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Paul Rousseau était policier lors de la répression sanglante du 17 octobre 1961 à Paris, contre des manifestants maghrébins.TÉMOIGNAGE : « Je les voyais jeter des corps à la Seine »
Paul Rousseau était policier lors de la répression sanglante du 17 octobre 1961 à Paris, contre des manifestants maghrébins.
Paul Rousseau, gardien de la paix, attend avec ses collègues dans un car stationné près du pont de Clichy, côté Paris. Vers 17 h, il voit arriver des manifestants maghrébins de l’autre côté du pont. « Ils descendaient tranquillement des bus, les mains vides. » Ils viennent protester contre le couvre-feu imposé aux Algériens.
Subitement, la violence des policiers se déchaîne sur les manifestants. « C’était un méli-mélo. J’entendais des coups de feu. Par la vitre baissée du car, je voyais les policiers jeter des corps à la Seine par-dessus la rambarde du pont. Des manifestants rebroussaient chemin et s’enfuyaient. »Environ 200 morts
Dans son car de police, la tension monte. « La radio annonçait que des policiers avaient été tués. Les officiers nous disaient d’agir « en notre âme et conscience », que c’était de la légitime défense. » Certains de ses collègues s’excitent : « Pourquoi on ne nous laisse pas sortir ? » Mais ils n’auront pas à intervenir.
Les historiens, tant français qu’algériens, s’accordent pour dire qu’environ 200 manifestants ont été tués cette nuit-là dans Paris. On repêchera des corps jusqu’à Rouen. « Pas un policier n’a été tué ni blessé », souligne l’ancien gardien de la paix.
Menacé par des collègues qui l’accusent de « soutenir les bougnoules », Paul Rousseau se tait quelques jours. Mais des syndicalistes commencent à parler, des articles paraissent. Paul Rousseau, en tant que délégué du Syndicat général de la police du Xe arrondissement, adresse alors trois articles aux journaux. Il dénonce à la fois les attentats du FLN contre les policiers (une trentaine de morts en 1961) et les dérapages de la police. Pour ces articles, il est suspendu trois semaines et muté disciplinairement.
Paul Rousseau, âgé aujourd’hui de 78 ans, en retraite à Concarneau, ne s’est jamais remis de ce qu’il a vu le 17 octobre 1961. Pendant longtemps, il n’a pas voulu en parler. Aujourd’hui encore, il refuse de prononcer le nom du préfet de police de l’époque, Maurice Papon. Il a toutefois accepté de participer à une cérémonie commémorative sur le pont de Clichy, lundi prochain, pour le 50e anniversaire de la répression sanglante. Il y recevra la médaille d’or de la Ville de Clichy-la Garenne. « Je veux offrir cette médaille à ma jeune filleule. »
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