La réalisatrice et l’actrice sont de retour en Algérie pour la belle histoire d’une danseuse qui se reconstruit après une violente agression.
Lyna Khoudri dans « Houria » de Mounia Meddour — Le Pacte
- Une jeune danseuse voit son avenir s’envoler après une agression brutale.
- « Houria » permet à Mounia Meddour de diriger de nouveau Lyna Khoudri qui fut l’héroïne de son premier film, « Papicha ».
- La reconstruction douloureuse d’une femme blessée fait découvrir l’Algérie d’aujourd’hui.
Elles sont vibrantes de complicité. L’actrice Lyna Khoudri et la réalisatrice Mounia Meddour font de nouveau équipe pour Houria après avoir obtenu un succès international et deux César pour Papicha. Houria, c’est le prénom de l’héroïne de ce deuxième long métrage, une jeune Algérienne, brillante danseuse classique, dont les rêves vont se briser après une agression brutale.
« Ce qui m’intéressait était la reconstruction du personnage, explique Mounia Meddour à 20 Minutes. A l’image de l’Algérie, Houria a un énorme potentiel qui doit être redécouvert. » Cette œuvre aussi forte que Papicha offre à la fois le portrait d’une jeune femme blessée devenue muette à la suite d’un traumatisme et la description d’un pays handicapé par des lourdeurs administratives et politiques.
Une grande responsabilité
Lyna Khoudri est éblouissante dans le rôle-titre où elle exprime toute la complexité de son personnage sans pouvoir utiliser la parole. « J’ai consulté beaucoup de médecins et de neurologues pour incarner Houria, précise-t-elle. Je suis entrée dans ce personnage par le corps. J’ai commencé à danser dès que j’ai su qu’on allait faire le film. » Ses chorégraphies qui évoluent au fil du récit expriment aussi bien sa colère que son courage. Certains passages dansés, notamment celui de la fin du film, coupent le souffle.
Les deux jeunes femmes n’ont pas que le talent en commun. Elles ont aussi le goût du travail et du perfectionnisme. « On est de grandes bosseuses, détaille Mounia Meddour. Cela correspond à notre façon de fonctionner mais aussi au fait qu’on touche à des sujets sensibles comme le handicap et l’Algérie ce qui accentue notre sens des responsabilités. On a parfois l’impression d’être des ambassadrices d’un pays qu’on voit peu au cinéma. »
L’importance de la solidarité
La sororité est capitale dans ce récit puissant montrant comment un groupe de femmes se soutient pour échapper à des destins difficiles avec autant d’énergie que de créativité. « Elles trouvent le moyen de s’en sortir dans un pays où tout peut changer du jour au lendemain pour le meilleur comme pour le pire », explique Lyna Khoudri. Le spectateur la suit dans son évolution douloureuse et galvanisante. Ce beau film fait espérer que le duo se retrouvera bientôt pour une troisième collaboration.
https://www.20minutes.fr/cinema/4027126-20230314-houria-apres-papicha-mounia-meddour-fait-entrer-lyna-khoudri-danse-algerie
« Houria » de Mounia Meddour, danse avec les loups
Après Papicha, qui évoquait la « décennie noire », Mounia Meddour et son actrice principale, Lyna Khoudri, sont de retour avec ce drame intense et virtuose sur une danseuse qui tente de se reconstruire dans une Algérie aux plaies mal cicatrisées.
Houria **
de Mounia Meddour
Film franco-algérien, 1 h 38
Papicha, succès public et critique de 2019, avait propulsé la réalisatrice Mounia Meddour et sa jeune actrice Lyna Khoudri sur le devant de la scène. Le film, remarqué au Festival de Cannes, avait ensuite remporté deux Césars : ceux du meilleur premier film et du meilleur espoir féminin. Houria, porté par le même duo, en est en quelque sorte le prolongement.
Alors que le premier se déroulait durant la « décennie noire » avec son cortège de violences, celui-ci s’ancre dans une Algérie contemporaine toujours hantée par les fantômes de la guerre civile. Le sujet lui est voisin puisque, à travers le chemin de reconstruction d’une danseuse blessée, il met en scène le combat d’une femme pour affirmer sa liberté.
Houria pratique la danse classique et rêve de ballets dans un pays où danser est contraire aux bonnes mœurs. Femme de ménage dans un hôtel le jour, elle participe la nuit venue à des paris clandestins sur des combats de bélier afin de réunir l’argent pour partir en Europe. Un soir, elle est violemment agressée et voit ses ambitions brisées par une double fracture à la cheville. Alors que son agresseur, un terroriste repenti, bénéficie de l’immunité accordée au nom de la paix civile, la jeune fille choquée et mutique va peu à peu revenir à la vie grâce à un groupe de femmes muettes.
Une dimension sociale et politique
Sur un sujet très proche de celui d’En corps, de Cédric Klapisch, la cinéaste franco-algérienne construit un drame intense et virtuose. La légèreté de sa caméra capte avec grâce les mouvements du corps, mais elle y ajoute une dimension sociale et politique qui transcende avec beaucoup de finesse son sujet. Il y a le regard des hommes sur ces femmes qui dansent et ne sont pas beaucoup mieux considérées que des prostituées, ces jeunes désœuvrés qui rêvent d’Europe et livrent leur destin à des passeurs sans scrupules, et le déni des violences subies pendant la guerre civile sur lesquelles le pays a préféré jeter un voile pudique.
À une première partie très enlevée et magnifiquement filmée succède le traumatisme et le lent travail de rééducation. Privée de parole, c’est désormais le corps d’Houria qui est au centre du film. Danser à nouveau devient alors pour elle, non seulement une planche de salut personnelle, mais aussi un acte de résistance. Elle exprime toute sa rage contenue et sa détermination dans une chorégraphie guerrière mêlant danse contemporaine et langage des signes.
Si le dénouement du film peut paraître un peu attendu, Lyna Khoudri, mélange de force et de fragilité, y est une nouvelle fois exceptionnelle et nous entraîne avec elle dans un ballet d’émotions. Elle est entourée d’autres femmes, blessées elles aussi par la vie, qui, à la manière d’un gynécée, vont la protéger dans cette ode à la sororité et à la liberté des corps.
https://www.la-croix.com/Culture/Houria-Mounia-Meddour-danse-loups-2023-03-14-1201259085
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