A l’origine, le cercle de pays dit le G7 était celui des pays les plus industrialisés. Or cela fait des années que cela n’est plus le cas. Il se trouve que ces pays se rencontrent annuellement, pour se concerter et discuter des grandes questions du moment, économiques aussi bien que politiques, comme s’ils l’étaient encore. La somme de leurs PIB ne représente plus que 30 % de la production mondiale ; elle montait à deux tiers de cette dernière dans les années 1970. Le PIB des BRICS, qui pourtant ne sont que 5, est supérieur au leur. On peut dire du G7 qu’il est devenu le groupe des pays qui se croient encore les plus industrialisés au monde, qui en tout cas s’affichent comme tels, mais dont les sommets ne suscitent plus qu’un intérêt mitigé, et d’abord dans les pays dont il se compose. On aura remarqué que leurs médias ne disent plus d’eux qu’ils sont les pays les plus industrialisés mais les plus grandes démocraties. L’ouverture du dernier sommet, pourtant tenu à Hiroshima, la ville martyre, le symbole du pouvoir destructeur de la guerre, devait lui garantir une attention plus grande de la part du monde, alors que la guerre est de retour en Europe, et qu’elle menace en Asie.
Il n’en fut rien, d’autant qu’Evgueni Prigojine, le patron du groupe Wagner, a choisi ce jour pour annoncer la prise de contrôle complète de Bakhmout par ses hommes. Un fait reconnu par le Kremlin, qui a promis des médailles à tous ceux quels qu’ils soient ayant contribué à la victoire, ainsi que par le ministère de la Défense, mais évidemment aussitôt démenti par Kiev. Toutefois en des termes qui valent confirmation. Kiev, en effet, ne dit pas que Bakhmout n’est pas prise par les Russes, mais que les combats se poursuivent… dans ses abords. Les Russes n’ont pas annoncé qu’ils avaient pris les abords de Bakhmout mais Bakhmout elle-même. On admettra qu’il y a une différence. A ce compte d’ailleurs, la bataille de Bakhmout n’est pas près de se terminer, ni même d’ailleurs d’être gagnée ou perdue par personne, vu que dans sa périphérie, à plus forte raison si celle-ci va s’élargissant à partir d’un centre, il y aura toujours des combats en train d’avoir lieu. Hiroshima et Bakhmout ne sont que des symboles, la première du pouvoir effrayant de destruction de la bombe atomique, la deuxième de celui de la guerre tout court. Ni l’une ni l’autre n’a été le théâtre d’une bataille décisive. Les Etats-Unis ont recouru à la bombe atomique, et cela à deux reprises, ni pour gagner la guerre ni pour la perdre, mais à des fins d’expérience in vivo et grandeur nature. Ils sont les seuls à avoir commis une telle horreur, ou plus exactement à avoir été en mesure de la commettre. Si d’autres qu’eux avaient eu la bombe, peut-être qu’eux aussi s’en seraient servis. Le président américain a rendu hommage, en même temps que les autres dirigeants, aux victimes de Hiroshima, mais il n’était pas question pour lui de présenter les excuses des Etats-Unis au Japon, pourtant un allié. Le Japon ne demande d’ailleurs pas de repentance, une absurdité par quelque côté qu’on la regarde. Il n’avait pas capitulé parce que les Américains avaient recouru à la bombe atomique, mais parce que les Russes étaient entrés en guerre contre lui. Il avait compris alors que toute résistance était inutile, et qu’il valait mieux pour lui se rendre aux Américains que se laisser prendre par les Russes.
Mohamed Habili
https://lejourdalgerie.com/hiroshima-bakhmout/
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