Vu par un ancien mobilisé,
Nous avions tous vingt ans, et un peu plus peut-être,
Et nous ne savions rien des choses de la vie.
Nous étions des moutons que l’on amenait paître,
Nos bergers politiques étaient bien assoupis.
Ne sachant trop quoi faire, ils étaient tiraillés,
Conduisant au désastre, les yeux sur le bâton.
Gouverner c’est prévoir, ce n’est pas louvoyer
Et nos beaux officiers, ne rêvant qu’aux… ratons!
Pour devenir plus tard les cocus de l’Histoire.
Nous les pauvres couillons, on croyait (ou pas) à la guerre,
Victimes inconscients de nos esprits grégaires,
Car on nous demandait de nous battre, sans savoir trop pour qui,
Pour les colons bien sûr, leurs privilèges acquis,
Ils voulaient tout garder, en imposant leurs lois
Attisant les querelles, entre arabes et gaulois.
A Paris, à Alger, on faisait des patrouilles
Mais ailleurs se tramaient de vilaines magouilles,
Qu’importe le gâchis, et le sang et les larmes,
On ne faisait parler que la haine et les armes.
Le sort de l’Algérie se jouait à Wall Street
Au Caire et à Moscou, et non dans les guérites.
Oh ! Que de temps perdu, que de vies sacrifiées,
Pour aucun bénéfice, que l’honneur humilié.
Telle est la tragédie dont nous fûmes acteurs.
Reste le souvenir d’une immense rancœur.
Il nous reste encore de beaux jours à vivre,
Même si Thanatos, avec sa grande faux
Rôde ici et là, et par monts et par vaux.
Disons-lui “halte là !”. Je termine mon livre.
Simon Garrigue, juin 2017
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