Les barbares portent parfois l’uniforme. La France, hébétée, a réagi sans attendre. Tout comme le premier d’entre eux, Emmanuel Macron.
Dans les régimes totalitaires, la police fait ce qu’elle veut. Dans les régimes totalitaires, la force publique entre chez les particuliers sans mandat, truque les procès-verbaux, tabasse comme bon lui semble le citoyen lambda, l’innocent comme le suspect. Dans les régimes totalitaires, les flics inventent des délits imaginaires, jettent en prison les opposants mais aussi les passants en fonction de leur humeur du moment. Un café mal digéré ? Hop, une rafle ! Une épouse infidèle ? Vlan, une perquisition chez le vulgum pecus. Histoire de se détendre. De rappeler qui est le maître. Dans les régimes totalitaires, qu’il soit nazi, stalinien, junte militaire, caudillisme sournois, le citoyen est un pion, une petite marchandise sans importance qu’on peut mettre au cachot à volonté, sans la moindre protection juridique. Dans les régimes totalitaires, on envoie au goulag pour un mauvais regard.
Dans les régimes totalitaires… Bien sûr, la France est loin d’être dans cette situation tragique. Et pourtant, il y a comme un sale parfum dans l’air de notre beau pays. Je fus un de ceux qui défendait âprement notre police républicaine contre toutes les manipulations, les propagandes tentant de l’éloigner de sa fonction originelle, celle de protéger les plus faibles d’entre nous contre la violence, l’arbitraire, la loi du plus fort, contre les caïdats dans les zones en difficultés.
L’agression inouïe de Michel Zecler par un petit gang de « barbares » en uniforme a eu effet de blast qui n’est pas près de s’éteindre. Que nous dit cette séquence qu’on peut considérer comme historique ? Que les valeurs de la République ne sont pas inscrites pour l’éternité. Qu’à tout moment, des forces fascisantes peuvent profiter de la crise que nous traversons, celle de la pandémie, mais aussi politique et sociale, pour ressurgir et réveiller les fantômes qu’on croyait endormis. Les risques d’un déchainement des forces obscures, que nous avons connu sous l’Occupation, ou durant la guerre d’Algérie, ne sont plus de l’ordre de l’impossible. C’est ce que nous révèle l’affaire Zecler.
Elle n’est pas anecdotique. Elle est un électrochoc, un signal d’alarme, en premier lieu pour le pouvoir en place qui ne doit plus jouer au plus malin avec notre sécurité. Il a une responsabilité politique évidente dans ce climat délétère, dans lequel des flics racistes se croient revenus aux temps anciens. Il doit donc agir en urgence, tenter de retrouver une confiance perdue avec les Français. En créant une structure totalement indépendante chargée de contrôler l’activité de nos forces de l’ordre.
Faut-il révoquer le préfet de police de Paris, dont la tendance à jouer les cow-boys est attestée à chaque manifestation publique ? Faut-il sanctionner une part de la hiérarchie policière, prise au piège de l’obsession sécuritaire, qui a sans doute lâché la bride sur les pratiques pas toujours « appropriées » de sa base ? Faut-il défendre cette commission de débat autour du si lourdaud article 24 du projet de loi, lancée comme une bouteille à la mer par un Premier ministre aux abois ?
La réponse est évidente : il faut arrêter de tourner autour du pot. Lancer un signal clair et net, se débarrasser au plus vite de tout un pan de la loi « sécurité globale », pour que nos gardiens de la paix républicaine soient les premiers remparts contre les dérives totalitaires qui pourraient naitre sur notre territoire. Dans les régimes totalitaires, les manifestations sont interdites. Dans les régimes totalitaires, les chars sont envoyés face à des hommes et des femmes désarmées, des citoyens aux mains nues. Comme celles de Michel Zecler qui se rendait juste à son travail. Dans les régimes totalitaires, il serait sans doute dans un camp de rééducation. Dans les régimes totalitaires, il n’y a pas de caméras pour le peuple…
Alors, pour que jamais nous ne vivions dans ces systèmes oppressifs, armez-vous d’images. Top, filmez !
https://www.nouvelobs.com/edito/20201128.OBS36720/respecter-sa-police-oui-encore-faut-il-qu-elle-soit-respectable.html
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