Si j'étais parti en guerre
Je n'aurais pas de fleurs entre les dents
J'aurais un cimetière et du marbre blanc
Si j'étais parti en guerre au printemps
Si j'étais parti en guerre
Je suivrais déjà mon enterrement
J'aurais déjà mon nom sur le marbre blanc
On aime pas voir mourir les enfants
Mais les moribonds n'ont pas d'âge
Car on croit encore aux guerr's à vingt ans
Car on croit encore aux guerres
On a volé le calvaire aux enfants
Les Dieux sont enterrés sous le marbre blanc
Si j'étais parti en guerre à vingt ans
Si j'étais parti en guerre
J'aurais perdu ma jeunesse et mon temps
Les fleurs ne vivent plus sous le marbre blanc
Car l'amour leur fait la guerre au printemps
Car l'amour leur fait la guerre
Les fleurs de lys qu'on épouse à vingt ans
Se fan'nt au coin du feu près du marbre blanc
Je ne sais pas pourquoi les enterr'ments
Me font penser aux mariages
Car il y a plusieurs manièr's à vingt ans
De perdre et gagner la guerre
Des morts vivants j'en connais tant et tant
Qui éteignent leur coeur sous un voile blanc
Mais je n'ai pas fait la guerre à vingt ans
Non je n'ai pas fait la guerre
J'ai tenu tête à mes rêves d'enfants
Je vais cueillir des fleurs sur le marbre blanc
Au coeur des grands cimetières du temps
Remplis de morts étrangères
De temps en temps parmi le marbre blanc
Je cherche mes vingt ans
Je cherche mes vingt ans
Je cherche mes vingt ans
Au Chili comme à Prague
Toujours la même vague
Toujours les mêmes murs
Bouchant le même azur
Au nom des noms en Isme
On torture et l'on tue
Dans un même lyrisme
Auquel hélas on s'habitue
Au Chili comme à Prague
Toujours le même dague
Toujours la même mort
Et les mêmes remords
Et toujours la jeunesse
En tête du troupeau
Et le même vieillesse
Pour hériter de son drapeau
Toujours les mêmes larmes
Après les mêmes armes
A Prague comme au Chili
Toujours la même nuit
Et toujours la Harangue
Des prophètes sacrés
Dont on coupa la langue
Et qu'on réhabilite après
Et qu'on réhabilite après
Au fond des mêmes tombes
Des mêmes hécatombes
Et les mêmes Jésus
Qui meurent inaperçus
Sur le même calvaire
Avec la même foi
Et qu'on met sous la terre
Dont ils renaissent chaque fois
Toujours les mêmes maîtres
Et les mêmes sous-maîtres
La même hiérarchie
Pour le même gâchis
Toujours l'unique sceptre
Aux mains d'un seul tyran
Et les marches funèbres
Après les marches en avant
Toujours les mêmes gloires
Et les mêmes victoires
Toujours la même paix
Succédant à l'épée
Les mêmes après guerre
Où l'on croit à nouveau
Que les hommes sont frères
En dehors du froid du tombeau
Puis après les charognes
De nouveau les ivrognes
Balancent entre deux rots
Dans les mêmes bistrots
Les mêmes conneries
Avec le même aplomb
Pour éblouir les filles
Qui ne pensent qu'à leur pognon
Au Chili comme à Prague
Toujours la même vague
Toujours la même nuit
A Prague, comme au Chili.
Au pied du mur
On s’y retrouve un jour
Pour un pays ou un amour
Peu importe la blessure
Au pied du mur
Assourdit de silence
On attend la sentence
Seul et sans armure
En criant ses idéaux
Les yeux sous un bandeau
Pour quelques écritures
Au pied du mur
Dictées par la haine
Dictées par les chaînes
Celles qui nous emmurent
Au pied de ce mur
Au pied du mur
Pour quelques prières
Pour chercher la lumière
Faut il parler au mur
Au pied du mur
On n’isole pas la peur
Aux parpaing de l’horreur
Cimenté de dictature
Au pied du mur
On y fonce droit dedans
Marionnettes d’occident
Transformées en lémures
Au pied du mur
Une mère aux yeux vidés
Ne pourra oublier
Chaque coup chaque morsure
Au pied de ce mur
Au pied du mur
Sans aucune manière
Sans retour en arrière
Pas de juste mesure
Au pied du mur
Quand on cloisonne nos terres
Et qu’on brûle nos bannières
Tous les rêves se fissurent
Au pied du mur
On créer des martyrs
Une liberté à cueillir
Même si on la murmure
Au pied du mur
Il lézarde les cœurs
C’est pour ça qu’aucune fleur
Ne poussera ça c’est sur
Au pied de ce mur
Pour qui, comment quand et pourquoi ?
Contre qui ? Comment ? Contre quoi ?
C’en est assez de vos violences.
D’où venez-vous ?
Où allez-vous ?
Qui êtes-vous ?
Qui priez-vous ?
Je vous prie de faire silence.
Pour qui, comment, quand et pourquoi ?
S’il faut absolument qu’on soit
Contre quelqu’un ou quelque chose,
Je suis pour le soleil couchant
En haut des collines désertes.
Je suis pour les forêts profondes,
Car un enfant qui pleure,
Qu’il soit de n’importe où,
Est un enfant qui pleure,
Car un enfant qui meurt
Au bout de vos fusils
Est un enfant qui meurt.
Que c’est abominable d’avoir à choisir
Entre deux innocences !
Que c’est abominable d’avoir pour ennemis
Les rires de l’enfance !
Pour qui, comment, quand et combien ?
Contre qui ? Comment et combien ?
À en perdre le goût de vivre,
Le goût de l’eau, le goût du pain
Et celui du Perlimpinpin
Dans le square des Batignolles !
Mais pour rien, mais pour presque rien,
Pour être avec vous et c’est bien !
Et pour une rose entr’ouverte,
Et pour une respiration,
Et pour un souffle d’abandon,
Et pour ce jardin qui frissonne !
Rien avoir, mais passionnément,
Ne rien se dire éperdument,
Mais tout donner avec ivresse
Et riche de dépossession,
N’avoir que sa vérité,
Posséder toutes les richesses,
Ne pas parler de poésie,
Ne pas parler de poésie
En écrasant les fleurs sauvages
Et faire jouer la transparence
Au fond d’une cour au mur gris
Où l’aube n’a jamais sa chance.
Contre qui, comment, contre quoi ?
Pour qui, comment, quand et pourquoi ?
Pour retrouver le goût de vivre,
Le goût de l’eau, le goût du pain
Et celui du Perlimpinpin
Dans le square des Batignolles.
Contre personne et contre rien,
Contre personne et contre rien,
Mais pour toutes les fleurs ouvertes,
Mais pour une respiration,
Mais pour un souffle d’abandon
Et pour ce jardin qui frissonne !
Et vivre passionnément,
Et ne se battre seulement
Qu’avec les feux de la tendresse
Et, riche de dépossession,
N’avoir que sa vérité,
Posséder toutes les richesses,
Ne plus parler de poésie,
Ne plus parler de poésie
Mais laisser vivre les fleurs sauvages
Et faire jouer la transparence
Au fond d’une cour aux murs gris
Où l’aube aurait enfin sa chance,
Vivre,
Vivre
Avec tendresse,
Vivre
Et donner
Avec ivresse
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