Un Maghrébin assure avoir changé de nom de famille pour pouvoir obtenir un emploi en France. Il en parle dans un roman qu’il a récemment publié.
« J’avais hérité du nom de mon père qui n’était pas compatible avec un emploi qualifié. J’avais deux masters à la Sorbonne et pas un seul appel pour un entretien. Au moment où j’ai changé de nom, en remplaçant Ait-Taleb par Le Clerc, j’ai reçu des centaines d’appels », assure l’écrivain Xavier Le Clerc dans « Un homme sans titre », son troisième roman publié aux éditions Gallimard.
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Ce roman est avant tout un hommage à son père né en Kabylie. Arrivé en France dans les années 60, ce dernier s’est battu toute sa vie pour faire vivre sa famille de neuf enfants, fait savoir France Inter. « L’homme sans titre, c’est avant tout une référence au fait que mon père n’avait de titre que de titre de résidence ou de transport, jamais de titre de propriété ou de noblesse », explique Xavier Le Clerc.
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Aussi, a-t-il confié que son père est né dans la famine, qu’il a eu son enfance pendant la seconde guerre mondiale, son adolescence pendant la Guerre d’Algérie qui ne portait pas encore son nom. L’écrivain se dit fier du parcours de son père. « C’est une immense leçon de dignité. Si j’avais quelques miettes de sa dignité, j’en serais très fier. Le premier livre de ma vie, c’est avant tout mon père », ajoute-t-il.
L’historienne fait part de ses divergences avec les analyses de Benjamin Stora dans le rapport sur « les questions mémorielles » liées à cette période qu’il a remis le 20 janvier 2021 au chef de l’Etat la commande du rapport à Benjamin Stora sur « les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d’Algérie » repose sur un présupposé : la « guerre d’Algérie » serait l’objet d’une «guerre des mémoires» qu’une «réconciliation» francoalgérienne devrait apaiser.
Il y aurait donc une fracture dans l’approche de ce passé, opposant Français et Algériens. Ce n’est pas ce que raconte l’histoire de la guerre. En Algérie comme en France, les sociétés ont connu des clivages profonds, parfois violents, qui ont transcendé les appartenances nationales.
Cette guerre n’a pas mis en présence des Français et des Algériens unis face-à-face, ni incapables de converger. Des « Européens », dans la taxonomie coloniale, ont lutté pour l’indépendance selon une conception de la nation algérienne ouverte à leur égard, des Français ont dénoncé la torture en invoquant la République et ses valeurs quand d’autres défendaient l’œuvre coloniale ; des anticolonialistes français et des nationalistes algériens ont partagé un idéal révolutionnaire, internationaliste ; des indépendantistes se sont entretués. Aucune homogénéité, aucun unanimisme, donc ; cette guerre a mis les nations à l’épreuve. Rien n’est plus faux que de la penser en affrontement de deux blocs nationaux. Ce n’est pas non plus ainsi que les mémoires individuelles se sont construites.
En France, les recherches démontrent la multiplicité des appréhensions de ce passé par les générations postérieures, les témoins disparaissant au fil du temps. Tout est possible : de la réappropriation la plus vive à l’indifférence totale, en passant par une vaste gamme complexe. La remémoration n’est pas toujours douloureuse, ni publique. Elle exprime souvent une demande d’histoire, à des fins de compréhension et non de revanche. La pathologisation systématique des mémoires, dans la société française, est excessive.
Le politique pour champ de bataille
Les affrontements ont le politique pour champ de bataille. Ils se cristallisent sur les noms de lieux, les plaques, stèles et autres symboles érigés dans la discorde, parfois vandalisés. En dépit d’une représentativité à questionner, des associations s’arrogeant la parole d’un groupe entretiennent la bataille, sans hésiter à servir des clientélismes électoraux. Il ne s’agit pas d’histoire ni de mémoire, mais d’usages du passé. Celui-ci est d’autant plus polémique qu’il nourrit des argumentaires allant de l’extrême gauche à l’extrême droite sur des thèmes d’actualité (migrations, islam, terrorisme, exception, citoyenneté, nation…).
Parler ici de « réconciliation » n’a pas de sens. Idem, au plan bilatéral : les deux Etats, censés traîner un contentieux historique, ont toujours été partenaires – sinon, par exemple, comment la France aurait-elle pu conduire des essais nucléaires au Sahara après 1962 ?
Partenaires, les deux pays le sont toujours. Le passé sert de levier actionné dans le sens du rapprochement ou de la tension, au service d’intérêts supérieurs ; il est une ressource dans laquelle puiser, selon les besoins du moment. La réaction du secrétaire général de l’Organisation des moudjahidine, rejetant le rapport, pourrait ainsi s’expliquer. Le traitement de ce passé en France, par les pouvoirs publics français, reste cependant d’actualité.
DES ASSOCIATIONS S’ARROGEANT LA PAROLE
D’UN GROUPE ENTRETIENNENT LA BATAILLE
SANS HÉSITER À SERVIR DES CLIENTÉLISMES
L’idée d’une « guerre des mémoires » est performative. Elle produit des effets pervers d’assignation et d’identification des acteurs ; chacun n’est-il pas censé appartenir à un camp, auquel il doit se ranger ? Il faut d’urgence revenir à l’histoire – et son dépassement des référents nationaux – pour enrayer l’engrenage et cesser de craindre ce passé au motif de sa conflictualité sociale.
Des traumatismes, des blessures intimes transmises au gré des générations, bien sûr, cette guerre en a causés ; la situation n’est pas la même en France et en Algérie, où chacun a été exposé aux violences. En France, où le cas de la seconde guerre mondiale a légitimé des politiques parées de vertus réparatrices, des déclarations, des monuments, des plaques, des commémorations existent mais la demande demeure. Que manque-t-il ? Une condamnation, certainement ; forte, solennelle, officielle. L’enceinte judiciaire n’a pu en être le théâtre. L’amnistie a interdit la poursuite des crimes commis pendant la guerre. A la jonction entre la réparation symbolique et l’action politique, la justice transitionnelle offre une piste – il faudrait y réfléchir au-delà de la vague suggestion d’une «commission» à peine esquissée dans le rapport. Et revenir à la source du mal qu’a été l’entreprise coloniale, à l’origine d’une colonie de peuplement assurant à un million de Français la suprématie sur une majorité de neuf millions de «musulmans», d’après la catégorisation de l’époque.
Cette société-là – par nature oppressive, en dépit d’interactions individuelles et de relations humaines sincèrement amicales, quelles qu’aient pu être la volonté et les intentions de ses membres – ne pouvait tenir. C’est d’elle qu’est sortie la guerre. La culture politique française doit se débarrasser de sa frilosité sur une colonisation naguère source de puissance et d’orgueil. Au XXIe siècle, comment défendre encore la légitimité d’une conquête territoriale suivie d’un peuplement exogène, d’une dépossession foncière officiellement organisée, de l’instauration d’un ordre social intrinsèquement inégal et de sa préservation par la violence ?
Racisme toujours à l’œuvre
Mais que vaut le symbolique, à l’heure où les discriminations rejouent au présent, au moins en apparence, un rapport colonial ancien ? Que l’origine coloniale de ces discriminations soit discutable (car jamais le présent ne découle directement du passé), que leurs dimensions raciale et/ou sociale soient vivement débattues, n’y change rien. Cette histoire toute entière parle d’un racisme toujours à l’œuvre. Pour cette raison, le traitement symbolique du passé n’en atténue pas l’âpreté.
Que peut-il quand les discriminations, quotidiennes, nécessiteraient des mesures à la portée sociale effective et quand la stigmatisation demeure ? À l’heure où le projet de loi sur le séparatisme, source de débats nauséabonds, arrive au Parlement, il faut dire qu’il n’y aura pas de politique publique de la mémoire crédible sans politique cohérente par ailleurs. Parce qu’elle conduit au symbolique, l’approche psychologisante est un outil redoutable de dépolitisation.
p Sylvie Thénault est historienne, directrice de recherche CNRS, autrice de «Violence ordinaire dans l’Algérie coloniale. Camps, internements, assignations à résidence» (Odile Jacob, 2012).
Ce n’est pas la mort de la reine d’Angleterre qui me rend triste (je n’en dirai pas plus sur ce sujet, il y a déjà le dénommé Jupiter Macron qui m’insupporte) mais c’est la disparition du journal Le Ravi qui est un journal mensuel fondé en 2003, il examine d'un œil attentif la vie politique, sociale, culturelle, et l’actualité de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Il mélange enquêtes et satire, articles et dessins. Le dessin de presse et la caricature y tiennent une part importante, tandis que les journalistes de l'équipe scrutent l'actualité locale.
Journal indépendant, résolument acteur du monde de l'économie sociale et solidaire, et premier journal en France à se réclamer du Slow Media, Le Ravi est édité par l’association « La Tchatche » (à Marseille). Il paraît chaque premier vendredi du mois. Il est possible de l'acheter en kiosque (sur toute la région) ou bien de s'abonner en ligne pour un accès numérique et l'envoi du journal à domicile.
En septembre 2022, le journal annonce son dépôt de bilan et la fin de ses activités.
Le 14 octobre 2011 je mettais en ligne sur mon blog cet article :
Le 17 octobre 1961, une manifestation à l’appel du FLN était réprimée dans le sang à Paris par le préfet Papon. 50 ans plus tard, le Ravi a concocté un petit circuit touristique atypique et gratuit pour vous faire découvrir une vraie spécialité régionale : les lieux de mémoire des nostalgiques de l’Algérie française et de l’OAS, l’Organisation armée secrète.
Un peu d’Histoire. À partir de 1962, 404 000 rapatriés d’Algérie et Harkis s’installent en Provence-Alpes-Côte-d’Azur (« Le dessous des pieds noirs ». Très rapidement, certains sentent le besoin de se créer des lieux de mémoire. Les plus extrémistes perpétuent encore cette funeste tradition, qu’ils accompagnent de révisionnisme. Les gerbes déposées au pied des stèles délivrent parfois un message, du style « On pense A toi Sans cesse », afin de rendre hommage à l’O.A.S.
Marseille et sa région
Marseille
Si la deuxième ville de France n’est pas à proprement parler une destination nostalgérique, elle est le point de départ idéal de notre petite balade. La « Porte de l’Orient » est en effet parsemée de souvenirs de l’empire colonial français : les escaliers la gare Saint-Charles et sa statuaire représentant les colonies d’Afrique et d’Asie, le plafond du salon de l’Horloge de la préfecture à la gloire du « génie de la France éclairant le monde » ou encore le monument aux morts des Poilus d’Orient sur la corniche Kennedy. L’incontournable : l’hélice de César, commandée par Gaston Deferre en hommage aux rapatriés. La curiosité : l’ancienne usine Picon, 11 bd National, qui accueille les locaux du Ravi !
Carnoux-en-Provence
Située en banlieue d’Aubagne, la petite ville est l’un des lieux de pèlerinage en Paca (le 15 août). Fondée en 1957 par des « repliés » du Maroc, la bourgade prend son essor après l’arrivée des Français d’Algérie. L’incontournable : l’église Notre-Dame-d’Afrique et sa monumentale vierge noire. La curiosité : son cimetière, longtemps ouvert à tous les rapatriés de France.
Aix-en-Provence
La « belle endormie » est un haut lieu de la nostalgérie. Il faut prendre le temps d’y flâner. Maryse Joissains, députée-maire UMP de la ville, y multiplie en effet les signes de sympathie à l’égard des révisionnistes. Derniers en date : sa présence au spectacle « La mémoire qui saigne », en mars 2010, et l’inauguration d’un rond-point Général-Bigeard le 19 juin de la même année, le lendemain de sa mort. L’incontournable : le Mémorial national des Français d’Algérie (cimetière Saint-Pierre, au sud-est du centre-ville), tout premier monument à voir été édifié (en 1965) en l’honneur des rapatriés. La curiosité : la Maison du maréchal Juin (quartier d’Encagnane), propriété de la ville, qui rassemble une vingtaine d’associations nostalgériques, dont certaines proches de l’extrême droite).
En quittant Aix, vous avez le choix entre deux directions : le Vaucluse à l’Ouest, le Var à l’Est. Pas de panique ! Cette année, les deux départements ont chacun élu un conseiller général FN…
Marignane
Sur la route du Vaucluse, impossible d’éviter Marignane. Depuis 2005, l’ancienne ville frontiste vit au rythme de la bataille (de procédure) de la « stèle de la discorde », qui trône depuis mars dernier dans le cimetière Saint-Laurent Imbert par la grâce d’Éric Le Dissès, maire divers droite. Une priorité ! De prochains jugements pourraient décider d’un nouveau démontage.
Vaucluse
Avignon
Petite halte rafraîchissante au cimetière Saint-Véran. Tous les 26 mars y a lieu une cérémonie du souvenir en l’honneur de la fusillade de la rue d’Isly à Alger. Cette année, les UMP Alain Dufaut (sénateur du Vaucluse), Jean-Marc Roubaud (député du Gard) et Thierry Lagneau (conseiller général et maire de Sorgues) ont fait le déplacement.
Orange
Passer par Sorgues. Le cimetière abrite une stèle – dédiée aux « Morts » des rapatriés de la ville – d’une rare laideur : une colonne en ardoise surmontée d’un saladier. En arrivant à Orange, direction la rue Jacques-Perret. C’est au maire Jacques Bompard, passé par le FN et le MPF avant de fonder la Ligue du Sud, que l’on doit cet hommage unique à un des rares écrivains engagés dans la défense de l’Algérie française.
Direction le Var
Attention ! Le passage par les Alpes-de-Haute-Provence est une rude épreuve : aucun lieu mémoriel à signaler et la population est majoritairement gauchiste et pacifiste ! À traverser d’une traite, pied au plancher !
Toulon et ses environs
Toulon
Autre immanquable de cette balade. L’empire colonial français doit beaucoup au port militaire : la plage du Mourillon a été le point de départ de la conquête de l’Algérie puis la base logistique des expéditions coloniales, l’émir Abd el-Kader y débute sa détention et en 1957 s’y crée une antenne de l’OAS… L’incontournable : le monument aux Martyrs de l’Algérie française (porte d’Italie). S’il a perdu sa statue du lieutenant Degueldre, chef des commandos Delta de l’OAS condamné à mort et fusillé en juillet 1962, lors de son plasticage une semaine avant son inauguration, le 14 juin 1980, le mémorial est depuis toujours un lieu de pèlerinage pour Jean-Marie Le Pen et bénéficie depuis peu d’une illumination nocturne tricolore sur décision d’Hubert Falco, sénateur-maire UMP de la ville. Curiosité : le carrefour du Colonel-Salan (vers le mont Faron), initiateur du putsch d’Alger. Rebaptisé en 2005 « Libération de Toulon – août 1944 », il a été inauguré en mars 2001 par Jean-Marie Le Chevalier, alors maire FN de la ville, avec un Salan au grade de général, en souvenir de l’attentat manqué du général de Gaulle au mémorial du Mont Faron (1964).
Hyères
La capitale des nostalgiques de l’Algérie française. Depuis 1967, la ville aux palmiers y accueille le siège de l’Association pour la défense des intérêts moraux et matériels des anciens détenus de l’Algérie française (le Ravi no 55 et 58), une organisation proche de l’OAS et toujours virulente. Curiosité : la plaque « Aux Disparus, aux Martyrs, aux Patriotes résistants tombés pour que la France vive en Algérie » inaugurée en janvier 2007. À noter : Jean-François Collin, son président et ancien élu FN de Hyères, vient d’être nommé chevalier de la Légion d’honneur. Bravo ! Cet article ayant été écrit en 2011, le « chevalier a perdu sa Légion du déshonneur » depuis.
Si vous avez encore des tripes, plus que quelques kilomètres avant les Alpes-Maritimes !
La Côte d’Azur
Théoule-sur-Mer
La Mecque de la nostalgérie depuis 2000 ! Installé à la frontière du Var et des Alpes-Maritimes, le village (1 500 âmes) accueille aux Saoumes (colline de l’Esterel) le fameux mémorial Notre-Dame-d’Afrique, une statue géante (12 mètres) en ferraille et bras ouverts qui n’a rien à envier au Mandarom de Digne-les-Bains. Des plaques commémoratives, dont la liste des morts de la fusillade de la rue d’Isly, ornent son socle. Pèlerinages : les 1er mai et 1er novembre.
Le Cannet
Pas de monument, aucun signe extérieur de « richesse » nostalgérique. Mais un maire UMP, Michèle Tabarot, entièrement dévouée à la cause. Fille d’un dirigeant de l’OAS, physique et idées de Marine Le Pen, la députée est inscrite depuis sa première élection, en 2002, dans le groupe d’étude parlementaire sur les rapatriés. Deux ans plus tard, la « copéiste » y a défendu la cause des anciens membres de l’OAS pour qu’ils récupèrent des points de retraite perdus durant leurs années de clandestinité et d’exil. Sans surprise, Michèle Tabarot a également été l’une des plus virulentes partisanes de la loi du 23 février 2005 sur le « rôle positif » de la colonisation.
Nice
Grâce à la volonté du sarkozyste Christian Estrosi, la baie des Anges trouve progressivement sa place dans la sphère nostalgérique. Depuis deux ans, un très curieux Festival des Deux rives s’installe au mois de juin dans les arènes de Cimiez. Curiosité : le jardin Alsace-Lorraine. À deux pas de la promenade des Anglais, ce petit parc verdoyant accueille un mémorial aux rapatriés (une main portant une urne) dédié au lieutenant Degueldre. Le 23 avril 2011, l’ancien ministre et député-maire de la ville, avec l’aval de la préfecture, y a autorisé la commémoration du putsch d’Alger. Les élections approchent…
Par Jean-François Poupelin
Un grand merci à François Nadiras, de la Ligue des droits de l’homme de Toulon, pour son aide, ses souvenirs et toute la matière disponible sur le site qui existait de son vivant...
La belle province canadienne reçoit de nombreuses infirmières algériennes pour renforcer leur effectif dans les deux villes québécoises Matane et Rimouski. Dzair Daily vous en dit davantage à ce sujet, dans la suite de son édition du 2 septembre 2022. En effet, le CISSS (centre intégré de santé et de services sociaux) de la région du Bas-Saint-Laurent, situé au Canada, s’apprête à accueillir de nouvelles infirmières algériennes, mais aussi de plusieurs autres pays africains. Ces nouvelles recrues se feront prochainement, en début d’automne de l’année en cours. Il s’agit d’une information relatée par Radio Canada.
Effectivement, le CISS du Québec accueillera très bientôt environ 37 nouvelles infirmières et infirmiers, venant du continent africain. Cela permettra au susdit centre de santé d’assurer une bonne prise en charge des patients. Toutefois, ces nouveaux membres recrutés pour accroître le paramédical peuvent engendrer un sureffectif. Par conséquent, provoquer une pénurie de logement.
Par ailleurs, ces nouveaux arrivants vont entamer une formation qui durera un an. Et ce, avant de pouvoir prêter une aide dans les établissements de santé de la région. Vingt et un (21) d’entre eux suivront cette formation au Cégep de Rimouski. Tandis que seize (16) d’entre eux feront cette formation au Cégep de Matane.
Québec : embauche de nouveaux infirmiers du continent africain Dans le détail, cette première année leur sera utile afin d’acquérir d’autres compétences. Ainsi, leur ensemble des infirmiers seront évalués en vertu des exigences du centre de santé. Enfin, le CISSS du Bas-Saint-Laurent procèdera à les embaucher officiellement pour une durée de trois (3) ans.
Il est à noter qu’une coordonnatrice des services de ressources humaines pour le CISSS du Bas-Saint-Laurent témoigne. Celle-ci révèle donc : « Ce sont des infirmières et infirmiers d’expérience, qui arrivent avec un conjoint qui va pouvoir lui aussi travailler dans la région. Ça apporte aussi de la main-d’œuvre au Bas-Saint-Laurent ».
Rappelons notamment qu’en février dernier, le Québec a annoncé un investissement de 65 millions de dollars. Cette somme budgétaire a été destinée au recrutement de nouvelles infirmières à l’extérieur du pays. Cette offre était destinée à sept régions du Québec, dont le Bas-Saint-Laurent.
Au cours de ses sept décennies de règne, la reine Elizabeth II s’est rendue dans une vingtaine de pays africains. Des voyages dont il reste des photos qui ont fait le tour du monde, et un héritage politique.
La légende raconte qu’elle a appris la mort de son père, le roi George VI, alors qu’elle se trouvait sur une plateforme hissée au sommet d’un figuier d’où elle observait la vie sauvage, elle, la grande passionnée d’animaux et de photographie. Nous sommes en février 1952, au Kenya. La princesse Elizabeth effectue une tournée dans plusieurs pays du Commonwealth – cinquante-six, dont une vingtaine de pays africains souverains aujourd’hui –, pour représenter le souverain de 56 ans, atteint d’un cancer du poumon et incapable de se déplacer à l’étranger.
Elle est accompagnée de son époux Philip, le duc d’Edimbourg. Le couple s’est marié cinq ans plus tôt. Princesse à son arrivée en Afrique, elle en repartira reine, et sera la sixième femme à monter sur le trône britannique. Elle a 25 ans.
Le nouveau dirigeant du pays, William Ruto, a quant à lui présenté ses condoléances sur Twitter et décrit le Commonwealth comme « l’héritage historique » d’Elizabeth II. Mais dans le pays, certains gardent surtout en mémoire la révolte anticolonialiste des Mau-Mau, violemment réprimée par les colons.
Au cours de son règne de sept décennies – un record – marqué par le processus d’indépendance des anciennes colonies britanniques, la reine aura visité au total vingt et un pays du continent. Avec toujours un objectif en tête : la préservation du Commonwealth.
Ce sera le cas en 1961, au Ghana. Dans son entourage, tous craignent ce déplacement. La presse britannique le juge « imprudent » et « dangereux ». Winston Churchill s’en émeut auprès du Premier ministre de l’époque. Rien n’y fait. Malgré les mises en garde répétées, la souveraine maintient son voyage dans l’ancienne colonie britannique devenue indépendante. À sa tête, le panafricaniste Kwame Nkrumah est de plus en plus contesté. Sa politique très ferme lui vaut de multiples tentatives d’assassinat. La dernière a coûté la vie à l’un de ses gardes du corps.
Mais Elizabeth II se moque de cet aspect sécuritaire. Le rapprochement de Nkrumah avec Moscou l’inquiète bien davantage. Le « marxiste » envisage de quitter le Commonwealth et ça, la reine ne s’y résout pas. « Comme j’aurais l’air sotte si j’avais peur de visiter le Ghana, puisque Khrouchtchev y est allé en étant bien reçu », confie-t-elle.
Les photos de sa valse avec Kwame Nkrumah lors de l’ouverture d’un bal donné en son honneur, qui la place sur un pied d’égalité avec son hôte, un homme noir – la ségrégation existe alors encore aux États-Unis –, feront le tour du monde. Le succès de ce voyage sera bien sûr symbolique, mais aussi et surtout politique : le Ghana fait toujours partie du Commonwealth aujourd’hui.
Le président ghanéen actuel, Nana Akufo-Addo, a salué sur les réseaux sociaux « sa présence inspirante, son calme, sa stabilité et, par-dessus tout, son grand amour et sa croyance dans le Commonwealth, ainsi que sa capacité à être une force pour le bien commun ». Les drapeaux du pays seront en berne pendant sept jours.
En Zambie contre l’avis de Thatcher
Comme lors de ce voyage officiel au Ghana, la reine fera fi de multiples mises en garde quelques années plus tard, à l’occasion d’un déplacement en Zambie, en 1979. La cheffe du Commonwealth est attendue cette année-là au sommet de l’organisation, organisé dans la capitale, Lusaka.
La ville se situe à seulement 200 kilomètres de la frontière rhodésienne, où une guerre civile fait rage depuis 1964. Le régime ségrégationniste affronte les partisans de l’indépendance. La Première ministre britannique Margaret Thatcher, qui vient d’arriver à ce poste, est fermement opposée à ce déplacement. Les deux femmes ont seulement six mois d’écart et leur relation est notoirement houleuse.
Elizabeth II, accueillie très chaleureusement en Zambie, y présidera la signature de la Déclaration de Lusaka, par laquelle les dirigeants de l’organisation s’engagent à travailler ensemble pour éliminer le racisme et les politiques d’apartheid. Quelques mois plus tard, la Rhodésie du Sud disparaît au profit du Zimbabwe de Robert Mugabe. La guerre prendra fin.
Unanimement respectée à la tête du Commonwealth, elle n’a vu qu’un seul dirigeant oser s’opposer à elle : le sanguinaire Idi Amin Dada, autoproclamé « roi d’Écosse ». Ce dernier avait assuré qu’il prendrait sa place à la tête de l’organisation.
En 1975, le président ougandais s’était invité à Buckingham Palace. Dans un message à la reine, il annonçait sa visite officielle en Grande-Bretagne à partir du 4 août, exigeant « un séjour confortable » avec « l’espoir de pouvoir compter à Londres sur un ravitaillement régulier et satisfaisant en produits essentiels », bien que l’économie britannique soit » souffrante à bien des égards », rapporte Le Monde dans un article paru l’année en question. Puis, Idi Amin Dada (renversé en 1979) avait proposé à la reine de venir à son tour en Ouganda « rencontrer un vrai homme »…
Dans le pays aujourd’hui, l’un des plus beaux parcs nationaux porte le nom de Queen Elizabeth. « Il rassemble à lui seul un composé de savane d’acacias, de forêt tropicale, de cratères volcaniques, de lacs et de plaines », d’après les guides touristiques. Un hommage à la passion de la monarque pour la nature et un clin d’œil au jour où la princesse devint reine, en Afrique. Mais des voix s’élèvent pour demander que disparaissent les traces de l’ancien colon dans l’espace public…
Le conflit entre la Russie et l’Ukraine était prévisible, pourtant rien n’a réellement été fait pour l’éviter. Un signe inquiétant alors que les tensions s’avivent entre grandes puissances, en particulier autour du sort de Taïwan.
Notre monde, plus que jamais, court de graves dangers créés et entretenus par l’homme. Le dérèglement climatique n’est plus une menace. Il est déjà là avec toutes ses conséquences, aussi bien sur la santé des hommes que sur leur sécurité et la paix.
Cette arme nouvelle est différente de tout l’arsenal thermonucléaire existant. C’est une arme qui menace l’existence même de l’humanité et dont on commence à voir les conséquences sur toutes les parties du globe. Une arme qui n’épargnera aucun pays, puissant ou faible, riche ou pauvre. Pour preuve, la grande sécheresse qui frappe l’Europe, accompagnée de l’incendie de dizaines de milliers d’hectares de terre. Sans compter l’impact de ces phénomènes qui bouleversent toutes les certitudes et accélèrent la crise économique mondiale. Pour y faire face, rien de mieux que de renforcer les mesures collectives pour atténuer les effets néfastes de l’homme sur la terre, notre bien commun.
Pendant longtemps, la course aux armements fut la plus grande menace pour l’avenir de l’humanité. Elle existe toujours et se précise. Les mots contenus dans l’excellente tribune publiée dans Le Figaro, le 13 mai 2022, par Claude Guéant, l’ancien conseiller du président Nicolas Sarkozy, au début de la guerre d’Ukraine, nous interpellent tous. « Nous avançons vers la guerre comme des somnanbules. »
Les deux guerres les plus meurtrières qui ont marqué l’Europe – entraînant le reste du monde – se sont déroulées dans la première moitié du XXe siècle. Elles ont causé environ 18,6 millions de morts pour la première et plus de 60 millions de victimes pour la seconde, et ont vu la bestialité franchir toutes les limites avec les crimes odieux perpétrés dans les camps de la mort nazis.
Au lendemain de ces effroyables événements, les hommes ont pensé que plus jamais le spectre de la guerre ne menacerait l’existence de l’humanité. Ils ont imaginé un nouveau mécanisme pour assurer la sauvegarde de la paix dans le monde, par la création de l’organisation des Nations unies. Peine perdue. Les foyers de guerre sont demeurés.
À peine sorti de ces deux guerres, le monde a frôlé une autre confrontation en Corée entre les nouvelles puissances militaires dominant le monde, l’alerte maximum étant atteinte lors de la crise des missiles soviétiques de Cuba, en 1962.
Géostratégie politique malavisée
Aujourd’hui, nous assistons, impuissants, à une nouvelle guerre aux portes de l’Europe qui, si elle n’est pas maîtrisée, pourrait entraîner tous les pays européens et, à terme, une confrontation entre les puissances nucléaires. Je reste persuadé que la guerre d’Ukraine aurait pu être évitée. Abstraction a été faite de tous les mécanismes de prévention et de règlement des conflits existants. La diplomatie n’a pas usé de toutes ses capacités. Il est regrettable de constater que plutôt que de prévenir l’émergence de ce conflit, les pays continuent de l’attiser, au nom d’une géostratégie politique.
Dans cette guerre, il était évident dès le départ que la Fédération de Russie, se sentant menacée par son encerclement par les forces de l’Otan, prendrait la décision d’envahir militairement l’Ukraine. Une violation flagrante des principes du droit international unanimement condamnée. Les pays occidentaux nourrissent l’envie de voir la Russie s’embourber dans cette guerre avec, à la clé, la panoplie de sanctions imposées pour paralyser l’ogre russe. Ils continuent d’attiser le feu en fournissant à l’Ukraine des armes de dernière génération.
Les sanctions imposées à la Russie auront naturellement de nombreux impacts sur ce pays, mais les pays européens commencent à se rendre compte qu’ils sont les victimes collatérales de ces mesures de rétorsion, tant leur dépendance énergétique à l’égard de Moscou est évidente. D’autres conséquences aux dimensions planétaires se font sentir à plusieurs niveaux : la crise alimentaire, l’effet négatif sur le développement de l’agriculture avec la rareté des engrais produits, pour une grande part, par la Russie et l’ Ukraine.
Les menaces nucléaires proférées par le président Vladimir Poutine doivent aussi être prises au sérieux. L’usage de ce type d’arme n’est pas une chimère. L’histoire de l’humanité atteste que l’homme, depuis son apparition sur la terre, a utilisé toutes les armes qu’il a inventées. Du bâton à la pierre, des pieux à la lance, du couteau à l’épée , du fusil au canon et, depuis les deux dernières guerres, l’arme chimique, l’aviation, la marine, et, le comble, l’arme atomique. Toutes les sources attestent que les États-Unis n’avaient nullement besoin d’utiliser la bombe atomique à Hiroshima ou à Nagasaki en 1945, le Japon étant déjà vaincu militairement. Mais, puisque l’arme atomique était née, il fallait l’utiliser.
L’on est en droit de s’inquiéter des tournures de ce conflit russo-ukrainien qui commence à toucher la Crimée, que la Russie avait annexée des années auparavant et qu’elle considère comme partie intégrante de son territoire – guerre qui pourrait toucher rapidement d’autres pays européens membres de l’Otan. Une confrontation majeure pourrait surgir alors, pour le malheur du monde entier.
Dans une autre partie du monde, une menace pèse également sur la paix mondiale. Cette fois, elle pourrait mettre face à face deux puissances militaires, nucléaires de surcroît, la première et la deuxième économie mondiale. Deux foyers sont déjà identifiés, avec des intensités différentes, mais tous deux susceptibles de déclencher un conflit entre les États-Unis d’Amérique et la République populaire de Chine.
La reconquête de l’île de Taïwan, détachée de la Chine populaire à la fin de la guerre civile qui avait opposé nationalistes et communistes et été suivie de la victoire des troupes de Mao Tsé-toung, en est un. Le leader nationaliste Tchang Kaï-check, après sa fuite le 8 décembre 1949, se réfugia sur l’île de Formose où il établit son gouvernement, soutenu par les États-Unis d’Amérique et bénéficiant de leur appui militaire. Depuis, la longue lutte de la République populaire de Chine pour recouvrer sa place aux Nations unies, et elle n’a jamais renoncé à recouvrer sa légitimité sur l’île de Taïwan, qu’elle considère comme une partie intégrante de son territoire.
La modification du statut quo sur les îles chinoises de la mer de Chine est aussi une source réelle de confrontation entre les États-Unis d’Amérique et la République populaire de Chine.
Mâle dominant et harem
L’histoire des empires ressemble au règne animal, au sein duquel la loi du plus fort est la règle et où, en filigrane, règne le mâle dominant. Chaque fois qu’un jeune se sent la force d’affronter le dominant, une lutte féroce s’établit entre eux pour désigner celui qui prendra le contrôle du harem. Il en est de même pour les empires qui connaissent débuts, apogée et déclin, comme ce fut le cas de ceux des pharaons, des Romains, des Grecs, des Ottomans ou des Britanniques.
Zbigniew Brzezinski, l’ancien conseiller à la sécurité nationale du président Jimmy Carter, écrivait dans son livre L’Amérique face au monde. Quelle politique étrangère pour les États-Unis, que le déclin des États-Unis arriverait. Mais ni aussi tôt que le prédisent certains dans le monde, ni aussi tard que le pensent les Américains.
Plusieurs signes avant-coureurs de cette évolution sont perceptibles de nos jours. L’Amérique d’aujourd’hui est très différente de celle des années 1940 et de l’après-guerre, période durant laquelle les États-Unis avaient investi 16,5 milliards de dollars (l’équivalent de 173 milliards de nos jours) dans la reconstruction des pays européens dévastés par le conflit, sans compter le relèvement du Japon.
Aujourd’hui, la République populaire de Chine, devenue la seconde puissance économique du monde dominant le commerce mondial et disposant d’un impressionnant cash flow, se sent en mesure de défier les États-Unis. Selon plusieurs sources, elle a dégagé, en 2021, un excédent commercial de 690 milliards de dollars, pendant que les États-Unis, eux, traînent un déficit budgétaire colossal de 668 milliards de dollars.
Toutefois, l’Amérique conserve encore une avance économique et financière, militaire et culturelle, sans compter son succès en matière d’innovation technologique. Cet écart lui permet de maintenir son hégémonie mondiale et sa place de première puissance planétaire.
Mais le débat sur la mutation est engagé à plusieurs niveaux. Des chercheurs, politologues, dont mon ancien excellent collègue singapourien au Conseil de sécurité Kishore Mabubani, estiment que le XXIe siècle est celui de l’Asie, la Chine jouant le rôle moteur.
Pékin tente de changer le statut quo en mer de Chine, en déployant une impressionnante flotte dans cette partie du monde pour contrer l’influence de la 7e flotte américaine. Le premier test se fera sur l’île de Taïwan. Si, d’aventure, Taïwan décidait de proclamer son indépendance, il est loisible de penser que l’île, qui est à portée de main de la République populaire de Chine, serait envahie immédiatement par les forces armées de Beijing. L’autre hypothèse est une invasion de Taïwan par l’armée chinoise. Dans ces deux cas de figure, que feront les États-Unis d’Amérique face à l’annexion d’un territoire auquel ils sont liés par un accord de défense ?
Actuellement, les regards se portent sur deux parties du monde, l’Europe et l’Asie. Une réédition de la situation qui prévalait durant la Deuxième Guerre mondiale, avec l’Allemagne d’un côté et le Japon de l’autre. Les dernières manœuvres militaires des forces russes et chinoises sont-elles le signe d’une nouvelle alliance face au monde occidental ?
Je n’oublierai pas de mentionner des conflits récurrents non résolus comme la crise du Moyen-Orient, le nucléaire iranien, l’apparition des extrémismes violents comme al-Qaïda, Daech ou l’État islamique.
Il est temps que la communauté internationale prenne la mesure des menaces réelles qui pèsent sur la paix mondiale pour trouver les moyens de désamorcer cette tension visible qui risque de plonger le monde dans des jours sombres pour la survie de l’humanité.
8 septembre 2022 à 08:48
Par François Louncény Fall
François Louncény Fall est ancien secrétaire général adjoint des Nations unies, représentant spécial du secrétaire général de l’ONU et chef du Bureau régional des Nations unies pour l’Afrique centrale (Unoca).
27 avril 2022, checkpoint de Qalandia en Cisjordanie occupée. Des Palestiniens veulent se rendre à la mosquée Al-Aqsa pour y célébrer la Nuit du destin (Laylat al-Qadr) à la fin du ramadan
Abbas Momani
Auteur d’un projet de résolution cosigné cet été par 33 député·es de gauche sur « l’institutionnalisation par Israël d’un régime d’apartheid à l’encontre du peuple palestinien », le député communiste Jean-Paul Lecoq a subi un tombereau de critiques et d’injures. Il persiste et signe et répond ici, pour la première fois, à ses détracteurs.
Ce fut le mauvais buzz politique de l’été 2022 en France, à la mi-juillet. Le projet de résolution soumis au Parlement sur « l’institutionnalisation par Israël d’un régime d’apartheid à l’encontre du peuple palestinien » a été décrié, rejeté. Son auteur, Jean-Paul Lecoq, ancien maire de Gonfreville dans l’agglomération du Havre, député de Seine-Maritime, vice-président de la commission des affaires étrangères, et ses 33 député·es cosignataires ont été accusé·es du pire. Pour le gouvernement, pour les pro-israéliens, pour la droite, mais aussi pour une partie de la gauche, parler d’apartheid à propos d’Israël serait abusif, voire antisémite. Pourtant cosigné par des élus communistes, la France Insoumise (FI), des Verts, socialistes et indépendants, bref issus de toutes les nuances de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), ce texte a en outre été jugé par certains à gauche malencontreux et inapproprié dans le contexte de l’été, après une longue séquence électorale. Y a-t-il un bon ou un mauvais moment pour évoquer une situation qui perdure depuis des décennies ? Abasourdi par la violence des attaques subies, Jean-Paul Lecoq a décidé de répondre pour la première fois, pour Orient XXI. Pour le député, sur l’apartheid israélien, « il est temps de dire les choses ».
Jean Stern. — Pourquoi avoir choisi de présenter votre projet de résolution sur l’apartheid israélien cet été ?
Jean-Paul Lecoq. — Il y a une quinzaine d’années, j’ai vécu une expérience à l’Assemblée parlementaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) où j’étais l’un des députés représentant la France. Un député allemand avait alors présenté une résolution assimilant toute critique de la politique d’Israël à de l’antisémitisme. J’avais voté contre, comme l’ensemble des représentants français, de gauche, de droite et du centre. Je refuse de me résoudre à l’interdiction de parler.
J. S. — Vous n’avez donc pas été surpris de la violence des réactions à propos de cette résolution ?
J.-P. L. — Au moment de l’opération Plomb durci contre Gaza fin 2008-début 2009, j’ai fait partie d’une délégation parlementaire de haut niveau à se rendre sur place. Il y avait Bernard Accoyer, alors le président de l’Assemblée, Axel Poniatowski, Renaud Muselier, François Sauvadet, Jean-Marc Ayrault et moi-même. Je ne voulais pas participer à la rencontre avec Ehud Olmert, qui était le premier ministre israélien à l’époque. Et puis je me suis dit si tu as été élu, c’est aussi pour dire ce que tu penses à ces gens-là. Notre échange a été très vif, je lui ai parlé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, je lui ai aussi parlé de l’Afrique du Sud. Je ne fuis pas mes responsabilités, je pense qu’il faut dire les choses. De retour à l’hôtel, Accoyer m’a reproché ma prise de parole, mais Ayrault m’avait alors défendu en disant que ce que dit Lecoq, c’est ce que pensent 80 % des Français. Il faut continuer à dire que la situation en Israël et en Palestine n’est plus acceptable.
J. S. — D’où ce texte ?
J.-P. L. — Oui. En fait, il remonte à la mi-mai. Vous savez, je n’étais alors pas sûr d’être réélu, et je voulais laisser quelque chose. Sur la Palestine et Israël, après les Nations unies, après B’Tselem, après Amnesty International, il y avait de quoi s’appuyer pour dire que les choses étaient inacceptables. La résolution est sortie finalement en juillet, mais personne ne m’a entendu. Tous ceux qui m’agressaient ont fait campagne sur le vocable, sans parler du fond. Pourtant, ce n’était pas un mauvais moment, à une période où tout le monde en Europe évoquait des sanctions contre la Russie à propos de l’Ukraine.
J. S. — Vous vous attendiez à cette violence dans les réactions ?
J.-P. L. — De la part de Meyer Habib, cela ne m’a pas surpris. Mais je ne m’y attendais pas de la part d’un collègue socialiste comme Jérôme Guedj. Surtout qu’il ne m’en a pas parlé au préalable. Même chose de la part de Mathilde Panot et de Adrien Quatennens de la FI. Ils ont retiré leur signature sans même m’en parler, il y a eu zéro échange, rien. Pourtant on se voit souvent, je partage des actions militantes avec eux.
J. S. — Compte tenu des positions habituelles du parti socialiste, vous n’auriez pas dû être tellement surpris.
J.-P. L. — Une autre majorité, socialiste, avait voté pour la reconnaissance de l’État de Palestine…
J. S. — Qu’un gouvernement socialiste lui aussi n’avait pas avalisée…
J.-P. L. — Certes, et toutes ces contradictions méritent débat, mais rien ne justifie le niveau de violence que j’ai subi. Pourquoi en France je peux critiquer la Turquie, le Maroc, l’Iran et pourquoi je ne pourrais pas critiquer la politique d’Israël ? Au nom de quoi ? Sur l’apartheid, la définition des Nations unies s’applique par exemple à la Birmanie à propos des Rohingyas, sans que cela mette tout le monde en colère. Je veux débattre sur le fond.
J. S.— Vous avez été accusé d’antisémitisme.
J.-P. L. — Je n’ai pas envie de répondre, mais je ne me laisserai plus insulter. Mes multiples engagements comme élu local à Gonfreville, ceux de mon parti, se suffisent à eux-mêmes.
J. S.— La charge à l’Assemblée du ministre de la justice Éric Dupont-Moretti a été particulièrement violente contre votre résolution.
J.-P. L. — Il n’avait rien lu du tout, il n’était au courant de rien. Il fait son intervention à la tribune de l’Assemblée et nous décidons alors, mon groupe et moi, de quitter l’hémicycle. Je suis en bas et Dupont-Moretti vient me voir et me dit : « Ce n’est pas contre toi ». Je lui réponds : « Tu es en train de m’insulter, là ! » Mais comme la première ministre Élisabeth Borne ensuite, il était obsédé par les « islamo-gauchistes » de la FI. Ils ne savaient même pas que c’était une résolution d’origine communiste. Il y a quelque chose qui les aveugle. Ils condamnent avant même de lire. C’était pourtant l’occasion de mettre les bons mots sur des actes, de qualifier les choses convenablement.
J. S. — Comment comptez-vous donner suite à ce projet de résolution ?
J.-P. L. — Cette résolution, nous allons la faire vivre. Nous la présenterons bientôt dans une niche parlementaire. Et puis nous allons la transmettre à des groupes parlementaires proches de nous dans d’autres pays européens. J’ai l’intention de continuer à dire les choses, à ne pas lâcher la solidarité, à affirmer que le boycott est un acte pacifique. Je n’ai pas l’intention de lâcher.
La ville aux yeux d'or. Roman de Keltoum Staali. Casbah Editions, Alger 2022, 175 pages, 700 dinars
Elle (Meryem) revient -après de longues années d'éloignement- à Alger, une ville où elle y a vécu si peu mais une ville qui la possède. Une ville «bavarde mais secrète». Une ville magique pleine d'envoûtements. Une ville embouteillée, envahie par la poussière chaude et les klaxons assourdissants et furieux. Alger, ville blanche? Plutôt ville grise.
«Quand je suis à Alger», dit-elle, «je m'amuse à évoquer la France, en cherchant bien au fond de mon cœur, un petit filet de nostalgie. En France, je fais l'inverse. J'aime être ici et là-bas, là-bas et ici. Je voudrais être un bateau pour aller sans cesse d'une rive à l'autre». Partagée ? Déchirée ?
Elle est certes née en France, mais Alger est la ville de sa «renaissance».
Cela va lui permettre de renouer avec le passé, allant même jusquà (se) fabriquer de toutes pièces des personnages. Ceci dit avec un style qui, lui-même, déroute, en raison du mélange -maîtrisé sans être recherché- littérature classique (n'est-elle pas prof'de Lettres ?) -écriture journalistique
L'Auteure : Née et grandie en France dans les années 60. Etudes de Lettres modernes. Journaliste en Algérie à la fin des années 80 (Révolution africaine, Alger Réublicain). Retour en France au début des années 90. Plusieurs ouvrages : poésie, autobiographie, roman... Actuellement professeure de Lettres (en France)
Extraits : «Ville bavarde et pourtant secrète, où chaque rue est un hommage discret à un sacrifié au nom vaguement familier.Dans chaque maison, une blessure qui ne se ferme pas» (p13), «Le silence est notre maître souverain. Il nous enferme , nous emprisonne, nous donne l'illusion de commander nos vies, mais il nous met à genoux et martyrise nos cœurs» (p 65)
Avis : Un roman ? Peut-être. Car, aucune histoire particulière, mais plutôt une réflexion sur la vie, sur la mort, sur le pays, sur Alger, sur l'exil, sur la guerre, sur le terrorisme, sur l'amour , sur la vie, sur la mort du petit frère, sur Darwich, sur le mimosa, sur Mazouna, sur Nabile Farès (le seul personnage clairement identifié), sur les langues... Un peu de tout, de tout un peu. Un chassé-croisé de personnages et d'événements, réels ou inventés. Une lecture un peu déprimante. Heureusement, de la belle écriture en prose, presque poétique, chargée de nostalgie et souvent de tristesse.
L'avis de Nadjib Stambouli (in Le Jour d'Algérie, avril 2021): «L'auteur construit (et souvent déconstruit en livrant les ficelles de la construction) son œuvre sur un chassé-croisé entre fiction et réalité, entre inventions et vécu où le mot et le verbe font office non pas de décor, mais de personnages principaux. Keltoum Staali trace le chemin, étale des panneaux indicateurs, indique le trajet mais bifurque aussitôt, laissant le lecteur non pas égaré, encore moins désemparé, mais curieux de ce qui l'attend au prochain tournant, c'est-à-dire au prochain paragraphe...»
Citations : «Chez nous, les Arabes, il paraît que l'âge est un privilège, une chance pour les femmes. Délivrées de leurs attraits diaboliques, elles peuvent partager l'espace de la rue en toute quiétude avec les hommes» (p27), «J'ai quitté Alger parce que je n'en pouvais plus d'être une femme» (p72), «Mon premier contact avec la langue française, à trois ans, se résume à une gifle coloniale qui ne me fait pas pleurer (...). La gifle ne détruit pas ma curiosité pour cette langue nouvelle et prometteuse. Au contraire, je me saisis de cette langue qui remettra mon cœur à l'endroit» (p 85), «Il y a un dedans et un dehors de la langue qui sont accessibles quand on est bilingue, même imparfaitement» (p95), «Parler en arabe me renvoie à la fois à ma condition de fille de mon père et en même temps, de manière paradoxale, me met à égalité avec lui, car notre langue est aussi une langue d'adulte pour parler de choses sérieuses et graves» (p101), «Le thé à la menthe se boit toujours brûlant. Il réveille la fête, appelle la convivialité et pique l'esprit par sa petite pointe d'exotisme» (p128)
Et si tu écoutais mon cœur ! Roman de Ahcène Beggache. Editions El Qobia, Alger2022, 252 pages
Qu'elle est belle l'histoire d'amour que celle de Lydia (la dentiste) et de Yacine (lenseignant). Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes... Mais, il était dit (et écrit) que cela n'allait pas se passer facilement.
Lydia (au bel avenir) est... promise (sans qu'elle ne le sache, la «chose» ayant été arrangée entre son frère et son oncle, tous deux en relations d'«affaires» avec un mafieux) au fils d'un apparatchik, très haut fonctionnaire dans un ministère de souveraineté, roi de la corruption administrative. Une bande et une famille de pourris-ripoux, avec un père maître-chanteur et une mère encore plus affreuse croyant pouvoir tout «acheter»... dont une belle-fille pour son unique fils chéri, un fils à papa, fainéant comme pas un, que même l'armée (la belle «couverture») n'a pas réussi à «re-dresser» L'histoire ? Un vieil enseignant retraité est menacé d'expulsion de son logement de fonction s'il persistait à autoriser son fils, Yacine (un enseignant lui aussi) à vouloir épouser son aimée, Lydia
Par peur ? Par lâcheté ? Par fatalisme devant le pouvoir discrétionnaire du «système» ? Il ordonne sans explications à son fils de rompre. Respectueux de la décision, Yacine s'exile... sans explications. Le poids d'un système autoritariste et archaïque ! Le silence et la fuite en avant... laissant la jeune fille, brutalement abandonnée, seule et choquée ! Une histoire douce-amère où l'on retrouve bien des maux du pays comme la corruption, le népotisme, mais aussi -heureusement- le Hirak... un mouvement aux effets -indirects- sur la gestion politique du pays, ce qui a permis à l'histoire d'amour de bien se terminer, après trois années de parenthèse douloureuse: les méchants seront punis, les marionnettes complices se repentiront, le «fuyard» sera pardonné et les amoureux se réconcilieront...en se mariant. N'est-elle pas belle cette histoire d'amour ? On en redemande et je suis absolument certain que le genre fera beaucoup de bien à la littérature populaire algérienne.
L'Auteur : Né le 2 avril 1972 à Imaandène (M'kira/Tizi Ouzou). Chimiste de formation. Longtemps enseignant de langue française puis Inspecteur de l'Enseignement primaire
Extrait : «Hier fait déjà partie du passé ; le passé est ce qu'il est, tu ne peux rien changer à cela ; nous ne pouvons que le regarder, l'analyser, l'exploiter pour vivre le présent mieux que le passé. L'avenir nest pas encore là, même demain est loin de nous, tu le vivras seulement demain, mais avant tu dois vivre ton jour, sinon tu en feras la prison de tes remords, une source intarissable de regrets» (p73)
Avis : Une belle histoire d'amour. Mais pas que ! Une véritable (bonne) salade algérienne où problèmes de relations sociales et humaines se mêlent (parfois s'affrontent) aux problèmes sociétaux (dont la grande corruption) et politiques... comme le Hirak. Se lit d'un seul trait d'autant qu'il est écrit en très bon français
Citations : «Se taire quand tout son être parle, rire quand son cœur est en colère, dire exactement le contraire de ce que l'on veut dire relève non seulement de la maîtrise de soi, mais aussi du sacrifice de soi, de sa dignité, de ses principes, de sa fierté» (p23), «Parfois, il fait sortir du cadre pour trouver la solution. Nous avons tous besoin de celui qui regarde notre situation sous un autre angle, sous son propre angle» (p 41), «Un cœur qui n'écoute pas la raison est un cœur aveugle ; quand il ouvrira les yeux, ils sera trop tard pour changer sa destinée (p 87), «Quand la pauvreté entre par la fenêtre, l'amour sort par la porte» (p 222).
René Reynaud nous a ouvert ses livres de photos souvenirs et ses archives. Photo Progrès /Françoise PAWLIKOWSKI1 /2
René Reynaud est né au Monastier-sur-Gazeille en 1930. À l’âge de 21 ans, il fait son service militaire en Allemagne. À son retour, il est persuadé de devenir menuisier, comme son père. Une évidence pour lui : « Je suis né dans les copeaux et la sciure ! » Mais son père l’en dissuade : « Menuisier, c’est un métier difficile ! » René Reynaud se tourne alors vers la gendarmerie, carrière qu’il a terminée à la brigade de Bas-en-Basset. À la retraite, il est revenu à sa passion du bois et en a fait profiter toute sa famille en réalisant des meubles pour son épouse et ses enfants.
« J’étais tellement stressé que je ne trouvais plus les clefs des menottes ! »
Pendant ses années dans la gendarmerie, René Reynaud a été envoyé en Algérie pendant cinq ans. Il y a participé à un moment historique : il a procédé à l’arrestation du président Ben Bella à la suite du détournement de son avion. « C’était incroyable », s’étonne encore le retraité. « Nous n’étions que deux gendarmes. Nous avons été appelés à Alger et nous avons procédé à l’arrestation. Nous étions jeunes… J’étais tellement stressé que je ne trouvais plus les clefs des menottes ! » René Reynaud garde précieusement l’exemplaire de Paris-Match de 1957 qui retrace ce moment historique qui est aussi un moment marquant de son histoire personnelle.
« Quand j’ai vu Antoinette, je l’ai aimée au premier regard ! »
Les années passées en Algérie ont été jalonnées « d’événements difficiles » mais elles représentent aussi une époque inoubliable pour l’ancien gendarme car c’est là qu’il fait la connaissance de son épouse. Le jeune homme est dans la même brigade qu’une femme gendarme et son mari. Un jour, cette collègue reçoit la visite de sa sœur qui allait devenir… Madame Reynaud. « Quand j’ai vu Antoinette, je l’ai aimée au premier regard ! », affirme René Reynaud avec une tendresse qui ne laisse personne insensible.
De retour en France, René et Antoinette Reynaud fondent leur famille avec la naissance de trois enfants. Les deux amoureux ne se sont plus jamais quittés. « Mon épouse, c’était la femme idéale. Elle n’est plus là aujourd’hui mais je ne passe pas un jour sans penser à elle. »
Lors de l’arrestation du président algérien, le 22 octobre 1957. Roger est à droite de la photo originale. Photo DR2 /2
Quand j'ai découvert L’Étranger , l'émerveillement. Pour la première fois, j'ai senti à quel point l’écriture était en accord avec le récit pour exprimer, avec la même force, l'extranéité, « l'étrangeté » au monde du héros. Impression retrouvée à chaque nouvelle lecture. A propos de La Chute, Albert Camus a dit « J'ai adapté la forme au sujet ». Cela paraît encore plus vrai pour L’Étranger. Nombreux sont ceux qui ne peuvent en oublier les premières phrases.
Certains ont voulu faire de La mort heureuse, le brouillon de L’Étranger. Mais La mort heureuse est seulement un premier essai de roman, abandonné par Camus et non publié de
son vivant. A la lecture de ces deux livres, on ne peut qu'être frappé par la différence des styles. Prose poétique, lyrique, de La mort heureuse, sécheresse de L’Étranger, dés les premières lignes. Mais l'écriture de L’Étranger ne se limite pas à cette sécheresse.
Il suffit pour le vérifier de comparer les premières : «Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J'ai reçu un télégramme de l'asile: «Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués.» Cela ne veut rien dire. C'était peut-être hier. L'asile de vieillards est à Marengo, à quatre-vingts kilomètres d'Alger. Je prendrai l'autobus à deux heures et j'arriverai dans l'après-midi. Ainsi, je pourrai veiller et je rentrerai demain soir. J'ai demandé deux jours de congé à mon patron
et il ne pouvait pas me les refuser avec une excuse pareille.
Mais il n'avait pas l'air content. »
Et les dernières lignes du livre : « Et moi aussi, je me suis senti prêt à tout revivre. Comme si cette grande colère m'avait purgé du mal, vidé d'espoir, devant cette nuit chargée de signes et d'étoiles, je m'ouvrais pour la première fois à la tendre indifférence du monde. De l'éprouver si pareil à moi, si fraternel enfin, j'ai senti que j'avais été heureux, et que je l'étais encore. Pour que tout soit consommé, pour que je me sente moins seul, il me restait à souhaiter qu'il y ait beaucoup de spectateurs le jour de mon exécution et qu'ils m'accueillent avec des cris de haine. »
Camus ne se contente pas seulement de la relation factuelle, aux phrases courtes, sèches. Il entretient le sentiment d'étrangeté, il maintient le lecteur à distance en utilisant aussi le style indirect.
« Il [le juge d'instruction] a voulu savoir si j'avais choisi un avocat. J'ai reconnu que non et je l'ai questionné pour savoir s'il était absolument nécessaire d'en avoir un. « Pourquoi ? » a-t-il dit. J'ai répondu que je trouvais mon affaire très simple. Il a souri en disant « C'est un avis. Pourtant, la loi est là.Si vous ne choisissez pas d'avocat, nous en désignerons un d'office. » J'ai trouvé qu'il était très commode que la justice se chargeât de ces détails. Je le lui ai dit. Il m'a approuvé et a conclu que la loi était bien faite. »...
« Les gendarmes m'ont dit qu'il fallait attendre la cour et l'un d'eux m'a offert une cigarette que j'ai refusée. Il m'a demandé peu après « si j'avais le trac ». J'ai répondu que non. Et même, dans un sens, cela m'intéressait de voir un procès. Je n'en avais jamais eu l'occasion dans ma vie ».
Les paroles sont rapportées et en plus, Meursault commente « objectivement » , par petites phrases, la situation ou les échanges avec des réflexions logiques, de « bons sens ». Il s’efforce, à chaque fois, y compris dans des situations de tension, de rester au plus près de la vérité, sans ajouter de considérations sentimentales. Comme s'il n'était pas question de lui-même. Ici de son procès. On peut retrouver une forme proche de celle de L’Étranger dans la façon dont le « narrateur », derrière lequel se cache le Docteur Rieux, écrit la chronique de La Peste.
A cause du style et du personnage de Meursault dans L’Étranger, on a voulu faire de Camus, le précurseur du nouveau roman. Mais pour Alain Robbe-Grillet, « Seuls les objets déjà chargés d'un contenu humain flagrant sont neutralisés avec soin... » mais, « la campagne est 'gorgée' de soleil, le soir est 'comme une trêve mélancolique', la route défoncée laisse voir la 'chair brillante' du goudron, la terre est 'couleur de sang', le soleil est une 'pluie aveuglante'... « le principal rôle est occupé par la Nature »... et« Le monde est accusé de complicité d'assassinat. » Les petites choses sont neutralisées, la nature éclate, surhumaine.
Comprendre, le mot revient plus de 60 fois. Comprendre les choses, les faits de la vie quotidienne, mais que peut la faible raison humaine face à la toute puissance du monde, de la nature, le soleil pousse-au-crime : le soleil cité plus de 40 fois, surtout dans la première partie du livre.
Pour Camus, le sentiment d'étrangeté, l'absurde naît d'une « confrontation de l'homme et du monde,entre l'appel humain et le silence déraisonnable du monde », du « divorce entre l'homme et sa vie, l'acteur et son décor », du «désir éperdu de clarté » devant un monde incompréhensible. L'homme muni de sa seule raison, « Cette raison si dérisoire, c'est elle qui m'oppose à toute la création. »
Dans sa cellule de condamné à mort, Meursault décrit les affres de tous les condamnés à mort. Il sent, à la fois, l'intensité de la vie, par bouffées, dans tout son corps et la force implacable de la ridicule justice des hommes qui l'a condamné à mort. Ridicule car tous les hommes sont condamnés à mort. L'échafaud n’est qu'un des instruments pour accomplir l'inévitable destin de l'homme.
Meursault, après avoir rejeté avec colère l’aumônier qui voulait le ramener à Dieu, vidé de toutes les illusions humaines, passé de l'autre coté, peut s'ouvrir « pour la première fois à la tendre indifférence du monde ». Pour que sa mort soit réussie, il faut que la machine des hommes continue à jouer son rôle de rejet, d'exclusion, « avec des cris de haine ».
Au delà de raisons philosophiques, peut-on trouver dans la vie de Camus des événements, des circonstances qui pourraient expliquer la force de ce sentiment d'étrangeté ?
Une première source, dés son tout jeune âge, dans sa vie familiale. Né en novembre 1913, dans une famille très pauvre, Camus n'a pas connu son père, mort en octobre 1914 des suites d'une blessure de guerre. Il sera élevé.par une mère à moitié sourde, analphabète, femme de ménage et surtout par une grand-mère autoritaire autant avec lui qu'avec sa mère. De multiples citations peuvent étayer cette première proposition. Dans un brouillon de L'Envers et l'endroit, Camus écrit : « Il y avait une fois une femme que la mort de son mari avait rendue pauvre avec deux enfants. Elle avait vécu chez sa mère, également pauvre, avec un frère infirme qui était ouvrier. Elle avait travaillé pour vivre, fait des ménages, et avait remis l'éducation de ses enfants dans les mains de sa mère. Rude, orgueilleuse, dominatrice, celle-ci les éleva à la dure. » (Album Camus, Roger Grenier, cité par Wikipedia). Et aussi :« Il commence à sentir beaucoup de choses. À peine s’est-il aperçu de sa propre existence. Mais il a mal à pleurer devant ce silence animal. Il a pitié de sa mère, est-ce l’aimer ? Elle ne l’a jamais caressé puisqu’elle ne saurait pas. Il reste alors de longues minutes à la regarder. À se sentirétranger, il prend conscience de sa peine. Elle ne l’entend pas, car elle est sourde. Tout à l’heure, la vieille rentrera, la vie renaîtra... Mais maintenant, ce silence marque un temps d’arrêt, un instant démesuré. Pour sentir cela confusément, l’enfant croit sentir dans l’élan qui l’habite, de l’amour pour sa mère. Et il le faut bien parce qu’après tout c’est sa mère. » (L'envers et l'endroit, 1937).
Dés son enfance, dans son milieu familial, il se sent « étranger » et la dernière phrase ci-dessus annonce déjà le style de « L’Étranger » : il « croit sentir de l'amour pour sa mère. Et il le faut bien parce qu'après tout c'est sa mère. »
Distingué et poussé par son instituteur, auquel il rendra hommage, quand il recevra le Prix Nobel de Littérature en 1957, il sera reçu au concours des bourses ce qui lui permettra de continuer les études malgré l'opposition de sa grand-mère. Au lycée Bugeaudd'Alger, Albert Camus, demi-pensionnaire, échappe à son milieu « naturel », se retrouve avec des enfants plus favorisés : « J'avais honte de ma pauvreté et de ma famille… Auparavant, tout le monde était comme moi et la pauvreté me paraissait l'air même de ce monde. Au lycée, je connus la comparaison », (Notes pour un roman, citées par Roger Grenier, 1982,: cité par Olivier Todd, 1996, Wikipedia).
Étranger dans le milieu familial, honteux dans le milieu lycéen, la nature, la maladie, va contribuer encore à son isolement. En 1930, à l'âge de 17 ans, à l'adolescence, au moment où tout est indécis, la tuberculose le sépare, une nouvelle fois, des siens, de ses copains, de l'équipe de football où il avait trouvé sa place. Elle l'empêche de vivre et de suivre ses études comme les autres. Encore « isolé », au propre comme au figuré, il est confronté à la mort, la sienne et celle des autres malades - la tuberculose, maladie surtout des pauvres, pouvait être mortelle à l'époque. Plus tard, une rechute l'empêchera aussi de présenter l'agrégation et, nouvelle exclusion, il sera rejeté par l'armée qui refuse son engagement en 1939.
Fidèle à son origine sociale et à ses convictions, Albert Camus militera pendant deux ans au Parti communiste, bref passage, et il s'en écarte ou en est exclu. Une fois de plus, la greffe n'a pas pris.
Comment ne pas éprouver un sentiment de forte solitude après ces ruptures répétées, cette proximité avec la misère et la mort, pendant toute sa formation, en contradiction avec la belle indifférence de la terre algérienne, gorgée de soleil, de couleurs et d'odeurs ?
Certains ont voulu trouver une origine politique à ce sentiment d'étrangeté. Par sa situation d'étranger dans son propre pays, l'Algérie, étranger à la majorité de la population colonisée, en « porte-à faux », mal à l'aise, par son origine sociale, dans le milieu européen. Finalement, doublement minoritaire.
Partant de l'absence ou de la rareté de personnages algériens, arabes, musulmans, dans son œuvre littéraire, le sentiment d'étrangeté de Camus a été mis en relation avec sa situation de pied-noir, d'étranger en Algérie. Ainsi Ahmed Taleb Ibrahimi :« Je n’irai pas jusqu’à dire, avec certains, qu’en tuant l’Arabe, Meursault, et partant Camus, se défoule d’un complexe de petit blanc contracté depuis que sa mère fut brutalisée par un Algérien dans leur maison de Belcourt. Mais je pense qu’en tuant l’Arabe, Camus réalise de manière subconsciente le rêve du pied-noir qui aime l’Algérie mais ne peut concevoir cette Algérie que débarrassée des Algériens ».(http://guy.perville.free.fr/spip/article.php3?id_article=33)
Dans l’œuvre littéraire de Camus, si l'Algérie est omniprésente par ses villes, Alger, Oran, ses sites, particulièrement Tipaza, sa nature, le soleil, la mer, et décrite de façon lyrique, le peuple algérien en est presque absent. Et quand des Algériens apparaissent, c'est de façon impersonnelle, anonyme, sans nom patronymique et même sans prénom : « l'arabe » ou la « mauresque ». De façon paradoxale, Camus qui se proclame algérien, ne parle des Algériens que sous le terme d'arabe alors qu'il connaît la diversité ethnique de l'Algérie.
Dans La Peste,son roman le plus célèbre, avec L’Étranger, Camus décrit une épidémie à Oran. Contacté par un journaliste « envoyé d'un grand journal de Paris », Raymond Rambert, qui veut faire un reportage sur l'état sanitaire du peuple algérien, le Docteur Rieux, narrateur et principal personnage du roman, refuse de témoigner. Parce que le journaliste ne veut pas s’engager à dire toute la vérité sur la désastreuse situation sanitaire de cette population. Parce qu'il refuse de porter une « condamnation totale » dont il pense qu'elle serait sans doute « sans fondement ». Ensuite, tout le roman tournera autour de la population européenne, aux noms français ou espagnols. Certes, La Peste est une allégorie mais située à Oran et dont le peuple algérien est absent. Qui meurt pendant La Peste ? Peut-être des « Arabes » mais ce n'est dit nulle part !
Dans L’Étranger, apparaissent des images bien différentes des Algériens, plus positives dans la seconde partie que dans la première.
A la maison de retraite de la mère de Meursault, apparaît « une infirmière arabe ».« A la hauteur du nez, le bandeau était plat. On ne voyait que la blancheur du bandeau dans son visage. »... «A ce moment, le concierge m'a dit : 'C'est un chancre qu'elle a'.»
Après l'enterrement de la mère de Meursault, l'auteur décrit son milieu, ses relations de travail, son quartier, ses fréquentations, sa rencontre avec Marie... Dans son petit monde, toutes ses relations sont européennes, avec des noms, ici aussi, d'origine française ou espagnole. Parmi elles, Raymond Sintès, nom d'un « ami », aux fréquentations douteuses, habitant le même immeuble que Meursault, qui va le conduire au meurtre. (Sintès est aussi le nom de jeune fille de la mère de Camus). Unmeurtre commis, presque par hasard, sans haine, sans motif réel, pour un coin d'ombre sur la plage - une portion du territoire algérien ? .
Raymond Sintès, le voisin, a une maîtresse : « Quand il m'a dit le nom [que le lecteur ne connaîtra pas]de la femme, j'ai vu que c'était une Mauresque. ». C'est à cause des relations avec cette Mauresque qu'il frappe, que son « ami » a des problèmes avec les Arabes. Qui le suivent. Qui les regardent « en silence, mais à leur manière, ni plus ni moins que si nous étions des pierres ou des arbres morts ». Qui se retrouveront à la plage où aura lieu le drame lors d'une altercation qui aurait dû rester banale, sans la pression du soleil.
Dans la seconde partie, Meursault retrouve des Arabes lors de son emprisonnement : « Le jour de mon arrestation, on m'a d'abord enfermé dans une chambre où il y avait déjà plusieurs détenus, la plupart des Arabes. Ils ont ri en me voyant. Puis ils m'ont demandé ce que j'avais fait. J'ai dit que j'avais tué un Arabe et ils sont restés silencieux. Mais un moment après, le soir est tombé. Ils m'ont expliqué comment il fallait arranger la natte où je devais coucher. En roulant une des extrémités, on pouvait en faire un traversin. » Isolé ensuite, il ne reverra des Arabes qu'au parloir où des « Mauresques » viennent les voir. Il observe les comportements. Dans le brouhaha du parloir, certains parlent fort, les Européens, « à cause de la distance entre les grilles » qui les séparent. Tandis que « la plupart des prisonniers arabes ainsi que leurs familles s'étaient accroupis en vis-à-vis. Ceux-là ne criaient pas. Malgré le tumulte, ilsparvenaient à s'entendre en parlant très bas. Leur murmure sourd, parti de plus bas, formait comme une basse continue aux conversations qui s'entrecroisaient au-dessus de leurs têtes ».
Meursault ne parlera plus des Arabes. Et lors du procès, si tous ses amis apparaissent à la barre en témoins, aucun témoignage des amis de l'Arabe assassiné n'est rapporté.
Comment expliquer cette quasi absence des Algériens, Arabes ou juifs d'ailleurs, ou cette séparation des populations ? Simple constat de la situation réelle en Algérie ? De Camus en Algérie? Pourquoi aucune œuvre de Camus ne se déroule jamais en milieu algérien ? Avec des personnages algériens ? Ce n'est pas que Camus ignore le peuple algérien et sa pauvreté. Son engagement au Parti communiste témoigne de son intérêt pour lui, de même que les onze articles « Misère en Kabylie » que, journaliste à Alger républicain, « le journal des travailleurs », il a écrits en1939.
Comment expliquer une telle séparation de Camus, le militant, et de Camus, l'homme de lettres. La lettre qu'il a envoyé à son instituteur lors de l'attribution du prix Nobel en témoigne. Il est le fruit, social et politique, de l'école publique dans un département français d'Algérie. Cette école de la liberté, de l'égalité, de la fraternité, de l'universalisme... français. Dans ses Carnets , il note à l’automne de 1950 : « Oui, j’ai une patrie : la langue française.» Pas seulement. Et cettelangue française est minoritaire, peu partagée, à l'époque, par les Algériens. Camus n'apprend pas l'arabe. Cette école de la méritocratie républicaine ne l'empêchera pas, bien au contraire, de prendre conscience de la misère des Algériens qui ne pourra être combattue, efficacement selon lui, que par l'intégration dans la République. Elle lui permettra de prendre conscience de l'injustice faite à la population algérienne mais lui rendra très difficile la prise en considération du peuple algérien, de la nécessaire séparation, la solution ne pouvant être que dans la justice français : « Mon préjugé est que la France ne saurait être mieuxreprésentée et défendue que par des actes de justice » (Préface d'Actuelles III). Par son engagement, il peut aller au peuple « arabe » mais par son origine, il appartient à la partie européenne, française du peuple algérien.
Ce n'est pas du nationalisme, du moins du nationalisme étroit. Plutôt de l'universalisme abstrait, françaisde 1789 enseigné par l'école et qui a quelques difficultés à s'appliquer à l'Algérie. D'où sa grande difficulté à reconnaître l’existence d'un peuple algérien : « Il n’y a jamais eu encore de nation algérienne. Les Juifs, les Turcs, les Grecs, les Italiens, les Berbères, auraient autant de droit à réclamer la direction de cette nation virtuelle » Comme Ferhat Abbas, une autre réussite de l'école du mérite, qui a pu dire « J’ai beau scruter, interroger les cimetières algériens, nulle part je ne trouve trace de la nation algérienne ». Découverte tardive du fait de leur éducation, pour l'un et pour l'autre. Par leur situation, ils n'auront pas la même trajectoire.
Quand Camus se rapproche des nationalistes, c'est, normalement, comme la majorité de la gauche française à une certaine époque, de Messali Hadj, le père du nationalisme algérien et des messalistes avec lesquels il aura des relations suivies. S'il a bien compris depuis longtemps, que le danger de l'immobilisme de la politique française pouvait mener à la violence en Algérie, il ne reconnaîtra l'existence d'un peuple algérien, paradoxalement et, comme beaucoup, qu'à la suite des actions du FLN dont il ne pourra accepter la radicalité ni de la position, ni des méthodes même.
Lors d’une rencontre avec des étudiants suédois, un jeune algérien lui reproche son silence sur ce qui se passe en Algérien. En réalité, de ne pas prendre position en faveur de la lutte du peuple algérien pour son indépendance au nom de la justice. Sa réponse a été diversement rapportée et commentée. «En ce moment, on lance des bombes dans les tramways d’Alger. Ma mère peut se trouver dans un de ces tramways. Si c’est cela la justice, je préfère ma mère.»Dans le compte rendu du Monde,cette phrase devient : «Je crois à la Justice, mais je défendrai ma mère avant la Justice.»Et habituellement, encore plus simplifié : «Entre la justice et ma mère, je choisis ma mère.» Au delà du glissement des mots, il y a un important changement de sens.
Du fait de sa formation, de ses origines, de son attachement à une solution française, il ne pourra jamais faire le saut et condamner la France coloniale. Il ne pourra envisager pour l'Algérie qu'un avenir dans un cadre français amélioré. Ce qui permettra à tous ceux qui ont empêché toute amélioration de ce cadre, qui se réclament encore aujourd'hui de l'Algérie française, y compris de l'OAS, de vouloir l'annexer cinquante ans après l'indépendance.
Le livre est paru en 1942. Il fait partie selon Camus de sa tétralogie de l'absurde* avec l'essai Le Mythe de Sisypheet les pièces de théâtre Caligula et Le Malentendu. Luchino Visconti a fait une adaptation cinématographique de L’Étranger en 1957, Jacques Ferrandez une bande dessinée (Gallimard) en 2013 et une adaptation théâtrale, mise scène de Sissia Buggy, est actuellement à l'affiche à Paris. En 1978, L’Étranger a inspiré au groupe The Cure une chanson dont le titre, malheureux, Killing an Arab, a fait problème (Ce titre a été plusieurs fois modifié par la suite en Kissing an Arabou Killing anotherou Killing an Englishman). Voici le texte de la chanson.
Standing on the beach With a gun in my hand Staring at the sea Staring at the sand Staring down the barrel At the arab on the ground I can see his open mouth But I hear no sound
[Chorus] I'm alive I'm dead I'm the stranger Killing an arab
I can turn And walk away Or I can fire the gun Staring at the sky Staring at the sun Whichever I chose It amounts to the same Absolutely nothing
[Chorus]
I feel the steel butt jump Smooth in my hand Staring at the sea Staring at the sand Staring at myself Reflected in the eyes Of the dead man on the beach The dead man on the beach
[Chorus]
Debout sur la plage Un pistolet à la main Je fixe la mer Je fixe le sable Je fixe le canon Sur l'arabe à terre Je vois sa bouche ouverte Mais je n'entends aucun son
[ Refrain] Je suis en vie Je suis mort Je suis l'étranger Qui tue un arabe
Je peux me retourner Et m'en aller Ou je peux tirer avec le pistolet Je fixe le ciel Je fixe le soleil Quoi que je choisisse Cela revient au même Absolument rien
[Refrain]
Je sens le sursaut de la crosse d'acier Lisse dans ma main Je fixe la mer Je fixe le sable Je me regarde fixement Dans le reflet des yeux De l'homme mort sur la plage L'homme mort sur la plage
[Refrain]
Cette chanson n'est en aucun cas raciste.Paroles et traduction de «Killing An Arab» (Wikipedia)
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