https://www.youtube.com/watch?v=CBNO_EX8lqY
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Rédigé le 16/12/2023 à 10:50 dans Israël, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
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Rédigé le 16/12/2023 à 10:25 dans Israël, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Photo : 7 décembre 2023, l’armée israélienne fait des dizaines de prisonniers parmi la population de Gaza à Beit Lahia au nord de Gaza dans deux écoles de l’UNRWA. Les troupes les ont obligé à se déshabiller avant de les entasser dans des camionnettes vers une destination inconnue. Source : Eye on Palestine
La présence de citoyens et citoyennes français et de binationaux (franco-israéliens) dans l’armée israélienne d’occupation est une réalité avérée depuis de nombreuses années. Aujourd’hui, le nombre de soldats de nationalité française mobilisés sur le front à Gaza est estimé à 4 185, d’après une enquête effectuée par Europe 1 en Israël. Après celui des États-Unis, il s’agit du deuxième contingent de soldats étrangers opérant dans l’armée israélienne.
L’un de ces jeunes soldats témoigne au micro d’Europe 1 : « Je voulais vraiment passer à l’action, même si je ne suis pas un Israélien, que je n’étais jamais allé en Israël... Notre objectif, pour l’instant, est de faire face au Hamas, et on fera ce qu’il faut faire quand il faudra le faire et on le fera comme il faut... » Depuis le 7 octobre, des témoignages comme celui-là émanant de citoyens français prêts à tout faire sur le front à Gaza sont nombreux dans tous les médias. Cela vous étonne, cela vous indigne ? À l’AFPS, cela nous révolte aussi !
Rappelons que pour les Françaises et les Français, il existe deux manières de servir dans l’armée israélienne :
Celles et ceux qui ont émigré en Israël, en tant que juifs ou juives, - en obtenant de ce fait la nationalité israélienne, tout en conservant leur nationalité française - doivent effectuer un service militaire obligatoire d’une durée de 3 ans pour les garçons et de deux ans pour les filles. Ce sont les binationaux.
Les Françaises et les Français résidant en France - qu’ils se reconnaissent ou non comme juifs ou juives - peuvent s’engager dans l’armée israélienne en tant que volontaires, tout en ne résidant pas en Israël et en n’ayant pas la nationalité israélienne.
Rappelons également que l’armée israélienne consacre de gros moyens pour le recrutement de volontaires venus du monde entier. En France cela passe, entre autres, par l’organisation de stages et de camps d’été en Israël avec une immersion dans l’armée. Ces stages proposés à des jeunes, y compris des mineurs de 16 ans sont organisés par des associations basées en France qui font, en même temps, des appels aux dons à destination de l’armée d’occupation. C’est, parmi d’autres, le cas de l’association Moreshet basée à Paris.
Au moment où l’armée israélienne est engagée dans un génocide en cours à Gaza, cette présence de nombreux français et françaises dans cette armée est révoltante. L’Association France Palestine Solidarité tient à la dénoncer et à exiger qu’il y soit mis fin. L’AFPS demande aussi que les personnes de nationalité française (y compris les binationaux) impliquées dans des crimes de guerre soient traduites devant la justice française.
La question se pose également pour les colons de nationalité française. La colonisation étant un crime de guerre, la France devrait s’interroger sur la responsabilité de ses ressortissants dans ce crime de guerre. La violence des colons contre la population palestinienne est un fait de notoriété publique, s’il s’avère que des Français ont pris part à leurs exactions, il faut qu’ils rendent des comptes.
Le Bureau national
Le 15 décembre 2023
Appel des Européens à l'arrêt des violences des colons israéliens
LONDRES, 15 décembre (Reuters) - La Grande-Bretagne, la France, l'Union européenne et plus d'une douzaine d'autres pays dont l'Australie et le Canada, ont publié vendredi une déclaration commune appelant Israël à prendre des mesures immédiates et concrètes pour lutter contre la violence des colons en Cisjordanie occupée.
"Cette montée de la violence extrémiste des colons à l'encontre des Palestiniens est inacceptable", peut-on lire dans cette déclaration.
"Des mesures proactives doivent maintenant être prises pour assurer la protection efficace et immédiate des communautés palestiniennes."
Jeudi, le ministre britannique des Affaires étrangères, David Cameron, a déclaré que les responsables de violences commises par des colons à l'encontre de Palestiniens seraient interdits d'entrée en Grande-Bretagne, suivant un projet similaire de l'Union européenne.
"L'incapacité d'Israël à protéger les Palestiniens et à poursuivre les colons extrémistes a conduit à un environnement d'impunité quasi-totale dans lequel la violence des colons a atteint des niveaux sans précédent", dit le texte signé par l'Australie, la Belgique, le Canada, le Danemark, l'Union européenne, la Finlande, la France, l'Irlande, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Norvège, l'Espagne, la Suède, la Suisse et la Grande-Bretagne.
"Cette situation compromet la sécurité en Cisjordanie et dans la région et menace les perspectives d'une paix durable," ajoutent les signataires selon qui, depuis début octobre, les colons ont commis plus de 343 attaques violentes, tuant 8 civils palestiniens, en blessant plus de 83 et forçant 1.026 Palestiniens à quitter leur domicile.
SOURCE : Appel des Européens à l'arrêt des violences des colons israéliens (msn.com)
Cisjordanie : la guerre des colons
Alors que les caméras du monde entier se focalisent sur la bande de Gaza et les combats meurtriers qui s’y déroulent entre le Hamas et l’armée israélienne, les violences sont aussi quotidiennes en Cisjordanie. Notre grand reporter, Romeo Langlois, s’est rendu dans des villages des territoires occupés de Cisjordanie, qui subissent régulièrement les raids de colons juifs extrémistes, que l’attaque du 7 octobre a rendu encore plus violents.
Par micheldandelot1 dans Accueil le 16 Décembre 2023 à 09:37
http://www.micheldandelot1.com/des-francais-es-sont-engage-es-dans-l-armee-israelienne-appel-des-euro-a215133429
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Rédigé le 16/12/2023 à 10:12 dans Israël, Palestine | Lien permanent | Commentaires (0)
La Communauté de communes de la Veyle a commandé la réalisation d'un film documentaire sur les appelés de la guerre d'Algérie sur le territoire. 17 témoins ont été interviewés fin d'année 2021.
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Rédigé le 15/12/2023 à 21:05 dans France, Guerre d'Algérie | Lien permanent | Commentaires (0)
De Gaulle, du haut du balcon du gouvernement général d'Alger, les bras en V, lance à la foule qui exulte : "Je vous ai compris". De Gaulle a été rappelé au pouvoir après la révolte des Français d'Algérie le 13 mai. Son cri laisse croire qu'il est résolu à conserver l'Algérie française et créera d'amères désillusions parmi les colons d'Algérie. Les accords d'Evian qui mettront fin à la guerre d'Algérie seront signés le 18 mars 1962.
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Rédigé le 15/12/2023 à 19:49 dans France, Guerre d'Algérie | Lien permanent | Commentaires (0)
Rédigé le 15/12/2023 à 15:48 dans Israël, Lejournal Depersonne, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Israël est un État colonial. Refuser de le voir serait une illusion historique. Mais il se distingue des expériences coloniales européennes. Refuser de le voir serait une impasse politique.
LaLa volonté du gouvernement Nétanyahou d’expulser et de détruire une part toujours croissante de la population de Gaza et de réduire le territoire et la souveraineté de l’enclave, combinée à l’accélération, en Cisjordanie occupée, des prises de terres par les colons depuis le 7 octobre, oblige à reposer une question vertigineuse.
Au regard de l’histoire, l’installation de colons sur une terre peuplée peut-elle aboutir à autre chose que l’extermination du peuple autochtone, éventuellement avec quelques « réserves » persistantes comme en Australie ou aux États-Unis, ou à l’expulsion manu militari des colons, comme ce fut le cas en Algérie ?
Appliquée à la guerre actuelle, l’alternative se résume ainsi : soit Gaza est rayée de la carte et la possibilité d’un État palestinien réduite à néant, soit Israël se retire de l’ensemble des territoires occupés et prend le risque de se trouver plongé dans une guerre civile.
Le caractère insoutenable du massacre en cours à Gaza, outre l’impuissance désespérante de la communauté internationale, découle en grande partie de l’absence de perspectives politiques : on ne voit pas ce qui peut y mettre un terme, tant on mesure à quel point les choix à opérer pour sortir de la tenaille sont existentiels.
Cette tenaille s’est resserrée au fur et à mesure de la construction de l’État d’Israël et de la consolidation de sa logique coloniale. Aujourd’hui, la présence dans les territoires occupés de 700 000 colons israéliens, dont 500 000 en Cisjordanie, parmi lesquels plusieurs dizaines de milliers d’ultranationalistes et/ou religieux prêts à la guerre civile pour défendre leurs colonies, hypothèque durablement les deux seules solutions offrant un semblant de débouché : celle où deux États cohabiteraient chacun de leur côté ; et celle, résumée par le slogan « Two States, One Homeland », qui autoriserait à la fois les colons israéliens à demeurer sur le territoire de l’État palestinien et les réfugiés palestiniens à revenir s’établir en Israël.
Depuis le 7 octobre, les territoires palestiniens font l’objet d’une pression accrue du pouvoir israélien : pendant que Tsahal anéantit Gaza, plus de 250 Palestiniens ont été tués en Cisjordanie et la construction d’une nouvelle colonie vient d’être approuvée à Jérusalem-Est. Depuis plusieurs mois, les velléités d’annexion ne se cachent plus : elles transpirent de plusieurs décisions gouvernementales, parmi lesquelles la récente nomination du ministre des finances, Bezalel Smotrich, partisan acharné du « Grand Israël », à la tête de l’organe de planification des colonies, une instance qui relevait jusque-là du ministère de la défense.
Cette dynamique coloniale s’est vertigineusement renforcée depuis l’accession au pouvoir de la droite nationaliste et de l’extrême droite, avec notamment l’adoption en 2018 d’une loi fondamentale définissant Israël comme le « foyer national du peuple juif », légitimant au sommet de la structure étatique la discrimination des minorités arabe et druze. Et rompant avec la déclaration d’indépendance de 1948, selon laquelle Israël se devait d’assurer « une complète égalité de droits sociaux et politiques à tous ses citoyens, sans distinction de croyance, de race ou de sexe ».
Mais cette logique expansionniste est plus ancienne encore. La communauté internationale dénonce en effet son illégalité depuis la guerre des Six Jours de 1967, au cours de laquelle Israël, en réaction au blocus de ses navires en mer Rouge, a attaqué l’Égypte, la Cisjordanie et la Syrie, étendant sa domination sur la péninsule du Sinaï, la Cisjordanie, le plateau du Golan, la bande de Gaza et Jérusalem-Est. Après une première résolution votée par l’ONU pour s’y opposer en 1967, plus d’une dizaine d’autres se sont succédé. En vain.
Dans ses modalités, la politique menée depuis lors par Israël se distingue des expériences coloniales européennes en ce qu’elle se déplie sans empire et sans métropole. Mais elle s’en rapproche par la logique de peuplement, comme cela a été le cas pour la colonisation française en Algérie, visant, pour un État souverain, à s’approprier des terres qui ne lui appartiennent pas et à les exploiter en s’appuyant sur une population extérieure à la population autochtone. En 1968, on comptait moins d’une dizaine d’implantations illégales en Cisjordanie ; elles sont au nombre de 145 aujourd’hui, toutes contraires au droit international, comme l’étaient celles de Gaza démantelées en 2005.
Si le consensus international et intellectuel l’emporte pour dénoncer la politique coloniale d’Israël depuis 1967, il s’avère nettement plus conflictuel pour analyser la période antérieure, des prémices de l’État d’Israël jusqu’à la guerre des Six Jours, en passant par sa création en 1948. C’est là que se cristallise une ancienne querelle historiographique et politique qui se prolonge jusqu’à nos jours pour interpréter l’impasse actuelle.
Pour la résumer trop brièvement, une critique postcoloniale assimile le projet sioniste à la mentalité coloniale et aux pratiques des pays européens catalysées à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Ce faisant, elle fait d’Israël un État colonial dans son essence même et délégitime son existence.
Contre ce récit assimilant sionisme et colonialisme, le récit israélien insista longtemps sur trois distinctions importantes : les émigrants juifs n’étaient pas originaires d’une métropole principale et leur installation en Palestine ne servait pas les desseins d’une force armée ; l’intérêt économique des terres arides de Palestine était réduit et leur exploitation ne reposait que marginalement sur la main-d’œuvre locale ; les immigrants juifs ne fuyaient pas une misère économique mais une persécution en diaspora, avec le but de doter les juifs d’un foyer souverain pour les protéger sur une terre auquel l’attachement était millénaire et non fortuit.
Ce récit, contesté précocement par les Palestiniens, les États arabes et même un petit parti politique israélien, le Matzpen (« La Boussole » en hébreu), a été taillé en pièces par ceux qu’on a nommés les « nouveaux historiens » dans les années 1990, qui ont remis en cause la thèse dominante de l’historiographie sioniste faisant de la guerre de 1948 une guerre d’indépendance, voire de libération, pour insister sur l’expulsion massive de la population autochtone.
Dans la décennie suivante, sous les effets de l’échec des accords d’Oslo de 1993 et des attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, le caractère central de la dépossession territoriale dans le conflit israélo-palestinien est passé au second plan, le narratif de l’antagonisme religieux millénaire ou d’un choc des civilisations prenant le dessus.
Pourtant, « sans réfléchir à l’enjeu territorial, il est impossible de comprendre les racines du conflit et les raisons de la résistance arabe au sionisme », rappelle la chercheuse Yaël Dagan, dans un article ancien mais toujours pertinent sur les « mots du sionisme » où elle montre notamment comment, au début du XXe siècle, l’hébreu substitue aux termes kolonia ou kolonist des mots comme hityashvut ou hitnahalut, aux racines bibliques et aux connotations moins agressives.
L’historien et sociologue Jérôme Bourdon estime quant à lui que faire d’Israël un État colonial depuis soixante-quinze ans constitue une interprétation historiquement trompeuse et politiquement problématique. « S’il y a des aspects coloniaux dans le sionisme, ce mouvement est d’abord un mouvement national, qui réclame un État indépendant comme beaucoup d’autres peuples », expliquait-il récemment dans l’émission « Le temps du débat » sur France Culture.
Pour Gaza, on parle souvent de prison à ciel ouvert, mais la comparaison avec les camps de regroupement en Algérie me paraît plus pertinente.
L’historienne Raphaëlle Branche inscrit elle aussi l’expérience sioniste de la fin du XIXe siècle « dans le contexte de la montée des aspirations nationales partout en Europe plutôt que dans un moment colonial ». « La logique est celle du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, de peuples qui, à un moment donné, ont réclamé d’être reconnus comme une entité politique internationale sous la forme d’un État », indique-t-elle.
Quand les premières colonies juives s’installent au Proche-Orient, précise-t-elle tout en soulignant la polysémie du terme « colonie », les juifs non seulement n’ont pas d’État mais ils s’installent sur des terres contrôlées par l’Empire ottoman.
Cependant, pour la chercheuse Sylvie Thénault, spécialiste de la colonisation et de la décolonisation de l’Algérie, la comparaison entre l’Algérie et la Palestine demeure utile pour penser ce qui se déroule aujourd’hui en Cisjordanie, à savoir un « territoire où la colonisation se manifeste par l’installation d’éléments allogènes avec le soutien d’autorités étatiques et militaires ».
La référence aide aussi à comprendre le verrouillage de Gaza, que Raphaëlle Branche rapproche des camps de regroupement pendant la guerre d’Algérie, « où la guerre est menée d’abord et avant tout envers une population civile ».
« On parle souvent de prison à ciel ouvert, mais en réalité, la comparaison avec les camps de regroupement me paraît plus pertinente, dit-elle. La logique n’est pas celle de l’emprisonnement mais du contrôle de la population civile, dont on limite la capacité de circulation, qu’on prive de l’accès à ses moyens de subsistance, etc. Tout cela pour gagner la guerre, en obtenant que la population civile cesse de soutenir les opposants au système colonial. »
Sylvie Thénault souligne toutefois que, « sans vouloir aucunement minimiser les crimes de l’armée française en Algérie, qui a pu avoir recours au napalm, la situation n’est pas comparable, ne serait-ce que parce que les avions militaires français ne pilonnaient pas ces camps de regroupement qui ont pu regrouper jusqu’à deux millions de personnes à la fin de la guerre. La logique d’extermination n’était pas la même que celle qui se manifeste aujourd’hui à Gaza au nom de la chasse au Hamas. »
Pour tenter d’échapper au conflit des interprétations, l’historien Vincent Lemire propose de distinguer des « seuils » dans la nature coloniale de l’État hébreu. « Est-ce que la première implantation juive en Palestine historique au XIXe siècle est comparable à la pire colonie d’extrême droite en Cisjordanie aujourd’hui ? Les différences sont évidentes, mais est-ce que ce sont des différences de nature ou de degré ? »
Pour lui, « un premier cran important a été franchi en 1948 avec l’expulsion de 750 000 Palestiniens, parce que c’est différent de revendiquer un droit à l’installation et de mener une politique d’expulsion. Un autre cran est franchi avec l’ingénierie coloniale, à la fois hyper technologique et messianique, qui se développe à partir des années 1990 et crée un espace carcéral à l’intérieur de ce qui reste de la Palestine. »
L’historien donne à voir le piège d’une posture décoloniale univoque. « Si on considère que les populations juives de Palestine sont “aussi exogènes” que l’étaient les Français en Algérie, alors on peut difficilement imaginer d’autres scénarios que l’élimination quasi totale des autochtones, comme en Australie ou aux États-Unis, ou l’expulsion de l’ensemble des colons comme en Algérie. Mais force est de constater l’existence quasi continue de communautés juives sur le territoire de la Palestine. À partir d’une réalité qui n’est donc pas la même qu’en Algérie se greffe le projet sioniste originel qui est de créer un refuge pour les juifs victimes de l’antisémitisme dans le monde occidental. »
Analyser la question palestinienne comme une question coloniale est pertinent historiquement, mais cette lecture coloniale ne nous offre aucune solution politique.
Attentif aux singularités de chaque situation coloniale, Omar Jabary Salamanca, chercheur à l’université libre de Bruxelles, nuance un des arguments principaux entendus pour juger que le cas palestinien serait à ce point spécifique qu’il serait impossible à penser dans une logique similaire avec d’autres histoires coloniales.
« En général, les colonies de peuplement sont des projections depuis une métropole. Mais ce qu’on voit aujourd’hui, c’est qu’en réalité Israël est une projection de plusieurs métropoles, comme le montrent aujourd’hui l’investissement militaire ou diplomatique de pays très investis dans le soutien à Israël mais aussi le nombre de soldats israéliens ayant la double nationalité américaine, française ou britannique. »
Au-delà des lectures et relectures possibles de l’histoire, le nœud serait, pour le dire comme l’historienne Sylvie Thénault, qu’analyser « la question palestinienne comme une question coloniale est pertinent historiquement, mais que cette lecture coloniale ne nous offre aucune solution politique ».
« Ce qui est très différent dans le cas de la Palestine et de l’Algérie, c’est que celle-ci pouvait défendre le détachement du territoire colonisé et l’érection d’un État souverain sur le territoire de l’ex-colonie, analyse-t-elle. Se situer dans la même logique, c’est défendre la fin de l’État d’Israël, ce qui n’est pas réaliste, au-delà de l’effarement politique et moral qu’on peut légitimement avoir vis-à-vis de ce que fait aujourd’hui Israël à Gaza. »
Quand nous avons quitté l’Algérie, il y a un million de Français qui sont partis.
Pour celles et ceux qui ne croient plus à une solution à un État et continuent de prôner une solution à deux États, la question lancinante serait de savoir s’il serait possible d’expulser 500 000 colons de Cisjordanie pour laisser la place à un État palestinien viable, alors qu’il a fallu plus de 12 000 soldats pour expulser quelques milliers de colons à Gaza en 2005.
Aujourd’hui, la possibilité d’une solution à deux États est rendue caduque à la fois par la logique coloniale à l’œuvre en Israël mais aussi par l’intransigeance du Hamas, dont beaucoup de membres, tel Ghazi Hamad, porte-parole et membre du bureau politique, estiment qu’« Israël est un pays qui n’a pas sa place sur [leur] terre ». Alors même qu’en 2017 le Hamas avait modifié sa charte, établie en 1988 un an après sa création, en reconnaissant l’existence d’Israël et en acceptant un État palestinien dans les frontières de 1967.
Pour envisager l’avenir et ne pas se résoudre à une vision du conflit israélo-palestinien comme insoluble, juge Vincent Lemire, « il faut préciser ce qu’on désigne par colonie » : « Un kibboutz ou un moshav [autre type de communauté agricole, moins collectiviste à l’origine qu’un kibboutz – ndlr] à l’intérieur des frontières créées de fait par la guerre de 1948, ce n’est pas la même chose qu’une projection contemporaine ultrareligieuse et suprématiste sur les collines de Naplouse ».
Pour ouvrir des perspectives, l’historien rappelle le projet « Two States, One Homeland », qui imagine deux États côte à côte avec une frontière ouverte entre les deux, autorisant les colons israéliens à rester sur le territoire de l’État palestinien et les réfugiés palestiniens à revenir vivre en Israël. Cela permettrait, estime-t-il, de prendre en compte « ce que l’on pourrait appeler une “autochtonie coloniale”, parce qu’Israël existe depuis soixante-quinze ans et parce que des communautés juives sont présentes en Palestine depuis des siècles. Et plutôt que de vouloir en finir avec cette réalité, il me semble qu’elle autorise des solutions créatives, parce que ni les Palestiniens ni les Israéliens ne peuvent espérer jeter l’autre peuple à la mer ».
Les doubles racines, à la fois arabes et juives de la Palestine, proscrivent en effet la disparition de l’un ou l’autre peuple de ce territoire. Elles interdisent aux Israéliens qui voudraient profiter de la stratégie du choc à l’œuvre à Gaza de songer à une élimination des Palestiniens. Elles empêchent aussi une partie du camp décolonial de rêver pour la Palestine d’une décolonisation à l’algérienne.
En Afrique du Sud, la transition s’est faite sans qu’il y ait, comme en Algérie, de départ des colons, même si la question de la possession de la terre n’a pas été réglée.
Pour penser le moment présent, Omar Jabary Salamanca tourne son regard vers le cas sud-africain plutôt qu’algérien puisqu’en Afrique du Sud « la transition s’est faite sans qu’il y ait, comme en Algérie, de départ des colons, même si la question de la possession de la terre n’a pas été réglée puisque les colons sont demeurés les grands propriétaires ». Au-delà des différences de contexte, « s’il y a un point commun aux processus de décolonisation, c’est qu’ils passent par la lutte armée parce que les colons ne cèdent jamais volontairement leur pouvoir, y compris en Afrique du Sud comme on a tendance à l’oublier. »
Nul hasard sans doute si l’Afrique du Sud a accueilli le 5 décembre à Prétoria de hauts responsables du Hamas invités aux commémorations officielles des dix ans de la mort de Nelson Mandela. Son petit-fils, Mandla Mandela, y a rappelé que pour le héros de la lutte contre l’apartheid la création d’un État palestinien était « la grande question morale de notre époque ». Et c’est l’Afrique du Sud qui, la première, a saisi la Cour pénale internationale sur les crimes de guerre israéliens à Gaza. Cette identification à la cause palestinienne montre bien qu’en tant que grille de lecture politique, la question coloniale est au cœur du conflit israélo-palestinien.
Joseph Confavreux et Carine Fouteau
14 décembre 2023 à 19h22
https://www.mediapart.fr/journal/international/141223/de-quel-colonialisme-israel-est-il-le-nom
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Rédigé le 15/12/2023 à 13:28 dans Israël, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
SERMENT
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Je jure sur la raison de ma fille attachée
hurlant au passage des avions
Je jure sur la patience de ma mère
Dans l' attente de son enfant perdu dans l' exode
Je jure sur la bonté d Ali Boumendjel
Et le front large de Maurice Audin
Mes frères mes espoirs brisés en plein élan
Je jure sur les rêves généreux de ben M' Hidi et d' Inal
Je jure sur le silence des villages surpris
Ensevelis à l' aube sans larmes sans prières
Je jure sur les horizons élargis de mes rivages
A mesure que la plaie s' approfondit hérissée de larmes
Je jure sur la sagesse des moudjahidines maîtres de la nuit
Je jure sur la certitude du jour happé par
la nuit transfigurée par l' aurore,
Je jure sur les vagues déchaînées de mes tourments
Je jure sur la colère qui ,embellit nos femmes
Je jure sur la haine et la foi qui entretiennent la flamme
Que nous n' avons pas de haine contre le peuple français.
Bachir HADJ ALI
ALGER le 15 décembre 1960.
Né le 9 décembre 1920 à la Casbah d’Alger, mort à Alger le 9 mai 1991 ; technicien aux PTT à Alger puis permanent de la direction du PCA, membre du Comité central en 1947 et du Bureau politique en 1949, premier responsable du PCA en Algérie pendant la guerre de libération ; après l’indépendance secrétaire général du PCA non reconnu ; participe à la formation de l’opposition clandestine (ORP) après le coup d’État du 19 juin 1965 ; torturé, détenu, maintenant son activité poétique et de commentateur d’histoire de la musique.
« Mon grand père, paysan pauvre, a fui la Kabylie, pourchassé par les gendarmes (il était au début de ce siècle dans une troupe de « rebelles » dirigée à l’époque par un nommé Arezki el Bachir condamné à mort par les Français) » écrit Bachir Hadj Ali, en juillet 1966, dans une de ses lettres d’emprisonné, adressée à sa chère Safia, son épouse bien aimée, Lucie Larribère* (Lettres à Lucette. 1965-1966, éditions RSM, Alger, 2002). Pour le poète communiste, toute l’histoire est récit patriotique.
Les Numides sont ses ancêtres qui ont fondé en Espagne l’Andalousie ; il dit appartenir à la tribu des Beni Hammad, au-delà de la forêt d’Ibarazen, là-bas du côté d’Azeffoun, le Port-Gueydon colonial sur la côte de Grande Kabylie. Il a grandi bercé par les chansons kabyles de sa grand-mère mais racontant des légendes orientales. Ses parents s’étaient installés pauvrement à la Casbah d’Alger ; ils vivent encore auprès de Lucie Larribère quand il écrit ses lettres de prison, souhaitant que l’on dise à sa mère que « son fils n’a pas failli à l’honneur des ancêtres ». Il parle de ses sœurs dont l’une, Dahboucha, a épousé le vétéran communiste Mahmoud Lathrache*.
Dans son enfance, Bachir Hadj Ali a été atteint d’ostéomyélite de la jambe gauche ce qui lui vaudra des souffrances pour plus tard. À six ans, il fréquente l’école indigène Sarrouy, l’école française en avant de la Casbah, qui rassemble des "indigènes musulmans" de tout Alger. Le jeudi et le dimanche, les jours sans école française, il va réciter les sourates à l’école coranique voisine. Il appartient ensuite aux Scouts musulmans. À dix-sept ans, à la veille d’entrer à l’École normale d’instituteurs, il abandonne les études pour aider son père qui venait de perdre un emploi, et entre comme technicien aux PTT. C’est dans ce milieu de la Grande Poste d’Alger que des collègues lui font découvrir le communisme ; il ne cessera plus de lire les brochures publiées en français par le parti communiste et les classiques du marxisme soviétique.
Il devient membre du PCA en août 1945 ; il est chargé d’assurer la présidence pour l’Algérois des comités d’amnistie qui défendent les victimes de la répression qui a sévi après le 8 Mai 1945 ; c’est une façon pour les communistes de rattraper leur condamnation du « complot nationaliste » de Mai 1945. Très vite, il gravit les échelons dans l’encadrement du parti. En juillet 1946, il est invité à participer au comité central élargi après la conférence du Parti qui procède, au détriment d’Amar Ouzegane*, à la rectification de la ligne suivie par le PCA en 1945 et relance l’ouverture vers les partis algériens. Il est élu au bureau régional du PCA d’Alger. À la fin de la même année, il devient rédacteur en chef de l’hebdomadaire du PCA, Liberté. Au congrès de Maison Carrée (El-Harrach, banlieue d’Alger), il entre officiellement au CC (fin 1947-début 1948). En 1949 après le congrès d’Hussein Dey, il devient secrétaire du parti et membre du Bureau politique. Ayant son bureau au siège du parti, il est le camarade arabo-berbère témoignant de l’algérianisation du PCA.
Effectivement, avec un discours se réclamant du peuple algérien déshérité, il impulse les luttes menées à l’intérieur, celles des petits paysans dans la région de Tlemcen en 1949, et à répétition, celles des dockers du port d’Oran. Aussi est-il à plusieurs reprises déféré devant les tribunaux pour atteinte à la sûreté de l’État. Le parti communiste est son lieu de vie. Certes il a une famille par un premier mariage dans le cercle kabyle et quatre enfants à charge, deux garçons, deux filles : Youssef, Smaïl, Meryem, Nadjia.
Il va gagner encore en noblesse dans les références fondatrices du communisme en Algérie par la rencontre puis l’exemplarité de couple mixte avec Lucie Larribère*. Elle est la nièce de Camille Larribère*, un des premiers propagateurs en Oranie, et fille du docteur Jean-Marie Larribère* dont la clinique à Oran est la providence des femmes algériennes ; sa sœur Suzanne est également médecin et militante ; celle-ci épouse le dirigeant communiste marocain Abdelkrim Ben Abdallah, assassiné au moment de l’indépendance du Maroc (voir volume Maroc).
Installée à Alger, la militante de famille, Lucie Larribère* rencontre le dirigeant communiste, figure algérienne du PCA, poète et intellectuel communiste voué à la connaissance de la musique andalouse ; leur rencontre daterait de juillet 1947. Comme ils sont nés tous deux le même jour de la même année 1920, c’est Lucie Larribère* qui est chargée, en public communiste, de porter le bouquet et de fêter le trentième anniversaire du dirigeant du parti. Ils militent ensemble et notamment manifestent et sont arrêtés ensemble devant la prison Barberousse (Serkadji) à la Casbah dans le rassemblement de soutien, en 1952, aux prisonniers nationalistes de l’OS (l’organisation clandestine paramilitaire du PPA) qui reviennent du tribunal de Blida. Un poème de Kateb Yacine célèbre « Lucie à la veste rouge ».
Déjà mariée à un professeur communiste dont elle a deux enfants : Jean et Pierre Manaranche qui ont donc la pleine citoyenneté française et la conserveront, elle épouse Bachir Hadj-Ali devant le cadi. Tous ces enfants et les parents de l’un et de l’autre se retrouveront à la maison de Lucie Larribère à Oran où, géographe de formation, Lucie Larribère est professeur d’histoire et géographie au lycée. Lourde charge quand Bachir Hadj Ali connaît la clandestinité et plus tard la prison, mais échange et soutien de couple et de famille intenses jusqu’au terme de ce compagnonnage militant.
Le lieu d’existence est celui des relations mixtes communistes, de cette micro-société, minoritaire et souvent clandestine, faite de camaraderie de parti entre Européens et Musulmans, d’une Algérie algérienne progressiste, nouvelle Andalousie se réclamant de l’arabisme mais mêlé de légendaire berbère et ne retenant de la civilisation musulmane et de l’enseignement français que la part des lumières. Le poète Bachir Hadj-Ali se fait le chantre de cette Andalousie qui se confond avec l’avenir socialiste de l’Algérie. Déjà dans son œuvre, le mot de référence est progrès, qui est aussi le titre de la revue intellectuelle du PCA qui publie ses textes repris éventuellement par la revue du PCF, la Nouvelle critique.
Ce qui est propre à Bachir Hadj-Ali, c’est de conjoindre les différentes sources, dans un patriotisme de continuité du peuple algérien. Les donatistes, chrétiens en dissidence dans l’empire romain chrétien, chantent un "grégorien algérien" (avant que la musique grégorienne des ordres monastiques au service du pape n’existe), les Numides portent la "culture arabo-musulmane" dans les vallées des Pyrénées des ancêtres Larribère (par extrapolation du Cid et de la chanson de Roland) ; Barberousse, Baba Aroudj, le militaire et pirate de l’expansion du sultanat turc conduit la « résistance » de l’Algérie contre les Espagnols ; les instruments de musique andalous sont algériens, et son oreille, très éveillée et cultivée, reconnaît la tradition pluriséculaire du chant d’un muezzin algérien qui a certes le bénéfice d’être de l’école de Blida. Le fond de doctrine communiste toujours présent dans ses lettres de prison de 1966, repose sur la croyance que le développement par le socialisme est la voie certaine pour « s’arracher du retard économique, social culturel ».
À la veille du 1er novembre 1954, Bachir Hadj-Ali, condamné à une peine de prison, entre dans la clandestinité. Il ne devait en sortir qu’après l’indépendance en juillet 1962. Avec Sadek Hadjerès*, il est ainsi un des dirigeants clandestins qui assurent la continuité de la participation communiste à la guerre de libération en veillant à préserver l’autonomie d’orientation du PCA, en 1955-1956, par la mise en place d’une organisation propre : « les combattants de la libération » ; le « maquis rouge » reçoit des armes du camion enlevé dans l’opération menée par la désertion de l’aspirant Henri Maillot*.
Non sans faire valoir un apport en armes pour une ALN en manque, en mai-juin 1956, Sadek Hadjerès* et Bachir Hadj-Ali entrent en négociation au nom du PCA avec le FLN représenté par Ramdane Abane* et Benyoussef Ben Khedda*, qui demandent bien des armes mais tergiversent et refusent de reconnaître la présence communiste en tant que parti. L’aspirant Maillot est exécuté par l’armée française (6 juin) et tué en même temps Maurice Laban* ; le périlleux maquis des Combattants de la libération dans l’Ouarsenis est démantelé. Pour un PCA en état critique, les accords conclus début juillet acceptent le ralliement des maquisards à l’ALN et l’entrée individuelle des militants communistes. En dehors donc du FLN, le PCA refuse de se dissoudre. On comprend que la plateforme du congrès de la Soummam du FLN, à l’automne, ne ménage pas le Parti communiste ni la CGT pour sa dépendance.
Dans cette suite de repliements et de raidissement du PCA, y compris par rapport au PCF qui vote les pouvoirs spéciaux pour l’Algérie en mars 1956, la mise en examen et en cause du communisme stalinien après le XXe congrès du parti soviétique de février 1956 et les soulèvements à l’Est, ne comptent pas. La croyance est renouvelée dans la vérité scientifique du « marxisme soviétique ».
Alors que Larbi Bouhali* représente le PCA à l’extérieur, et d’abord auprès des partis du camp socialiste, Bachir Hadj Ali est donc premier responsable communiste de l’intérieur dans ces années de guerre de libération. Ni Bachir Hadj Ali, ni Sadek Hadjerès n’ont quitté l’Algérie ; ils échappent à la répression et à l’arrestation ; ils passent de cache en cache, accueillis chez des militants plus anonymes, des sympathisants, des chrétiens progressistes comme le couple Bachir Hadj-Ali et Lucie Larribère dans la famille de Pierre Mathieu. Plus particulièrement, Bachir Hadj-Ali veille à la sortie de la presse clandestine : le journal El-Houriya et la revue théorique : Réalités algériennes et marxisme, des tracts, des journaux régionaux. Il ne cesse d’écrire des poèmes accompagnés de dessins ; il célèbre notamment les manifestations populaires de la Casbah d’Alger en décembre 1960 (Chants pour le 11 décembre).
À l’indépendance, Bachir Hadj-Ali est désigné comme premier secrétaire du parti. Après l’interdiction du PCA en novembre 1962 par le gouvernement de Ben Bella, sous une certaine tolérance, il maintient la direction et l’activité du PCA. Il fait des périples en URSS et en pays socialistes, et renoue les contacts avec les responsables du PCF. En 1963, il donne une conférence mémorable et très souvent pillée sur la musique algérienne à la salle officielle au pied de l’ancien Gouvernement général devenu Palais du gouvernement et rebaptisée salle Ibn Khaldoun, et répète ses interventions dans les villes algériennes. Il participe à la création de l’Union des écrivains algériens.
Il apparaît à la fois comme le poète communiste national, le spécialiste de musique andalouse (et de musique européenne classique), et le porteur de la nouvelle doctrine du « marxisme soviétique », celle des voies non capitalistes du développement et des spécificités nationales dans la construction du socialisme. Sa position est exposée dans un texte de conférence plusieurs fois repris en 1963-1964 : Qu’est-ce qu’un révolutionnaire algérien ? Ce communisme nationaliste suit l’évolution du FLN et de l’UGTA en 1964-1965 (Charte d’Alger, congrès de l’UGTA). Il soutient les accords de rapprochement entre FLN et PCF et prépare des numéros spéciaux des revues communistes pour célébrer la marche au socialisme qu’annoncent les engagements de Ben Bella en faveur d’un socialisme national, dit aussi arabe comme en Égypte, et spécifique.
Le coup d’État du 19 juin 1965 du colonel Boumédienne met tout par terre. Bachir Hadj-Ali et les dirigeants communistes sont recherchés par les forces de la sécurité militaire. Par exception rare de renoncement à un parti communiste maintenu comme tel, une part des dirigeants communistes participe avec les opposants venant de la gauche du FLN (Mohammed Harbi,*, Hocine Zahouane* notamment), à la création de l’Organisation de la résistance populaire (ORP). Arrêté le 20 septembre 1965, Bachir Hadj-Ali est soumis à d’atroces tortures, celles dites du casque allemand qui, par suite d’un traumatisme crânien, le rendront sujet aux vertiges, dont il porte témoignage dans L’arbitraire (qui sera republié accompagné des Chants pour les nuits de septembre).
Commence pour lui et ses compagnons : Ahmed Abbad*, Mohammed Harbi*, Mourad Lamoudi*, Hocine Zahouane*…, une longue période de détention à la prison de Lambèse, puis au secret à Annaba, et ensuite à Dréan. Pendant son emprisonnement, il figure comme appartenant à la direction de l’organisation communiste reconstituée sous le nom de Parti de l’Avant-garde socialiste (PAGS). En novembre 1968, il est assigné à résidence d’abord à Saïda puis à Aïn-Sefra, dans le Sud oranais. En 1970, la mesure d’assignation est levée, mais il reste interdit de séjour dans quatre grandes villes d’Algérie : Oran, Alger, Constantine, Annaba.
Sous censure et ne comprenant donc aucune remarque politique, ses lettres de prison (Lettres à Lucette, op. cit.) traduisent sa sensibilité littéraire et musicale en laissant voir plus encore l’intériorisation de la formation communiste qui s’est attachée à l’idéal progressiste d’une Algérie algérienne. Les lectures et les références culturelles sont celles que partagent les intellectuels communistes, de Nazim Hikmet à Pablo Neruda, mais sous horizon français plus encore : Paul Eluard, et en premier : Louis Aragon, et aussi les chansons de Jean Ferrat. La passion du malouf est la touche propre maghrébine, mais qui se projette andalouse algérienne. L’arabisme classique est cultivé par survalorisation d’option politique. Le patriotisme et le socialisme sont de sentiment dans l’exaltation de la permanence du peuple.
Libéré officiellement en 1974, Bachir Hadj-Ali réduit ses activités au domaine poétique et de connaissance musicale ; il fait des conférences, participe à des colloques et séminaires, soutient l’expérience théâtrale d’Abdelkader Alloula. Les souffrances endurées et les séquelles des sévices, la détérioration physique qui gagne, le font entrer après 1980 « dans une nuit de plus en plus opaque ». Il meurt à Alger le 9 mai 1991, cinq jours après son ami Mohamed Khadda*, dont le tableau Le Supplicié sert de frontispice à la réédition de L’Arbitraire (1968).
Rédigé le 15/12/2023 à 09:13 dans France, Guerre d'Algérie | Lien permanent | Commentaires (0)
Rédigé le 14/12/2023 à 19:55 dans France, Guerre d'Algérie | Lien permanent | Commentaires (0)
L’usage du terme « génocide » reste très limité en France, souvent mis entre guillemets par la presse, présenté comme excessif. En revenant pourtant au droit international, la pertinence du terme pour qualifier le massacre en cours depuis le 7 octobre à Gaza est limpide. Le bureau international de la Fédération internationale pour les droits humains a d’ailleurs adopté une résolution reconnaissant les actions d’Israël contre le peuple palestinien comme étant « un génocide en cours ».
Depuis le début de la guerre israélienne la plus brutale contre les Palestiniens de la bande de Gaza, qui a suivi l’attaque du Hamas contre des militaires et des civils israéliens le 7 octobre 20231, nombre de médias et de gouvernements ont fait du droit international et du droit humanitaire un point de vue, ou une opinion exprimée sur les plateaux par des non-spécialistes.
Ainsi, des termes et des concepts ayant chacun une signification très précise, tels que « crime de guerre », « crime contre l’humanité », « nettoyage ethnique » ou « génocide » sont utilisés de manière indifférenciée pour qualifier certaines situations ou, le plus souvent, pour nier au contraire la pertinence de ces usages. Nous nous attachons ici à rappeler les définitions des crimes en question, afin d’examiner l’applicabilité de ces termes à la guerre israélienne dans la bande de Gaza.
Le droit international et le droit humanitaire définissent les crimes de guerre de manière très détaillée. Ils les divisent en trois catégories, énumérant toutes les violations possibles des Conventions de Genève signées en 1949 qui peuvent se produire lors d’opérations militaires, qu’il s’agisse de conflits de nature internationale ou nationale.
On peut ainsi dire que sont considérés comme des crimes de guerre tout meurtre intentionnel et tout ciblage de civils en tant que tels, ou toute destruction intentionnelle de leurs biens et de leurs établissements hospitaliers, éducatifs et religieux, ou le fait de les exposer à la famine et de leur refuser l’aide humanitaire ; toute attaque à grande échelle contre des villes ou des villages pour laquelle il n’y a pas de justification militaire, ou tout mauvais traitement ou torture de prisonniers, de détenus, de non-combattants, ou même de combattants s’ils déposent les armes ; tout transfert ou déplacement systématique et forcé de populations, ou toute attaque injustifiée contre des centres et des représentants d’organisations internationales, d’organisations de maintien de la paix, d’organisations humanitaires ; et toute utilisation d’armes internationalement interdites.
Par conséquent, et compte tenu de ce que stipule l’article 8 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI)2, des organisations de défense des droits humains et des organisations humanitaires internationales telles qu’Amnesty International, Human Rights Watch, la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), Médecins sans frontières, Médecins du monde, ou des agences onusiennes telles que l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont ainsi dénoncé directement ou indirectement de possibles crimes de guerre, y compris contre leur personnel.
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a exprimé de son côté sa préoccupation concernant les actions et mesures militaires israéliennes interdites par les conventions de Genève et les deux protocoles additionnels3. Une prise de position publique rare de la part du CICR, qui pourrait s’expliquer par l’ampleur des violations.
Quant aux crimes contre l’humanité, ils peuvent se produire pendant les opérations militaires ou en dehors de celles-ci, c’est-à-dire en dehors du contexte de la guerre. Ils comprennent, selon l’article 7 du Statut de Rome :
a) meurtre ;
b) extermination ;
c) réduction en esclavage ;
d) déportation ou transfert forcé de population ;
e) emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ;
f) torture ;
g) viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ;
h) persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste au sens du paragraphe 3, ou en fonction d’autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour ;
i) disparitions forcées de personnes ;
j) crime d’apartheid ;
k) autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale.
Là encore, on peut dire qu’il existe des preuves confirmant la légitimité des allégations selon lesquelles Israël commet et a commis des crimes contre l’humanité, que ce soit lors de l’actuelle guerre contre Gaza — surtout s’agissant d’attaque « généralisée ou systématique lancée contre la population civile et en connaissance de cette attaque » et d’actes inhumains « de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale [des civils] », ou en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, en vertu des clauses qui font référence à l’apartheid.
Entre les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité d’une part et le crime de génocide d’autre part, la science politique de son côté a développé des termes construits à partir du suffixe d’origine latine « cide »4 qui renvoie au meurtre, pour désigner un système criminel pratiqué par un État ou un acteur puissant contre ses ennemis afin de les « exécuter » politiquement ou d’« effacer » leurs sphères publiques et privées.
Ainsi, le terme « politicide » est apparu dans les années 1970 pour désigner la destruction de groupes de personnes partageant une identité politique commune (et pas nécessairement une identité ethnique ou « raciale »). Il a ensuite évolué pour qualifier les actions visant à détruire les éléments matériels qui permettent à une entité politique d’exister. Le terme a été utilisé, par exemple, pour décrire la politique israélienne à l’égard des Palestiniens à la veille et pendant la seconde Intifada en 2000, lorsque l’objectif clair d’Israël était de détruire les conditions de l’existence même d’un État palestinien. Cette politique se poursuit bien entendu aujourd’hui.
Il y a des années, le terme « urbicide » a été largement employé pour désigner le ciblage d’espaces urbains en vue de les détruire ou de les rendre inhabitables pendant de longues périodes. Il a été suggéré pour décrire des attaques russes à Grozny en 2001, lors de la deuxième guerre de Tchétchénie, des attaques israéliennes sur l’un des quartiers de la banlieue sud de Beyrouth en 2006 lors de la guerre avec le Hezbollah, et des attaques du régime de Bachar Al-Assad puis de la Russie à Homs et à l’est d’Alep en Syrie entre 2012 et 2017. Bien entendu, ce terme est aujourd’hui de nouveau évoqué dans la guerre israélienne contre Gaza.
Plus récemment, certains chercheurs ont adopté le terme de « domicide » pour désigner une politique israélienne encore plus dure à l’égard des Palestiniens, qui cible leurs lieux de résidence intimes (domiciles), afin de les empêcher d’avoir une existence stable dans un espace défini par ses caractéristiques géographiques et émotionnelles et ses symboles publics et privés, et de faire du temporaire (en les déplaçant constamment) une partie intégrante de leur vie.
Tout cela, bien sûr, nous amène progressivement à parler de la question la plus controversée parmi les politiques et évitée — par crainte de représailles — parmi une partie des juristes et universitaires, à savoir : est-ce que la définition du crime de génocide, avec toutes ses significations chargées d’histoire et de mémoires, s’applique actuellement à la situation dans la bande de Gaza ?
Le génocide est défini dans la première convention internationale de lutte contre le génocide, adoptée en 1948 par l’Assemblée générale des Nations Unies et entrée en vigueur en 1951, puis dans plusieurs textes onusiens et dans le Statut de Rome (article 6) comme tel :
Le génocide s’entend de l’un quelconque des actes ci-après, commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme :
a) meurtre de membres du groupe ;
b) atteintes graves à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe ;
c) soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ;
d) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ;
e) transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe.
Par ailleurs, la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (ratifiée par 153 États) précise que « le génocide peut être commis contre une partie seulement d’un groupe, pour autant qu’elle soit identifiable (y compris à l’intérieur d’une zone géographiquement limitée) »5.
Sur la base de ce qui a été documenté et rapporté, et en revenant à l’ampleur des bombardements destructeurs filmés et du ciblage direct des Palestiniens dans une zone précise par le biais de meurtres, d’assiègements et de tortures collectives physiques, psychologiques et mentales, l’anéantissement des conditions de vie dues à la coupure totale ou partielle de l’eau, de l’électricité, du carburant et des communications ; par le siège et l’empêchement total ou partiel de l’entrée de l’aide humanitaire — alimentaire et médicale — et par les attaques d’hôpitaux et d’ambulances et la mort de patients et d’enfants en raison de l’impossibilité de les soigner, il est possible d’évoquer plusieurs éléments concluant à la mise en place par Israël d’un génocide à Gaza.
D’après le ministère de la santé à Gaza, le bilan des attaques israéliennes fait état au 11 décembre 2023 de 18 205 morts, dont plus de 7 000 enfants et 5 000 femmes, de plus de 7 000 disparus sous les décombres ou isolés ou déplacés sans moyens de contact, et de plus de 49 000 blessés. Selon les estimations du gouvernement gazaoui, 60 % des habitations de la bande sont détruites ou endommagées, 262 mosquées et 3 églises ont été ciblées. Enfin, 27 hôpitaux et 55 structures de soins, de même que 55 ambulances ont été bombardés et souvent mis hors service. Les organisations onusiennes et les organisations humanitaires ont perdu plus de 100 employés, médecins et fonctionnaires, tués sous les bombes israéliennes. Quatre-vingt-six journalistes ont également trouvé la mort, parfois directement ciblés par les tirs israéliens.
Cependant, pour qu’un génocide soit reconnu comme tel, l’intention de le commettre doit être prouvée. C’est souvent cet élément qui est le plus difficile à établir, car il faudra démontrer que les auteurs des actes en question ont eu l’intention de détruire physiquement un groupe ou une partie du groupe (national, ethnique, racial ou religieux). La jurisprudence associe donc cette intention à l’existence d’un plan ou d’une politique voulue par un État ou une entité.
Certains juristes considèrent que les déclarations officielles israéliennes et les appels explicites à la vengeance et aux meurtres contre les Palestiniens — en tant que Palestiniens —, les décisions claires de renforcer le siège de Gaza en listant les matériaux interdits d’entrée, comme l’a fait le ministre israélien de la défense Yoav Gallant le 9 octobre 2023, tout en sachant qu’aucune vie n’est possible sans ces matériaux (eau, électricité, carburant, etc.), ainsi que la mise en œuvre de tout cela par l’armée israélienne, prouvent la volonté d’anéantissement et de passer de la déclaration à l’exécution. On peut ajouter à cela la présence d’une « tendance génocidaire » répétitive dans les discours officiels du gouvernement de Benyamin Nétanyahou et de certains députés de sa majorité — autant de discours filmés et transcrits dans la presse. Par exemple : invoquer une « guerre contre les forces du mal et de la barbarie », déshumaniser les Palestiniens et les qualifier d’animaux, prétendre qu’il n’y a pas de civils dans la bande ou déclarer qu’il n’y a que « les terroristes du Hamas » et les « sympathisants du Hamas », appeler à utiliser des armes nucléaires contre les Gazaouis si nécessaire et à déporter les survivants en Égypte (et dans d’autres pays), détruire Gaza et la transformer en « grand terrain de football », etc.
Rappelant la présence claire de cette intention de commettre un génocide du côté israélien et « le passage à l’acte », l’historien israélien Raz Segev, spécialiste de l’Holocauste, a été le premier à souligner que nous étions face à « un cas d’école de génocide »6.
Le directeur du bureau du Haut-Commissariat des droits de l’homme à New York, le juriste Craig Mokhiber, a quant à lui démissionné de ses fonctions pour protester contre le silence vis-à-vis « d’un cas typique de génocide à Gaza ». Dans la même lignée, neuf experts onusiens ont alerté sur le fait que la violence militaire israélienne et les intentions de certains responsables à Tel-Aviv constituent « une menace génocidaire envers la population palestinienne »7.
De son côté, l’ancien procureur de la CPI, Luis Moreno Ocampo, a confirmé que les crimes commis par Israël pourraient constituer un cas de génocide8.
Des dizaines d’universitaires palestiniens et arabes, africains, asiatiques, américains et européens, ont également publié ces dernières semaines des tribunes et des communiqués évoquant des positions similaires. En plus des demandes que certains d’entre eux ont adressées au procureur de la CPI pour enquêter sur ces crimes, cinq États (l’Afrique du Sud, le Bangladesh, la Bolivie, les Comores et Djibouti) ont saisi officiellement la Cour pour « exiger une enquête sur d’éventuels crimes israéliens à Gaza et dans les territoires palestiniens »9.
Il faut ajouter que la plupart des États et des responsables politiques préfèrent éviter l’utilisation du terme « génocide », pour ne pas avoir à agir, conformément à la Convention qu’ils ont signée, pour le « prévenir » ou pour « y mettre fin immédiatement ». Ce qui, bien entendu, n’est pas à l’ordre du jour pour eux.
Enfin, il est possible de dire qu’aucun conflit antérieur documenté n’a concentré autant de crimes, de violations et d’atrocités dans une zone géographique aussi restreinte, d’environ 360 km², et sur une période aussi courte. Cela révèle davantage la « nature génocidaire » de cette guerre, et mérite en soi une réflexion approfondie. On peut y voir le signe d’une augmentation des possibilités d’escalade de la brutalité, et des violations à grande échelle du droit international humanitaire dans les guerres à venir. Un risque qui semble contredire ce à quoi on aurait pu s’attendre du fait de l’évolution des législations, mais aussi de « l’abondance » des reportages en direct et de la documentation visuelle des faits.
ZIAD MAJED
https://orientxxi.info/magazine/peut-on-parler-de-genocide-a-gaza,6944
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Rédigé le 14/12/2023 à 19:36 dans Israël, Palestine | Lien permanent | Commentaires (0)
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