En Algérie, la région du Tassili n'Ajjer, désignée par l'UNESCO comme site du patrimoine mondial, comporte l’une des plus importantes collections d'art rupestre au monde avec près de 15 000 dessins et gravures documentés par les archéologues. En effet, au cours des millénaires, les artistes préhistoriques ont peint ou sculpté une ménagerie d'animaux, sauvages et domestiqués, ainsi que des plantes et des personnes impliquées dans la chasse et d'autres activités quotidiennes.
Les premières représentations de l'utilisation rituelle de champignons psychotropes
Mais parmi ces peintures, se trouvent aussi des représentations des "têtes rondes", des figures humanoïdes aux têtes surdimensionnées qui semblent voler. Datées de 9 500 à 7 000 av. J.-C., les images de personnes en lévitation, ainsi que des personnages masqués, comme des "chamans" avec de gros champignons jaillissant de leur corps, pourraient être "les premières représentations de l'utilisation rituelle de champignons psychotropes producteurs de psilocybine", explique sur le site Atlas Obscura, Giorgio Samorini un ethnobotaniste italien et chercheur indépendant qui étudie les plantes et les champignons psychoactifs. Selon lui, l'art sur les parois des grottes du Tassili n'Ajjer, a été créé à une époque où le Sahara était une savane tempérée. "Nous savons que diverses espèces de Psilocybe poussaient dans cette région à cette époque. Imaginer que les personnes qui ont créé ces œuvres d'art n'en étaient pas conscientes n'est pas réaliste. Ils vivaient de manière nomade, avec une connaissance encyclopédique probable de la flore et de la faune de la région pour survivre".
Une identification difficile
Selon un article publié en 2012 par Gastón Guzmán, un expert en champignons psychotropes, qui comparait les représentations de champignons préhistoriques au Mexique, en Espagne et en Algérie, les champignons représentés dans les grottes du Tassili pourraient être Psilocybe mairei Singer, une espèce commune à la région. Mais les images du Tassili étant altérées, il n'est pas possible d'identifier l'espèce exacte, "en particulier parce que les preuves physiques de champignons psychotropes, telles que des résidus ou même des traces d'ADN, n'ont jamais été trouvées dans les grottes".
De plus, pour certains archéologues, il n’y a aucune preuve qu’il s’agisse réellement de représentations de champignons. En 1956, l'ethnographe français Henri Lhote pensait que ces peintures auraient pu être des représentations d’extraterrestres. Selon l'ethnomycologue Brian Akers, "nous savons que la majorité des autres plantes et animaux de l'art rupestre des chasseurs-cueilleurs ont été chassés et/ou consommés par la culture en question, nous pouvons donc supposer que les champignons l'étaient aussi. Bien sûr, ces représentations en Algérie sont plus abstraites, moins réalistes que celles en Espagne, mais pourquoi ne pas admettre la possibilité qu'il s'agisse de champignons ?".
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Une signification particulière
Pour Brian Akers, ces champignons avaient probablement une signification pour les peuples préhistoriques du monde entier qui les incluaient dans leur art. "Ce sont probablement des cultures dans lesquelles le rôle des effets psychédéliques des champignons est profondément intégré, en plein centre de la culture". Enfin, pour Giorgio Samorini, "nous avons des preuves que des humains expérimentent toutes sortes de substances intoxicantes depuis des milliers d’années. Notre préhistoire était probablement une période beaucoup plus expérimentale".
Publié le
https://www.geo.fr/histoire/en-algerie-des-peintures-rupestres-pourraient-montrer-lutilisation-de-champignons-psychedeliques-210345
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