Pourquoi faire cette guerre, et à cet âge-là ? Comment faut-il « avoir vingt ans dans les Aurès » ? Communauté d’âges, de souvenirs et d’incertitudes : les jeunes Français du contingent ont appris en Algérie comment se forge une génération. Jamais ni l’autorité militaire ni eux-mêmes n’en ont douté. Voici l’étude pionnière du visage d’Algérie d’une jeunesse française.
2Un double destin en partage, celui d’une enfance vécue dans les affres de la seconde guerre mondiale et d’une jeunesse frappée de plein fouet par la guerre d’Algérie : voilà ce qui du moins, par-delà les différences d’ordre social et culturel, constitua l’expérience commune aux jeunes Français appelés du contingent en Algérie. Si une génération se reconnaît dans des événements majeurs qui la fondent, ces deux guerres venues pour eux s’entrechoquer furent sans doute déterminantes.
3La guerre a certes le plus souvent le visage de la jeunesse, mais le conflit algérien l’eut peut-être plus que tout autre. En effet, qu’on lui fît endosser les euphémismes de « pacification » ou d’« opérations de maintien de l’ordre », cette guerre, officiellement, n’en était pas une ; par conséquent, le gouvernement n’eut nullement besoin de faire appel aux première et deuxième réserves. C’est pourquoi les hommes transformés en soldats sur les terres d’Afrique du Nord eurent pour première caractéristique la grande homogénéité de leur âge : la majeure partie d’entre eux avait entre vingt et vingt-deux ans, un peu plus pour les sursitaires et les rappelés. Que signifiait, non pas seulement faire cette guerre-là, mais la faire à cet âge-là ?
4On ne saurait conférer à des événements vécus à la première personne, et par là, irréductibles à toute généralisation, une unité qu’ils n’eurent pas, ni considérer la guerre d’Algérie comme un bloc chronologique et géographique. Ce dont il s’agit bien plutôt, c’est d’étudier comment l’armée voulut apprendre la guerre à ces jeunes, et en quoi l’instruction militaire qu’elle leur donna prit en compte cette particularité juvénile et générationnelle. Par suite, la signification que les jeunes du contingent donnèrent à leur expérience algérienne fut-elle redevable d’un certain legs : celui des conflits qui les avaient précédés, et tout particulièrement de la dernière guerre mondiale ? Ce qui retiendra l’attention ici, c’est bien la part prise par la mémoire et la culture de guerre dans la transmission d’une génération à l’autre, d’un point de vue institutionnel, celui de l’armée, et générationnel, celui des appelés.
? La jeunesse du soldat
5L’armée n’est pas uniquement école de combat ; elle est aussi « instrument de citoyenneté [1][1]Annie Crépin, La Conscription en débat ou le triple… » et propose aux jeunes soldats une forme de socialisation à certaines valeurs qui doit leur permettre tout à la fois une intégration et une incorporation. Celles-ci se mènent au moyen d’une instruction tant civique que physique : apprendre à être un combattant et un citoyen, c’était alors l’un des buts que l’armée s’assignait et que la société lui reconnaissait. Mais cela même supposait que la hiérarchie militaire sût précisément à quelles recrues elle s’adressait.
6De fait, au cours des années 1950, l’armée manifesta le souci de mieux connaître les appelés qu’elle enrôlait, non seulement comme soldats, mais aussi comme jeunes. La mise en place, en 1953, d’une commission Armées-Jeunesse en porte le témoignage : créée à la demande de plusieurs associations de jeunesse et sous l’impulsion du service d’information de la Défense nationale, elle était composée, à parité, de représentants de l’armée et de dirigeants d’organisations de jeunesse et d’éducation populaire, dans le but d’une meilleure compréhension mutuelle. Autre indice, à partir de 1954 l’instauration des centres de sélection, avec leur cortège de tests, d’exercices et d’épreuves venant compléter les informations fournies par les conseils de révision, devait également offrir à l’armée une connaissance affinée du contingent.
7Les archives militaires donnent ainsi une vision éclairante de la manière dont le haut commandement considérait les jeunes gens qui lui étaient confiés. Tantôt perçus comme des hommes faits, les appelés pouvaient être soumis aux traitements les plus durs, et il paraissait alors normal qu’ils eussent à subir les conditions de vie que leurs prédécesseurs, sur tous les fronts de toutes les guerres, avaient connues avant eux. Et il est vrai que, au cœur de la guerre d’Algérie, l’entraînement physique à la « contre-guérilla » eut des exigences que la routine du temps de paix n’avait pas. Les directives sur la conduite de l’instruction étaient explicites quant aux buts à atteindre par un durcissement des classes [2][2]Général Lorillot, chef d’état-major, directives sur la conduite… : il s’agissait de fournir à l’armée d’Afrique du Nord des hommes résistants, aptes à supporter la fatigue, les efforts violents et les privations, et animés d’un esprit agressif. Les jeunes soldats étaient vus comme des adolescents, encore très proches de l’enfance, et il convenait de montrer à leur égard la mansuétude adaptée à cet âge de la vie. Le service militaire, pour chaque appelé, devait être l’occasion « d’un développement de sa personnalité d’homme et de Français [3][3]Idem. ». La jeunesse était bien de ce point de vue phase de transition, malléable comme l’enfance et forte comme l’âge d’homme.
8Car les responsables militaires n’oubliaient pas que ces appelés étaient, somme toute, très jeunes. Ainsi des consignes émanant du cinquième bureau de l’état-major, spécialement chargé de « l’action psychologique [4][4]Cf. Marie-Catherine et Paul Villatoux, « Le cinquième bureau en… », soulignaient-elles que les recrues sortaient à peine de l’adolescence et qu’il fallait les traiter comme tels : « Les hommes qui sont placés sous nos ordres touchent encore à l’enfance et les pères d’enfants de vingt ans le savent bien. Si la vie militaire affermit leur caractère et durcit en quelque sorte leur écorce, leur corps, leur cœur et leur esprit exigent encore beaucoup de sollicitude [5][5]5e bureau, 10e région militaire, 26 avril 1958, SHAT 1H2449/1.. » De telles considérations devaient avoir des applications pratiques destinées, autant que faire se pouvait, à plonger l’appelé dans une atmosphère proche du milieu familial qu’il venait de quitter : « Le souvenir des soins maternels est évoqué dans l’unité par le bien-être matériel : qu’il s’agisse de l’ordinaire, de l’habillement, de la décoration des locaux, de l’ambiance au Foyer ou des soins corporels. La fermeté paternelle s’exerce par la discipline et par l’acte de commandement. » L’armée se présentait donc comme une seconde famille, sur le modèle d’une distribution des rôles que les supérieurs devaient jouer tour à tour et tout à la fois. Il s’agissait également de mieux connaître ces jeunes hommes, en particulier à l’échelon du commandement de compagnie : des fiches de renseignement, comportant des détails confidentiels, devaient être rédigées pour chaque soldat, avec la mention des différentes permissions, des maladies que l’appelé avait contractées, et de la situation de sa famille. Ainsi, le comportement de chaque instant devait-il être expliqué par la connaissance intime du passé social, familial et psychologique du jeune soldat.
? La culture de guerre dans l’instruction militaire
9À ces jeunes hommes, il fallait apprendre non seulement le combat, mais le sens du combat. À cet égard, les directives sur la conduite de l’instruction mettaient en lumière le choc en retour non seulement de la guerre en cours, mais aussi de l’héritage guerrier, sur la formation militaire du contingent. Les conflits de jadis et de naguère s’inscrivaient comme par réverbération dans cette instruction.
10Celle-ci s’attelait tout d’abord à rendre plus concrète l’appartenance à une communauté. De ce point de vue, l’histoire du régiment constituait une bonne entrée en matière : une plaquette la racontant pouvait être remise à chaque homme dès son arrivée dans son cantonnement [6][6]Exemple du 7e régiment d’infanterie, Général Miquel, rapport…. Noël Favrelière se rappelle ainsi qu’un officier conta l’histoire de son régiment, à Mont-de-Marsan, devant la troupe rassemblée dans la cour du camp ; les « bleus » apprirent alors que le 8e régiment auquel ils appartenaient avait été formé en Indochine et qu’il avait participé à de nombreuses batailles, dont celle de Dien Bien Phu. « Dans les rangs, une voix dit derrière moi : “Ils comptent probablement sur nous pour la revanche” [7][7]Noël Favrelière, Le Déserteur, Paris, J. C. Lattès/Édition…. »
11Pensée comme vivante et reposant sur la méthode de la « participation active », cette instruction devait permettre aux recrues de s’approprier l’histoire comme héritage. Quelques visites de nature « historique » étaient donc organisées ici et là. Par exemple, les responsables des camps militaires de Mourmelon et de Sissonne souhaitaient tirer profit de leur situation dans une région riche de souvenirs et de hauts lieux d’histoire militaire : les unités établies dans ces camps devaient pouvoir profiter de leurs dimanches pour visiter le Chemin des Dames, les Monts de Champagne ou encore la Montagne de Reims. Ces promenades dans l’histoire de la France et de la guerre avaient vocation à faire saisir aux recrues les idées de patrie et de sacrifice, et à leur donner corps [8][8]Général Morlière, « Éducation morale des recrues au cours des….
12« La France a toujours eu les meilleurs soldats du monde. » Tel était du moins l’un des mots d’ordre à employer auprès des appelés et des rappelés, selon une note de service du général Miquel datée de mars 1956 [9][9]Note de service du général Miquel, 30 mars 1956, SHAT 6T965/3*.. Par cette affirmation, le commandement entendait provoquer l’enthousiasme parmi les troupes et donner à l’impôt du sang une épaisseur historique. Les jeunes soldats ne devaient pas se sentir isolés dans leur époque, mais rattachés au contraire à la longue suite des générations combattantes, comme le dernier maillon d’une chaîne que certains militaires faisaient remonter au Premier Empire : « Si vous êtes de bons Français, et j’en suis sûr car vous l’avez prouvé, si vous êtes jaloux de la renommée de vos pères, si vous êtes les authentiques fils des Grognards de Napoléon et des Poilus de 1914 […], votez oui ! », écrivait le général Daillier, en juillet 1958, aux soldats qui allaient participer au référendum du 28 septembre [10][10]Lettre manuscrite du général Daillier, reproduite dans le…. L’armée restait bien le mémorial d’une culture de l’héroïsme.
13L’« identification des ancêtres », selon l’expression d’Anne-Marie Thiesse [11][11]Anne-Marie Thiesse, La Création des identités nationales Europe…, revêtait donc une importance capitale. L’armée ne s’adressait pas, en l’occurrence, à des jeunes en général, mais à ces jeunes en particulier, ceux dont les pères ou les frères avaient été ou eussent pu être des héros de la Résistance. Aussi les exploits de leurs « frères aînés, combattants des maquis ou des armées de libération, les glorieux soldats de Bir-Hakeim, du Zaghouan, de Garagliano, du débarquement et de Rhin et Danube [12][12]Lettre du général Daillier, lettre citée. » étaient-ils rappelés comme autant de références susceptibles de former les soldats à la conviction de leur propre devoir. Les commémorations officielles, celles du 8 mai ou du 18 juin, furent par exemple l’occasion de rendre hommage à la mémoire des jeunes résistants : elles devaient faire comprendre aux recrues que leur action s’inscrivait dans le prolongement de cet engagement. Des « causeries-veillées » furent alors organisées dans les casernements ; le thème proposé pour le 18 juin 1960 était « l’espoir par l’effort [13][13]Causerie-veillée pour commémorer l’anniversaire du 18 juin,… ». D’après les directives officielles, des lettres de jeunes résistants fusillés devaient être lues à haute voix ; un officier prenait ensuite la parole pour affirmer que « ce que ces jeunes gens [n’avaient] pu faire, c’[était] à leurs successeurs de le réaliser ». Les soldats du présent étaient tenus pour « responsables » vis-à-vis de tous ces morts du passé, et les régimes de temporalité venaient se mêler. Par une telle filiation, ces références paraissaient être à même d’éveiller auprès des jeunes Français qui n’avaient connu la guerre qu’enfants l’exaltation patriotique de leurs aînés morts pour la France.
? Fraternité d’armes
14Enfin, le haut commandement eut recours aux anciens combattants eux-mêmes pour tenter d’assurer la continuité des générations qu’il voulait promouvoir. De fait, les diverses amicales d’anciens combattants, à partir de 1955-1956, menèrent une action réelle pour matérialiser ce lien entre les générations du feu. Certes, la portée de ces initiatives fut inégale. Les amicales régimentaires issues de la guerre de 1914-1918 avaient vu progressivement les liens qui unissaient leurs membres se desserrer par lassitude, retraites et décès. Celles datant de la seconde guerre mondiale n’avaient jamais eu, sauf exceptions, la vitalité des associations fondées après la victoire de 1918. Malgré ces obstacles, l’armée leur fournit des moyens d’action : documentation, aide pour l’organisation de leurs fêtes, possibilité d’envoyer sans frais postaux des colis ou des journaux en AFN. Réciproquement, des directives furent données aux chefs de corps pour mettre en œuvre une propagande en faveur des amicales auprès des jeunes soldats. Dès lors, une communication s’établit parfois : des associations d’anciens combattants et des amicales régimentaires envoyèrent colis et mandats. Par exemple, les anciens du 7e régiment d’infanterie de la guerre de 1914 accueillirent les recrues et passèrent quelques jours avec elles dans les casernes, en 1956 ; dans la subdivision militaire de Lille, les anciens artilleurs adressèrent, en janvier 1957, une somme de 5 000 francs à chaque membre rappelé en AFN [14][14]Général Miquel, Rapport sur le moral (5e région militaire),…. Certaines associations s’occupèrent également des cas sociaux qui leur étaient signalés par l’armée ou des soldats libérés qui parfois s’adressaient directement à elles.
15En 1959, l’état-major fit même appel à l’un des plus éminents de ces anciens combattants, le maréchal Juin, dans le cadre des cérémonies célébrant l’anniversaire du 8 mai 1945. Il s’agissait alors de révéler aux recrues de métropole le courage dont les combattants africains avaient fait preuve lors du dernier conflit mondial : « Nul mieux que vous, monsieur le Maréchal, n’est qualifié pour faire comprendre aux jeunes soldats de 1959 ce que furent de 1942 à 1945 le dévouement et les sacrifices de nos soldats Nord-Africains », lui écrivit le général Zeller [15][15]Lettre du général Zeller au maréchal Juin, 11 mars 1959, SHAT…. C’est ainsi que le maréchal Juin enregistra en avril 1959 une allocution destinée à parachever les cérémonies du 8 mai dans les casernes et les centres d’instruction. Il y exalta les vertus des volontaires de l’armée d’Afrique et convia la jeune génération, qui allait fouler la terre algérienne, à commémorer ces moments : « Jeunes soldats de la classe 1959, quand vous verrez poindre à l’horizon les côtes ensoleillées de notre chère Algérie, souvenez-vous de ceux qui, quinze ans plus tôt, sont partis de ces rives pour venir nous délivrer [16][16]Cahier « Suggestion pour la conduite et la mise en scène de la…. » Il s’agissait de rappeler la part prise par les « Français de souche nord-africaine » sur tous les théâtres d’opération. Ce thème permettait en outre d’accentuer la propagande anti-FLN : les directives relatives à l’instruction du contingent insistaient sur le fait que les anciens combattants algériens, « imprégnés des idées et des habitudes occidentales [17][17]5e bureau de l’état-major, « L’instruction civique », Fiches… », étaient particulièrement visés par la répression des « rebelles » – nombre d’entre eux avaient été abattus par le FLN, qui retirait à d’autres leur livret militaire de pension et leur interdisait de porter leurs décorations.
16Pour que l’efficacité de ces séances fût totale, les instructions portant sur le déroulement de ces séances étaient très précises : pendant le discours du maréchal Juin, qui devait être écouté « avec le plus grand recueillement », la salle était placée dans l’obscurité ; l’éclairage de la « scène » (une estrade, le plus souvent) ne devait pas être violent ; les sources sonores étaient dissimulées : on reliait un haut-parleur à un magnétophone, derrière l’écran. Cette mise en scène s’approchait d’une séance de magie ; c’est véritablement un moment unique et sacré que les soldats devaient vivre. Faire du jeune un homme et un citoyen, c’était d’abord lui faire prendre conscience de l’histoire dans laquelle il s’inscrivait, non à la manière des leçons des manuels scolaires, mais dans une sorte d’incarnation que les supports techniques, par le son et l’image, secondaient.
17Tous les moyens matériels furent mis à contribution pour exposer et commenter cette fraternité d’armes. Des affiches déployaient leurs slogans en lettres majuscules : « L’armée venue d’Afrique a contribué grandement à la Libération du sol national et à la victoire. » On projeta des films relatant son action. Ceux-ci posaient toutefois des problèmes aux instructeurs chargés de les diffuser, et des responsables des régions militaires firent part de ces scrupules. Certains cadres jugeaient leur mission délicate car les films montraient le rôle, non seulement des Algériens, mais également des ressortissants des anciens protectorats, Maroc et Tunisie : leur récompense avait-elle été leur indépendance ? « Il aurait été bon », indiquait le général Noiret, « que ces films fissent valoir la fraternité d’armes avec les départements d’Algérie seulement ». Par ailleurs, ces documents confondaient, dans leurs commentaires, le peuple allemand et le régime nazi, ce qui paraissait pour le moins déplacé à l’époque de la réconciliation franco-allemande.
18Cette instruction proposait enfin une certaine vision de l’Empire et de l’Algérie, qui devait aider à transmettre des certitudes sur la bataille engagée et sa nécessité, par respect pour les générations antérieures. Les réalisations françaises en Algérie constituaient la pièce maîtresse de cette argumentation. « L’autorité de la France en Algérie est une exigence de l’histoire, de la nature et de la morale », pouvait-on lire sous la plume du ministre Pierre Guillaumat dans un opuscule destiné à l’instruction du contingent [18][18]Pierre Guillaumat, « Développement des forces morales dans….
19Toutes ces recommandations relevaient bien sûr des principes. Elles figuraient dans les fiches détaillées de l’« instruction rationnelle » que l’armée se proposait de mettre en œuvre, mais il n’est pas certain qu’elles aient été respectées toujours et partout, à la ligne et à la lettre. Il est probable en effet que, devant l’accélération des cadences, des instructeurs aient préféré accorder plus de temps à la préparation physique et au maniement des armes qu’à l’éducation civique. Il n’empêche : ces éléments n’ont rien de formules incantatoires. Ils décrivent les directions que les commandements locaux devaient suivre ; ils disent surtout la signification politique que l’état-major investissait dans la formation des jeunes soldats.
? Guerres dans la guerre
20Qu’en était-il pour les appelés lorsque, leur instruction achevée, ils découvraient cette terra incognita ? Quand l’Algérie prenait pour eux forme et chair, se faisait hommes et femmes, images et paysages, certaines références, le plus souvent indirectes, rapportées par les récits de leurs aînés et venues surtout de la dernière guerre, pouvaient interférer dans leur propre expérience : il y avait alors, plus ou moins prégnants selon les individus et les parcours, un étroit entremêlement du présent vécu sur un champ de bataille sans front et du passé guerrier tel qu’il leur avait été transmis.
21Dans une première confrontation d’apparence anodine avec la réalité algérienne, et pourtant susceptible de faire advenir de douloureuses comparaisons, les appelés gardèrent fréquemment un pénible souvenir de leurs trajets effectués depuis Alger ou Oran vers leurs destinations à l’intérieur des terres. Dans les trains de la compagnie de chemins de fer « voie étroite », les soldats étaient serrés comme harengs en caque dans des wagons ridiculement petits. La seule clientèle importante de cette « voie étroite » était d’ordinaire l’animal : moutons, ânes et chevaux. Quelques images, violentes, pouvaient surgir alors dans l’esprit de certains appelés ; ils furent en effet quelques-uns à oser la comparaison avec les trains de la déportation : « On voyageait dans des wagons à bestiaux, exactement comme ceux qui, pendant la guerre, ont embarqué les Juifs vers les camps d’extermination. C’était évidemment bien différent mais, dans l’apparence, c’était ça [19][19]Témoignage de Jean-Pierre Beltoise, in L’Ancien d’Algérie,… » ; « Je me disais en moi-même “non ce n’est pas possible, nous n’allons tout de même pas voyager là-dedans comme des prisonniers que l’on expédiait en Allemagne en 39 à la dernière guerre” et cette image de wagons marqués (hommes 40 chevaux 8) me rappela les récits que mon père me racontait au retour de sa captivité où entassés les uns sur les autres ils furent expédiés au fin fond de l’Allemagne dans d’atroces souffrances et des conditions d’hygiène affreuses [20][20]Jean Brec, Derrière la Grande Bleue, Niort, Chez l’auteur,…. » L’Algérie engendrait ainsi les références à l’autre guerre toute proche.
22Soldats perdus, plongés le plus souvent dans l’ignorance de l’évolution du conflit, les appelés eurent encore à s’interroger sur la réalité qu’ils vivaient : une guerre, ou non ? Parce qu’on masquait son nom derrière toutes sortes de litotes, les jeunes happés par le conflit algérien manquaient de repères et devaient, pour certains, interroger la notion de « guerre » et son histoire. Car les grandes heures, héroïques ou tragiques, des autres conflits qui avaient nourri les récits de leur enfance et de leur adolescence, les accompagnaient bien souvent. Comment s’ancraient, dans la grande fable de la guerre, leurs opérations, leurs batailles, leur vie de soldats à eux ?
23La doctrine officielle du « maintien de l’ordre » et de la « pacification » contribuait à faire naître l’incertitude sur le terme même de « guerre ». « Pacifier mais ne pas s’y fier », le jeu de mots disait bien l’ironie avec laquelle certains appelés regardaient cette situation fausse [21][21]Témoignage de Jean Stablinski in L’Ancien d’Algérie, n° 315,…. D’aucuns réalisaient qu’ils étaient en guerre à peine le pied posé sur le sol algérien : des convois puissamment armés attendaient en effet les jeunes tout juste débarqués pour les conduire dans leurs casernements. D’autres éprouvaient ce sentiment lorsqu’ils voyaient leur premier mort. Faire la guerre et en avoir conscience, c’était aussi ressentir en soi la peur, harcelante. Mais dans l’ambiguïté des qualifications, le poids de l’histoire jouait également sa partie.
24Cette guerre ne semblait pas avoir d’équivalent dans le passé proche ou lointain de la France. Jean Norton Cru a décrit l’emprise de cette « légende toute puissante », celle de la guerre « selon l’histoire, les romans et les journaux, la guerre apprise dès l’enfance, à l’école primaire, la guerre des discours officiels [22][22]Jean Norton Cru, Du témoignage, Paris, Gallimard, 1930, p. 111. ». Et dès lors, le récit des conflits précédents pouvait se faire lourd aux épaules des jeunes appelés. « Les anciens de 14, en particulier, sont sceptiques. Quelle est cette petite “guéguerre” sans tranchées boueuses, sans les centaines de milliers de morts ? Ça ne paraît pas très sérieux [23][23]Témoignage d’un appelé viticulteur, à Xavier Grall, La…. » Les appelés le savaient, les « événements » d’Algérie n’avaient rien de commun avec les batailles de tranchées de la « Grande » guerre, ni avec les chocs frontaux de la seconde [24][24]L’armée perdait rarement plus de 50 hommes par semaine. Émile…. Les conflits d’Afrique relevaient toujours de « la petite guerre » par rapport aux théâtres d’opération européens ou asiatiques. La guerre d’Algérie des soldats de vingt ans n’était qu’un conflit mineur, « une guerre de raccroc en quelque sorte [25][25]Les Années algériennes, émission de Philippe Alfonsi, Bernard… ».
25Mais les réminiscences des autres conflits ne touchaient pas à la seule hiérarchie épique. Elles surgissaient parfois en modèles de conduite. Et dès lors, chez ceux qui les avaient aux lèvres ou à l’esprit, ces rapprochements étaient absolus. Traiter la population algérienne en inférieure revenait à se comporter comme les nazis l’avaient fait à l’égard d’autres peuples. Des soldats redoutaient, de l’intérieur même de leurs rangs, un déploiement de violence tel que la population française l’avait elle-même connu en d’autres temps, comme victime et non comme bourreau. Depuis son poste, non loin de la forêt de l’Afkadou qui était un repère de combattants algériens, la compagnie de Claude P… surveillait le village d’Imardabar, en janvier 1961 : « S’il nous arrivait malheur, pensa à ce moment le soldat, Imardabar deviendrait Oradour [26][26]Journal de Claude P…, 27 janvier 1961, in Martine Lemalet,… ! » Les camps de regroupement et de prisonniers rappelaient à d’autres « le sort de nos prisonniers de 1939-1945 [27][27]Cité dans l’enquête du Groupe d’études et de recherches des… ». Et la comparaison revenait. « C’est éprouvant de faire l’expérience de la haine : je vis au milieu d’une haine réciproque entre Arabes et Français et j’ai l’impression de vivre exactement, mais en sens contraire, ce que nous avons vécu pendant la résistance, en 43, 44 », écrivait Stanislas Hutin dans son journal [28][28]Stanislas Hutin, Journal de bord. Algérie novembre 1955-mars…. Noël Favrelière eut quant à lui, au moment de son rappel pour l’Algérie, le souvenir immédiat des maquisards qu’il avait vus lorsqu’il avait dix ans : « Cette fois, se dit-il, tu seras le boche et tu te battras contre des résis-tants [29][29]Noël Favrelière, Le Déserteur, op. cit., p. 39.. » Le plus pénible pour certains appelés résidait dans cette apparente inversion des rôles : ressembler davantage au soldat allemand qu’au partisan.
26Le récit de la Résistance, que la famille et l’école avaient contribué à diffuser auprès de ces enfants grandis pendant la guerre, pouvait ainsi interférer dans la narration de leurs propres combats. Avec la distance, la dernière guerre mondiale était comme clarifiée dans ses enjeux et dans ses camps bien circonscrits. Le conflit algérien n’avait pas la netteté de ces contours que la mémoire avait tracés. À ce propos, Jean-Marie Domenach écrivit : « En somme, ce fut une chance d’avoir vingt ans sous l’Occupation ; l’ennemi était l’ennemi ; le drapeau et l’idéal flottaient confondus [30][30]Jean-Marie Domenach, « Démoralisation de la jeunesse »,…. » A contrario, pour les soldats en guerre d’Algérie, les marques paraissaient se brouiller, l’idéal n’était pas aussi clair ni l’adversaire aussi identifié. Cette situation singulière participa sans doute aux troubles profonds qui se manifestèrent chez ces appelés et qui firent de ce moment de leur vie une « jeunesse égarée [31][31]D’après l’expression de l’ancien appelé Jean-Louis Nageotte (La… ».
27Le conflit algérien ne pouvait donc être comparé aux grands chocs frontaux, aux vastes engagements entre deux armées propres aux guerres mondiales qu’avaient connues les aînés. Le contingent en Algérie fut confronté le plus souvent, pour sa part, aux accrochages et aux embuscades [32][32]Certes, les formes du combat furent diverses, dans le temps et…. Aussi le « profil psychiatrique » du conflit, étudié par les médecins militaires, fut-il caractérisé par la névrose spécifique à la guérilla. Il se différenciait du syndrome d’épuisement typique des formes de combat intensif (comme durant la première guerre mondiale) ou encore du syndrome névrotique avec somatisation dans les combats d’intensité moyenne (typique de la guerre de 1939-1945). Il se manifestait davantage par des troubles caractériels, aboutissant à une confusion mentale, à des troubles du sommeil voire à des affections d’ordre psychomoteur. Point commun avec les symptômes dominants lors de la Grande guerre, l’anxiété fut l’une des caractéristiques majeures du conflit algérien [33][33]L. Crocq, P. Lefebvre, R. Sauvaget, P. Bernot, A. Savelli,….
? La modification
28Dès lors, pour nombre de ces jeunes, la guerre d’Algérie fut faite de métamorphoses intimes. Le temps du conflit fut souvent celui de la modification de tout l’être, d’autant plus décisive qu’elle intervenait dans la pleine jeunesse. Le plus marquant, et le plus tragique, fut sans doute le risque perpétuel de sombrer dans l’indifférence ou le cynisme, de consentir à la violence aveugle et de revenir traumatisé, perdu. La sensibilité progressivement émoussée pouvait enfanter une distance à la souffrance et à la mort de l’autre, vécue sur le mode d’une terrible accoutumance : « Chaque jour, je découvrais les horreurs de la guerre, je ne les approuvais pas, mais je m’y accoutumais, et cela était presque pire [34][34]Jean-Baptiste Angelini, Soldat d’Algérie (1956/1959). Afin que…. » Des militants chrétiens, notamment, s’inquiétèrent de cet état d’esprit : « Nous pouvons dire que nous assistons à une dégradation progressive de la conscience des jeunes », nota un groupe d’aumôniers jocistes ; « par l’action psychologique qui convertit plus les soldats eux-mêmes que la population musulmane, et en face de laquelle ils sont isolés et démunis ; par une surexcitation nerveuse venant du climat de guerre ; on vit au niveau des instincts et des gestes réflexes ; par un perpétuel sentiment d’angoisse, la peur de tout (souffrances, fatigues, isolement, mort) si bien que les gars se durcissent même en face de la cruauté. Les lettres se vident de leur contenu [35][35]Rencontre des aumôniers jocistes à propos des jeunes en AFN,…. » Pour exemple de cette dernière affirmation, on mentionnera cette lettre adressée à ses parents agriculteurs par un jeune soldat du Causse quercynois, en 1957 : « J’espaire que vous allé bien, que la brebi a mi bas et que la gran maire et gueri. Pour nous, ca va ; on a été dan un village on pri toute les femme, on les a sorti, et puis on a brulé toute la maison. A par ca, ca va [36][36]Lettre citée par le président de la fédération…. » Nul n’était vraiment à l’abri de cette banalisation dramatique.
29L’effroi de constater sa propre insensibilité, son anesthésie affective, a été décrit par les spécialistes de psychiatrie militaire comme l’un des conflits psychiques les plus douloureux [37][37]Claude Barrois, Psychanalyse du guerrier, Paris, Hachette,…. L’indifférence, cette « inhumaine cuirasse » dont avaient parlé certains combattants de la Grande guerre [38][38]L’Argonaute, juin 1918, cité par Stéphane Audoin-Rouzeau, in À…, venait aux appelés d’Algérie avec une irritante inquiétude : « Au contact de la réalité, les sentiments généreux s’estompent, on devient dur avec les autres, dur avec soi-même. J’ai pleuré la mort de mon premier ami, qu’en sera-t-il pour d’autres ? », s’interrogeait un appelé [39][39]Jean Forestier, Une gueule cassée en Algérie, Paris, Saurat,…. Dans ce détachement résidait la logique même du conflit. « Et c’est cette défloraison de l’âme que j’ai pardonnée le moins facilement à la guerre », disait un ancien combattant de « 14-18 » [40][40]Cité par Stéphane Audoin-Rouzeau, in La Guerre des enfants,…. Les appelés du djebel pouvaient vivre eux aussi, dans toute sa violence, cette transformation morale et usaient parfois des mots semblables à ceux qu’avaient employés jadis les « poilus » pour décrire cette « acceptation passive des atteintes à la dignité humaine, qui est une réelle infirmité de l’âme [41][41]Lettre de Jacques P… au cardinal Feltin, 22 juillet 1957,… ». La guerre d’Algérie put donc ébranler les convictions, modifier les représentations initiales tant sur le combat que sur les populations rencontrées, mais aussi transformer l’image de soi.
30Bien des témoins, observateurs de l’époque, redoutèrent d’ailleurs ce que Jean-Marie Domenach appela alors un « ensauvagement de la jeunesse [42][42]Jean-Marie Domenach, « Démoralisation de la jeunesse », article… », quelque chose de l’ordre du dégoût et du flétrissement. Au retour, un processus de mûrissement social, physiologique et moral s’était produit. Partis presque adolescents encore, les jeunes rentraient anciens combattants, sans que ce statut leur fût reconnu. La société dans laquelle ils reprenaient pied avait changé [43][43]Cf. ce qu’écrit Benjamin Stora, in Appelés en guerre d’Algérie,…. Les jeunes hommes qui la découvraient pouvaient se sentir étrangers, voire exclus. La vie avait continué sans eux et leur retour ne constituait pour personne, sinon pour leurs proches, un événement. Ils s’apercevaient souvent aussi de la relative indifférence qui régnait en France par rapport à la guerre d’Algérie, en dehors des grands moments politiques. Un jeune agriculteur de Côte d’Or relevait que « les paysans s’intéressent pas beaucoup (sic) au problème algérien et se montreraient volontiers ironiques à l’égard des soldats d’Algérie [44][44]Enquête du GEROJEP, archives départementales du Val-de-Marne,… ». L’occultation de la parole naquit souvent d’un mur du silence auquel les appelés se heurtèrent à leur retour, bâti par les autres sur le refus de les écouter, de les laisser dire l’inopportun ou l’insupportable. Aucune institution ne tenta de prendre en charge les jeunes démobilisés et de leur apporter un soutien psychologique. Or, la guerre d’Algérie fut pour beaucoup un poids que certains traînent encore, aujourd’hui, comme un fardeau ou comme une croix.
31Une conclusion trop hâtivement globalisante ne saurait cependant être avancée. La diversité des conditions dans lesquelles les soldats vécurent ce conflit et la multiplicité des actions et réactions, par essence singulières, l’empêchent radicalement. Sans doute même, pour certains de ces jeunes hommes, cette guerre n’en fut-elle pas vraiment une, lorsque la peur, la souffrance, le regard porté sur la mort d’autrui leur furent épargnés, dans quelques postes protégés ou dans les bureaux des grandes villes.
32Toutefois, on ne saurait non plus affirmer qu’il n’y eut là que pure addition d’expériences personnelles. Celles-ci se sont structurées, dans les résonances et références communes, en identité collective et générationnelle, progressivement construite par l’événement puis la mémoire de celui-ci. Pour en prendre la mesure, l’historien ne dispose certes que de peu d’instruments : les témoignages d’anciens appelés se sont multipliés, mais demeurent finalement peu nombreux au regard de toutes les voix du silence. Aujourd’hui, il est urgent et nécessaire de mener une enquête orale à large échelle – des historiens ont heureusement commencé à l’entre-prendre [45][45]Cf. Raphaëlle Branche, La Torture et l’armée pendant la guerre… –, pour préserver, mais aussi faire émerger cette mémoire. Une telle étude mérite de prendre résolument place au carrefour d’une histoire institutionnelle – celle de l’armée –, d’une réflexion de nature anthropologique sur les comportements ordinaires modifiés par le choc du conflit, et d’une approche d’ordre plus psychologique, sensible aux affects et aux retombées psychiques propres aux retours de guerre. Ainsi sera-t-on mieux à même de suivre et de décrire, notamment, les sillons que la culture guerrière transmise par les générations antérieures a tracés dans la « malaventure » algérienne des jeunes appelés.
33Génération algérienne ? D’après un proverbe arabe que cite Marc Bloch, « les hommes ressemblent plus à leur temps qu’à leurs pères [46][46]Marc Bloch, Apologie pour l’histoire ou Métier d’historien,… ». Pourtant, la césure avec les aînés n’est jamais que relative et se réfère à la culture antérieure ; elle ne peut donc être définie en soi, mais toujours par la comparaison et la mesure des ressemblances et des écarts. En prenant l’histoire à bras-le-corps, la construction de l’identité générationnelle fait rarement du passé table rase, même si elle se réalise par et dans la différenciation. D’une manière ou d’une autre, les appelés en guerre d’Algérie semblent avoir pris appui sur les références laissées par leurs aînés : à la manière d’une « mémoire volontariste », celle qui « célèbre, érige, décore ou enterre [47][47]Henry Rousso, Le Syndrome de Vichy, 1944-198…, Paris, Le Seuil,… » – et c’est là toute l’importance accordée par l’armée à la commémoration des précédentes guerres dans l’instruction militaire ; ou à la façon d’une « mémoire latente », « implicite [48][48]Idem. », surgie parfois comme par éclairs dans un système de représentations en construction.
34In fine, il apparaît que cette génération, par son histoire et sa mémoire, se différencia plus radicalement de ses cadets que des ses aînés. Ces hommes, jeunes encore et marqués par leur expérience algérienne, ne se reconnurent pas, à leur retour, dans les adolescents du « baby-boom » qui les suivirent, cette « génération épargnée [49][49]Jean-François Sirinelli, Les Baby-boomers. Une génération… » qui naquit et grandit en temps de paix. Guerre et paix : il y eut là assurément une ligne de fracture dissociant deux générations. En Algérie, quelque chose avait été perdu, souvent douloureusement ; ce qui était mort là-bas peut sans doute se dire d’un mot : la jeunesse.
35?
Notes
- [1]
Annie Crépin, La Conscription en débat ou le triple apprentissage de la nation, de la citoyenneté et de la république (1798-1889), Arras, Artois Presses Université, 1998, p. 13 et 229. Cf. notamment Odile Roynette, « Bon pour le service ». L’expérience de la caserne en France à la fin du xix e siècle, Paris, Belin, 2000, et Jean-François Chanet, Enraciner la nation en France xix e-xx e siècles. Armée nouvelle et République conservatrice 1871-1879, dossier d’habilitation à diriger des recherches, octobre 2002 (à paraître).
- [2]
Général Lorillot, chef d’état-major, directives sur la conduite de l’instruction en 1958, 29 novembre 1957, Service historique de l’armée de terre (SHAT) 12T27* (l’astérisque signale qu’une dérogation a été nécessaire à la consultation du document).
- [3]
Idem.
- [4]
Cf. Marie-Catherine et Paul Villatoux, « Le cinquième bureau en Algérie », in Jean-Charles Jauffret et Maurice Vaïsse (dir.), Militaires et guérilla dans la guerre d’Algérie, Bruxelles, Complexe, 2001, p. 399-419.
- [5]
5e bureau, 10e région militaire, 26 avril 1958, SHAT 1H2449/1.
- [6]
Exemple du 7e régiment d’infanterie, Général Miquel, rapport sur le moral (5e région militaire) (Dijon), s. d. [1956], SHAT 6T265/3*.
- [7]
Noël Favrelière, Le Déserteur, Paris, J. C. Lattès/Édition spéciale, 1973, p. 40.
- [8]
Général Morlière, « Éducation morale des recrues au cours des séjours en camp », 23 mai 1957, SHAT 12T27*.
- [9]
Note de service du général Miquel, 30 mars 1956, SHAT 6T965/3*.
- [10]
Lettre manuscrite du général Daillier, reproduite dans le journal militaire Aurès-Nemencha, juillet-août 1958, SHAT 1H1118/2.
- [11]
Anne-Marie Thiesse, La Création des identités nationales Europe xviii e-xx e siècle, Paris, Le Seuil, 1999, p. 19.
- [12]
Lettre du général Daillier, lettre citée.
- [13]
Causerie-veillée pour commémorer l’anniversaire du 18 juin, s. d. [1959], SHAT 27T154/6*.
- [14]
Général Miquel, Rapport sur le moral (5e région militaire), s. d. [1956], SHAT 6T265/3*.
- [15]
Lettre du général Zeller au maréchal Juin, 11 mars 1959, SHAT 27T154/6*.
- [16]
Cahier « Suggestion pour la conduite et la mise en scène de la veillée », s. d. [avril 1959], SHAT 27T154/6*.
- [17]
5e bureau de l’état-major, « L’instruction civique », Fiches pour l’instructeur, avril 1958, SHAT 27T179/3*.
- [18]
Pierre Guillaumat, « Développement des forces morales dans l’Armée par la formation civique et l’information », 3 avril 1959, SHAT 12T70/2*.
- [19]
Témoignage de Jean-Pierre Beltoise, in L’Ancien d’Algérie, n° 355, mars 1997.
- [20]
Jean Brec, Derrière la Grande Bleue, Niort, Chez l’auteur, 1989, p. 13.
- [21]
Témoignage de Jean Stablinski in L’Ancien d’Algérie, n° 315, mars 1993.
- [22]
Jean Norton Cru, Du témoignage, Paris, Gallimard, 1930, p. 111.
- [23]
Témoignage d’un appelé viticulteur, à Xavier Grall, La Génération du djebel, Paris, Éditions du Cerf, 1962, p. 54.
- [24]
L’armée perdait rarement plus de 50 hommes par semaine. Émile Servan-Schreiber écrivit dans Les Échos du 3 août 1960 que la guerre d’Algérie causait moins de morts que la circulation routière (Hartmut Elsenhans, La Guerre d’Algérie 1954-1962. La transition d’une France à une autre. Le passage de la IVe République à la Ve République, Paris, Publisud, 1999, p. 890).
- [25]
Les Années algériennes, émission de Philippe Alfonsi, Bernard Favre, Patrick Pesnot et Benjamin Stora, n° 1, « D’amour et de haine ». Gilles Perrault écrit dans son dernier récit : « Quand on a vu passer sous son nez le train express de la Deuxième Guerre mondiale, refusera-t-on de monter dans le tortillard d’une guerre de second ordre ? » (Gilles Perrault, Go !, Paris, Fayard, 2002, p. 41).
- [26]
Journal de Claude P…, 27 janvier 1961, in Martine Lemalet, Lettres d’Algérie. La Guerre des appelés, la mémoire d’une génération, Paris, J.-C. Lattès, 1992, p. 279.
- [27]
Cité dans l’enquête du Groupe d’études et de recherches des organisations de jeunesse et d’éducation populaire (GEROJEP) [novembre 1959], archives départementales du Val-de-Marne, 518J6.
- [28]
Stanislas Hutin, Journal de bord. Algérie novembre 1955-mars 1956, Toulouse, GRHI, 2002, p. 86. Stanislas Hutin, né en 1930, avait vécu la guerre et l’Occupation comme adolescent et avait donc pu en garder des souvenirs précis.
- [29]
Noël Favrelière, Le Déserteur, op. cit., p. 39.
- [30]
Jean-Marie Domenach, « Démoralisation de la jeunesse », L’Express, n° 301, 29 mars 1957.
- [31]
D’après l’expression de l’ancien appelé Jean-Louis Nageotte (La Jeunesse égarée, Mâcon, chez l’auteur, 1996).
- [32]
Certes, les formes du combat furent diverses, dans le temps et l’espace et selon les spécialisations. Pour les soldats postés aux frontières, la guerre revêtit un aspect plus classique, avec artilleurs et surveillance étroite des barrages, des réseaux électrifiés et des champs de mines.
- [33]
L. Crocq, P. Lefebvre, R. Sauvaget, P. Bernot, A. Savelli, « Archives neuro-psychiatriques de la guerre d’Algérie. Étude de 1 280 dossiers de l’hôpital militaire de Constantine », Médecine et armées, 1986, t. 14, n° 4, p. 309.
- [34]
Jean-Baptiste Angelini, Soldat d’Algérie (1956/1959). Afin que nul n’oublie, Nîmes, C. Lacour, 1997, p. 92.
- [35]
Rencontre des aumôniers jocistes à propos des jeunes en AFN, s. d. [1956 ?], archives du diocèse de Paris, 7K4*.
- [36]
Lettre citée par le président de la fédération interdépartementale de soldats mobilisés en AFN (Villefranche de Rouergue) au cardinal Feltin, 15 septembre 1957, archives du diocèse de Paris, 1D XV 12*.
- [37]
Claude Barrois, Psychanalyse du guerrier, Paris, Hachette, 1993, p. 32 et 209.
- [38]
L’Argonaute, juin 1918, cité par Stéphane Audoin-Rouzeau, in À travers leurs journaux, 14-18. Les combattants des tranchées, Paris, Armand Colin, 1986, p. 55.
- [39]
Jean Forestier, Une gueule cassée en Algérie, Paris, Saurat, 1987, p. 16.
- [40]
Cité par Stéphane Audoin-Rouzeau, in La Guerre des enfants, 1914-1918. Essai d’histoire culturelle, Paris, Armand Colin, 1993, p. 11.
- [41]
Lettre de Jacques P… au cardinal Feltin, 22 juillet 1957, archives du diocèse de Paris, 1D XV 12*.
- [42]
Jean-Marie Domenach, « Démoralisation de la jeunesse », article cité.
- [43]
Cf. ce qu’écrit Benjamin Stora, in Appelés en guerre d’Algérie, Paris, Gallimard, 1997.
- [44]
Enquête du GEROJEP, archives départementales du Val-de-Marne, 518J6.
- [45]
Cf. Raphaëlle Branche, La Torture et l’armée pendant la guerre d’Algérie, 1954-1962, Paris, Gallimard, 2001 ; Claire Mauss-Copeaux, Appelés en Algérie. La parole confisquée, Paris, Hachette, 1998. C’est le travail que mènent Jean-Charles Jauffret et ses étudiants (cf. Jean-Charles Jauffret, Soldats en Algérie 1954/1962. Expériences contrastées des hommes du contingent, Paris, Autrement, 2000).
- [46]
Marc Bloch, Apologie pour l’histoire ou Métier d’historien, Paris, Armand Colin, 1949, p. 9.
- [47]
Henry Rousso, Le Syndrome de Vichy, 1944-198…, Paris, Le Seuil, 1987, [rééd.] 1990, p. 14.
- [48]
Idem.
- [49]
Jean-François Sirinelli, Les Baby-boomers. Une génération 1945-1969, Paris, Fayard, 2003, p. 71.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/01/200
6https://doi.org/10.3917/ving.083.0097
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