres mots, il voulait « gouverner autrement », sortir du tunnel de la « vieille politique » et mettre fin aux blocages des partis politiques qu'il avait connus avec François Hollande face à la crise des « frondeurs » de son propre camp. Il voulait intégrer la France dans le mouvement mondial de la « Start-up nation », redonner à la France sa capacité à s'ouvrir au monde, à créer les conditions de sa modernité et sortir du traditionnel combat historique et stérile entre la gauche et la droite. Il voulait des « premiers de cordée », c'est-à-dire placer au sommet de la pyramide ceux qui ont la capacité de créer, d'innover et d'entraîner un « ruissellement vers le bas », c'est-à-dire au profit des autres. Il avait cru que c'était l'excellence qui gouvernait le monde. Il avait oublié que si cette dernière était indispensable par le dynamisme d'une jeunesse diplômée et la compétence de hauts cadres, il fallait un projet politique qui crée les conditions d'adhésion et d'entrainement d'une société. Il avait cru qu'un pays se gouvernait comme une entreprise.
Ni à droite ni à gauche, nulle part
Pour arriver à cet objectif ambitieux, Emmanuel Macron voulait écarter les corps intermédiaires et créer un centre puissant. Dans toutes ses déclarations, une expression qui va lui coller à la peau « en même temps ». Chaque décision se voulait être ni-ni, ni les vieilles lunes de droite ni celles de gauche. Il avait cru alors avoir trouvé ce territoire central si recherché et jamais réellement découvert, celui qui unit une société. Un fantasme de la politique française qui avait fait dire à François Mitterrand aux journalistes : « le centre est au fond du couloir, à droite ». Puis une autre fois, « curieux que ce centre qui vote à droite ».
Son projet de créer ce centre mythique fut alors d'affaiblir les deux partis de gouvernement qui alternaient au pouvoir depuis 1981, avec l'arrivée de François Mitterrand et de les attirer vers lui. Il avait réussi à débaucher un certain nombre de leurs cadres, séduits par ce jeune homme aux visions d'avenir. En fait, ils souhaitaient surtout quitter deux partis en déclin et prendre leur chance avec un nouveau souffle promis. Ainsi il a détruit les traditionnels partis républicains et de gouvernement. À gauche, le Parti Socialiste et à droite, Les Républicains, qui sont devenus des coquilles presque vides. Il devrait s'en mordre les doigts car ils auraient été ses chances actuelles d'une éventuelle coalition en sa faveur.
À s'acharner à détruire l'existant politique, il n'a créé ni le « ni-ni », ni le « gouverner autrement », ni construire un centre solide. Finalement, il est arrivé nulle part.
Le pouvoir et la solitude du Prince
Goethe affirmait que «la solitude est enfant du pouvoir » et Machiavel que « le pouvoir corrompt, le pouvoir absolu corrompt absolument» (Le Prince, 1513).
Bien entendu, pour Emmanuel Macron on doit écarter la corruption dans le sens de l'appropriation matérielle illégale mais retenir celle de l'esprit. Pour sa défense, on peut également dire que la lourde responsabilité et les décisions quotidiennes importantes pour gérer les affaires de l'Etat nous rapprochent d'une seconde affirmation de Goethe « toute production importante est l'enfant de la solitude ». On doit aussi écarter l'image du pouvoir isolé dans le Palais de l'Elysée. « La république est dans ses meubles » disait Mitterrand lorsqu'il avait reçu des chefs d'Etat, à Versailles. Tous les édifices prestigieux ont été la propriété de la noblesse de sang et d'argent, construits par le fruit du labeur et du talent du peuple. Installer les hommes du pouvoir républicain et leurs administrations dans ces palais est la marque de la magnificence de l'Etat, donc celle du peuple. Cependant, en sens contraire, on peut reprocher à tous les Présidents de la cinquième république d'avoir été envoutés par la puissance qui les isole davantage. Tous les intimes et compagnons qui ont permis au Prince d'accéder au pouvoir ont vécu avec le temps son éloignement progressif et un enfermement dans sa certitude d'être la source de développement et de la protection du pays.
Et maintenant, que peut la solitude ?
Une remarque préalable, cet article est rédigé avant qu'une décision soit prise par Emmanuel Macron. Qu'importe, d'une part il est peu probable que la décision soit prise demain et par ailleurs, cela permet d'analyser toutes les options possibles dans une telle situation. Une seconde dissolution ? La constitution ne le lui permet pas avant un an. La démission ? Emmanuel Macron a déclaré qu'il ne l'envisage pas. Et puis, ce serait donner les clés de la Présidence de la république à Marine le Pen, en considération du mode de scrutin.
Un gouvernement de techniciens ? Il le pourrait, comme ce fut le cas très souvent en Italie, mais ce n'est pas la culture politique française. Certains prétendent que la seule exception fut le Premier ministre Raymond Barre mais ils ont oublié que celui-ci avait des ancrages politiques et une expérience d'élu, maire de longue date de la ville de Lyon, troisième métropole de France. Si l'image du technicien lui était attribuée c'est parce qu'il fut un grand professeur d'économie (le plus grand disait-on à cette époque).
La recherche d'une coalition majoritaire qui lui serait favorable ? À constater l'effort immense pour la gauche de construire le Nouveau Front Populaire alors que les positions politiques de chacune des composantes sont aussi éloignées que les étoiles entre elles. La coalition ne tiendrait pas plus longtemps que les promesses du menteur. J'ai bien peur que la gauche ne s'enthousiasme trop tôt et s'éloigne du chemin de l'unité. Elle est loin d'être atteinte malgré cette soirée de victoire.
La nomination du leader du parti majoritaire ? L'usage le voudrait mais il n'est pas obligé. Il aurait donc le choix entre Bardella et Mélenchon ? Pour une victoire, j'en ai connu des plus stables et durables.
Nommer un Premier ministre en dehors des partis majoritaires ? Dès la première motion de censure, il serait balayé comme une feuille au vent d'automne. Utiliser tous les autres pouvoirs que lui confère la constitution ? Ils sont puissants mais le Président serait alors obligé de refuser tous les textes gouvernementaux ou du Rassemblement National.
Le blocage permanent est-il dans le rôle de la fonction et de l'intérêt de la France pendant une année, avant la prochaine dissolution ? En conclusion, donner les clés à un jeune premier de la classe qui n'avait aucun parcours politique (dans le sens du militantisme), aucun parti politique enraciné dans les territoires et aucun projet autre que celui du rêve chimérique de détruire l'existant, c'était assurément donner un gros jouet à un enfant gâté. Il l'a fracassé.
En accordant une dense considération pour la bravoure des Palestiniens et leur impressionnant engagement militaire à peine croyable, une forte interrogation ne peut être écartée devant le drame amplifié vécu aujourd'hui en Palestine. Comment en effet, le Mossad, l'un des plus puissants services secrets du monde a-t-il pu faire preuve d'une manifeste indolence et ne pas avoir décelé les prémices d'un rare soulèvement époustouflant jamais provoqué jusqu'ici ? L'interrogation est d'autant plus de circonstance que le renseignement américain n'a pas pour habitude de se laisser aller dans un aveuglement, et les liens comme l'efficace collaboration dans ce domaine entre Washington et Tel-Aviv sont notoirement connus.
Israël n'a jamais fait état de ses pertes matérielles et humaines comme il s'y applique aujourd'hui. Il n'a pas pour habitude de se dénuder, et de plus, il s'applique à mettre en exergue le décompte des tués occidentaux ouvrant le champ libre à leurs médias pour engager d'un crucifix qui a l'air d'une programmation élaborée.
Pour la première fois, le gouvernement israélien intime l'ordre à ses colons de se replier provisoirement et de laisser place vide. L'exigence est parlante. Son poids et son contenu ne sont pas légers quand la politique de colonisation israélienne figure au sommet de sa stratégie hégémoniste. En parallèle, le nombre de centaines de milliers de déplacés palestiniens, femmes, enfants et familles livrés à l'errance, ne cesse d'augmenter. L'un dans l'autre, ces deux déplacements sont significatifs d'un plan bien établi.
Dès lors, il serait une erreur de se laisser bercer par un aura démesuré devant la hardiesse remarquable des combattants palestiniens. Il serait aussi illusoire de croire que le tocsin a sonné pour les «accords d'Abraham», car il se confirme de plus en plus que la reconnaissance offerte par certains pays arabes à Israël n'est pas un don fortuit.
De fait, la diabolisation renforcée que subit le mouvement Hamas n'est qu'une manœuvre pour voiler l'entame d'une décision finale. C'est le peuple palestinien qui est la visée optimale.
L’attaque terroriste du Hamas en Israël, inédite, est un choc, un tournant aux conséquences incalculables. Une édition spéciale de « À l’air libre », l’émission en accès libre de Mediapart.
ImpossibleImpossible de ne pas voir ces images, insoutenables, de l’attaque terroriste du Hamas, inédite par son ampleur, en territoire israélien. À ce stade, au moins 900 personnes ont été tuées en Israël, plus de 800 à Gaza. Rien ne paraît désormais devoir arrêter l’escalade meurtrière. Le choc, la guerre, les implications régionales : on tente d’y voir plus clair avec nos invité·es.
Jean-Paul Chagnollaud,président de l’Institut de recherche et d’études Méditerranée Moyen-Orient (iReMMO) ;
Joseph Confavreux, journaliste à Mediapart ;
Stéphanie Latte Abdallah, directrice de recherche au CNRS ;
Muzna Shihabi Barthe, ancienne membre de l’équipe de négociation palestinienne ;
Marius Schattner,journaliste franco-israélien, depuis Jérusalem.
La nécessité d’un cessez-le-feu immédiat, de l’envoi d’une force d’interposition de l’ONU et d’une solution politique à deux Etats.
Le Mouvement de la Paix condamne fermement les attaques des commandos du Hamas contre les populations civiles israéliennes. Il apporte son soutien à toutes les victimes qu’elles soient israéliennes ou palestiniennes.
Les différentes autorités annoncent plus de 1000 morts et des milliers de blessés.
Nous soutenons l’appel du pape François « Que les attaques et les armes cessent, je vous en prie ! »
Cependant cette condamnation ne nous conduit pas à ignorer le contexte dans lequel ces attaques se sont déroulées.
Comme le dit Eli Barnavi qui fut ambassadeur d’Israël en France, de 2000 à 2002, « la politique du gouvernement israélien ne peut être dédouanée de cette situation ».
En effet, cet enchaînement de violences a lieu dans un contexte d’aggravation de la politique menée par le gouvernement d’extrême droite d’Israël dans les territoires occupés et la bande de Gaza.
Cette politique se caractérise par l’extension des colonies de peuplement, les assassinats ciblés de palestiniens, les procédures de détention administrative de palestiniens, sans jugement ni accès aux dossiers d’accusation (1000 détenus environ actuellement), le blocus inhumain de Gaza etc…
Il y a urgence, comme l’ont demandé samedi dernier les 55 pays de l’Union Africaine, « il faut revenir, sans conditions préalables, à la table des négociations pour mettre en œuvre le principe de deux États vivant côte à côte ».
Nous soutenons leur appel de voir « la communauté internationale, et les grandes puissances mondiales en particulier, assumer leurs responsabilités pour imposer la Paix et garantir les droits des deux peuples » conformément aux résolutions de l’ONU.
La Palestine a accédé à l’Unesco en 2011. En 2012, l’Assemblée Générale des Nations Unies lui a accordé le statut d’État observateur, comme le Vatican. Aujourd’hui, 138 pays sur 193 à l’ONU reconnaissent l’État de Palestine comme Etat indépendant.
Nous appelons
La France, les États-Unis et tous ceux ne l’ayant pas encore fait, à les rejoindre au plus vite car seule la reconnaissance de l’Etat de Palestine fournira le cadre juridique permettant à Israël et à la Palestine de vivre libres, indépendants et côte à côte ;
La communauté internationale à enfin faire respecter la sécurité et l’existence des deux Etats.
Comme le souligne dans un communiqué du 8 octobre l’organisation israélienne Standing Together « nous avons vu aujourd’hui une preuve terrible et douloureuse qu’il n’y a pas de moyen de « gérer » l’occupation tout en assurant notre sécurité… Sur notre terre, il y a deux peuples, et si nous refusons à l’un d’entre eux la liberté et l’indépendance, nous ne pourrons jamais reposer en Paix ».
La France doit prendre des initiatives comme elle l’avait fait dans le passé pour faire aboutir cette solution, car aucune paix juste et durable ne peut se construire au Moyen-Orient sans respecter les droits des Palestiniens.
Dans l’immédiat, nous appelons à exiger avec nous :
- Un cessez-le-feu immédiat,
La libération des otages Israéliens et des prisonniers politiques Palestiniens
La mise en place d’une force d’interposition, sous l’égide de l’ONU.
Au-delà de la Palestine, le Mouvement de la Paix souligne que dans la situation internationale actuelle, il faut que cesse la mise en œuvre d’un droit international à double vitesse qui conduit non seulement à décrédibiliser le multilatéralisme et les valeurs démocratiques dans le monde mais aussi à enflammer plus encore les esprits, à attiser les haines et à conduire l’humanité sur le chemin d’une généralisation de la guerre.
Le Mouvement de la Paix apporte son soutien aux forces de paix agissant dans cette région telles les femmes palestiniennes et israéliennes qui ont organisé un rassemblement pour la paix le 4 octobre pour ramener les responsables à la table des négociations.
Plus les heures et les jours passent, plus l’horreur de la situation se fait jour. L’horreur de ces centaines de jeunes assassinés alors qu’ils faisaient la fête, l’horreur de ces dizaines de civils enlevés pour servir de bouclier humain, l’horreur de la riposte qui elle aussi tue des civils, l’horreur de cette occupation qui dure depuis des décennies et du sort insupportable de millions de Palestiniens enfermés dans une prison à ciel ouvert.
On le sait, les pires extrémistes des deux camps se pourlèchent les babines lorsque l’horreur attise des haines, tuant un peu plus l’espoir d’avoir un jour une issue acceptable pour tous. Personne ne peut penser que le Hamas se soucie des Palestiniens lorsqu’il planifie un tel massacre dont il connaît parfaitement les conséquences désastreuses. Personne ne peut penser que l’extrême droite israélienne se soucie de sa population lorsqu’elle crée les conditions de la prospérité du Hamas à Gaza.
L’urgence est de permettre aux dizaines d’otages de rentrer chez eux. Et cela ne se fera pas en bombardant massivement une population innocente. L’indignation, la condamnation des actions terroristes du Hamas, l’empathie et la solidarité avec le peuple israélien ne doivent pas conduire à soutenir une politique de vengeance aveugle de la part de Tel-Aviv. Les Israéliens n’ont pas besoin que des rivières de sang viennent alimenter de futures guerres. Les Palestiniens n’ont que faire des appels à la terreur qui instrumentalisent leurs aspirations pour justifier le pire.
En Israël, en Palestine et ailleurs doivent s’élever des voix pour la désescalade et la paix. Elles doivent résonner plus fort que celles qui, usurpant et détournant la lutte du peuple palestinien pour attiser les vieux démons du « complot juif », fustigent ceux qui condamnent l’action du Hamas.
Ces voix de l’espoir doivent l’emporter sur celles qui accusent d’antisémitisme ceux qui s’inquiètent de l’ampleur et de la brutalité de la riposte israélienne. L’antisémitisme est trop grave, trop dangereux pour être utilisé afin de disqualifier ceux qui ne sont pas alignés sur les positions extrémistes du pouvoir israélien et de ses alliés. Les autorités françaises s’honoreraient de ne pas manger de ce pain-là.
Ce discours de Nelson Mandela a été donné aux Etats-Unis en 2001, à l’occasion de sa rencontre avec Thomas Friedman, un journaliste américain juif, spécialisé dans le Proche-Orient.
Mandela's Memo to Thomas Friedman About Israel & Palestine
By Nelson Mandela, in Jefferson Corner - America's Speaker's Corner, 28 March 2001
" Cher Thomas,
Je sais que vous et moi, nous aspirons à la paix au Moyen-Orient, mais avant que vous continuiez à parler des conditions nécessaires d’un point de vue israélien, vous devez savoir ce qui est dans mon esprit.
Par où commencer? Que diriez-vous de 1964. Laissez-moi citer mes propres paroles lors de mon procès. Elles sont vraies aujourd’hui, autant qu’elles l’étaient alors: «J’ai combattu contre la domination blanche et j’ai combattu contre la domination noire. J’ai chéri l’idéal d’une société libre et démocratique dans laquelle tous vivraient ensemble en harmonie et avec des chances égales. C’est un idéal pour lequel j’espère vivre. Mais s’il le faut, c’est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir « .
Aujourd’hui, le monde, noir et blanc, reconnaît que l’Apartheid n’a pas d’avenir. En Afrique du Sud, il s’est terminé par notre propre action de masse, pour bâtir la paix et la sécurité. Cette campagne et d’autres actions ne pouvaient qu’aboutir à l’établissement de la démocratie.
C’est peut-être étrange pour vous d’observer la situation en Palestine ou, plus spécifiquement, la structure des relations politiques et culturelles entre les Palestiniens et les Israéliens, comme un système d’apartheid. C’est parce que vous pensez à tort que le problème de la Palestine a commencé en 1967. Cela a été démontré dans votre récent article « Premier Mémo de Bush » dans le New York Times du 27 Mars 2001.
Vous semblez surpris d’entendre qu’il y a encore des problèmes de 1948 à résoudre, l’élément le plus important est le droit au retour des réfugiés palestiniens. Le conflit israélo-palestinien n’est pas seulement une question d’occupation militaire et Israël n’est pas un pays qui a été créé « normalement » et s’est mis à occuper un autre pays en 1967.
Les Palestiniens ne luttent pas pour un « Etat » mais pour la liberté, la libération et l’égalité, exactement comme nous avons lutté pour la liberté en Afrique du Sud.
Au cours des dernières années, et surtout pendant le règne du Parti travailliste, Israël a montré qu’il n’était pas encore prêt à rendre ce qu’il avait occupé en 1967, que les colonies restent, Jérusalem est sous souveraineté exclusivement israélienne et les Palestiniens n’ont pas d’ Etat indépendant, mais sont sous domination économique israélienne avec un contrôle israélien des frontières, de la terre, de l’air, de l’eau et de la mer.
Israël ne pense pas à un «Etat» mais à une «séparation». La valeur de la séparation se mesure en termes de capacité d’Israël à garder l’Etat Juif, et à ne pas avoir une minorité palestinienne qui pourrait avoir la possibilité de devenir majoritaire à un certain moment dans l’avenir. Si cela se produit, cela forcerait Israël à devenir soit un Etat démocratique ou bi-national laïque, ou à se transformer en un Etat d’apartheid de facto.
Thomas, si vous suivez les sondages en Israël au cours des 30 ou 40 dernières années, vous trouvez clairement un racisme grossier: un tiers de la population se déclare ouvertement être raciste. Ce racisme est de la nature de « Je hais les Arabes » et « je souhaite la mort des arabes. »
Si vous suivez également le système judiciaire en Israël, vous verrez qu’il y a discrimination contre les Palestiniens, et si vous considérez les territoires occupés en 1967, vous trouverez qu’il y a déjà deux systèmes judiciaires opérationnels qui représentent deux approches différentes de la vie humaine: une pour la vie des Palestiniens l’autre pour celle de la vie juive. En outre, il y a deux approches différentes pour la propriété et à la terre. La propriété palestinienne n’est pas reconnue comme propriété privée car elle peut être confisquée.
Quant à l’occupation israélienne de la Cisjordanie et de Gaza, il y a un facteur supplémentaire. Les soi-disant «zones autonomes palestiniennes » sont des Bantoustans. "
Le général-major à la retraite Abdelaziz Medjahed est le directeur général de l’Institut national d’études de stratégie globales (Inesg). Dans cet entretien, il relate la participation de l’armée algérienne à la guerre d’octobre 1973. Lui-même engagé en Egypte avec les troupes algériennes, il revient sur certains détails de cet engagement.
L’armée algérienne a participé à la guerre d’octobre 1973. Notre pays était-il prêt à envoyé ses troupes sur le front du Moyen-Orient ?
Pour parler de la participation de notre armée à la guerre d’octobre 1973, il faudrait d’abord parler de préparation. Ici, je préfère évoquer les événements qui ont précédé la guerre, quand la décision a été prise juste après la défaite de juin 1967. Le président Houari Boumediene a déclaré que «nous avons perdu une bataille et non une guerre, nous devons donc analyser pourquoi nous avons subi cette défaite, car nous n’avons pas mobilisé tous nos moyens».
Cette idée ancrée dans la vision du président Boumediene a été à l’origine de plusieurs décisions prises par la suite. Notons tout d’abord la mobilisation des étudiants pendant 45 jours. Il faut rappeler que les étudiants ont manifesté devant la Présidence pour avoir l’autorisation de rejoindre le front au Moyen-Orient. Aussi, faut-il préciser que cet appel à partir au front a été lancé par les étudiants et les étudiantes. Ce qui est inédit, c’est l’appel des étudiantes.
Cela nous fait rappeler la mobilisation des femmes britanniques durant la Seconde Guerre mondiale, en conduisant les ambulances, c’est à peu près la même chose. Il y a également l’idée de la création des sociétés nationales, parce qu’on va les retrouver en 1973. C’est toute une architecture qui a été mise en place afin de fournir les moyens de la logistique nécessaire au transport des troupes.
En juillet 1967, la SNTR (Société nationale des transports) est créée, la SNTV pour le transport des voyageurs suivra ainsi que la CNAN pour le transport maritime. Autrement dit, l’Algérie a mis en place les outils de sa logistique pour pouvoir mobiliser les moyens nécessaires le moment venu. D’ailleurs, en octobre 1973, ce sont ces sociétés nationales qui ont facilité le transport des troupes et de l’armement.
Il y a eu également le Service national et la reconversion des unités et la création en 1970 de la 8e Brigade blindée (la 8e BB). C’était huit années après le recouvrement de la souveraineté nationale. Elle a poursuivi ses entraînements avec une manœuvre en 1972. D’ailleurs, c’est cette brigade qui a participé au défilé du 5 juillet 1972, à l’occasion du 10e anniversaire de l’indépendance. La 8e BB a continué ses entrainements jusqu’en 1973.
Avez-vous rencontré le général Saad Eddine Chazli ?
Le général Saad Eddine Chazli est venu les 6 et 7 février 1973, pour voir l’état des troupes. Par contre, en mars 1973, nous avons fait une grande manœuvre à laquelle a assisté le président Houari Boumediene. A l’issue de cette manœuvre, le Président a déclaré : «C’est un progrès», avant de se ressaisir en disant : «C’est un début de progrès. Je m’explique : vous avez choisi le thème, vous avez choisi le terrain, vous avez fixé la date. Le jour où vous exécuterez le même exercice sur le thème que j’aurai arrêté et une date que j’aurai fixée, là, ça sera un progrès.» Le président Boumediene a fait cette déclaration en présence des membres du Conseil de la Révolution.
Comment avez-vous appris le début des hostilités au Moyen-Orient ?
Le samedi 6 octobre, en plein Ramadhan nous avons appris le début de la guerre au Moyen-Orient en fin de journée à la télé à l’heure de l’iftar. Avant la fin de l’iftar, nous avons reçu l’alerte N°1, c’est-à-dire préparez-vous. Et c’est à ce moment-là que nous avons compris ce que voulait dire le président Boumediene sur «le thème, la date et le terrain» qui ont été bel et bien choisis. L’Algérie a mobilisé tous ses moyens : la SNTR pour le transport de la logistique, la SNTV pour le personnel, et la CNAN pour les chars.
Une partie s’est déplacée par route, et l’autre par bateau. Et lorsque nous sommes arrivés en Egypte, c’était déjà le cessez-le-feu. Au camp de Huckstep, ils nous ont engagés. Notre position était l’axe Suez-Le Caire au Km 101, et notre unité était divisée en deux. La mobilisation de l’Algérie était telle, que même les étudiants en journalisme à l’université du Caire ont été envoyés au front. Je cite comme exemple Mme Nouara Djaafar, ancienne ministre et membre du Conseil de la nation.
Toute l’Algérie était mobilisée. Et l’une des grandes leçons tirées de la défaite de 1967, c’était la création de la direction des armes de combat afin d’éviter toute dispersion des efforts. C’était déjà le concept d’adhocratie qui était à l’œuvre depuis 1970.
Il ne faut pas oublier une chose, 1973 était un exploit pour l’Algérie, car cela se produisait seulement onze ans après le recouvrement de notre souveraineté nationale. D’ailleurs, dès notre retour en juillet 1974 nous avons créé un noyau pour former la 12e brigade motorisée (la 12e BIM). La 8e BB est la mère de toutes les brigades.
Sur le front, où étaient les Algériens ?
Nous étions en première ligne, et notre mission était de contenir les Israéliens en attendant de passer à l’offensive avec les Egyptiens. Il y avait un plan pour passer à l’offensive mais il n’a pas été exécuté. Trois chefs se sont distingués, dont le commandant Belkacem Mazouzi qui commandait ses unités et les unités égyptiennes, il accompagnait un commandant égyptien pour indiquer au mètre près les positions. Le commandant égyptien lui a dit : «C’est la première fois dans ma carrière de militaire, qu’un chef marche avec moi et m’explique tout, détail par détail.» Et ça a été rapporté au haut commandement à la troisième armée égyptienne, ils ont dit : «Si tous les officiers arabes étaient comme toi, Israël n’aurait pas existé.»
Un des nôtres a mené trois opérations contre les Israéliens et ramené même des armes. Cela a arrêté les négociations. Les Egyptiens nous ont reproché nos ripostes contre les Israéliens, mais nous étions fermes et nous leur avons expliqué que si les Israéliens bougeaient, nous riposterions.
Sur le front, j’étais chargé de liaison avec les Egyptiens qui étaient tous des camarades de promotion. En 1967, il n’y avait pas une défaite, mais une déroute. Cette déroute était la synthèse d’une mauvaise conduite politique égyptienne. En juin 1967, l’armée égyptienne était dans une véritable débandade. Cela découle d’une suite d’échecs (fin de l’union avec la Syrie, guerre au Yémen, etc.). Il y avait beaucoup de considérations subjectives, notamment la relation entre Nasser et Abdelhakim Ameur.
A quoi pensiez-vous en étant au front ?
A l’Algérie, l’Algérie c’est une responsabilité et pour la porter il faut des efforts, beaucoup d’efforts. C’est un lourd héritage, une véritable responsabilité, quand on vous voit ils voient un peuple et un million et demi de martyrs, c’était lourd, très lourd.
50 ans après la guerre, quelles leçons avez-vous tirées ?
La vie nous impose d’être sérieux et savoir s’organiser. A vrai dire, en dépit du changement des moyens de la guerre, l’humain reste au centre de toute décision. La liberté a un prix, la dignité a un prix et nous sommes les héritiers d’une histoire à laquelle nous devons être dignes. Etre Algérien est une lourde responsabilité. Ceux qui disent que nous avons défendu des terres qui ne sont pas les nôtres oublient que nous appartenons à une ère civilisationnelle, nous appartenons à l’Algérie, à l’Afrique, au Maghreb, et à la civilisation humaine. Être Algérien, ça se mérite, c’est une lourde responsabilité. C’est la réponse que je donne à ces gens-là.
Avec les vagues de normalisation, est-ce que ça ne remet pas en question tout cela ? En valait-elle la peine ?
Les Palestiniens résistent aujourd’hui en Cisjordanie et ailleurs. S’il n’y avait pas eu 1973, il n’aurait pas eu de résistance. Cette résistance repose sur deux piliers : la foi et la conviction de défendre une cause juste. Aujourd’hui, il faut se rappeler d’autres images comme celles de Beyrouth 1982. Aujourd’hui un enfant palestinien se met face à un Israélien avec RPG, c’est dans les gènes, une résistance génétique qui se transmet de génération en génération, c’est héréditaire. Il faut que justice soit faite, car s’il y a injustice. Soyez sûr qu’il y aura une réaction.
Est-ce que la participation algérienne à la guerre de 1973 justifie l’acharnement des Israéliens sur les réseaux sociaux ?
Cet acharnement est le fait bien évidemment de ceux qui sont hostiles à l’Algérie. La propagande israélienne tend à gonfler l’ego des Algériens pour montrer qu’ils sont forts. Il ne faut pas baisser la garde. Nous n’avons pas le droit d’être faibles. Nous ne voulons plus subir l’histoire. Les Israéliens, depuis 1973, ont compris que dans la région un pays compte et a pour nom l’Algérie. La force est notre unique choix. Aujourd’hui, nous devons nous renforcer davantage. R. R.
La guerre d’octobre 1973 met le monde au bord du gouffre nucléaire
En faisant franchir aux troupes égyptiennes le canal de Suez, le 6 octobre 1973, et en déclenchant avec l’aide de la Syrie un nouveau conflit contre Israël, Anouar El-Sadate cherchait à mettre fin au statu quo né de la défaite arabe de juin 1967. Avec, comme arrière-pensée, l’idée d’impliquer les États-Unis et de lever la dépendance du Caire à l’égard de Moscou. Un pari en partie réussi mais qui provoqua une alerte nucléaire.
Réunion de l’état-major égyptien, sous la houlette du président Anouar El-Sadate, le 6 octobre 1973
Libéré lors d’un échange « otage israélien contre prisonniers palestiniens », le leader du Hamas dans la bande de Gaza était vu par Israël comme à même de contrôler ce territoire. Jusqu’aux massacres du 7 octobre.
La photo a circulé en mai 2021 sur tous les réseaux sociaux palestiniens. Yahya Sinouar sourit, chemise repassée, pantalon noir et barbe blanche bien taillée, assis sur un fauteuil, dans les décombres de sa maison détruite par l’armée israélienne durant la précédente guerre de Gaza.
L’homme sera-t-il un jour à nouveau capable de prendre une telle pose de défi, alors que parmi les nombreux objectifs d’ores et déjà détruits par l’aviation à Gaza figure à nouveau la maison du leader du Hamas, et qu’il est devenu l’homme à abattre pour Tsahal ?
Yayha Sinouar en mai 2021.
Yahya Sinouar est devenu, samedi 7 octobre, le cauchemar du gouvernement israélien. En premier lieu parce qu’il est à l’origine d’une opération militaire qui s’est montée sous le radar des systèmes de renseignement et de protection censés être les meilleurs du monde. Infligeant ainsi en quelques heures un bilan humain apocalyptique de plus de 700 morts et 2 000 blessé·es, inédit dans l’histoire du pays hébreu.
Les raisons de ce succès logistique du Hamas restent à expliquer, autant que les défaillances sécuritaires israéliennes. Le sous-sol de Gaza est certes un gruyère, mais les tunnels au sud avaient été largement inondés et la contrebande intense qui existait encore avec l’Égypte il y a quelques années ne paraissait plus possible.
Au nord, la bordure qui encercle Gaza ne se dresse pas seulement au-dessus du sol, mais s’enfonce aussi sous terre, compliquant les infiltrations de combattants palestiniens sur le sol d’Israël à travers des tunnels, comme cela avait été le cas lors de la capture du soldat Gilad Shalit en 2006.
Cela n’a pas empêché le Hamas de disposer de suffisamment de roquettes – 5 000 tirs ont été revendiqués – pour détourner l’attention de l’infiltration de ses combattants ; d’assez d’explosifs et d’engins motorisés pour briser en plusieurs endroits le mur qui entoure Gaza, y compris dans les secteurs a priori ultra-sécurisés que sont le point de contrôle frontalier d’Erez et la base militaire de Zikim, sans parler des images frappantes d’hommes entrant en ULM en Israël ou tentant d’y pénétrer par la mer.
Échange « otage contre prisonniers »
Le changement de stratégie du Hamas est aussi massif qu’inattendu, surtout de la part d’un homme, Yahya Sinouar, qui était présenté aussi bien par les responsables sécuritaires israéliens que ceux du Hamas comme un « pragmatique » lorsqu’il a pris la tête du mouvement islamiste à Gaza en 2017.
D’autant que cet homme aurait théoriquement dû encore se trouver dans une geôle israélienne, dans la mesure où il avait été condamné en 1988 par un tribunal israélien à la perpétuité…
La sidération actuelle en Israël vient notamment de là. Alors que près d’une centaine d’otages se trouveraient aujourd’hui à Gaza, et qu’une grande part de la réponse actuelle d’Israël est suspendue à des décisions sur leur sort, l’homme fort du Hamas à Gaza a été libéré en 2011 dans le cadre d’un échange « otage contre prisonniers ». Israël avait alors accepté de libérer pas moins d’un millier de prisonniers palestiniens pour récupérer vivant le soldat franco-israélien Gilad Shalit, capturé par un commando en 2006…
L’autre élément de la sidération israélienne vient du fait que, depuis qu’il a pris les rênes du Hamas à Gaza en 2017, Yahya Sinouar semblait tenir le rôle que les Israéliens attendaient officieusement de lui : négocier avec l’incontournable voisin égyptien ; sous-traiter au Jihad islamique – une organisation plus petite et moins dotée militairement que le Hamas – la plupart des affrontements directs avec Israël en lançant régulièrement des roquettes facilement interceptées par les défenses israéliennes ; mais aussi contrôler un territoire décrit rituellement et adéquatement comme une « prison à ciel ouvert » et une « cocotte-minute », tant la population ultra-dense y manque de tout : eau potable, nourriture, accès aux soins, sans même parler de perspectives de départ ou d’avenir.
C’est pourtant cet homme qui a inauguré une forme d’affrontement avec Israël que beaucoup semblaient juger impossible. Dans la société israélienne, comme dans une large partie de la société palestinienne, prévalait en effet jusqu’à peu l’idée qu’une action palestinienne d’ampleur n’était plus possible, tant la disproportion des forces était grande, que ce soit sur le plan militaire ou diplomatique.
Changement d’échelle
La première intifada, surnommée la « guerre des pierres » en raison des images de frondes brandies par des adolescent·es palestinien·nes, fut déclenchée en 1987 dans le camp de réfugié·es gazaoui·es de Jabaliya. C’était un soulèvement populaire, massif, marqué par des barricades, de la désobéissance civile et des manifestations où les femmes se trouvaient en masse et en première ligne.
Étalée jusqu’en 1993 et la signature des accords d’Oslo, elle fit environ 300 morts côté israélien et 2 000 côté palestinien. C’est en 1987, à l’occasion de cette première intifada, que le Hamas est créé à Gaza – son guide spirituel, le cheikh Yassine, étant arrêté et emprisonné en Israël en 1989. Yahya Sinouar, lui, a été arrêté par les Israéliens dès 1988. Il restera dans les prisons israéliennes pendant 23 ans.
La seconde intifada, initiée en 2000, fut un affrontement beaucoup plus militarisé entre Tsahal et les Tanzim, marqué par les importants attentats-suicides dans les centres urbains israéliens, lancés principalement par le Jihad islamique et le Hamas, qui survivra à l’assassinat ciblé, en 2004, de ses deux fondateurs, Ahmed Yassine et Abdel Aziz al-Rantissi. On estime à environ 1 000 morts israéliens et environ 3 000 morts palestiniens le bilan de cette confrontation armée qui dura près de cinq ans.
Même si les chiffres ne racontent qu’une petite partie de l’histoire, c’est dire si l’attaque menée par le Hamas le week-end dernier, avec un bilan de déjà plus de 700 morts côté israélien et de près de 600 côté palestinien, fait changer le conflit israélo-palestinien d’échelle.
Vous devrez vous préparer à une grande bataille si Israël n’arrête pas d’attaquer la mosquée al-Aqsa.
Yahya Sinouar en avril 2022
Même si le nombre de morts palestiniens depuis janvier dernier avait atteint des records inédits depuis des années, et même si les attaques palestiniennes tuant des Israélien·nes sont régulières depuis ce qu’on a nommé « l’intifada des couteaux » en 2015, jusqu’aux actions commises ces derniers mois par des jeunes gens revendiquant leur appartenance à de nouveaux groupes de combattants palestiniens dans les régions de Naplouse et Jénine, l’idée que la sécurité d’Israël pouvait être véritablement fragilisée semblait s’être définitivement éloignée.
En ayant lancé ses hommes armés et entraînés sur le sud d’Israël, Yahya Sinouar pose aux Israéliens un défi que le gouvernement Nétanyahou n’avait pas envisagé, même si la position du leader du Hamas à Gaza était à la fois publique et connue des autorités militaires israéliennes.
En avril 2022, lors d’une de ses rares apparitions publiques et après une vague d’attentats qui avaient fait plusieurs morts israéliens, Yahya Sinouar avait déclaré : « Vous devrez vous préparer à une grande bataille si Israël n’arrête pas d’attaquer la mosquée al-Aqsa. »
Et, dans un long article publié à l’été 2021, le journal Haaretz citait déjà de multiples sources militaires anonymes notant des évolutions du personnage, dont une partie serait liée au fait qu’il n’avait obtenu que difficilement d’être reconduit à la tête du Hamas à Gaza lors d’élections internes au parti islamiste en mars 2021.
Confronté à la candidature de Nizar Awadallah, considéré comme un radical adepte d’une guerre totale avec Israël, Yahya Sinouar aurait radicalisé son approche et pris en compte les critiques l’accusant d’avoir, en dépit de ses proclamations, abandonné l’option militaire pour se contenter de gérer Gaza avec l’argent du Qatar et de l’aide internationale.
Pour l’une des sources au sein des services de sécurité citée dans l’article de Haaretz, Yahya Sinouar ne se verrait plus seulement comme un simple leader d’un parti palestinien, mais « se conduit comme s’il avait la mission donnée par Dieu de protéger Jérusalem et Al-Aqsa ». Une mission qui aura infligé à Israël un des pires drames de son histoire et qui plonge aujourd’hui Gaza dans l’inconnu.
Le Proche-Orient s’enfonce dans une guerre à l’effroyable bilan humain, et que fait la communauté internationale ? Au lieu d’appeler à la désescalade, les États-Unis, et de nombreux pays alignés derrière eux, dont la France, assurent Israël de leur solidarité après l’attaque du Hamas. Un message compris comme un blanc-seing pour déchaîner le feu sur la population de Gaza. Chaque roquette tombée sur Israël fournit comme sur un plateau un motif à Netanyahou pour lancer ses troupes à l’assaut de l’enclave palestinienne, et chaque bombe explosant à Gaza sert de prétexte aux chefs islamistes pour mener leur guerre, au mépris des vies israéliennes comme palestiniennes. Il importe avant tout de faire cesser le massacre. Le vainqueur de cette spirale de violence ne sera ni Netanyahou ni le Hamas, mais la haine.
Les attaques de civils sont lâches et injustifiables. Rien, pas même l’horreur vécue dans « la prison à ciel ouvert » de Gaza, ne peut excuser le Hamas de s’en prendre à des familles israéliennes. Et rien, pas même « le droit de se défendre » brandi par Israël, ne peut justifier le déluge de destruction et de mort aux allures de vengeance qui s’abat sur les Gazaouis. Au nom de la lutte contre le terrorisme, de beaux esprits qui prétendent incarner la civilisation contre la barbarie voudraient interdire de rappeler le « contexte », c’est-à-dire l’humiliation quotidienne du peuple palestinien par un État israélien oppressif qui foule aux pieds la légalité internationale.
L’historien israélien Zeev Sternhell avait dénoncé en son temps le jeu malsain de Tel-Aviv pour favoriser le Hamas contre l’OLP, et torpiller ainsi tout accord débouchant sur un État palestinien. S’aligner sur Netanyahou en fermant les yeux sur l’occupation n’aide en rien les Israéliens et les Palestiniens. Au contraire, ces deux poids, deux mesures insupportable est un ferment de l’islamisme. La lutte contre ce dernier passe par la fin du blocus de Gaza et de la colonisation de la Palestine. C’est aussi la condition d’une paix juste et durable avec Israël, seule garante à terme de sa sécurité.
À gauche, même lorsque la condamnation du Hamas est ferme, le terreau sur lequel pourrit ce conflit est mis en avant. Le sénateur communiste Fabien Gay l’a de nouveau souligné dimanche. « L’attaque du Hamas doit être condamnée avec force. La mort de et la prise d’otage de civils israéliens et la mort de civils palestiniens est un drame, écrit-il sur X. Elle s’inscrit dans un cycle de violences continues dans les territoires palestiniens sous blocus et occupés. Une solution politique à deux États, basée sur les résolutions de l’ONU et le respect du droit international reste la seule voie possible pour la paix. Pour cela, la colonisation israélienne et le blocus de Gaza doivent cesser », ajoute le directeur de l’Humanité.
« La France doit prendre l’initiative pour les faire respecter et permettre la coexistence pacifique du peuple israélien et du peuple palestinien », ajoutait également le secrétaire national du PCF Fabien Roussel, dimanche sur France 3.
Efraim Davidi : « Il n’y a qu’une seule solution, mettre fin à l’occupation »
Membre du comité central du Parti communiste israélien, Efraim Davidi dénonce la politique du gouvernement de Benyamin Netanyahou, qu’il tient pour responsable de la situation, et met en garde contre les actes de vengeance qui pourraient être menés contre les citoyens arabo-palestiniens d’Israël. Il appelle à la reconnaissance du droit des Palestiniens.
Pour Efraim Davidi, membre du parti communiste israélien : « Il n’y a qu’une seule solution : mettre fin à l’occupation et reconnaître les revendications et les droits légitimes du peuple palestinien ».
« En tant que Parti communiste israélien et membre du mouvement Hadash (Front démocratique pour la paix et l’égalité), nous estimons le gouvernement fasciste israélien responsable de l’escalade brutale et dangereuse de ces dernières heures, qui a coûté la vie à de nombreux citoyens innocents. Cela s’est produit à la fin d’une semaine choquante au cours de laquelle les colons se sont déchaînés dans les territoires occupés sous les auspices de leur gouvernement, ont profané la mosquée al-Aqsa et ont perpétré un autre pogrom à Huwara (ville palestinienne près de Naplouse déjà attaquée il y a quelques mois par les colons – NDLR). C’est une escalade très grave qui met en danger toute la région dans une guerre que le gouvernement de droite alimente depuis son premier jour.
Les événements que nous vivons depuis samedi montrent dans quelle direction dangereuse le gouvernement Netanyahou et les colons conduisent toute la région, et soulignent une fois de plus qu’il n’y a aucun moyen de gérer le conflit ou de le résoudre militairement. Il n’y a qu’une seule solution : mettre fin à l’occupation et reconnaître les revendications et les droits légitimes du peuple palestinien. La fin de l’occupation et l’établissement d’une paix juste sont un intérêt distinct et commun des deux peuples de ce pays.
Nous sommes profondément préoccupés par l’utilisation de ces événements par le gouvernement Netanyahou pour mener une attaque vengeresse contre la bande de Gaza. Nous appelons la communauté internationale et les pays de la région à intervenir immédiatement pour faire taire les tambours de la guerre et lancer des initiatives en faveur d’une solution politique. Enfin, nous mettons en garde contre les actes de vengeance qui pourraient être menés contre les citoyens arabo-palestiniens d’Israël, et en particulier les habitants des villes mixtes et des villages non reconnus du Néguev (villages bédouins que le gouvernement ne reconnaît pas comme légaux – NDLR), qui ont déjà payé un prix élevé car l’État ne s’occupe pas d’eux.
Dans cette réalité, il est du devoir des forces saines en Israël, juifs et Arabes, de faire entendre une voix forte et claire contre toute tentative d’incitation à la violence à l’encontre de populations entières et de promouvoir l’aspiration à une vie normale sans occupation, sans discrimination et sans suprématie – une vie de paix, d’égalité et de véritable démocratie pour tous. »
SOURCE : Efraim Davidi : « Il n’y a qu’une seule solution, mettre fin à l’occupation » (humanite.fr)
Ça suffit le concert des nations pro-israélien Résister à un occupant est légitime !
Au moment où nous écrivons, sans informations détaillées et vérifiées, nous tenons à préciser ce qui suit.
Un déferlement de commentaires présente comme d’habitude le Hamas et les Palestiniens comme les agresseurs et l’armée israélienne comme ripostant. Quoi que nous puissions penser de là où nous sommes de la stratégie adoptée par le Hamas (et nous n’avons pas forcément un point de vue commun sur le sujet), nous nous devons de rappeler que c’est :
Israël la puissance colonisatrice,
Israël qui impose un blocus inhumain à Gaza,
Israël qui poursuit à marche forcée une colonisation de peuplement sur toute la Palestine historique,
Israël qui conforte un régime d’apartheid et utilise l’emprisonnement massif comme un moyen de gestion de son occupation,
Israël dont l’armée dans la dernière période couvre les pogroms opérés par les colons contre les villages palestiniens.
Plus de 200 morts palestiniens depuis le début de l’année, plus de 1000 détenus administratifs (c’est-à-dire sans jugement et sans accès au dossier d’accusation), etc. Et nous rappelons que le droit international, qu’Israël foule au pied, justifie la résistance, y compris armée, à l’occupation et à l’oppression.
Les événements d’aujourd’hui doivent rappeler à toutes et tous, et en particulier à la population israélienne, qu’il n’y aura pas de paix possible pour une communauté juive dans cette région du monde sans que soit reconnu à toutes et tous l’égalité des droits. Nous maintenons notre appel aux autorités françaises à cesser la sempiternelle référence univoque au droit d’Israël à la sécurité et à cesser sa collaboration militaire et économique avec cet État colonial.
Nous soutenons la résistance du peuple palestinien face à l’occupation, à la répression, au déni du droit des Palestiniens.
La Coordination nationale de l’UJFP, le 7 octobre 2023
SOURCE :
Qui sommes-nous ? - Clip 1/10 de "Paroles juives contre le racisme"
A partir de leur trajectoire personnelle, 35 militants antiracistes de l’UJFP. s’expriment sur le racisme et l’antiracisme d’aujourd’hui.
AU PROCHE-ORIENT, ICI ET PARTOUT VIVRE ENSEMBLE DANS L’EGALITE ET LA JUSTICE
Née en 1994 de la volonté d’une paix juste au Proche-Orient, l’UJFP est une association juive laïque rassemblant des adhérents aux histoires et aux parcours divers et fermement attachés au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Conscients d’appartenir à une histoire plurielle qui a produit aussi bien des résistants antinazis, des combattants anticolonialistes que d’autres grandes figures universalistes dont les expériences marquent nos mémoires, nous portons la parole dont nous sommes héritiers : agir pour « créer un monde meilleur ».
L’UJFP regroupe des membres, Juifs ou non, qui œuvrent ensemble pour que le « vivre ensemble » dans l’égalité et la justice en France comme au Proche Orient, devienne réalité et pour que des voix juives laïques et progressistes se fassent entendre.
C’est pourquoi elle est partie prenante des combats contre le racisme sous toutes ses formes et contre toutes les discriminations.
LE PROCHE-ORIENT
Le sionisme a abouti à la création d’un Etat, Israël, qui prétend se définir comme « Etat juif » et au nom de cette judéïté justifie et légitime aussi bien « la Naqba » (pour les Palestiniens, la catastrophe de 1947-48) que sa politique d’occupation et de discriminations légales niant le peuple palestinien et ses droits. Le gouvernement actuel amplifie et accélère la politique de dépossession et d’épuration ethnique contre le peuple palestinien poursuivie depuis 1948.
Nous faisons nôtres les conclusions des trois premières sessions du Tribunal Russell sur la Palestine, et notamment la qualification de la politique d’Israël comme coupable du crime d’apartheid contre le peuple palestinien.
Nous combattons énergiquement l’odieux chantage à l’antisémitisme et la sinistre équation « Juifs = Sionistes = Israël », qui vise à embrigader tous les Juifs dans une politique criminelle – comme l’ont encore montré le rapport Goldstone sur les bombardements de la population de Gaza en décembre 2008/janvier 2009 ou l’arraisonnement meurtrier de la flottille Free Gaza le 30 mai 2010- et suicidaire, car cette stratégie d’une guerre sans fin, au nom de tous les Juifs du monde, interdit toute perspective de vie pacifique pour une minorité juive israélienne au Proche Orient, et mobilise dans le monde les rancœurs contre «les Juifs».
Nous jugeons désastreux à cet égard le rôle joué par les institutions communautaires juives de France, qui agissent à travers le CRIF comme une annexe de la propagande sioniste dans ce pays – alors même que nous savons que ces institutions ne représentent qu’elles mêmes, c’est à dire un groupe d’associations juives sionistes, et sont loin de porter la voix de l’ensemble des Juifs français. Nous rejetons de la même manière les politiques européenne et française de laisser faire et d’impunité pour toutes les violations du droit international, et des droits humains commises par Israël.
Tant que l’Etat d’Israël ne sera pas comptable de sa politique illégale d’occupation, des violations du droit international et des nombreux crimes de guerre, une paix fondée sur l’égalité des droits sera impossible.
L’UJFP considère que le respect des droits du peuple palestinien, tous ses droits, y compris le droit au retour des réfugiés, et la réparation des torts causés à ce peuple, sont des conditions indispensables pour une solution réellement pacifique et durable au Proche Orient. L’UJFP soutient l’aspiration à la démocratie et à l’égalité qui se traduit par les soulèvements en cours dans les pays du Printemps Arabe.
Membre du CRID, l’UJFP milite au sein du Collectif National pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens, de la Plateforme des ONG pour la Palestine. Elle participe activement à la campagne internationale « stoppons le KKL-FNJ », le Fonds national Juif étant depuis plus d’un siècle l’instrument de la dépossession du peuple palestinien de ses terres. Un exemple de ses conséquences catastrophiques en est donné par la politique de colonisation du Neguev et les amendements continus des lois foncières qui prétendent légitimer la dépossession de tous les Palestiniens de leurs biens immobiliers.
Elle répond à l’appel de plus de 170 organisations de la société civile palestinienne en adhérant à la Campagne BDS France (pour le Boycott, le Désinvestissement, et des Sanctions contre le régime israélien). Cette campagne, qui vise toutes les institutions israéliennes impliquées dans la politique d’Apartheid et d’occupation, remporte de nombreuses victoires dans le monde, et montre que les sociétés – à travers leurs syndicats, leurs milieux associatifs, parfois leurs églises et leurs gouvernements – refusent le non droit imposé par la force (campagne BDS France : www.bdsfrance.org).
Cette intervention directe des citoyens est cruciale pour isoler Israël, à l’image de la campagne qui avait contribué à mettre fin à l’apartheid en Afrique du Sud, et obtenir de nos gouvernants qu’ils mettent fin à l’impunité de cet Etat comme ils en ont le pouvoir, au lieu de lui maintenir un soutien inconditionnel.
Ainsi, nous demandons la suspension immédiate de l’accord d’association entre Israël et l’Union Européenne ; les responsables des crimes de guerre doivent être traduits devant les juridictions internationales compétentes.
Nous attendons du nouveau gouvernement français qu’il rompe effectivement avec le soutien inconditionnel à Israël, avec le soutien de la prétention du CRIF de représenter tous les Juifs, avec le déni de la liberté d’expression que représentent les poursuites contre les militants de la campagne BDS.
L’UJFP est membre de la Fédération des Juifs européens pour une Paix Juste (EJJP).
JUSTICE ET EGALITE ICI AUSSI
Dans le contexte de crise qui se poursuit, nous nous inquiétons des diverses remises en cause des libertés publiques en France et se mobilise contre toutes les discriminations.Elle participe aux mobilisations pour la régularisation des sans-papiers, pour le droit d’asile, pour un« vivre ensemble » dans l’égalité et la justice. Nombre de nos adhérents sont pleinement investis dans le Réseau Education Sans Frontières, que nous soutenons.
L’UJFP est sensible à l’antisémitisme comme à toutes les formes du racisme elle participe au collectif « d’ailleurs nous sommes d’ici », combat l’islamophobie et le racisme anti-arabe, produits d’un passé colonial non assumé et de l’idéologie du « choc des civilisations ». l’UJFP est présente dans le collectif « mamans toutes égales » Nous attendons avec ces associations et réseaux du nouveau gouvernement qu’il rompe effectivement avec la politique xénophobe et raciste de l’Etat lui-même.
L’UJFP SE BAT CONTRE LES MURS
ET CONSTRUIT DES PONTS
Nous luttons avec tous ceux qui s’opposent au « Mur de séparation », instrument d’une expropriation de terres supplémentaire au plus profond de la Cisjordanie et de l’Apartheid entre les populations juives et palestiniennes.
Nous sommes partie prenante des « flottilles de la liberté » pour briser le blocus de Gaza (un membre de notre Bureau national était sur le « Louise Michel » en juin 2011).
Pour le « vivre ensemble » dans l’égalité et la justice, ici comme là-bas, l’UJFP a développé un partenariat privilégié avec l’Association des Travailleurs Maghrébins de France (ATMF). Nos deux associations ont porté en commun le message de refus des replis communautaires et du nécessaire respect des droits pour vivre ensemble dans la 9e mission civile en Palestine/Israël de février 2002 et dans la 166° en octobre 2010, élargie à la Fédération Tunisienne des Citoyens des Deux Rives (FTCR) et au groupe Immigration Développement Démocratie (IDD), à l’occasion du Forum mondial de l’Education. Elles y ont affirmé dans les Territoires Occupés Palestiniens comme en Israël que la ligne de démarcation ne passait pas entre Juifs et Arabes, mais entre respect et déni du droit.
NOS ACTIVITES
Outre la participation aux mobilisations déjà évoquées en solidarité avec le peuple palestinien ou pour le respect des libertés démocratiques dans notre propre pays, des réunions publiques, organisées le plus souvent en partenariat pour faire connaître par exemple la situation des prisonniers palestiniens, celle des Palestiniens de 48, sur le sionisme, sur les solutions pour parvenir à une paix juste,… pour donner la parole à des auteurs et des militants, Palestiniens comme Israéliens engagés dans la lutte contre le colonialisme.
– il circule actuellement une exposition sur la situation des Bédouins du Néguev réalisée avec le concours d’Amnesty International, de l’AFPS et du Forum pour la coexistence et l’égalité de droits dans le Néguev (NCF). – nous sommes présents sur la toile : www.ujfp.org
– nous publions un bulletin, téléchargeable du site, des brochures et la revue « De l’Autre Côté ».
Pour de nombreux Palestiniens, et malgré la mort de centaines de civils à Gaza et en Israël, l’attaque du Hamas s’explique par les pratiques brutales du gouvernement de Nétanyahou et par la colonisation qui n’a fait que s’étendre. Témoignage de Rula Shadeed, responsable dans une ONG.
Tôt samedi matin, les Palestiniens ont appris le lancement par le Hamas d’une opération armée inédite par son ampleur contre Israël depuis la bande de Gaza, qui a causé environ 600 morts israéliens, civils pour la plupart. Quelques heures plus tard, ils ont enduré la réplique rapide de l’État hébreu, dont les frappes aériennes intenses ont causé plus de 300 morts, dont là aussi un nombre indéterminé de civils. Comment la population de Palestine a-t-elle vécu ce 7 octobre 2023, dont on ignore les conséquences à moyen et long terme, mais dont on sait déjà qu’il restera comme une date marquante du conflit israélo-palestinien ?
Mediapart a donné la parole à des experts sur place, dont des universitaires, comme Mkhaimar Abusada, professeur de sciences politiques à l’université Al-Aqsa de Gaza, qui voit dans l’attaque surprise du Hamas une conséquence à la politique de ce qu’il décrit comme un « gouvernement israélien d’extrême droite fasciste », en rappelant que certains de ses ministres « pensent que le temps est venu d’expulser les Palestiniens et d’annexer plus de la moitié de la Cisjordanie ».
D’autres voix de la société civile palestinienne s’expriment, et développent un discours similaire. C’est le cas de Rula Shadeed, qui travaille depuis des années dans diverses organisations non gouvernementales depuis Ramallah, en Cisjordanie. Aujourd’hui responsable de programme pour le Palestine Institute for Public Diplomacy, elle a œuvré longtemps à l’association Al-Haq, fondée en 1979 pour documenter les violations des droits humains commises dans le cadre du conflit. Al-Haq fait partie des six ONG que le gouvernement israélien a tenté d’interdire en 2021, au prétexte qu’elles aurait des liens avec le terrorisme palestinien, sans convaincre les Occidentaux.
Lorsque Mediapart joint Rula Shadeed, le 7 octobre dans la journée, la militante est en mission à Amman, en Jordanie, et ne peut rentrer à Ramallah, car Israël a bloqué les frontières. Face aux événements, et aux images choc de la journée, elle assume son soutien à l’attaque du Hamas. Soutien qu’elle estime largement partagé : « Je ne peux évidemment pas parler pour tout le monde, mais de ce que je comprends, nous sommes tous d’accord pour dire que nous avons le droit de résister contre la colonisation, l’occupation et l’apartheid, et de nous protéger », explique-t-elle.
Si elle exprime sa « surprise » face à « l’ampleur de cette opération », elle souligne toutefois que, comme nombre de Palestiniens, elle savait « que quelque chose allait se passer ». « Nous nous attendions à une forme de réponse, raconte-t-elle, parce que les différents partis incluant le Hamas avaient tous appelé à ce que le gouvernement israélien stoppe ses agressions, les attaques contre des civils et contre les lieux et édifices religieux comme la mosquée Al-Aqsa à Jérusalem. »
Elle évoque aussi des humiliations contre « les croyants en train de prier près des églises et des mosquées ». Les images toutes récentes de juifs ultraorthodoxes crachant sur des pèlerins chrétiens dans la vieille ville de Jérusalem ont notamment tourné en boucle à la télévision et sur les réseaux sociaux.
Le souvenir noir de 1948
Rula Shadeed dénonce également le « nombre insensé de violations et de brutalités » commises par « le gouvernement fasciste israélien, qui ne se soucie d’aucune manière des résolutions de l’ONU, des lois de l’Union européenne, des droits humains, du droit des Palestiniens à simplement vivre ».
Elle fait de l’extrémisme du gouvernement mené par Benyamin Nétanyahou et qui compte parmi ses ministres clés Itamar Ben Gvir, suprémaciste juif, raciste et homophobe, et Bezalel Smotrich, qui se revendique fièrement partisan du Grand Israël, de la Méditerranée au fleuve Jourdain, « l’un des moteurs qui font que le Hamas, mais aussi d’autres partis se sont décidés » [à attaquer – ndlr].
Comme une grande partie des Palestiniens, l’activiste raconte son inquiétude croissante devant « les villages brûlés » et « le transfert des populations auquel on assiste ces derniers mois » pour permettre aux colons israéliens de s’installer sur les territoires palestiniens, avec la bénédiction du gouvernement et de l’armée. « Tous ces événements ont constitué une sorte de signal d’alarme pour tous les Palestiniens, un signe que la menace devenait de plus en plus proche », décrit Rula Shadeed, pour qui ils sont « très similaires à ce qu[’ils ont] connu en 1948 » : la Nakba, l’exode forcé de plusieurs centaines de milliers de Palestiniens, expulsés au cours de la guerre qui a institué l’État d’Israël.
Pour autant, elle tient à préciser que si « ce gouvernement est le plus brutal », portant « une vision suprémaciste et raciste » assumée, cela « ne veut pas dire que le précédent ne poursuivait pas le même projet d’occupation de la Palestine ». Pour elle, la politique israélienne vis-à-vis de son pays depuis de nombreuses années se résume en quelques mots : « Un régime d’apartheid tout entier tourné vers un but ultime, celui de déplacer les Palestiniens pour les remplacer par le peuple juif. »
Les hôpitaux, le système d’eau potable, l’alimentation, les médicaments... Rien ne permet de faire face à une attaque massive.
Rula Shadeed, Palestine Institute for Public Diplomacy
Et lorsqu’on l’interroge sur le nombre élevé de morts israéliens et sur la journée de panique vécue dans les localités proches de la bande de Gaza, mais aussi à Tel-Aviv (lire notre reportage au cœur de cette journée de cauchemar pour les Israéliens), l’analyse de Rula Shadeed ne dévie pas. Sa colère non plus.
« Dans toute situation de colonisation et d’oppression, la violence est le résultat de la brutalité de l’oppresseur. Il ne faut jamais faire porter la responsabilité d’une escalade sur le colonisé, qui est confronté à de grandes injustices depuis des décennies », lance-t-elle.
La militante ne se fait guère d’illusions sur la suite. « Bien sûr, nous anticipons une augmentation des victimes, et en particulier à Gaza », dit-elle, rappelant que sur ce petit territoire de 350 kilomètres carrés et de 2,2 millions d’habitants, enserré de très près par l’armée israélienne, « il n’y a pas d’abris », et que la situation humanitaire y est notoirement déplorable : « Les hôpitaux, le système d’eau potable, l’alimentation, les médicaments... Rien ne fonctionne correctement à Gaza. Rien ne permet de faire face à une attaque massive. »
Elle appelle encore « la communauté internationale à regarder ce qu’il se passe le plus attentivement possible », car à ses yeux, « à chaque fois que les Israéliens ont attaqué Gaza, ils l’ont fait dans l’impunité, et sans jamais devoir répondre de leurs actes et de leurs crimes ».
« Nous savons que les États-Unis et l’Union européenne sont les meilleurs alliés du régime colonial d’Israël et cela ne va pas changer maintenant », s’insurge-t-elle. Lorsqu’en Ukraine, « des civils ont pris les armes pour se battre contre l’agression russe, pour se protéger, ils ont été bénis par les États-Unis, encouragés par l’Europe », souligne-t-elle, amère. « Ici, même quand les gens sont brûlés dans leurs propres maisons, ce n’est jamais le bon moment pour soutenir les Palestiniens », lance-t-elle.
Elle fait ici référence à l’incendie de plusieurs maisons par des colons israéliens en Cisjordanie en juin 2023, ou à cet enfant, brûlé vif dans l’incendie de son foyer, en 2015. « Nous n’attendons aucun soutien. Tout ce qu’il reste aux gens, c’est de sortir de chez eux et de se défendre eux-mêmes. »
Quant à la situation politique en Israël, elle ignore à quel point le premier ministre Benyamin Nétannyahou va être fragilisé, et si ce 7 octobre marquera le début de sa chute définitive : « Je ne sais pas comment cela va affecter son image, ni comment la société civile israélienne va réagir. » « Elle va peut-être condamner son premier ministre, considère Rula Shadeed. Ou bien faire bloc jusqu’à la fin de cet épisode. C’est un cycle sans fin : il y aura beaucoup de morts, et Nétanyahou pourra utiliser cette extrême brutalité pour trouver des soutiens. »
Appel. Gisèle Halimi est engagée depuis toujours pour la cause anticolonialiste et les droits de l’homme.
Un peuple aux mains nues – le peuple palestinien – est en train de se faire massacrer. Une armée le tient en otage. Pourquoi ? Quelle cause défend ce peuple et que lui oppose-t-on ? J’affirme que cette cause est juste et sera reconnue comme telle dans l’histoire. Aujourd’hui règne un silence complice, en France, pays des droits de l’homme et dans tout un Occident américanisé. Je ne veux pas me taire. Je ne veux pas me résigner. Malgré le désert estival, je veux crier fort pour ces voix qui se sont tues et celles que l’on ne veut pas entendre. L’histoire jugera mais n’effacera pas le saccage. Saccage des vies, saccage d’un peuple, saccage des innocents. Le monde n’a-t-il pas espéré que la Shoah marquerait la fin définitive de la barbarie ?
Gisèle Halimi
Ce cri prend toute sa force aujourd'hui !!!
Jérusalem - 25 juillet 2019
Israël détruit des maisons palestiniennes lors de la plus grande campagne de démolition depuis 1967
22.07.2019 – Des bulldozers israéliens rejoints par des centaines de soldats et de policiers ont démoli lundi des maisons palestiniennes à la périphérie de Jérusalem-Est, malgré les protestations locales et les critiques internationales.
Les forces israéliennes se sont rendues tôt le matin dans le village palestinien de Sur Bahir pour démolir 11 bâtiments, dont des dizaines de maisons, dans le quartier de Wadi Hummus, près de la clôture d’annexion qui sépare la Cisjordanie de Jérusalem. En fin d'après-midi, au moins un résident avait été arrêté et 10 bâtiments rasés, a rapporté le correspondant de MEE. Le Premier ministre palestinien Mohammed Shtayyeh a déclaré lundi lors d'une réunion de ministres que les démolitions constituaient une violation du droit international, tandis que d'autres responsables palestiniens ont demandé à la Cour pénale internationale de mener une enquête. Les responsables de l'ONU ont déclaré qu'ils étaient prêts à fournir une assistance aux personnes déplacées, mais a ajouté qu'aucune aide humanitaire ne pourrait remplacer la perte des propriétaires, dont certains avaient investi les économies de toute une vie. « Parmi les personnes déplacées de force ou autrement touchées figurent des réfugiés de Palestine, dont certains sont aujourd'hui confrontés à la réalité d'un deuxième déplacement, de mémoire d’homme », a déclaré un communiqué de l'ONU. Des habitants ont déclaré que les forces israéliennes ont traversé une section du mur d’annexion en le coupant à Sur Bahir [à cet endroit, le mur est constitué de barbelés électrifiés, ndt] en profitant de l'obscurité, vers 2 heures du matin lundi, et ont commencé à évacuer les gens avant d’installer des explosifs pour commencer les démolitions. Des activistes palestiniens, israéliens et internationaux qui s'étaient mobilisés pour tenter d'arrêter l'activité ont filmé et pris des photos de l’opération. (1) L'armée israélienne a déclaré la zone fermée pendant trois jours, interdisant aux gens d'entrer ou de rester dans le quartier. Elle a interdit aux Palestiniens de récupérer leurs biens ou d’ériger des tentes dans le secteur.
C'est quoi la Palestine aujourd'hui
" Un jour peut-être... Mais nous serons mort mon frère "
Par micheldandelot1 dans Accueil le 9 Octobre 2023 à 09:27
Attaque du Hezbollah et réplique de l’armée israélienne, activisme diplomatique ou coups de menton des pays du Moyen-Orient : l’offensive du Hamas contre Israël samedi met toute la région en ébullition. Israël décompte désormais 600 morts, et le Hamas environ 370. Les combats continuent, et l’État hébreu a décidé d’évacuer toute sa population près de la bande de Gaza.
DimancheDimanche 8 octobre en début de soirée, les combats se poursuivaient sur plusieurs points du territoire israélien, après l’attaque meurtrière du Hamas de la veille, et la réponse sous forme de frappes aériennes sur Gaza décidée par le gouvernement dirigé par Benyamin Nétanyahou.
L’armée a déclaré que des combattants palestiniens avaient pénétré dimanche dans le kibboutz Magen, à proximité avec la bande de Gaza au sud du pays. Dans un message audio diffusé sur Telegram, le porte-parole de la branche armée du Hamas a pour sa part assuré que son organisation continuait à envoyer des hommes en Israël.
Un porte-parole de l’armée israélienne a annoncé que des frappes aériennes sur la bande de Gaza avait eu lieu à la mi-journée. Elles se sont poursuivies, et Israël a indiqué avoir visé environ 800 cibles, en tout. Les tirs de roquettes en direction des villes israéliennes situées à proximité de Gaza se poursuivent également.
En moins de 48 heures, le conflit a déjà fait des centaines de victimes civiles côté israélien. Alors que le décompte semblait stabilisé depuis la nuit de samedi aux alentours de 300 morts, il a tout à coup été doublé en début d’après-midi dimanche, selon les médias israéliens, qui donnent désormais le chiffre de 600 morts. Selon les rumeurs circulant dans les médias et sur les réseaux sociaux, les jeunes participant à une rave party dans le désert pourraient constituer une large partie de ces victimes. Par ailleurs, plus de 2 200 blessés ont été comptabilisés.
Le ministère de la santé palestinien annonce quant à lui 370 Palestiniens tués et 2 200 blessés, dont 121 enfants. L’armée israélienne a également publié sur un site internet spécial les identités de 26 soldats, hommes et femmes, tués depuis samedi. Il s’agit de l’escalade la plus meurtrière dans le conflit israélo-palestinien depuis des décennies.
« Plus de 100 prisonniers » sont détenus par le Hamas, a annoncé le gouvernement israélien, dans une infographie publiée par le compte Facebook du bureau de presse du gouvernement et relayée par l’AFP. C’est la première fois que le gouvernement israélien évoque un chiffre sur ce sujet. Un Franco-Israélien de 26 ans pourrait faire partie de ces otages, a annoncé dimanche le député Meyer Habib, élu dans la circonscription des Français de l’étranger comprenant Israël.
Une Française fait partie des victimes. « Nous avons appris avec tristesse le décès tragique d’une compatriote en Israël dans le contexte des attaques terroristes », a fait savoir dimanche le ministère des affaires étrangères français, dans un bref communiqué. L’ambassadeur israélien aux États-Unis, Michael Herzog, a quant à lui déclaré que des citoyens américains se trouvaient parmi les personnes enlevées en Israël par le Hamas. Le ministère allemand des affaires étrangères a lui aussi indiqué que des personnes à la double nationalité israélienne et allemande faisaient partie des personnes enlevées.
Discussions diplomatiques
Les combats se sont aussi exportés au-delà d’Israël. Le Hezbollah, groupe armé chiite libanais soutenu par l’Iran, a revendiqué avoir attaqué trois positions israéliennes à la frontière, « en solidarité avec la résistance et le peuple palestiniens ». L’armée israélienne a immédiatement répliqué en frappant dimanche à l’aide de son artillerie le sud du Liban, ce qui laisse craindre une contagion régionale. Il n’y a pas pour le moment de victimes directes de ces tirs de part et d’autre.
«Le commandement de la résistance islamique au Liban est en contact direct avec le commandement de la résistance palestinienne au pays et à l’étranger et évalue en continu les événements et la conduite des opérations », a déclaré le Hezbollah juste après le déclenchement de l’offensive menée samedi matin par le Hamas palestinien. Cette offensive avait par ailleurs provoqué des scènes de joie dans les immenses camps palestiniens du Liban, mais également à Beyrouth ou dans la Jordanie proche.
L’Iran, soutien de longue date des groupes armés palestiniens, a également très vite fait entendre sa voix, revendiquant même une aide matérielle, financière et logistique à la conduite d’une telle opération. Le maintien en l’état du conflit israélo-palestinien, plus que la destruction d’Israël en elle-même, est l’obsession de la République islamique d’Iran, comme le rappelait récemment cette analyse de René Backmann. Le régime n’a cependant pas officiellement soutenu cette dernière attaque menée par le Hezbollah.
L’Égypte, autre pays frontalier d’Israël, a appelé par la voie de son ministère des affaires étrangères à « exercer un maximum de retenue en évitant d’exposer les civils à plus de danger », tentant de se poser, avec la France, en médiateur. Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi et Emmanuel Macron, en très bons termes ces dernières années, auraient discuté samedi des conditions d’une désescalade lors d’un entretien téléphonique.
Mais sur place ce dimanche, deux touristes israéliens et leur guide égyptien ont été tués par un policier à Alexandrie, sur la côte égyptienne. Le ministère des affaires étrangères israélien a confirmé l’information de médias locaux. Le policier, qui a été arrêté, a tiré sur le groupe de touristes israéliens avec son arme.
Sameh Choukri, le chef de la diplomatie égyptienne, s’était auparavant entretenu avec le ministre des affaires étrangères des Émirats arabes unis, le cheikh Abdallah ben Zayed al-Nahyane, sur « la gravité de la situation actuelle et de la nécessité de tout mettre en œuvre pour éviter que la situation sécuritaire ne devienne incontrôlable ».
Mobilisation des réservistes
L’offensive surprise du Hamas met à mal la normalisation entamée entre les pays du Golfe et Israël ces dernières années, avec une reprise des relations diplomatiques enclenchée l’an passé. Les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite se sont contentés, jusque-là, de condamner généralement « les violences » et d’appeler au calme.
La diplomatie marocaine a également demandé dimanche à la réunion d’urgence du Conseil de la Ligue arabe « la concertation et la coordination au sujet de la détérioration de la situation dans la bande de Gaza et du déclenchement d’actions militaires visant les civils, ainsi que [...] la recherche des moyens pour l’arrêt de cette dangereuse escalade ». Cette géographie des alliances et des réactions est documentée en temps réel sur le site Le Grand Continent.
L’armée israélienne a déjà annoncé que les jours à venir seraient terribles : l’état d’urgence a été décrété dans la nuit dans le pays, et l’armée a donné pour mission d’évacuer sous 24 heures tous les habitants des zones israéliennes du pourtour de la bande de Gaza, a déclaré dimanche son porte-parole, faisant état de « combats en cours, pour libérer des otages », entre forces israéliennes et activistes palestiniens infiltrés.
Le ministre israélien de l’énergie, Israël Katz, a annoncé, samedi 7 octobre dans la soirée, avoir signé un décret ordonnant à la compagnie publique d’électricité de « cesser [sa] fourniture d’électricité à Gaza »,plongeant dès samedi soir la cité dans le noir,de même que tout transport de marchandises ou de personnes. Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, qui avait qualifié Gaza de « cité du Mal » dans son allocution samedi, a averti dimanche les Israéliens qu’ils étaient « embarqués dans une guerre longue et difficile ».
Le gouvernement a par ailleurs appelé à la mobilisation de milliers de réservistes, maillon essentiel de l’armée israélienne. Des centaines d’entre eux avaient fait part de leur colère cet été face à la dérive de l’exécutif et menacé de ne pas servir cet été pour protester contre la réforme de la justice menée par Benyamin Nétanyahou. L’union nationale semble avoir pris le dessus.
À l’image de nombreuses autres compagnies aériennes, Air France et Transavia ont annoncé suspendre leurs vols vers Tel-Aviv ces dimanche et lundi.
La rédaction de Mediapart avec l’Agence France-Presse
8 octobre 2023 à 13h56
La rédaction de Mediapart avec l’Agence France-Presse
Une femme palestinienne marche près de sa maison détruite, après un raid israélien de deux jours à Jénine, en Cisjordanie occupée par Israël, le 5 juillet 2023 (Photo, Reuters).
«L'impunité dont jouit Israël pour ses actes de violence depuis des décennies ne fait qu'alimenter et intensifier le cycle récurrent de la violence», ont ajouté les expertes
Les deux jours de raids de cette semaine ont représenté l'assaut le plus féroce contre la région depuis la destruction du camp de réfugiés de Jénine en 2002
NEW YORK : L'offensive israélienne contre le camp de réfugiés de Jénine en Cisjordanie occupée cette semaine, qui a tué au moins 12 Palestiniens dont cinq enfants, pourrait constituer un crime de guerre, ont déclaré mercredi des expertes de l'ONU.
Des maisons, des immeubles et d'autres infrastructures ont été endommagés au cours des deux jours de raids, lundi et mardi, et plus de 4 000 Palestiniens ont été contraints de fuir.
Les actions d'Israël constituent «des violations flagrantes du droit international et des normes relatives à l'usage de la force et peuvent constituer un crime de guerre», ont déclaré Francesca Albanese, rapporteuse spéciale des Nations unies sur la situation des droits de l'homme dans le territoire palestinien occupé depuis 1967, et Paula Betancur, rapporteuse spéciale sur les droits de l'homme des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays.
«Les attaques ont été les plus violentes en Cisjordanie depuis la destruction du camp de Jénine en 2002», ont-elles ajouté.
Albanese et Betancur ont souligné que des équipes d'ambulanciers s'étaient vu refuser l'accès au camp de réfugiés, empêchant ainsi les blessés de recevoir une assistance médicale.
«Il est déchirant de voir des milliers de réfugiés palestiniens, déplacés à l'origine depuis 1947-1949, contraints de quitter le camp dans une peur abjecte au milieu de la nuit», ont-elles déploré.
Les rapporteurs spéciaux font partie de ce que l'on appelle les procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme des Nations unies. Ce sont des experts indépendants qui travaillent sur une base volontaire, ne font pas partie du personnel de l'ONU et ne sont pas rémunérés pour leur travail.
«Amplification de la violence structurelle»
Albanese et Betancur ont également dénoncé l'opération «antiterroriste» menée par Israël et ont signalé que le droit international ne justifiait pas de telles actions.
«Ces attaques constituent une punition collective à l'encontre de la population palestinienne, qualifiée de “menace collective pour la sécurité” aux yeux des autorités israéliennes», ont-elles indiqué.
Elles ont également exprimé leur «grave inquiétude» concernant les armes et les tactiques déployées au moins à deux reprises au cours des deux dernières semaines par les forces israéliennes contre la population de Jénine.
«Les Palestiniens du territoire palestinien occupé sont des personnes protégées par le droit international, auxquelles sont garantis tous les droits de l'homme, en particulier la présomption d'innocence», ont souligné Albanese et Betancur.
«Ils ne peuvent être traités comme une menace pour la sécurité collective par la puissance occupante, d'autant plus qu'elle poursuit l'annexion des terres palestiniennes occupées, ainsi que le déplacement et la dépossession de leurs résidents palestiniens».
Les opérations menées par Israël à Jénine représentent «une amplification de la violence structurelle qui imprègne» les territoires palestiniens occupés depuis de nombreuses années, ont-elles ajouté.
«L'impunité dont jouit Israël pour ses actes de violence depuis des décennies ne fait qu'alimenter et intensifier le cycle récurrent de la violence.»
Les expertes de l'ONU ont demandé qu'Israël soit tenu responsable, en vertu du droit international, de son «occupation illégale et des actes de violence qui la perpétuent».
Elles ont soutenu : «Pour que cette violence incessante prenne fin, l'occupation illégale d'Israël doit cesser. Elle ne peut être corrigée ou améliorée à la marge, car elle est erronée au plus profond d'elle-même.»
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