Quand Yacef Saâdi apprend que l'ancienne résistante Germaine Tillion, déportée à Ravensbrück, ethnologue, ancien membre du cabinet de Jacques Soustelle, vient d'arriver à Alger dans le cadre d'une commission d'enquête internationale sur le régime concentrationnaire, il décide de la rencontrer. L'idée paraît invraisemblable. Pourtant Germaine Tillion et Yacef Saâdi se verront deux fois, le 1er juillet et le 9 août 1957, au plus fort de la bataille d'Alger. Avec un luxe inouï de précautions, l'ancienne résistante sera conduite secrètement à la Casbah rue Caton, le repaire de Saâdi, où il se cache, bardé de mitraillettes et de grenades, derrière une cloison de carrelage.
Germaine Tillion n'ignore rien des souffrances dont il est le responsable. Mais rien non plus des exactions de l'armée française. Dans la cour de la prison Barberousse, les exécutions des militants FLN s'enchaînent. Elle veut arrêter ça. Et Saâdi a confiance en elle. Il lui fait la plus surprenante des propositions :
« Je m'engage à mettre fin au terrorisme contre les civils si la France accepte d'arrêter les exécutions capitales. »
Porteuse de ce message, Germaine Tillion alerte les plus hautes autorités de l'État. On lui fait croire un temps qu'elle a été entendue. Saâdi continue de faire éclater des bombes, mais pendant quelques mois ne tue plus de civils. La presse s'interroge sur les raisons de cette « étrange accalmie ». Saâdi tiendrait-il parole ? Germaine Tillion en est convaincue. Mais de retour à Alger elle apprend que l'on continue à guillotiner. Au moins aura-t-elle tenté l'impossible.
Quand Saâdi est arrêté le 24 septembre 1957, elle se battra pour le sortir des mains des parachutistes. Elle témoignera en sa faveur lors d'un de ses trois procès — où il sera par trois fois condamné à mort —, puis interviendra pour obtenir qu'il soit gracié. Une étrange amitié est née entre eux, qui n'a jamais cessé depuis. « Mademoiselle Germaine a tout fait pour moi, et je la respecte infiniment », dit Saâdi.
En avril 2008, il était à son chevet une semaine avant sa mort, il était également présent à Paris lors de sa panthéonisation le 27 mai 2015.
En 1966, Saâdi produit le film de Gillo Pontecorvo, La bataille d'Alger, dans lequel il joue son propre rôle. Ce film fut longtemps interdit en France, où il n'est sorti en salles qu'en 2004.
SOURCE : https://fr.wikipedia.org/wiki/Yacef_Sa%C3%A2di
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