La Tunisienne Ons Jabeur s’est inclinée le 10 septembre en finale de l’US Open face à Iga Swiatek, la numéro 1 mondiale. Malgré cette défaite, l’année 2022 sera à marquer d’une pierre blanche pour celle qui est devenuela première Africaine à se hisser au deuxième rang mondial.
Ons Jabeur après sa victoire face à la Française Caroline Garcia en demi-finale de l’US Open, à New York, le 8 septembre 2022. © SHANNON STAPLETON/REUTERS
Kamel Deguiche, le ministre tunisien des Sports, va peut-être réellement devoir créer ce « ministère du Bonheur » qu’il avait évoqué en juillet, quand Ons Jabeur a atteint la finale du tournoi de Wimbledon, perdue face à la Kazakhe Elena Rybakina.
Ce 10 septembre, de Tunis à Sfax en passant par Sousse et Nabeul, des centaines de milliers de Tunisiens ont déjà programmé leur soirée télé : Ons Jabeur, alors numéro cinq mondiale, s’apprête à défier la Polonaise Iga Swiatek (21 ans) en finale de l’US Open.
Après sa finale perdue sur le gazon londonien, Ons Jabeur rêvait d’inscrire son nom au palmarès d’un tournoi du Grand Chelem. Mais la Polonaise s’y est opposée en battant sèchement son aînée tunisienne en deux sets (6-2, 7-6).
Deux finales du Grand Chelem en 2022
Sous les yeux du très connaisseur public new-yorkais et de millions de téléspectateurs, Ons Jabeur n’est donc pas devenue la première joueuse africaine et arabe à inscrire son nom au palmarès d’un tournoi du Grand Chelem du circuit professionnel féminin.
Avant cette cruelle défaite, elle avait atteint la finale après un parcours parfaitement maîtrisé, en se débarrassant successivement des Américaines Madison Brengle (7-5, 6-2), Elizabeth Mandlik (7-5, 6-2) et Shelby Rogers (4-6, 6-4, 6-3), de la Russe Veronika Kudermetova (7-6, 6-4), de l’Australienne Ajla Tomljanović (6-4, 7-6) et de la Française Caroline Garcia, balayée en demi-finale (6-1, 6-3).
La droitière la plus célèbre d’Afrique est arrivée en finale en n’ayant perdu qu’un seul set, physiquement affutée, et boostée par les résultats qu’elle a obtenus depuis deux ans, notamment en 2022. « Cet US Open est une très grande victoire pour Ons. Certes, elle a perdu en finale, mais elle a battu les meilleures joueuses américaines, elle a atteint deux finales du Grand Chelem cette année, et je suis persuadée qu’elle en remportera un bientôt. Toute la Tunisie est très fière », s’enthousiasme Salma Mouelhi, présidente de la Fédération tunisienne de tennis (FTT).
Cette année, avant sa brillante mais inachevée escale new-yorkaise, Ons Jabeur ne s’est pas contentée d’atteindre la finale du tournoi sur gazon le plus prestigieux au monde, où elle a notamment éliminé Venus Williams, cinq fois victorieuse à Wimbledon. Elle a aussi remporté le tournoi de Berlin et atteint la finale à Charleston (États-Unis) et à Rome, face à une certaine… Iga Swiatek.
Sa seule vraie fausse note ? Un passage trop furtif à son goût à Roland-Garros, marqué par une élimination précoce au 3e tour pour celle qui ne cachait pas ses ambitions avant de fouler la terre battue parisienne. Mais dans la continuité de deux années 2020 et 2021 très convaincantes, avec notamment une victoire – sa première sur le circuit WTA – à Birmingham l’année dernière, la Tunisienne n’a cessé de progresser, s’affirmant à chaque tournoi davantage comme une des joueuses les plus prometteuses du circuit, sans jamais se départir de son sourire désormais proverbial et de son objectif : intégrer le Top 5 mondial.
« Les plus belles pages du sport tunisien »
Avant la finale face à sa cadette polonaise, elle n’a d’ailleurs pas manqué de rappeler à son auditoire que tous les plans qu’elle a échafaudés pour 2022 se sont, pour le moment, concrétisés : intégrer le Top 5 mondial, disputer une finale d’un tournoi du Grand Chelem, et remporter un tournoi. Elle a certes perdu le match le plus important depuis le début de sa carrière en 2010, mais elle est aujourd’hui redevenue numéro 2 mondiale – comme en juillet après sa finale à Wimbledon –, le meilleur classement jamais obtenu par une joueuse arabe et africaine.
Celle dont les matches étaient d’abord suivis par une poignée d’initiés dans un pays où le football reste le sport roi, a progressivement su convaincre une frange importante de ses compatriotes de s’intéresser à une discipline peu suivie en Afrique.
« Une fierté pour l’Afrique »
Comme elle s’en est félicitée à New York, la veille de sa finale, « les Tunisiens regardent aujourd’hui les matches de Ons ». Salma Mouelhi, qui a vu le nombre de licenciés augmenter de manière significative ces dernières années, voit en Ons Jabeur un symbole « non seulement pour la Tunisie, mais également pour l’Afrique et le monde arabe. Une femme sportive, jeune, moderne, avec une personnalité sympathique », résume-t-elle.
Nabil Maâloul, l’ancien sélectionneur de l’équipe tunisienne de football, désormais entraîneur de l’Espérance Tunis, ne cache pas son admiration pour sa compatriote : « Je pense que vous aurez du mal à trouver quelqu’un en Tunisie qui ne se soit pas intéressé à ses dernières performances. Ce qu’elle a réalisé cette année, en disputant deux finales des plus grands tournois, en en remportant d’autres, est extraordinaire. Elle est en train d’écrire une des plus belles pages du sport tunisien, mais aussi arabe et africain. Et elle va progresser et finir par gagner un tournoi du Grand Chelem. Oui, aujourd’hui, Ons Jabeur est au moins aussi populaire que les footballeurs, et même un peu plus ! »
En Afrique subsaharienne, les performances de la Tunisienne ont aussi trouvé un écho. Clémentine Touré, la sélectionneuse de l’équipe nationale féminine ivoirienne, a évidemment suivi de près l’US Open. « Pour le continent africain, c’est une vraie fierté, commente-t-elle. Peu importe la nationalité de celle qui obtient ces résultats. » En dépit des deux finales perdues, Ons Jabeur est bien une Africaine en or.
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