LE POÈTE
Le poète s’est mis à écrire
un beau poème
où il disait :
l’honnêteté déserte les gens.
Il n’y en a plus un
pour racheter l’autre.
Mais si vous posez la question,
chacun se prétendra si parfait
qu’il vous en rendra heureux.
Quant à moi je cherche,
sans trouver où il se cache,
l’homme honnête.
Ceux qui ont écouté le poème
se sont indignés, et ont exigé
du poète qu’il se refasse.
Le poète se remit à écrire,
refaisant le poème
où il dit :
nous ne savons où aller.
Les portes sont en fer ;
dès que nous en ouvrons une, deux se referment.
Nous sommes nés à la mauvaise époque.
Le méritons-nous ?
Aucune aberration ne nous épargnés.
Même les mots perdent leur sens.
Nous sommes brisés par le trouble.
Nous souffrons. Femmes, venez à notre secours !
Ceux qui ont écouté le poème
se sont indignés,
et ont exigé du poète qu’il le refasse.
Le poète se remit à écrire,
refaisant le poème
où il dit :
on ne sait si on est en guerre,
si on est en paix,
qui frappe et qui est frappé.
Lorsqu’il n’y a plus d’entente,
nul ne reconnaît l’autre.
C’est la force qui intervient ;
les fusils de tous côtés
et nous au beau milieu
avec nos mains vides.
Ceux qui ont écouté le poème
se sont indignés,
et ont exigé du poète qu’il le refasse.
Le poète se remit à écrire,
refaisant le poème
où il dit :
Nous désignons ceux qui nous gouvernement,
mais si notre jugement était juste
nous dirions : « nous méritons nos gouvernants »
C’est nous qui laissons le champ libre
à toutes leurs fantaisies,
méritant ainsi les coups qui en résultent.
Bien fait, nous avons le tort
d’avoir donné à celui qui nous frappe
un bon bâton.
Ceux qui ont écouté le poème
se sont indignés,
et ont exigé du poète qu’il le refasse.
Le poète se fâchant,
jeta au loin
tous ses poèmes.
Pour avoir la paix
il se mit à faire
de nouveaux poèmes, où il dit :
Les jours sont heureux,
les gens sont bons,
vous seriez comblés pour moins que ça.
Les fleurs sont écloses
tout le monde fait la fête,
chauffe le tambour Alilouche !
Les gens sont honnêtes
nous l’avons toujours dit.
Le mauvais sujet
n'a pas sa place en ce monde.
Tout est pour le mieux,
chauffe le tambour Alilouche !
Toujours debout, équilibrés
nous vainquons toute aberration.
Qu’une porte de fer se referme
nous en ouvrons deux.
Nous méritons tout bien
entrez dans la danse, femmes !
Chez nous, nul n’agresse l’autre,
nous sommes tous frères.
Préparez la fête
nous nous réjouissons de la paix,
chargez nous les fusils
Vous qui nous gouvernez,
venez-vous réjouir avec nous
il se sont si fatigués
à travailler pour nous.
Aujourd’hui, heureux,
ils s’éclateront parmi nous !
Idir en hommage à Mouloud Mammeri
Traduction par Lounis et Rabah Mezouane
https://www.poesielavie.com/2017/09/kabylie-cherie.html
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