Alors que l'armée israélienne a annoncé observer une « pause tactique » de ses opérations, un calme relatif règne dans l'enclave palestinienne en ce premier jour de la fête de l'Adha.
Des enfants palestiniens de Gaza lors de la fête de l'Adha à Khan Younès, le 16 juin 2024. Bashar Taleb/AFP
Des dizaines de Gazaouis priaient au lever du soleil dimanche, au premier jour de la fête de l'Adha, entourés d'immeubles détruits, dans un paysage de désolation, signe d'une guerre qui fait rage depuis huit mois dans l'enclave palestinienne.
"Il n'y a aucune joie. On nous l'a volé", déplore Malakiya Salman, quelques heures après le début de cette grande fête musulmane. Son abri de fortune, une tente, est plantée sous le soleil brûlant de la ville de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza.
Traditionnellement, les habitants de ce petit territoire palestinien sacrifient des moutons pour l'Aïd, partagent la viande avec ceux dans le besoin et offrent aux enfants des cadeaux ou de l'argent.
Mais cette année, le cœur n'est pas à la fête après plus de 240 jours de bombardements incessants et d'opérations militaires qui ont déplacé 75% des quelque 2,4 millions d'habitants du territoire menacé par la famine, selon l'ONU.
"J'espère que le monde va faire pression pour arrêter la guerre pour nous car on est littéralement en train de mourir et nos enfants sont brisés", ajoute Malakiya Salman, 57 ans, déplacée avec les siens de Rafah, ville à la lisière sud de la bande de Gaza, devenue depuis quelques semaines l'épicentre des combats.
Dimanche matin, l'armée israélienne a annoncé une "pause tactique" quotidienne de 8h à 19h, "jusqu'à nouvel ordre", dans la zone allant de Kerem Shalom, passage dans le sud d'Israël, jusqu'à la route Salaheddine à Gaza, puis vers le nord du territoire palestinien.
Elle a été décidée pour permettre une "augmentation du volume d'aide humanitaire entrant dans Gaza" après des discussions avec l'ONU notamment, a-t-elle précisé dans un communiqué.
Dimanche, des journalistes de l'AFP ont rapporté que le nord et le centre de la bande de Gaza bénéficiaient d'un moment de répit, n'ayant pas connaissance de frappes ou de combats. Mais des tirs et un bombardement ont touché la ville de Rafah, ont-ils précisé.
De son côté, l'armée israélienne a assuré qu'il n'y avait "pas de cessations des hostilités dans le sud de la bande de Gaza". Ce bref sursis a permis aux fidèles un moment de calme en ce jour de fête célébrée par les musulmans à travers le monde en souvenir du sacrifice qu'avait failli accomplir Abraham en voulant immoler son fils, avant que l'ange Gabriel ne lui propose in extremis de tuer un mouton à sa place, selon la tradition.
Ils étaient nombreux réunis dans la cour de la mosquée Omari de la ville de Gaza, gravement touchée par un bombardement israélien.
« Calme soudain »
« Depuis ce matin, nous avons ressenti un calme soudain, sans coups de feu, ni bombardement (...), c'est étrange », confie Haïtham al-Ghoura, 30 ans, de Gaza-ville, espérant que cette pause pourrait présager l'approche d'un cessez-le-feu permanent.
Mais les espoirs de trêve semblent s'éloigner en raison des exigences contradictoires d'Israël et du mouvement islamiste Hamas, depuis l'annonce de la feuille de route présentée par le président américain Joe Biden fin mai.
À Gaza-ville, samedi, un jeune garçon disposait des déodorants, parfums et autres produits, les ruines de bâtiments en arrière-plan quand d'autres vendeurs se protégeaient du soleil brûlant avec des parasols multicolores. Les clients, eux, se faisaient rares.
Pour beaucoup de Gazaouis, une pause dans les combats ne ramènera jamais ce qui a été perdu. "Cet Aïd est complètement différent. Nous avons perdu beaucoup de gens, il y a beaucoup de destructions. Nous ne ressentons pas la joie des années précédentes", confie Oum Muhammad Al-Katri, une habitante du camp de Jabaliya, où les combats ont été très durs entre Israël et les combattants palestiniens.
Le dernier bilan du ministère de la Santé de Gaza fait état de 37.296 morts dans l'enclave palestinienne, majoritairement des civils, ainsi que 85.197 blessés. « Nous voyons l'occupation (israélienne) tuer des enfants, des femmes et des personnes âgées », dénonce Hanaa Abou Jazar, onze ans, également déplacée de Rafah à Khan Younès. « Comment pouvons-nous célébrer ? »
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