L i v r e
Lalla Zouleikha Oudaï, la mère des résistants. Ouvrage historique et documentaire de Kamel Bouchama (Préface de Amar Belkhodja et une note aux lecteurs de Farouk Zahi). Juba Editions, Alger 2016, 295 pages, 950 dinars (Fiche de lecture déjà publiée. Pour rappel.Extraits).
Elle s'appelait Yamina Echaib, épouse Oudaï, mais toutes et tous l'appelaient Lalla Zouleikha. Lalla ? Un substantif qui nous vient -tradition citadine- du grand respect, voire de vénération vouée aux aînées. Lalla ? Parce qu'elle était une femme de caractère, «radjel ou nass». Lalla ? Parce qu'elle était une nationaliste très tôt engagée, suivant ainsi l'exemple de son père, aux côtés de son époux et des combattants pour la libération du pays du joug colonial.
Lalla ? Parce cela n'était guère facile dans une ville comme Cherchell (ville de l'époux), où se trouvait installée une Ecole militaire bien gardée et gardant toutes les Portes de la ville et ville dominée par des colons. Pourquoi ? Une Cherchelloise bien née, taillée dans le roc des Berbéro-Hadjoutis, cette tribu Hadjoute, éternelle rebelle.
Née à Marengo (Hadjout aujourd'hui) en 1911, elle fut une des rares «indigènes» à décrocher son Certificat d'études (en 1924, à l'âge de treize ans), prenant en même temps conscience de son statut de colonisé... Son fils aîné, Lahbib, ayant «fait l'Indochine», de retour au bercail,prend le maquis.
Il tombera au champ d'honneur en janvier 1957 à Sidi El Kebir, dans la région de Chréa, deux mois après l'exécution de l'époux, El Hadj Larbi.
Organisatrice hors pair de la résistance, responsable du «nidham» à Cherchell, elle animera les réseaux de soutien (deux cellules, l'une composée de femmes, et l'autre d'hommes) au sein et en dehors de la ville, parfois au nez et à la barbe des services de sécurité
A la suite d'une dénonciation, le 21 mars 1957, elle rejoint définitivement le maquis... et pourtant, la lutte continue. Hélas, elle est arrêtée le 15 octobre de la même année... et torturée ( Le nom de son bourreau est connu : le Lieutenant-colonel Le Cointe, devenu par la suite général de corps d'armée), puis assassinée, exécutée le 25 octobre à 15 heures. Son corps ne sera retrouvé que plus tard, en mai 1982... Elle est enterrée aujourd'hui au cimetière des chouhada de Menaceur (...)
L'Auteur : Homme politique (Fln 100%... avant), ancien ministre (... un des plus jeunes du gouvernement de l'époque... à la Jeunesse et les Sports), ambassadeur, conférencier... et homme de culture, amoureux fou de sa région natale, Cherchell (et de l'Algérie), auteur d'un grand nombre d'ouvrages
Avis : Un style qui n'a pas changé. Littérature, prose, commentaire, multiples digressions, rappels historiques remontant à loin, très loin, références vérifiées... et engagé... le style Bouchama ! On s'y perd un peu, mais à la fin, on aime... car on apprend.
Citations : «Même si on doit me brûler comme Jeanne d'Arc, je ne parlerai pas !» (Lalla Zouleikha Oudaï, p 20), «Malheureusement, les Algériennes sont souvent les grandes oubliées de l'histoire de leur pays» (Mildred Mortimer, professeur, Usa,p 280)
Yamina Oudaï, l'héroïne oubliée. Enquête historique de M'hamed Houaoura (Préface de Louiza Ighilahriz), Anep Editions 2017, 350 dinars, 103 pages (Fiche de lecture déjà publiée. Pour rappel. Extraits).
Elle a été l'unique femme algérienne responsable politico-miltaire durant la guerre de libération nationale. «Certes, il y avait de grandes moudjahidate mais, à ma connaissance, et je le dis pour l'Histoire, Yamina Oudaï, connue sous le pseudonyme de Ella Zoulikha est l'unique femme algérienne qui avait été désignée à la tête d'une organisation politico-militare» souligne un moudjahid de la région, Ghebalou H'mimed. Elle avait, aussi, organisé un réseau de soutien composé uniquement de femmes
Une situation, fruit d'une certaine histoire familiale, faite d'engagements politiques, de combats et de martyrs (dont l'époux, Hadj Ahmed Oudaï et un fils, Lahbib).
Belle, intelligente, cultivée, généreuse, sociable, mère de famille exemplaire (deux filles et trois garçons), née à Hadjout et installée à son mariage à Cherchell, elle a réussi, avec l'accord et le soutien de l'époux, à activer pour la cause nationale dans la plus stricte clandestinité.
Mais, toujours sur ses gardes, car surveillée, harcelée par la police, les gendarmes et les militaires... la maison familiale se trouvant à quelques mètres de l'académie militaire de Cherchell.
Après sa capture au maquis (le 15 octobre 1957), torturée, toujours résistante (elle avait craché au visage du capitaine français, en public, alors qu'elle était traînée par un half-track), elle fut froidement abattue le 25 octobre 1957 et son cadavre abandonné dans la forêt... Sans sépulture (certes, il existe un témoignage mais il reste bien incertain), son histoire a été évoqué par Assia Djebar dans un de ses romans («La femme sans sépulture») et son nom reste toujours vivant dans la mémoire populaire.
L'Auteur : Né en Novembre 1954 à Cherchell (Wilaya de Tipasa), diplômé de l'IC de Ben Aknoun (Alger), journaliste (El Watan)
Avis : Fruit de multiples enquêtes et de reportages sur la guerre de libération nationale dans la région de Tipasa, de Cherchell...
Citation : «Ella Zoulikha, l'héroïne algérienne n'a même pas de sépulture, comme tant d'autres héros de la guerre de libération nationale» (p 50)
par Belkacem Ahcene-Djaballah
Jeudi 22 decembre 2022
http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5317614
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