Zhor Zerari, une des plus actives Moudjahidates est la nièce du commandant Azzedine, son père Zhor Zerari a « disparu » après avoir été torturé par les parachutistes.
Arrêtée le 25 août 1957, incarcérée dans plusieurs prisons en France elle y a purgé une condamnation à perpétuité.
Décédée le 23 août 2013 Zhor Zerari a été la première femme journaliste en Algérie.
En mars 1962 sortant de la prison de Rennes, elle écrira ces quelques vers :
« Qu’importe le retour
Si mon père
N’est pas sur les quais
De la gare. »
Nous avons été renvoyées au réchaud juste après l’indépendance
Comment avez-vous vécu cette période qui a vu un foisonnement nationaliste, étiez-vous informée de ce qui se passait au sein du parti dans lequel militait votre père ? Aviez-vous connaissance des crises politiques qui ont précédé le 1ᵉʳ novembre 1954 ?
Je vivais un peu cela à travers mon cousin Abdelwahab. Je ne cessais de le tarabuster pour qu’il m’obtienne une carte du PPA-MTLD pour, me disais-je, agir en militante. Faire quelque chose. Un jour, alors que mon père avait accompagné toute la famille pour voir le très célèbre film, on disait « hindou », Mangala fille des Indes, et que je n’avais pas envie de voir, pour garder le magasin ouvert, Abdelwahab est passé, je lui ai demandé ce qu’il en était de ma carte. « Demande à ton père, moi je ne peux pas », m’avait-il répondu. Ma déception était profonde. Je ne pouvais d’évidence pas demander à mon père de m’inscrire au PPA-MTLD.
Dans les discussions familiales ou amicales parliez-vous de l’Algérie, de l’Istiqlal ?
Bien entendu. Nous parlions de l’istiqlal. Ce terme était à l’époque intimement lié au nom de Messali Hadj. Je crois bien qu’il n’y avait pas une maison à Alger, à Annaba, où je suis entrée et où je n’ai pas vu le portrait de Messali. Il était l’istiqlal.
La peur n’habitait pas encore les maisons…
Pas du tout. Quand on milite on n’a pas peur. Quand on est prêt à lutter, on n’a pas peur. On m’a souvent posé la question de savoir si, lorsque je transportais des armes et des explosifs ou lorsque j’allais les déposer, j’éprouvais une sensation de peur, lorsque je dis non, on me croit rarement et pourtant… On me croit inconsciente. Pas du tout, je savais le danger et je le mesurais mais la rage, la volonté de vaincre étaient plus fortes que tout autre sentiment.
Vous étiez dans le réseau de Belcourt ?
Oui à Belcourt, j’ai commencé dans le transport du courrier, d’armes, de munitions et d’explosifs. Je rencontrais Abderahmane Chaïd devant le Musée des beaux-arts, en face du jardin d’Essais, non loin de la rue Damourah, je recevais mes ordres.
Pour l’anecdote, les gamins du boulevard Cervantès non loin, croyant au début que c’était des rendez-vous entre amoureux, nous lançaient des cailloux.
Un jour, Abderahmane s’est lancé à leurs trousses, on ne les a plus revus. J’assurais donc le transport. J’allais rue des Mimosas, du côté du chemin des Crêtes, en face de la maison de Didouche Mourad. Il y avait là une petite boutique, un coiffeur me semble-t-il. Tout se passait dans l’arrière-boutique. Je recevais la cargaison et je faisais à pied le chemin inverse. Devant le cimetière chrétien, il y avait un barrage de gardes mobiles, l’air de rien, malgré le poids de ma charge, je passais d’un pas alerte pour n’éveiller aucun soupçon. Puis je me dirigeais vers Dar El Babour, avant de me perdre dans le dédale des venelles de Belcourt qui, par endroits, ressemble fort à La Casbah.
lundi 26 octobre 2020, par ,
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