En Eté, nouvelle vague de terrorisme
Parti pris et pour cause écrit par le Général Massu...
Malgré les échecs subis
- au début du printemps, le F.L.N. n'a pas renoncé à l'action terroriste, loin de là !.
- Le 12 Mai,
j'avais assisté aux obsèques de M. Gabet, le maire de Koléa, lâchement assassiné.
- Le 3 Juin,
Trois bombes à retardement, dissimulées dans des lampadaires en fonte, aux arrêts d'autobus,
explosent vers 18 heures trente, l'heure de sortie des bureaux.
Elles provoquent la mort de huit personnes dont trois enfants.
Il y aura quatre-vingt-huit blessés, dont trente-trois seront amputés.
Les bombes ont frappé, sans distinction de sexe, d'âge, ou de religion,
mais en majorité des musulmans
- Le 12 Mai,
Je donne alors
- le commandement du secteur Alger-Sahel à mon adjoint,
le colonel Godard, qui s'installe au palais Bruce, au plus près de la Casbah.
- Il va y avoir deux ans que nous sommes à Alger,
ma famille et moi, sans que l'idée même d'un jour de permission ou de détente me soit venue.
Ma femme ne veut se séparer ni de moi, ni de notre fille...
Nous sommes donc tous trois rivés à cette vie harassante,
usante, que la chaleur, dès le mois de mai, rend plus difficile à supporter.
Un changement d'air, d'ambiance me serait bénéfique.
Mais il ne peut être question de décrocher d'Alger,
surtout alors que reprennent les attentats, que se durcit à nouveau le terrorisme.
- Le lieutenant Mazza,
mon aide de camp, conscient comme tout mon entourage, du problème, me propose la réquisition
d'une villa sur la côte à quelques kilomètres d'Alger.
Il s'agit d'une vaste maison, quelque peu délabrée parce que vidée et inoccupée depuis les « événements ».
Le principal agrément de la villa est son accès immédiat à la mer.
- Chaque jours, dès le petit matin,
je pars précédé de mes motards qui me font filer un train d'enfer.
Au volant de ma 403 blonde, l'acrobate du volant, le sergent parachutiste Happey, leur colle aux roues.
Je suis éternellement pressé et nous avons contracté là, Happey et moi, la dangereuse habitude d'oublier les servitudes du code de la route pour gagner les cinq minutes qui me manquent pour faire une heure !
- Sur ce front de mer au pied de Notre Dame d'Afrique,
je traverse la pointe Pescade, les Deux-Moulins, Saint-Eugene, je me glisse entre les barrages militaires, j'entrevois des voitures arretées et vidées.
C'est le chemin d'accès à la ville.
La voie de la fuite de ceux qui apportent le trouble et surtout la mort !
Je recevais beaucoup :
- réunions où j'écoutais les comptes rendus d'exécution et donnais des directives de détail,
- audiences privées après filtrage par mon cabinet.
- J'avais bâti un programme hebdomadaire et m'efforçais de le suivre si l'actualité le permettait.
- Le lundi et le jeudi :
à 11 heures, je recevais dans mon bureau mes subordonnés directs, les paras et
les chefs de service de la police pour préciser les modalités de leur action en profondeur, dont les détails m'étaient communiqués chaque jour par le 2° bureau.
- Les mardi et vendredi :
à 14 heures, j'allais à la préfecture pour recevoir les comptes rendus de l'action en surface exposés par les commandants de secteurs d'Alger.
Nous étudiions la manière de parer à certaines difficultés, d'améliorer les métho- des.
- le samedi :
à 10 h 30 je me rendais à la préfecture, pour m'occuper des affaires du département d'Alger, traitées par l'état-major mixte départemental (militaires et civils) et celui de la zone Nord Algéroise (Z.N.A.)
C'étaient des affaires qui me concernaient personnellement et dont j'assurais la responsabilité.
- Mais j'étais tenu à participer également aux réunions provoquées, à la préfecture,
par le général Allard et le préfet Baret, où étaient traitées les affaires des quatre départements et zones, à la fois à l'échelle de l' « Igamie » pour les civils et de la division militaire d'Alger devenue le corps d'armée d'Alger.
- Mais si ces réunions étaient essentielles et m'obligeaient à une présence aussi régulière que possible, je devais multiplier mes contacts personnels avec les colonels de mes régiments à leur P.C chaque fois qu'une découverte ou une capture importante requérait ma venue.
- Le lundi et le jeudi :
Le général Massu, les colonels Perrin, Brothier, Mayer, JeanPierre, Romain-Desfossés
Pour mes officiers, pour moi, il était vital de ressentir en commun l'atmosphère intraduisible du lieu même où se déroulait l'action... où elle venait de se dérouler.
Parfois, c'était l'inspection de V.I.P., d'autorités supérieures, qui m'amenait à ces déplacements.
Je n'avais pas toujours, alors, le même sentiment de ne pas perdre mon temps.
Dans la seconde période de la Bataille d'Alger, qui va commencer maintenant, j'irai souvent rendre visite au colonel Godard, auquel j'ai délégué mes pouvoirs concernant le secteur Alger-Sahel.
Son P.C., tout près de la Casbah, s'est installé dans un « palais »... encore un.
Le dimanche 9 juin, c'est la Pentecôte,
- le colonel Brothier et son épouse sont venus nous voir.
Cette fin de journée, je ne suis pas près de l'oublier !
Nous prenons l'apéritif sur la terrasse quand une explosion troue le calme du soir...
il est 18 ou 19 heures :
- Le téléphone m'apprend qu'une bombe a éclaté au casino de la Corniche, tout proche de chez moi.
Brothier et moi nous nous précipitons.
- Le spectacle qui nous est offert n'a pu s'effacer de notre mémoire !
Toute une jeunesse joyeuse, venue danser au terme de ce beau jour de fête, est massacrée.
- Le téléphone m'apprend qu'une bombe a éclaté au casino de la Corniche, tout proche de chez moi.
- Le bilan est lourd :
- 9 morts, 85 blessés dont 39 femmes, 10 dans un état désespéré.
Ce sont des Français de souche, en grande majorité du quartier populaire de Bab-El-Oued,
beaucoup n'ont pas vingt-cinq ans !
La bombe a été déposée sous l'estrade, par un des plongeurs de l'établissement
qui a pris la fuite et qui sera arrêté dans la soirée avenue Gandillot. .
Le chef d'orchestre, Lucky Starway, est déchiqueté, ses musiciens tous grièvement atteints.
La piste est balayée, les danseurs couchés pêle-mêle...
Voilà comment se termine un bal innocent !
- 9 morts, 85 blessés dont 39 femmes, 10 dans un état désespéré.
- Ne peut-on penser à notre réaction,
à nous qui savions, en cette soirée du dimanche 9 juin 1957, jour de la Pentecôte ,
qu'une main criminelle, mue par une volonté froide, avait sciemment causé un tel drame ?
- Ne peut-on imaginer,
notre désir de trouver les autres bombes, prêtes à causer les mêmes drames,
de tout mettre en œuvre pour les désamorcer ?
- Je revois cette belle jeune fille de dix-huit ans dont les deux jambes ont été arrachées
et qui gît, évanouie, dans ses cheveux blonds souillés de sang.
Cette vision s'est imposée en moi, avec un réalisme étrange, insoutenable, lorsque j'ai entendu
l'an passé, puis lu le récit de l'atroce drame du « 5 à 7 » de Saint-Laurent-du-Pont.
Le 11 juin 1957,
- les obsèques des victimes sont l'occasion de violentes manifestations.
Une grève inopinée est respectée par la population française de souche.
- Après les obsèques des victimes du casino de la corniche, la foule exaspérée se livre à des exactions :
- cinq indigènes musulmans sont tués, dont deux terroristes.
- un camion fonce sur la foule, une Européenne est tuée, 8 bléssés.
- 200 magasins de musulmans sont saccagés,
- 200 personnes sont arrêtées, il y a 49 blessés parmi les manifestants, dont 2 paras.
Ce jour là,
les paras arrêtent Maurice Audin, communiste, chef de réseau, professeur à l'université d'Alger,
il avait obtenu sa mutation en 1953 afin de participer à l'insurrection qui s'annonçait.
C’est lui et ces complices
qui était chargé de caché et de transférer vers le maquis, les tueurs F.L.N. recherchés par les parachutistes.
Les arrestations des membres du réseau communiste
marquera le début de la seconde partie de la Bataille d’Alger et la fin des poseurs de bombes.
Le couvre-feu est fixé à 21 heures pour l'ensemble de la ville. .
Je m'adresse à la population et à mes troupes dans les termes que voici :
« Nous, militaires et policiers,
ressentons la même douleur, la même indignation que vous devant les attentats dont sont victimes
tant d'innocents. Vos deuils et vos souffrances sont nôtres, du fond du cœur.
L'action difficile, qui nous est imposée par cette guerre secrète, exige, avec la foi dans la victoire
qui nous anime, beaucoup de sang-froid, d'astuce et de temps.
Le moment n'est pas, même pour les étudiants, de se livrer sur la voie publique à des manliestations
qui obligent les troupes et la police à se distraire de leur effort essentiel pour en contrôler le développement.
Car vous n'ignorez pas qu'au milieu des gens les mieux intentionnés, aspirant à se libérer publiquement
de l'angoisse qui les étouffe, se trouvent des provocateurs, soucieux avant tout de détourner vers
leurs fins malsaines les mouvements de foules les plus honorables.
Il est primordial pour ll'avenir de l'Algérie que nous tous ici donnions à la métropole et au monde
le spectacle de l'union qui existe dans nos cœurs, notre seul but étant de réclamer et d'obtenir,
dans la légalité, la justice saine et totale, indispensable à notre victoire. »
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http://algeroisementvotre.free.fr/site0301/bataille/massu008.html
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