06 juin 2024
D.R.
Poète et graphiste palestinien né en 1958 à Tulkarm en Cisjordanie, Zuhayr Abu Shayeb est diplômé en langue et littérature arabes de l’université de Yarmouk. Auteur de plusieurs recueils de poésie, il reçoit en 2012 le prix Mahmoud Darwich de la créativité.
Nous n’avons pas beaucoup rêvé
Ne reste que le sable
Les arbres n’ont pas offert leur ombre aux dormants
Le vent ne s’est point attendri quand une femme l’a palpé
Et nos âmes ne suffisent pas
Nous sommes sortis de l’enfance comme des papillons
Pour brûler en approchant la première femme
Et la sagesse de la cendre nous a affligés
Nous étions pressés
N’avons pas tété le lait de nos mères
Ni respiré les odeurs de nos pères
Et le ciel ne nous a rien dit
Comme eux le voulaient
Nous étions pressés
Aussitôt nés
Nous avons tout improvisé
La mort, le sens et nous-mêmes
Nous n’avons pas beaucoup rêvé
N’étions pas sur terre
Et sur les murs n’avons écrit que nos cœurs
Nous étions pressés
Nous avons grandi comme les obsessions
Sous l’aile de la nuit
Et, encore fœtus, avons perdu nos corps
Et nos premières demeures
Nous avons erré sans ciel pour nous couvrir
Sans terre sous notre terre
Jusqu’à remplir la nuit de fantômes
Puis nous avons grandi
Et nous nous sommes penchés
Pour dire adieu aux choses
Avant de nous éloigner
Sans avoir tété le lait de nos mères
Et la glaise qui enveloppait nos os
N’avait pas encore séché
Ne reste que le sable
Les prophètes ont semé des éclairs
Et sont allés prier
Le ciel s’est retiré sans nous regarder
Ni parler à l’un de nous
Et Dieu Lui-même
N’a pas voulu nous guider.
Poème traduit de l’arabe par Farouk Mardam Bey.
Par Zuhayr Abu Shayeb, le 06 juin 2024 à 00h02
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