Le poste de commandemant de la 10° D.P. en opération hors d'Alger en 1957.
Le Général Jacques Massu avec derrier lui le Capitaine Graziani.
par le Général Jacques Massu
Edition du Rocher (Jean-Paul Bertrand).
Au cours d'une existence de soldat,
- fertile en événements les plus divers, j'ai été plusieurs fois placé par la Providence, ou le Destin,
dans l'obligation d'effectuer rapidement des choix importants, dont les conséquences débordaient
le domaine militaire pour déboucher sur la politique qui ne m'a jamais inspiré aucun goût.
- C'est le récit de l'un de ces choix.
- Celui qui me fut proposé en 1957 et m'amena à livrer
la « Bataille d'Alger », qui fait l'objet de cet ouvrage.
- Que désigne-t-on exactement par Bataille d'Alger ?
- C'est l'affrontement qui opposa la 10° division parachutiste et les troupes du secteur
à l'organisation F.L.N. d'Alger, au cours de l'année 1957.
- C'est l'affrontement qui opposa la 10° division parachutiste et les troupes du secteur
- Celui qui me fut proposé en 1957 et m'amena à livrer
- Cette définition me paraît pompeuse,
- mais elle a été employée par notre adversaire, Yacef Saadi,
dans son livre Souvenirs de la Bataille d'Alger, publié chez Julliard en 1962.
- mais elle a été employée par notre adversaire, Yacef Saadi,
- Dans mon esprit :
- cette bataille évoque l'ensemble des actions de toutes sortes, autant humaines que policières,
menées par les Forces de l'Ordre pour enrayer le terrorisme et rétablir la confiance sur
toute l'étendue de l'agglomération algéroise.
- La phase « utile » s'est déroulée en deux temps :
- de janvier à mars 1957
- de juin à octobre 1957.
- Tout ce qui se passa en Mitidja
et dans les contreforts de l'Atlas qui bordent cette plaine eut une telle résonance que
le département d'Alger en entier fut concerné par cette « Bataille ».
- cette bataille évoque l'ensemble des actions de toutes sortes, autant humaines que policières,
Pourquoi ai-je écrit cet ouvrage ?
- Un ensemble de circonstances m'y a entraîné.
- Circonstances prévues :
- les loisirs de la « retraite ».
- circonstances fortuites :
- la projection privée qui me fut faite en juin 1970
du film de Pontecorvo-Yacef Saadi,
sur la Bataille d'Alger,
- La lecture d'œuvres très variées en leurs genres
sur les années que j'ai vécues en Algérie,
- la rédaction d'un article qui me fut demandé
sur certain combat de cette époque,
- Ma citation par le commandant Faulques dans son procès contre l'Express en mars 1970.
- la projection privée qui me fut faite en juin 1970
- Ces condiments ont excité l'état
- de «
- » dans lequel je vivais depuis dix ans, nourri de tout ce qui se rapportait à l'Algérie.
- Ils ont provoqué chez moi la conscience d'un devoir, celui de mieux faire connaître,
- dans son contexte ingrat, mais aussi dans ses résultats :
La tâche demandée à la 10 division parachutiste et accomplie par elle en 1957.
- Je préviens donc le lecteur qu'il ne trouvera pas, dans les pages qui suivent :
- une nouvelle histoire plus ou moins romancée de la Bataille d'Alger,
j'ai parfaitement conscience qu'il attend autre chose de moi, il veut aujourd'hui des réponses
à toutes les questions, certaines douloureuses, qui hantent encore son esprit.
- Il veut connaître la vérité, savoir ce qui s'est passé et pourquoi cela s'est ainsi passé.
- une nouvelle histoire plus ou moins romancée de la Bataille d'Alger,
- Qu'il s'agisse :
- des assassinats de Français,
- de la torture,
- des bombes,
- de l'action clandestine sous tous ses aspects,
- de la riposte militaire
- des menées anti-terroristes.
- L'arrangement n'étant pas dans ma nature, j'ai visé de mon mieux l'honnêteté de la présentation :
C'est pourquoi j'ai accepté de répondre à toutes les questions, à toutes celles, m'a précisé mon éditeur,
que souhaiterait vous poser chaque Français, d'où qu'il vienne, qui se trouverait en face de vous.
- Cette façon de procéder entraîne :
- la franchise et parfois même une certaine brutalité,
- elle ne permet ni les précautions de style,
- ni les échappatoires,
- ni les complaisances habituelles à bien des Mémoires.
- Elle m'a donc paru répondre
mieux qu'aucune autre à la curiosité légitime que treize années passées n'ont pas émoussée.
Eviterai-je la controverse ?
Je le souhaite vivement, car si certaines brûlures ne sont pas encore cicatrisées,
c'est surtout à leurs victimes que je pense en livrant ce témoignage.
Jacques Massu
Retour sommaire Bataille d'Alger 1957
« Massu,
je vais vous confier l'ordre dans ce département.
Vous aurez tous les pouvoirs.
Avec votre division, vous allez reprendre tout en main. »
Voilà ce que me dit
- le
Ministre-résidant Robert Lacoste
- en cet après-midi gris du
lundi 7 janvier 1957
- ,
- fête de
Sainte Mélanie
- , disciple de
Saint Augustin
- , évêque d'Hippone, près de Bône,
- où il vécut de 391 à 430, il était né à Souk-Abnu en 354.
- Je l'invoque aussitôt, en inscrivant sur mon agenda :
« Priez pour le nouveau commandant militaire du département d'Alger. »
- Je remonte directement à mon domicile d'Hydra.
- Il faut que je réfléchisse, Que j'assimile ces mots,
leur sens exact et tout ce qu'ils vont représenter pour moi et pour ma 10° division parachutiste,
avant d'instruire mon état-major, mes collaborateurs les plus directs, tous ceux qui vont partager
avec moi cette nouvelle responsabilité ...
et quelle responsabilité !
- Il faut que je réfléchisse, Que j'assimile ces mots,
Pour en mesurer l'étendue, il est indispensable de décrire la situation à cette date :
- En ces premiers jours de 1957,
une bataille politique concernant l'Algerie se prépare outre-Atlantique.
- C'est pourquoi mon premier souci, compte tenu des renseignements obtenus :
- sur la recrudescence d'attentats annoncés avant et pendant ce débat à l'O.N.U.,
est de faire éclater la fourmilière terroriste en m'attaquant à son principal repaire :
la Casbah (74.000 habitants dont 62.000 musulmans).
- sur la recrudescence d'attentats annoncés avant et pendant ce débat à l'O.N.U.,
Les paras dans la casbah
Dès la nuit du 7 au 8 janvier 1957,
- j'inaugure mes nouvelles fonctions
en ordonnant, dès trois heures du matin, une opération de contrôle de la partie nord-ouest de la Casbah.
- Une énorme perquisition
à laquelle participent les moyens disponibles,
avec le concours d'assistantes sociales appelées
à aider les services de sécurité dans les maisons
où se trouvent des femmes musulmanes.
- Nous n'avons que peu de renseignements.
mais nos méthodes comprennent un bouclage absolu
et le travail d'équipes spécialisées.
- La police recommence à se sentir concernée,
un début de liaison avec elle s'instaure.
- Projecteurs, torches, échelles
et matériel divers sont mis en œuvre.
- L'opération ne prend fin que le 8 vers midi.
Elle aura permis d'appréhender :
- trois cents suspects parmi lesquels on a retenu :
- cinq tueurs du F.L.N. recherchés par la police.
- On a saisi une trentaine de fusils et des pistolets.
- On a surpris la réunion d'une quarantaine de jeunes gens venus de plusieurs régions d'Algérie.
- Pour contrarier la fuite des fourmis terroristes et les piéger,
- je fais isoler les quartiers arabes ( barbelés et patrouilles )
- Je fais appliquer un nouveau plan de circulation.
La très grande majorité des rues seront à sens unique.
- Des voitures radio seront placées à tous les carrefours.
- je fais isoler les quartiers arabes ( barbelés et patrouilles )
- Il s'agit aussi de recenser les musulmans
travaillant dans les quartiers européens et sur le port, de les munir d'un laissez-passer permanent,
mais révocable, pour leur permettre de se rendre à leurs lieux de travail.
- Pendant ce temps, dans la région algéroise, est capturé le chef communiste des groupes d'action
des « Combattants de la libération », l'instituteur Abd el Kader Guerroudj, dit « Lucien ».
Note :
Nous reviendrons dans un autre chapitre sur le rôle des communistes
- en Algérie,
- en France,
- dans les médias.
Retour sommaire Bataille d'Alger 1957
je vais vous confier l'ordre dans ce département.
Vous aurez tous les pouvoirs.
Avec votre division, vous allez reprendre tout en main. »
Voilà ce que me dit
- le
- en cet après-midi gris du
- ,
- fête de
- , disciple de
- , évêque d'Hippone, près de Bône,
- où il vécut de 391 à 430, il était né à Souk-Abnu en 354.
- Je l'invoque aussitôt, en inscrivant sur mon agenda :
« Priez pour le nouveau commandant militaire du département d'Alger. »
- Je remonte directement à mon domicile d'Hydra.
- Il faut que je réfléchisse, Que j'assimile ces mots,
leur sens exact et tout ce qu'ils vont représenter pour moi et pour ma 10° division parachutiste,
avant d'instruire mon état-major, mes collaborateurs les plus directs, tous ceux qui vont partager
avec moi cette nouvelle responsabilité ...
et quelle responsabilité !
- Il faut que je réfléchisse, Que j'assimile ces mots,
Pour en mesurer l'étendue, il est indispensable de décrire la situation à cette date :
- En ces premiers jours de 1957,
une bataille politique concernant l'Algerie se prépare outre-Atlantique.
- C'est pourquoi mon premier souci, compte tenu des renseignements obtenus :
- sur la recrudescence d'attentats annoncés avant et pendant ce débat à l'O.N.U.,
est de faire éclater la fourmilière terroriste en m'attaquant à son principal repaire :
la Casbah (74.000 habitants dont 62.000 musulmans).
- sur la recrudescence d'attentats annoncés avant et pendant ce débat à l'O.N.U.,
Les paras dans la casbah
Dès la nuit du 7 au 8 janvier 1957,
- j'inaugure mes nouvelles fonctions
en ordonnant, dès trois heures du matin, une opération de contrôle de la partie nord-ouest de la Casbah.
- Une énorme perquisition
à laquelle participent les moyens disponibles,
avec le concours d'assistantes sociales appelées
à aider les services de sécurité dans les maisons
où se trouvent des femmes musulmanes.
- Nous n'avons que peu de renseignements.
mais nos méthodes comprennent un bouclage absolu
et le travail d'équipes spécialisées.
- La police recommence à se sentir concernée,
un début de liaison avec elle s'instaure.
- Projecteurs, torches, échelles
et matériel divers sont mis en œuvre.
- L'opération ne prend fin que le 8 vers midi.
Elle aura permis d'appréhender :
- trois cents suspects parmi lesquels on a retenu :
- cinq tueurs du F.L.N. recherchés par la police.
- On a saisi une trentaine de fusils et des pistolets.
- On a surpris la réunion d'une quarantaine de jeunes gens venus de plusieurs régions d'Algérie.
- Pour contrarier la fuite des fourmis terroristes et les piéger,
- je fais isoler les quartiers arabes ( barbelés et patrouilles )
- Je fais appliquer un nouveau plan de circulation.
La très grande majorité des rues seront à sens unique.
- Des voitures radio seront placées à tous les carrefours.
- je fais isoler les quartiers arabes ( barbelés et patrouilles )
- Il s'agit aussi de recenser les musulmans
travaillant dans les quartiers européens et sur le port, de les munir d'un laissez-passer permanent,
mais révocable, pour leur permettre de se rendre à leurs lieux de travail.
- Pendant ce temps, dans la région algéroise, est capturé le chef communiste des groupes d'action
des « Combattants de la libération », l'instituteur Abd el Kader Guerroudj, dit « Lucien ».
Note :
Nous reviendrons dans un autre chapitre sur le rôle des communistes
- en Algérie,
- en France,
- dans les médias.
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Echec à la grève.
- En ce qui concerne le déclenchement :
- Les arrestations n'eurent manifestement aucun effet sur le déclenchement lui-même,
les ordres étaient partis, quelques centaines d'arrestations dans toute l'agglomération algéroise
n'y changeaient rien, mais elles influencèrent le zèle des exécutants.
- Les arrestations n'eurent manifestement aucun effet sur le déclenchement lui-même,
Les Algérois commençaient à se dire : « on n'avait jamais vu ça. ».
- D'autres mesures avaient été prises :
Elles tendaient à éviter des sabotages spectaculaires à l'aube du 28.
- Le « quadrillage » mettant en œuvre toute la 10° division était en place.
Les points vitaux pour l'existence d'une grande agglomération urbaine
(sources d'énergie, télécommunications, transports) étaient tenus par les paras.
- Le déclenchement de la grève ne s'accompagna donc d'aucun sabotage ni d'aucune violence.
- C'est surtout au moment de l'exécution que l'on s'aperçut qu'il y avait « quelque chose de changé ».
- Il ne me suffisait pas de « marquer » l'adversaire.
- Il me fallait au minimum le rendre impuissant, au mieux l'utiliser.
- Le « quadrillage » mettant en œuvre toute la 10° division était en place.
- Dès les premières heures du 28, des mesures sont prises pour remettre en marche les grands services publics :
- électricité,
- gaz,
- transports.
Pour y parvenir, il est nécessaire de neutraliser les piquets de grève, ramener au travail les grévistes.
- Neutraliser les piquets de grève ne fut pas difficile :
Aucun ne revendiqua la palme du martyre.
Nulle part les paras n'eurent besoin des sommations prévues par les règlements.
En règle générale, l'expression simpliste : « Allez, dégagez ! » suffit amplement.
- Pour remettre au travail les grévistes :
il n'y avait, le plus souvent, qu'à aller les chercher.
Il était facile de trouver, dans les bureaux de direction des grands services, les adresses des membres
du personnel. Une liste en était dressée, puis répartie entre des équipes de paras montées sur camions.
- « Est-ce ici qu'habite Mohamed ben Untel, conducteur de tramway ?
Oui, Monsieur, au bâtiment 3 de l'H.L.M., escalier B, 68 étage. »
- « Est-ce ici qu'habite Mohamed ben Untel, conducteur de tramway ?
- Le camion s'arrêtait au bas de l'escalier B.
Première galopade des paras dans l'escalier. Le sous-officier frappait à la porte de M. Mohamed.
Le gréviste en savates, trônait au milieu de sa marmaille, qui n'était pas allée à l'école.
« Allez, Mohamed, prend ta casquette de conducteur et en route. »
Nouvelle galopade pour descendre l'escalier.
Plus d'un gréviste, à vrai dire, descendit cet escalier sur les fesses,
mais très peu résistèrent véritablement, quitte à « perdre la figure » devant leur femme,
leurs gosses et les voisins.
- Au bout de quelques heures, tous les grands services publics marchaient,
cahin-caha peut-être, mais ils marchaient.
- En même temps
commençait un contrôle systématique de l'agglomération, dans le but de rétablir au maximum
une activité normale, et aussi de neutraliser ceux qui s'y opposeraient.
- Comme la réquisition des personnels clés des grands services publics, tout se passe « au pas de course ».
- L'ouverture forcée des magasins et des marchés fut l'une des opérations les plus spectaculaires
de la journée, opération simple dans certains cas.
Retrouvé par les paras :
- le commerçant, gréviste malgré lui, ne pouvait que lever le rideau de fer de son magasin.
Vis-à-vis du F.L.N., plus tard, il pourrait invoquer l'excuse d'avoir agi sous la contrainte.
- Si le commerçant, trop bien caché, n'était pas retrouvé, ou s'il avait malencontreusement
égaré la clé du rideau de fer :
Les choses ne traînaient pas, aucun rideau de fer ne résistait à une traction exercée par
un camion militaire ( le bon vieux G.M.C. ) démarrant en marche arrière.
- le commerçant, gréviste malgré lui, ne pouvait que lever le rideau de fer de son magasin.
- L'ouverture forcée des magasins et des marchés fut l'une des opérations les plus spectaculaires
- A l'Arba, gros village de la Mitidja, proche d'Alger,
le colonel Argoud, commandant le sous-secteur, décida, m'a-t-on raconté, dès les premières heures du jour
de ce même 28 janvier 1957, de prendre des mesures spectaculaires contre les commerçants grévistes.
- Accompagné de quelques officiers et suivi d'un blindé de son régiment, le 3° chasseurs d'Afrique.
Le Colonel Antoine Argoud.
il s'avança sur la grande place du village.
Tous les rideaux de fer des magasins étaient baissés.
Au milieu de la place, il s'arrêta puis, d'une voix forte,
donna l'ordre d'ouvrir ces rideaux.
Comme aucun rideau ne se levait, il dit alors, en substance :
« Vous l'aurez voulu
La colère du ciel va s'abattre sur vous. »
- Concluant ainsi son avertissement, il fit un geste :
Le blindé, qui attendait, lâcha un obus sur le rideau de fer placé devant lui.
Il y eut un vacarme épouvantable et une pluie de débris.
« Vous l'avez voulu . », ajouta Argoud, très digne.
- Accompagné de quelques officiers et suivi d'un blindé de son régiment, le 3° chasseurs d'Afrique.
- Cependant, son adjoint le tirait par la manche et lui murmurait à l'oreille :
- «
- . »
- Il avait, effectivement, été atteint par un petit ricochet.
- Ce jour-là,
- .
Les grands services étant en route :
- Les paras entamaient une patiente chasse aux suspects.
- Tous les chantiers sur lesquels se trouvaient des grévistes étaient contrôlés.
Il n'était pas facile de déterminer quels étaient, parmi les grévistes, ceux qui avaient un rôle actif.
En règle générale, les contrôles d'identité ne soulevaient aucune protestation.
Souvent l'attitude des grévistes ne comportait pas d'hostilité.
Il était exclu de leur demander : « qui est le chef, ici ?. »
- Mais quand, sur un chantier de construction, le sous-officier para identifiait,
après contrôle des papiers :
- douze maçons et un chômeur ( bien habillé ),
Il n'hésitait pas à « embarquer » le chômeur, qui prenait le chemin du camp de Ben-Aknoun.
- douze maçons et un chômeur ( bien habillé ),
- Tous les chantiers sur lesquels se trouvaient des grévistes étaient contrôlés.
- La conséquence essentielle de cette grève fut de donner aux parachutistes des responsabilités
bien plus vastes que celles prévues à l'origine.
Retour sommaire Bataille d'Alger 1957
La différence avec les Paras.
Dès les premières heures de la journée du 28, ils apparurent comme le suprême recours,
l'autorité seule à même de résoudre tous les problèmes.
- Dans la matinée, les transitaires du port d'Alger s'aperçurent que les dockers étaient en grève.
Or beaucoup de bateaux attendaient d'être déchargés rapidement :
- la grève ne pouvait qu'avoir des conséquences coutteuses.
- Porte-parole de ses pairs, le président du syndicat des transitaires s'adressa à moi :
Puisque j'avais fait marcher les tramways
évité les coupures de gaz et d'électricité,
ne pouvais-je rendre au port une vie normale ?
- Une action fut vite montée :
les dockers défaillants seraient remplacés par les « suspects » qui,
depuis deux jours, s'entassaient à Ben-Aknoun.
Encadrés par des soldats du génie parachutiste,
ils prirent le chemin du port et travaillèrent jusqu'au soir, sans histoires.
Comme ils allaient remonter dans les camions pour rentrer au camp, la journée finie,
un homme porteur d'une sacoche s'approcha de l'officier chef du détachement qui les gardait :
- c'était le comptable du syndicat des transporteurs, apportant la paye.
Toute peine mérite salaire.
Les dockers involontaires reçurent le leur.
- Le retour fut joyeux. Lors d'un arrêt, des gens s'assemblèrent autour des camions.
Apprenant que les pensionnaires de Ben-Aknoun travaillaient, certes,
mais mangeaient et étaient payés, un homme sauta dans un des camions, à l'arrivée,
non seulement il ne manquait personne, mais il y avait un pensionnaire de plus
- c'était le comptable du syndicat des transporteurs, apportant la paye.
Maintenir une vie normale dans Alger fut ma grande préoccupation les jours suivants.
- L'armée et, plus spécialement, les parachutistes apporta son aide aux grands services urbains.
Une division de quelque 10 000 hommes
- ne représente pas grand-chose, répartie sur une agglomération comme celle d'Alger.
Il fallait maintenir un contrôle constant sur les activités les plus diverses intervenant dans la vie
d'une grande cité, sans négliger toutefois l'aspect essentiel de la mission :
- le maintien de l'ordre
ou, plus exactement, la lutte active contre l'ennemi fauteur de désordre.
- le maintien de l'ordre
- Convoyer les pommes de terre au marché ou courir après les tueurs,
tout cela avait un dénominateur commun : le para.
- Ces paras qui devaient gagner la Bataille d'Alger sous toutes ses formes,
allaient devenir des personnages de légende ou plutôt des personnages de folklore.
- Au reçu des ordres fort vagues émanant du gouvernement : je donnais les miens.
- Ils contenaient un terme essentiel : « quadrilage offensif ».
- Les paras devaient être les éléments de ce quadrillage.
- Leur mise en place fut quasiment instantanée.
- On ne les avait pas vus se mettre en place : on les vit en place.
Une première chose frappa les Algérois :
- Les paras étaient propres.
Tous les régiments sans exception avaient fait un éffort
sur la tenue, Les fameuses tenues camouflées ;
« les jardins potagers », disaient les uns,
les « léopards », disaient d'autres.
- Ils étaient toujours ajustées, toujours impécables.
« Un paquet de lessive pour une tenue » ;
ça n'arrangeait pas le tissu qui, entre nous, n'était pas fameux
- Ils étaient propres, ils avaient les cheveux bien coupés
(la casquette modèle Bigeard
n'est pas portable avec les cheveux longs, le béret non plus)
- et... ils se taisaient.
- Ces paras impeccables et silencieux, :
- se tenant là où il fallait, un peu partout dans Alger,
voilà l'un des premiers facteurs de
la victoire psychologique
qui fut l'objectif essentiel de la bataille d'Alger.
- se tenant là où il fallait, un peu partout dans Alger,
Les Algérois avaient vu passer beaucoup de soldats :
- Les rappelés débarquaient par bateaux entiers, parmi eux, il y avait de tout.
Un jour, la foule regardait arriver une unité particulièrement minable, des dockers grommelèrent :
« Ce n'est pas avec ces bataillons de femmes qu'ils nous materont. »
Ce n'était pas un bataillon de paras.
- Les paras, c'était autre chose.
On ne tarda pas à s'en apercevoir.
L'une de mes premières instructions porta sur la tenue.
L'essentiel concernait le port du béret :
- le béret serait porté en toutes circonstances, remplaçant le casque réglementaire
pour les conducteurs de jeeps et de camions et même pour les motocyclistes.
- Je prenais un risque, mais je donnai cet ordre sans hésiter :
après tout, les paras étaient différents des autres.
il fallait le montrer, puis le prouver.
- le béret serait porté en toutes circonstances, remplaçant le casque réglementaire
- Le même souci, instinctif, de panache, m'inspira pour mon premier ordre du jour :
J'y définissais mon but essentiel : rétablir la confiance.
Comment ? Tout d'abord, en montrant au F.L.N. qu'on n'avait pas peur de lui.
L'ordre du jour contenait cette phrase :
« J'irai me promener dans la Casbah. »
On m'a raconté
- qu'au 1° régiment de chasseurs parachutistes, le colonel Mayer, dit Prosper
(en souvenir du personnage de la chanson de Maurice Chevalier, riche, comme lui, en succès féminins )
sourit de tous ses yeux bleus en lisant l'ordre et le tendit à son adjoint en disant :
- «
- . »
- Panache ? Oui.
- Bluff ? Peut-être.
- En tout cas, dans les unités, cadres et hommes étaient contents d'être autorisés à « avoir de la gueule ».
- Sur la population, l'impact fut considérable.
L'une des premières conséquences de cet impact fut la floraison du Renseignement.
- Du seul fait de leur allure extraordinaire :
- mes hommes, avant même d'avoir agi, inspiraient la crainte, « foutaient la trouille »,
- une trouille salutaire,
mais dont les terroristes humiliés se vengèrent bien souvent en colportant de sombres histoires, totalement étrangères à la vérité et se résumant paradoxalement ainsi :
« Avec les paras pas de quartier, avec la justice le salut .»
Voici, un exemple ;
- un chef politique de rang moyen est arrêté, conduit au centre de tri de Beni-Messous.
Ayant découvert son importance relative, l'officier para va voir l'officier de police responsable du centre
et lui demande de surveiller étroitement le suspect en vue d'un interrogatoire.
Il recommande de ne pas l'envoyer au camp d'internement et d'éviter qu'il ne s'évade.
L'officier de police appelle une sentinelle et lui montre l'homme par gestes.
- Celui-ci s'aperçoit de l'intérêt qu'il suscite et est pris de panique, pensant peut-être qu'on le désigne pour une exécution. Affolé, il est sur le point de sauter par-dessus les barbelés.
- Aussitôt après le départ de l'officier para, le captif va voir l'officier de police et
se déclare prêt à passer aux aveux ...complets sur les attentats auxquels il se serait livré.
- Celui-ci s'aperçoit de l'intérêt qu'il suscite et est pris de panique, pensant peut-être qu'on le désigne pour une exécution. Affolé, il est sur le point de sauter par-dessus les barbelés.
- En fait il n'en a commis aucun, mais il veut être déféré devant le juge d'instruction.
Il est mené au tribunal, fait des aveux, est incarcéré puis se rétracte.
Il s'en tire avec inculpation d'outrage à magistrat, grâce aux bons conseils de Verges avocat du FLN.
On le met à Barberousse : il est hors d'atteinte des paras.
La prison de Barberousse
- A vrai dire, cette « trouille » n'était éprouvée que par les mauvaises consciences.
- Les écoliers d'Alger
exprimèrent au contraire leur fierté et leur joie, quand les paras les prirent par la main et les ramenèrent
à leurs écoles pour une tardive ouverture de rentrée.
La grève scolaire sévissait depuis de longues semaines.
Notre intervention y mit bon ordre.
Retour sommaire Bataille d'Alger 1957 - mes hommes, avant même d'avoir agi, inspiraient la crainte, « foutaient la trouille »,
Premier tournant de la bataille :
En moins d'un mois un résultat intéressant était acquis
- Le 5 février 1957 :
- L'étude de la relève des unités de la 10° D.P. dans Alger par des formations de la gendarmerie mobile était jugée possible et entreprise.
- Neuf escadrons devaient être mis en place le 7 mars, permettant l'allégement du dispositif parachutiste dans Alger à compter du 16 mars.
- L'étude de la relève des unités de la 10° D.P. dans Alger par des formations de la gendarmerie mobile était jugée possible et entreprise.
- Ce résultat se traduit par l'échec total de la grève générale du 28 janvier
que le F.L.N. avait annoncée pour une durée de huit jours.
- Le succès des opérations de « dégel » de la Casbah, et dans les quartiers de Belcourt, Hussein-Dey,
de Maison-Carrée et dans la Cité Mahieddine, .
- La fin de la grève scolaire (30 janvier).
- La diminution de l'activité terroriste devenue presque nulle après les deux attentats à la bombe
au stade municipal et au stade d'El-Biar.
Mon objectif,
- après avoir montré la puissance militaire dont je disposais, était évidemment de rétablir
une confiance sans laquelle il était vain de croire au succès d'une entreprise observée par l'étranger.
- Rien ne serait gagné en fait
si les boutiques dont les portes avaient été arrachées, parfois simplement et plus habilement ouvertes,
demeuraient abandonnées par leurs propriétaires et si la seule coercition ramenait sur les lieux de travail
ceux qui les avaient désertés.
- Notre volonté de détente fut démontrée par l'arrestation de quelques pilleurs européens de magasins musulmans, tentés par les portes béantes ouvertes par l'armée, alors que leurs proprié- taires étaient demeurés invisibles.
- Sans doute cette mesure eut-elle plus d'effet en profondeur que les distributions de bonbons aux enfants par les soldats et les aubades données successivement par la musique des zouaves aux quartiers les plus contractés :
La musique adoucit les mœurs.
- Il faut noter ici que de nombreux commerçants mozabites, qui exploitent dans les quartiers arabes la plupart des épiceries et habitent l'arrière-boutique, étaient présents dans leurs maga- sins, mais d'une manière générale les boutiquiers observèrent mieux les consignes de grève que les travailleurs, sans doute parce que plus riches, donc plus exposés aux représailles des terroristes.
Le vendredi 1 février 1957, le journal Le Monde titrait :
- Le général Massu a atteint un double objectif :
- il a assuré une reprise progressive du travail.
- il a évité des heurts violents entre les deux communautés.
- Si les jeunes gens de Belcourt conduits sur les docks ne montraient aucun empressement,
d'autres ouvriers, jusqu'ici absents et conduits dans une grande entreprise du port, s'affairaient, actifs comme si la grève était pour eux désormais terminée.
- Etaient-ils, en ce dernier jour du mois de janvier, où ils perçoivent leur salaire,
satisfaits de reprendre leur tâche ?
- N'étaient-ils pas contents enfin d'être en paix avec le F.L.N., puisqu'ils avaient été, après tout, guidés par des soldats jusqu'à leur lieu de travail et étaient demeurés sous leur grade ?
- On pouvait le penser...
- l'auteur de l'article était : Eugène Mannoni
En somme,
- au matin du quatrième jour de la grève ordonnée par le F.L.N., l'échec est si évident
qu'on assiste à une esquisse de manœuvre.
- Quelques tracts, s'inspirant sans doute des méthodes de propagande de Nasser,
affirment que ce n'est pas le F.L.N. qui a déclenché la grève...
mais le général Massu...
Les premieres arrestations :
Dans le courant de février,le colonel Bigeard
- et son 3° RPC réussissent deux opérations spectaculaires :
- Le démantèlement du réseau Bombes.
- l'arrestation de Ben M'Hidi.
Le démantèlement du réseau Bombes.
patron du 3° RPC.
- Le 14 février 1957.
- L'arrestation de Bouchouchi Mahdj
Marchand de vaisselle, demeurant rue Hamma
dans le quartier de la Liberté, prés de l’Opéra
à permis au 3° RPC d’anéantir en six jours
une grande partie du réseau bombes.
Il a été arréte lors de la perquisition de la villa de Mehouli
à Birmandreis. Il était caché dans un placard.
- L'arrestation de Bouchouchi Mahdj
- Dans la nuit du 14 au 15 février 1957.
- 25 bombes sont récupérées :
7 bombes au 7 rue Mogador chez Salem Ramdani boulanger.
8 bombes au 59 rue Duc-de-Cars, chez Smail épicier.
10 bombes au 34 boulevard Saint-Saens au garage Bon Accueil- camoufléés sous un escalier par le gardien de nuit
- 25 bombes sont récupérées :
- Dans la nuit du 15 au 16 février 1957.
- 26 bombes sont récupérées :
26 bombes au 6 rue de la Grenade dans la casbah chez- dans une cache murée.
- 26 bombes sont récupérées :
- Dans la nuit du 16 au 17 février 1957.
- 9 bombes sont récupérées :
9 bombes au 3 et 4 Impasse Kléber dans la casbah- dans une cache murée aménagée en double cloison.
- 9 bombes sont récupérées :
- Dans la nuit du 18 au 19 février 1957.
- 20 bombes sont récupérées :
20 bombes au 3 rue Kléber dans la casbah.- au domicile d'un individu arrêté depuis 6 mois à
- .
- 20 bombes sont récupérées :
- Le 19 février 1957.
- 7 bombes sont récupérées :
7 bombes au 2 Impasse Kléber dans la casbah dans un puit abandonné.
- 7 bombes sont récupérées :
- Soit un total de 87 bombes
qui sans aucun doute auraient caussées la mort de mombreux Algérois.
- Cependant, le chimiste du réseau bombes :
- Abderhamane dit Dahmamne alias Mohand Akli
spécialiste en explosif a pu s'échappé.
Les coffrets contenant les bombes
Retour sommaire Bataille d'Alger 1957 - Abderhamane dit Dahmamne alias Mohand Akli
L'arrestation de Ben M'Hidi :
- Ben M'Hidi,
était membre du comité de coordination et d'exécution.
- Il était un des chefs FLN en Oranie.
- «
- » dans cette région,
- l'avaient désigné pour la gestion des attentats dans le département d'Alger.
Un massacre de femmes et d’enfants- en Oranie lui serait
- .
- C’est lui qui a voulu la grève insurrectionnelle du 28 janvier 1957.
- Il voulait faire du département d’Alger, « un nouveau Dien-Bien-Phu »
- L' échec de la grève, les coupes sombres provoquées par les arrestations,
l'obligent à rester à Alger.
- Les forces de l'ordre ont réussi à remonter la filière qu'il veut renforcer.
- Il est arrêté le 16 Février 1957
par les parachutistes du Colonel Bigeard et les policiers de la DST.
- Il voulait faire du département d’Alger, « un nouveau Dien-Bien-Phu »
- Ils est directement responsable
de la mort de dizaines d’Algérois, surtout de femmes et d’ enfants lors des attentats à la bombes.
Depuis son arrestation,
- Ben M'Hidi Larbi,
était gardé dans un cantonnement du 3° R.P.C.
à la disposition des services de police ( D.S.T. ) et
des services de renseignements du 2° bureau de
la 10° région militaire d’Alger.
- Ils avaient obtenu de lui certains renseignements,
et en attendaient d’autres.
- Il sera transféré
le 3 mars 1957 à 23 heures à Maison-Carrée.
- Il sera supprimer
avec l’accord des politiques de l’époques.
- Sa disparition
comblera le vœu de notre Ministre de la guerre,
M. Max Lejeune, il estimait que Ben M’Hidi Larbi
avait suffisamment de sang sur les mains pour que
son suicide soit souhaitable.
- Il me précisa :
« Dites-vous bien que si l’avion de Ben Bella
n’avait pas été piloté par un équipage français,
il ne se serait jamais posé. »
Le Bilan de ce premier trimestre :
- Du 20 janvier au 31 mars :
- La 10° division parachutiste a arrêté 1.827 membres du F.L.N.
- Ces individus étaient :
- membres de cellules : 267
- tueurs et terroristes : 253
- collecteurs de fonds : 322
- propagandistes et agents divers : 985
- Parmi ces 1.827 membres du F.L.N. :
- environ deux cents ont perdu la vie dans l'exécution de leurs missions,
au cours de combats corps à corps, de poursuites, d'évasions, d'accidents divers.
- Pendant ce premier trimestre 1957,
en face de ces deux cents membres du FLN qui ont perdu la vie,
il faut mettre les 168 assassinats d’Européens dans la Mitidja et
surtout les 68 fermes abandonnées du fait de l’insécurité permanente dans
les régions de l’Arba, Rivet, Alma, Maréchal Foch, Saint-pierre Saint-Paul.
- environ deux cents ont perdu la vie dans l'exécution de leurs missions,
- L'armement saisi comprenait :
- 87 bombes,
- 200 kg d'explosifs,
- 166 grenades.
- 812 armes ( pistolets, mitraillettes ).
- Ces individus étaient :
- La 10° division parachutiste a arrêté 1.827 membres du F.L.N.
- Quant au bilan des pertes des forces de l'ordre,
il est très léger, contrairement au films produit par Yasef Saadi,
- Pendant les trois premiers mois de 1957 :
- Le 1er R.C.P. a eu un officier blessé,
- le 1er R.E.P. un sous-officier et trois légionnaires blessés,
- le 28 R.P.C. deux tués dont un officier le lieutenant Guillaume,
- le 38 R.P.C. aucune perte.
- le 20 G.A.P. aucune perte.
- Pendant les trois premiers mois de 1957 :
La répression a sans doute été désagréable, voire pénible à supporter.
Contrairement à la tactique terroriste du F.L.N.:
- Elle n'a été ni inhumaine ni impitoyable.
Elle n'a pas exprimé un manque de cœur puisqu'elle a été imposée par le seul souci
de sauver des vies humaines.
- Elle a atteint notre premier objectif : l'éclatement de la fourmilière terroriste,
ainsi qu'en témoigne une lettre de Mohand Aklj à Yacef Saadi ( alias Reda ).
A la vérité,
- les coups portés par l'armée aux cellules politiques d'Alger ont été durement ressentis par
les dirigeants du F.L.N. qui ont donné l'ordre de suspendre pour le moment la collecte de fonds, pour reporter l'effort sur la propagande auprès des militants de base.
- Certaines cellules ont perdu contact avec l'échelon supérieur, par disparition de membres intermédiaires
de la hiérarchie, de « boîtes aux lettres ».
Les dirigeants du F.L.N.
- ont attribué leur échec dans Alger aux facilités qui leur avaient été laissées auparavant et
qui leur avaient fait négliger les règles de l'action clandestine.
- Il ne faisait alors pas de doute que le moindre ralentissement dans notre action permettrait une reconstitution rapide de tout l'appareil politico-administratif.
- Les chefs rebelles d'Alger et leurs complices communistes
ont évacué la ville, pour la plupart, et se sont réfugiés dans le Piémont
( Sud de Souilla Maréchal-Foch Menerville ),
mais sont demeurés prêts à reprendre leur action interrompue.
- Dans tous les lieux
où l'organisation rebelle avait été démantelée, l'état d'esprit s'est amélioré.
La fréquentation scolaire est un baromètre de l'opinion :
(25 000 élèves dans le Grand Alger le 25 février, contre moins de 1 000 au début du mois).
- La population reprenait confiance, non dans notre générosité, mais dans notre fermeté,
c'est-à-dire notre détermination à garder sous les verrous les hors-la-loi que nous avions arrêtés.
Seule cette détermination délivrait le peuple de la peur, délivrance sans laquelle aucune
organisation d'autodéfense contre les tueurs ne pouvait être entreprise.
Cependant,
- à la suite de ce premier effort, la situation était loin d'être complètement retournée.
- La masse attendait de voir si notre action allait continuer avec autant d'intensité et d'obstination.
Pour le moment, elle était dans l'expectative. Elle était déroutée par notre nouvelle fermeté.
- il fallait lui redonner des chefs, les anciens combattants pouvaient être utilisés.
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En Eté, nouvelle vague de terrorisme :
Malgré les échecs subis
- au début du printemps, le F.L.N. n'a pas renoncé à l'action terroriste, loin de là !.
- Le 12 Mai,
j'avais assisté aux obsèques de M. Gabet, le maire de Koléa, lâchement assassiné.
- Le 3 Juin,
Trois bombes à retardement, dissimulées dans des lampadaires en fonte, aux arrêts d'autobus,
explosent vers 18 heures trente, l'heure de sortie des bureaux.
Elles provoquent la mort de huit personnes dont trois enfants.
Il y aura quatre-vingt-huit blessés, dont trente-trois seront amputés.
Les bombes ont frappé, sans distinction de sexe, d'âge, ou de religion,
mais en majorité des musulmans
- Le 12 Mai,
Je donne alors
- le commandement du secteur Alger-Sahel à mon adjoint,
le colonel Godard, qui s'installe au palais Bruce, au plus près de la Casbah.
- Il va y avoir deux ans que nous sommes à Alger,
ma famille et moi, sans que l'idée même d'un jour de permission ou de détente me soit venue.
Ma femme ne veut se séparer ni de moi, ni de notre fille...
Nous sommes donc tous trois rivés à cette vie harassante,
usante, que la chaleur, dès le mois de mai, rend plus difficile à supporter.
Un changement d'air, d'ambiance me serait bénéfique.
Mais il ne peut être question de décrocher d'Alger,
surtout alors que reprennent les attentats, que se durcit à nouveau le terrorisme.
- Le lieutenant Mazza,
mon aide de camp, conscient comme tout mon entourage, du problème, me propose la réquisition
d'une villa sur la côte à quelques kilomètres d'Alger.
Il s'agit d'une vaste maison, quelque peu délabrée parce que vidée et inoccupée depuis les « événements ».
Le principal agrément de la villa est son accès immédiat à la mer.
- Chaque jours, dès le petit matin,
je pars précédé de mes motards qui me font filer un train d'enfer.
Au volant de ma 403 blonde, l'acrobate du volant, le sergent parachutiste Happey, leur colle aux roues.
Je suis éternellement pressé et nous avons contracté là, Happey et moi, la dangereuse habitude d'oublier les servitudes du code de la route pour gagner les cinq minutes qui me manquent pour faire une heure !
- Sur ce front de mer au pied de Notre Dame d'Afrique,
je traverse la pointe Pescade, les Deux-Moulins, Saint-Eugene, je me glisse entre les barrages militaires, j'entrevois des voitures arretées et vidées.
C'est le chemin d'accès à la ville.
La voie de la fuite de ceux qui apportent le trouble et surtout la mort !
Je recevais beaucoup :
- réunions où j'écoutais les comptes rendus d'exécution et donnais des directives de détail,
- audiences privées après filtrage par mon cabinet.
- J'avais bâti un programme hebdomadaire et m'efforçais de le suivre si l'actualité le permettait.
- Le lundi et le jeudi :
à 11 heures, je recevais dans mon bureau mes subordonnés directs, les paras et
les chefs de service de la police pour préciser les modalités de leur action en profondeur, dont les détails m'étaient communiqués chaque jour par le 2° bureau.
- Les mardi et vendredi :
à 14 heures, j'allais à la préfecture pour recevoir les comptes rendus de l'action en surface exposés par les commandants de secteurs d'Alger.
Nous étudiions la manière de parer à certaines difficultés, d'améliorer les métho- des.
- le samedi :
à 10 h 30 je me rendais à la préfecture, pour m'occuper des affaires du département d'Alger, traitées par l'état-major mixte départemental (militaires et civils) et celui de la zone Nord Algéroise (Z.N.A.)
C'étaient des affaires qui me concernaient personnellement et dont j'assurais la responsabilité.
- Mais j'étais tenu à participer également aux réunions provoquées, à la préfecture,
par le général Allard et le préfet Baret, où étaient traitées les affaires des quatre départements et zones, à la fois à l'échelle de l' « Igamie » pour les civils et de la division militaire d'Alger devenue le corps d'armée d'Alger.
- Mais si ces réunions étaient essentielles et m'obligeaient à une présence aussi régulière que possible, je devais multiplier mes contacts personnels avec les colonels de mes régiments à leur P.C chaque fois qu'une découverte ou une capture importante requérait ma venue.
- Le lundi et le jeudi :
Le général Massu, les colonels Perrin, Brothier, Mayer, JeanPierre, Romain-Desfossés
Pour mes officiers, pour moi, il était vital de ressentir en commun l'atmosphère intraduisible du lieu même où se déroulait l'action... où elle venait de se dérouler.
Parfois, c'était l'inspection de V.I.P., d'autorités supérieures, qui m'amenait à ces déplacements.
Je n'avais pas toujours, alors, le même sentiment de ne pas perdre mon temps.
Dans la seconde période de la Bataille d'Alger, qui va commencer maintenant, j'irai souvent rendre visite au colonel Godard, auquel j'ai délégué mes pouvoirs concernant le secteur Alger-Sahel.
Son P.C., tout près de la Casbah, s'est installé dans un « palais »... encore un.
Le dimanche 9 juin, c'est la Pentecôte,
- le colonel Brothier et son épouse sont venus nous voir.
Cette fin de journée, je ne suis pas près de l'oublier !
Nous prenons l'apéritif sur la terrasse quand une explosion troue le calme du soir...
il est 18 ou 19 heures :
- Le téléphone m'apprend qu'une bombe a éclaté au casino de la Corniche, tout proche de chez moi.
Brothier et moi nous nous précipitons.
- Le spectacle qui nous est offert n'a pu s'effacer de notre mémoire !
Toute une jeunesse joyeuse, venue danser au terme de ce beau jour de fête, est massacrée.
- Le téléphone m'apprend qu'une bombe a éclaté au casino de la Corniche, tout proche de chez moi.
- Le bilan est lourd :
- 9 morts, 85 blessés dont 39 femmes, 10 dans un état désespéré.
Ce sont des Français de souche, en grande majorité du quartier populaire de Bab-El-Oued,
beaucoup n'ont pas vingt-cinq ans !
La bombe a été déposée sous l'estrade, par un des plongeurs de l'établissement
qui a pris la fuite et qui sera arrêté dans la soirée avenue Gandillot. .
Le chef d'orchestre, Lucky Starway, est déchiqueté, ses musiciens tous grièvement atteints.
La piste est balayée, les danseurs couchés pêle-mêle...
Voilà comment se termine un bal innocent !
- 9 morts, 85 blessés dont 39 femmes, 10 dans un état désespéré.
- Ne peut-on penser à notre réaction,
à nous qui savions, en cette soirée du dimanche 9 juin 1957, jour de la Pentecôte ,
qu'une main criminelle, mue par une volonté froide, avait sciemment causé un tel drame ?
- Ne peut-on imaginer,
notre désir de trouver les autres bombes, prêtes à causer les mêmes drames,
de tout mettre en œuvre pour les désamorcer ?
- Je revois cette belle jeune fille de dix-huit ans dont les deux jambes ont été arrachées
et qui gît, évanouie, dans ses cheveux blonds souillés de sang.
Cette vision s'est imposée en moi, avec un réalisme étrange, insoutenable, lorsque j'ai entendu
l'an passé, puis lu le récit de l'atroce drame du « 5 à 7 » de Saint-Laurent-du-Pont.
Le 11 juin 1957,
- les obsèques des victimes sont l'occasion de violentes manifestations.
Une grève inopinée est respectée par la population française de souche.
- Après les obsèques des victimes du casino de la corniche, la foule exaspérée se livre à des exactions :
- cinq indigènes musulmans sont tués, dont deux terroristes.
- un camion fonce sur la foule, une Européenne est tuée, 8 bléssés.
- 200 magasins de musulmans sont saccagés,
- 200 personnes sont arrêtées, il y a 49 blessés parmi les manifestants, dont 2 paras.
- Ce jour là,
les paras arrêtent Maurice Audin, communiste, chef de réseau, professeur à l'université d'Alger,
il avait obtenu sa mutation en 1953 afin de participer à l'insurrection qui s'annonçait.
C’est lui et ces complices
qui était chargé de caché et de transférer vers le maquis, les tueurs F.L.N. recherchés par les parachutistes.
- Les arrestations des membres du réseau communiste
marquera le début de la seconde partie de la Bataille d’Alger et la fin des poseurs de bombes.
Le couvre-feu est fixé à 21 heures pour l'ensemble de la ville. .
Je m'adresse à la population et à mes troupes dans les termes que voici :
- « Nous, militaires et policiers,
ressentons la même douleur, la même indignation que vous devant les attentats dont sont victimes
tant d'innocents. Vos deuils et vos souffrances sont nôtres, du fond du cœur.
L'action difficile, qui nous est imposée par cette guerre secrète, exige, avec la foi dans la victoire
qui nous anime, beaucoup de sang-froid, d'astuce et de temps.
Le moment n'est pas, même pour les étudiants, de se livrer sur la voie publique à des manliestations
qui obligent les troupes et la police à se distraire de leur effort essentiel pour en contrôler le développement.
Car vous n'ignorez pas qu'au milieu des gens les mieux intentionnés, aspirant à se libérer publiquement
de l'angoisse qui les étouffe, se trouvent des provocateurs, soucieux avant tout de détourner vers
leurs fins malsaines les mouvements de foules les plus honorables.
Il est primordial pour ll'avenir de l'Algérie que nous tous ici donnions à la métropole et au monde
le spectacle de l'union qui existe dans nos cœurs, notre seul but étant de réclamer et d'obtenir,
dans la légalité, la justice saine et totale, indispensable à notre victoire. »
Retour sommaire Bataille d'Alger 1957
http://algeroisementvotre.free.fr/site0301/bataille/massu000.html
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