Le sénateur de l'Ohio, fervent soutien de la campagne militaire israélienne à Gaza et partisan d’une désescalade avec l’Iran, est devenu le colistier de Donald Trump à la vice-présidence.
Donald Trump et J.D. Vance, lors du premier jour de la Convention nationale républicaine de 2024, à Milwaukee, dans le Wisconsin, le 15 juillet 2024. Photo AFP
Jeune, self-made man et populaire : James David Vance salue la foule, ce lundi 15 juillet, à la Convention nationale républicaine de Milwaukee, un rendez-vous incontournable dans la course à la présidentielle américaine. Il a été choisi le jour même par Donald Trump, son mentor, rescapé d’une tentative d’assassinat la veille, comme colistier en vue d’exercer la fonction de vice-président en cas de victoire du candidat républicain à l’élection présidentielle de novembre. J.D. Vance, qui avait déclaré un jour : « Je suis un partisan du “jamais Trump”», a depuis changé son fusil d’épaule, offrant un narratif de victoire tout trouvé à Donald Trump, qui est parvenu à faire de cet ancien détracteur son principal allié. L’homme de 39 ans, actuellement sénateur de l’Ohio, est décrit par le Jewish Insider comme une figure importante de la position pro-israélienne du parti Républicain, en particulier depuis le début de la guerre à Gaza le 7 octobre.
Ces derniers mois, le colistier du candidat républicain a appuyé des projets de loi visant à retenir les fonds fédéraux destinés aux universités où se trouvent des campements contre la guerre d'Israël à Gaza. Dans un discours prononcé devant le Quincy Institute le 23 mai dernier, il a expliqué que l’attachement religieux des États-Unis, « le plus grand pays à majorité chrétienne au monde », à la Terre sainte explique pourquoi de nombreux Américains sont pro-israéliens, alors que le sénateur s’est officiellement converti au catholicisme depuis 2019. Fervent soutien du financement américain à Israël, J.D. Vance a appelé le président Joe Biden à permettre à Tel-Aviv de « terminer réellement le travail » à Gaza, après avoir accusé l'administration démocrate d’entraver les actions de l’armée israélienne contre le Hamas en « privant les Israéliens d’armes guidées de précision ». Le sénateur de l’Ohio a par ailleurs déclaré à plusieurs reprises qu’il existait des raisons pratiques pour lesquelles les États-Unis devaient réduire leur soutien à l’Ukraine et privilégier Israël.
Un parcours singulier
Né en 1984 à Middletown dans l’Ohio, J.D. Vance a grandi dans un foyer très modeste de la Rust Belt, région du nord-est des États-Unis dominée par l’industrie manufacturière, avec une mère toxicomane et un père qui a rapidement quitté la maison familiale. Le jeune Américain, brillant et ambitieux, fréquente ensuite l'Université d'État de l'Ohio avant de rejoindre les bancs de la prestigieuse faculté de droit de Yale, dont il sortira diplômé en 2013. De ses racines, il en tirera en 2016 un ouvrage social sous forme de mémoires, Hillbilly Elegy, devenu un best-seller du New York Times avant d’être adapté au cinéma en 2020.
Alors que J.D. Vance connaît un succès fulgurant auprès du grand public, en pleine campagne présidentielle de 2016, l’investisseur en capital-risque enchaîne les invitations sur les plateaux télévisés pour décrypter les désirs de la classe ouvrière américaine qu’il connaît bien, loin du quotidien des élites des côtes du pays. Mais bien que Républicain convaincu, il s’oppose avec virulence à Donald Trump, alors candidat face à Hillary Clinton dans la course à la Maison-Blanche. Dans une interview donnée en 2016, l’auteur à succès marié à Usha Vance, une femme issue de l’immigration indienne, critiquait l’attrait du milliardaire républicain pour les électeurs blancs de la classe ouvrière : « Cette élection donne aux gens une excuse pour pointer du doigt quelqu’un d’autre : les immigrants mexicains et le commerce chinois, ou les élites démocrates ou quoi que ce soit d’autre. »
Embrasser la ligne de Trump
Mais la victoire, le 8 novembre 2016, de celui que J.D. Vance qualifiait d’« idiot », changera peu à peu l’appréciation du jeune trentenaire sur le nouveau président, alors qu’il nourrit progressivement des ambitions politiques. Dès le mois de décembre de la même année, il retourne dans l’Ohio et crée une organisation à but non lucratif d'utilité sociale et éducative, Our Ohio Renewal, dans l’optique de se présenter aux élections sénatoriales de 2018. Mais les critiques passées à l’encontre de Donald Trump le marginalisent ainsi que son association, qui fermera un peu moins de deux ans plus tard sans grand accomplissement, ne permettant pas au candidat de se présenter au scrutin. En présentant des excuses publiques au locataire de la Maison-Blanche, J.D. Vance parvient à obtenir son approbation et à se remettre dans la course politique, qui l’emmènera à gravir les échelons du parti Républicain jusqu'à la victoire aux élections sénatoriales de 2022, contre le démocrate Tim Ryan. J.D. Vance adhère alors entièrement au programme de Donald Trump, et devient un acteur important de la politique « Make America Great Again ».
Quelques-unes de ses déclarations donnent un aperçu des grandes lignes qui guident sa vision de la politique étrangère. Lors d'un récent discours à la National Conservatism Conference, le 10 juillet, Vance a déclaré que le Royaume-Uni était dans une situation difficile à cause de l'immigration et a affirmé que sous un gouvernement travailliste, le pays était devenu le « premier pays véritablement islamiste » à posséder la bombe nucléaire. L’homme de confiance de Donald Trump a par ailleurs critiqué les décisions de politique étrangère de Washington, affirmant que les États-Unis « ont créé les proxy de l'Iran au Moyen-Orient » via l'invasion de l'Irak en 2003, à laquelle il avait participé au sein du Corps des marines américain. De son expérience de service militaire, Vance en garde un souvenir amer qui continue aujourd’hui d’influencer sa vision de la région. « Lorsque je suis allé en Irak, j’ai vu qu'on m'avait menti », a-t-il déclaré au Sénat, ajoutant que « les promesses de la politique étrangère de ce pays étaient une farce totale ».
Interrogé en octobre 2023 sur la question de savoir s’il soutiendrait une action militaire contre l’Iran, après que des milices pro-Téhéran avaient ciblé des troupes américaines dans la région, J.D. Vance a déclaré que ce serait une « erreur », citant la crainte d'une escalade significative : « Je pense que nous devrions essayer de désamorcer la situation. Mais bien sûr, nous devons fixer des lignes rouges (...) et être prêts à réagir ». Pour lui, l’objectif est de dessiner les contours d’un « nouveau Moyen-Orient », avait-il confié en mai dernier lors d’une interview à la chaîne CNN, dans la perspective de parvenir à un accord entre Israël et l’Arabie saoudite, puis de l’étendre à d’autres pays du Golfe. « Nous n’y parviendrons pas si les Israéliens ne terminent pas le travail avec le Hamas », avait poursuivi le colistier de Donald Trump, comme un présage.
OLJ / Par Tatiana KROTOFF, le 16 juillet 2024 à 21h38
https://www.lorientlejour.com/article/1420573/qui-est-jd-vance-le-colistier-pro-israelien-de-trump-pour-la-presidentielle-americaine-.html
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