La femme sans sépulture
“La femme sans sépulture” est un roman écrit par Assia Djebar, publié en 2002. C’est aussi la recommandation de la semaine de Mayssa.
Voilà. J’ai fini La femme sans sépulture. Que dire, que dire de ce magnifique roman faisant revivre Zoulikha, héroïne de la guerre de libération, figure estimée de sa ville, Césarée de Maurétanie. « La visiteuse », « l’étrangère pas si étrangère », l’auteure elle-même ? revenue bien trop tard après l’indépendance dans la ville de ses aïeux, retrace minutieusement la vie de Zoulikha, contée par les femmes de la ville : ses filles, sa tante, Dame Lionne. Autant de personnages complexes et étonnants convoqués pour raconter le passé. Chacune se remémorant un souvenir, mis bout à bout pour restituer l’histoire de l’héroïne : « une large fresque féminine » dont Zoulikha est au centre, elle par trois fois épousée, par quatre fois mère, militante locale avant de rejoindre le maquis puis disparue, laissée sans sépulture. Disparue comme tant d’autres combattants, dont les familles n’ont, jusqu’à aujourd’hui pas d’explications, pas de traces malgré des recherches désespérées : une volonté d’effacer ces héros de la guerre d’indépendance.
Ce récit, écrit comme un chant, un conte où plusieurs conteuses prennent la parole lors de veillées féminines est également un voyage. Un voyage dans le temps : des époques romaines, vandales et numides à travers notamment le musée de Césarée, à la guerre de libération, et enfin au retour de « la visiteuse » en juin 1981. C’est également un voyage dans la région natale de l’auteure, les femmes-conteuses nous emmènent à l’antique cité romaine Césarée, actuelle Cherchell, prennent la route de Tipaza, ancienne ville romaine également, passant par des villages de pécheurs et dégustant des grillades de poisson frais, aux villages du mont Chenoua surplombant la douce Méditerranée… Pour qui, comme moi, y est déjà passé, les images des magnifiques paysages défilent au cours de la lecture, comme si j’étais retournée en Algérie les admirer, entre une douce brise marine et un soleil éclatant.
La femme sans sépulture, c’est surtout un hommage, c’est faire vivre le récit d’une femme extraordinaire, par sa complexité et son courage, c’est un remerciement : à tous ces combattants ayant donné leur vie à l’Algérie, et en particulier une mise en lumière du rôle des femmes dans la guerre. Zoulikha n’est en effet pas la seule femme algérienne ayant quitté sa famille, ses jeunes enfants, pour rejoindre le maquis ; ni la seule ayant participé à l’organisation d’un réseau de femmes en ville (dont Dame Lionne, ou Lla Lbia faisait partie), récoltant de l’argent et des vivres pour le maquis, « l’organisation » comme on disait, aidée par des hommes de la ville. C’est aussi une illustration de la vie sous l’occupation : les arrestations, le couvre-feu, les inspections des maisons…
C’est un récit intense, poétique, pour que la femme restée sans sépulture, ne soit jamais oubliée, son ombre flottant au-dessus de Césarée et l’histoire vivant dans les cœurs de ceux qui l’ont connue puis en ceux qui liront ce roman.
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El Anka – الحمد لله ما بقاش إستعمار في بلادنا
“Dieu soit loué, il n’y a plus de colonisation dans notre pays” (الحمد لله ما بقاش إستعمار في بلادنا) est le début d’un chant révolutionnaire écrit par El Hajj El Anka et qui se fait connaître le jour de l’indépendance algérienne, le 5 juillet 1962. Par Hakim.
Le 5 juillet 1962, l’Algérie est officiellement libérée du joug français. À 00h05, résonne à la radio une chanson que le père de la musique Chaâbi lui-même, le Hajj Mohammed Al Anka avait écrit des années auparavant et qu’il n’avait jamais pu jouer jusqu’à ce jour. Il s’agit de « Al hamdoulilah mab9ach isti3mar fi bladna » ; « Dieu soit loué, il n’y a plus de colonisation dans notre pays »
Dieu soit loué, il n’y a plus de colonisation dans notre pays.
L’épée de l’injustice a été brisée au combat par les braves
Les hommes ont donné leurs vies dans nos forêts, déserts et montagnes
Longue Vie à l’Algérie libre et à sa jeunesse
Longue vie à l’Algérie libre, à ses hommes et à ses femmes
الحمد لله ما بقاش إستعمار في بلادنا
إتكسر سيف الظلم في الحروب هلكوه الشجعان
ضحات الرجال في الغيب والصحراء وجبالنا
تحيا الجزائر حرة و يحياو الشبان
تحيا الجزائر حرة رجال ونسوان
Voici les quelques vers de ce poème écrit par El Hajj El Anka considéré comme père de la musique Chaâbi Algérienne et que l’on surnomme aussi « Le Cardinal ». Cet homme à la fois grand musicien et patriote, était aussi un homme de foi,i comme l’indiquent aussi bien les poèmes qu’il a écrit mais aussi son appellatif « El Hajj », titre que l’on accorde aux Musulmans qui ont effectué le pèlerinage à la Mecque.
En 1962, l’Algérie sort d’une guerre de libération qui a fait de nombreuses victimes. Malgré cette période sanglante où la pratique de la musique avait beaucoup diminué, les musiciens Chaâbi avaient quand même joué leurs rôles. Le fils de Al Anka affirme, dans le documentaire El gusto , détenir encore des lettres que son père recevait des maquisards qui lui demandaient de les soutenir à travers ses chansons. Que cela soit en France ou en Algérie, beaucoup de joueurs Chaâbi soutenaient le FLN au travers de métaphores dans leurs chansons, le passage de messages ou d’armes ou encore le reversement d’une partie de leurs recettes au FLN.
Cette chanson devenue presque un hymne à la libération, retentit dans l’Algérie tous les 5 juillet pour célébrer la libération en rendant hommage aux sacrifices des femmes et des hommes qui ont lutté pour l’indépendance algérienne. Les écoliers l’apprennent d’ailleurs dès leur plus jeune âge. Elle fait aussi référence à la place de la religion musulmane au sein de la société algérienne, longtemps victime de propagande par le gouvernement français dont la politique coloniale passait par l’effacement de la culture et de la religion des colonisés, cœur de leur l’identité.
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