e 24 et le 28août 1955, le gouvernement d’Edgar Faure procède, dans lecadre de la politique d’augmentation des effectifs militaires destinés au « maintien de l’ordre » au Maroc et en Algérie, au rappel sous les drapeaux de soldats du contingent récemment libérés. Aux mois de septembre et octobre, plusieurs mil liers de ces jeunes rappelés se livrent à des actes de protestation, notamment à l’occasion de leur départ pour l’Afrique du Nord.
2Ces événements rencontreront peu d’écho, sauf dans la presse communiste, le PCF entendant en effet relayer la colère des rappelés et de leurs familles contre les « décrets de mobilisation ». Seuls les incidents impliquant des rappelés de l’armée de l’Air à la gare de Lyon le 11 septembre 1955 et du 406e Régiment d’artillerie antiaérienne (RAA) à la caserne Richepanse de Rouen les 6 et 7 octobre 1955 seront réellement médiatisés. Ils s’inscrivent pourtant dans un mouvement d’ampleur qui est l’objet, au côté de la vague de protestation du contingent provoquée par le second rappel d’avril 1956, de plusieurs études historiques qui en analysent les principales caractéristiques [1](1)J.-Ch. JAUFFRET, Soldats en Algérie (1954-1962). Expériences…. Le mouvement des rappelés qui se développe en mai-juin 1956 est a posteriori perçu comme plus emblématique que le mouvement de 1955 de la protestation des jeunes du contingent et, à ce titre, plus souvent cité en exemple de cette opposition des débuts de la guerre d’Algérie. Pourtant le rappel de 1955 est la première décision politique significative de l’utilisation du contingent face aux « troubles » en Afrique du Nord et le mouvement de protestation qu’il suscite inquiète le gouvernement et les autorités militaires qui constatent qu’une partie des rappelés n’est pas convaincue de l’utilité, voire de la légitimité, de la mission qu’ils sont amenés à accomplir.
3Bien que cette indiscipline généralisée constitue un des développements important de la guerre d’Algérie sur le sol « métropolitain », la forme et le contenu du mouvement des rappelés de 1955 sont encore mal connus. A travers son étude, nous pensons qu’il est possible de proposer une lecture du sens de la révolte des rappelés.
4La difficulté principale pour connaître ces événements réside dans le fait qu’il s’agit d’une multitude d’actions qui ne sont pas préparées et annoncées à l’avance, n’obéissent à aucun mot d’ordre préalablement établi et surtout n’expriment pas clairement de revendications. Il ne reste donc que les moments d’action des rappelés pour comprendre leur protestation. Ce sont essentiellement les sources militaires [2](2)Notamment les dossiers du cabinet du ministre de la Défense… qui permettent d’explorer ce mouvement. Les institutions civiles, police [3](3)Les archives de la préfecture de Police de Paris conservent des… et justice [4](4)Nous utilisons des dossiers du ministère de la Justice déposés…, s’intéressent surtout à l’implication de la population et de militants dans les actes de protestation, attitude assez exceptionnelle pendant le mouvement de 1955.
Initiatives et discours institutionnels
5Dès le 24 novembre 1954, le directeur général de la Sûreté nationale évoque la difficulté que représente l’envoi d’effectifs supplémentaires, réclamés par le gouverneur général de l’Algérie :
Cela pose un grave problème si de nouvelles unités partent, au cas où des troubles généralisés seraient provoqués en métropole [...]. Il ne faut pas songer à faire sortir de métropole une seule CRS, un seul escadron de gendarmerie. [...] Je m’oppose à tout nouveau départ [5](5)Archives nationales, F 1a 4812, Ministère de l’Intérieur,….
7Il s’inquiète des diverses sources potentielles d’agitation en métropole – PCF, mouvement Poujade, cheminots dont les revendications de la grève d’août 1953 n’ont pas été satisfaites, activités des nationalistes algériens – qui plaident en faveur des besoins de la métropole en forces de maintien de l’ordre. Il fait donc au gouvernement une série de propositions parmi lesquelles figurent « le rappel des disponibles d’Algérie », « le maintien des libérables » et « le rappel d’une fraction des disponibles de la dernière classe libérée en métropole ». Il s’agit là précisément des trois mesures que prend le gouvernement quelques mois plus tard.
8Le 24 août 1955, un décret promulgue le rappel des disponibles [6](6)Le terme de « disponibles » fait référence à la situation… de la quatrième fraction de la classe de mobilisation 1952 et de la première fraction de la classe de mobilisation 1953 [7](7)Décret du 24 août 1955 portant rappel des disponibles des…. Un peu plus de 70 000 hommes sont touchés : 57 000 de l’armée de Terre, 12 000 de l’armée de l’Air et 2 650 de la Marine [8](8)AN, C 15062, Assemblée nationale, Procès-verbaux des séances de…. Le 28 août, un second décret complète ce dispositif [9](9)Décret du 28 août 1955 tendant au maintien sous les drapeaux…. Il prévoit le maintien sous les drapeaux du premier contingent 1954 (1954/1), incorporé depuis le 1er mai 1954, à l’expiration du service actif de ce contingent qui devait normalement intervenir le 1er novembre 1955, ainsi qu’un autre rappel, celui des militaires de la deuxième fraction de la classe de mobilisation 1953, ayant fait l’objet de mesures de bienveillance pour « cas sociaux » et libérés par anticipation [10](10)Ils suivaient le sort du contingent 1954/1 et devaient…. Ces deux mesures concernent un peu plus de 100 000 hommes.
9C’est à l’institution militaire que revient la charge d’organiser le rappel sous les drapeaux. L’état-major de l’armée de Terre se met d’emblée dans la position de devoir appliquer une mesure de mobilisation qu’il n’a pas souhaitée. Le 23 août 1955, lors d’une réunion de différents responsables militaires « au sujet des possibilités d’utilisation des disponibles du dernier contingent libéré rappelé sous les drapeaux », le major général de l’armée de Terre qui préside la réunion souligne que l’état-major « aurait [...] préféré se borner à maintenir sous les drapeaux le demi-contingent qui doit être libéré en octobre » et que « c’est le gouvernement qui a imposé la solution du rappel » [11](11)SHAT, 19T105/2, Réunion de l’état-major de l’armée de Terre au…. Les autorités militaires s’interrogent sur le nombre de rappelés effectivement à leur disposition, elles estiment en effet que 25 à 70 % d’entre eux sont susceptibles d’être exemptés [12](12)Ibid., et craignent de ne pas bénéficier du temps et des moyens nécessaires à leur accueil et leur encadrement, ainsi qu’à la formation d’unités et à leur envoi en Afrique du Nord, la durée du rappel étant fixée à quatre mois [13](13)AN, C15062, Procès-verbal de la séance de la commission de la….
10Si une partie des rappelés prend le chemin du Maroc et de l’Algérie tous n’ont cependant pas subi ce sort. Pour les rappelés de l’armée de Terre, un recensement fait état de 30 345 rappelés envoyés en Afrique du Nord – 16 000 en Algérie, 11 483 au Maroc et 2 862 en Tunisie – sur un effectif de 51 500 hommes effectivement à la disposition de l’armée de Terre après les mesures d’exemption du rappel et de « renvoi immédiat » dans leur foyer de différentes catégories de disponibles [14](14)SHAT, 1H1374/2, Situation à la date du 1er décembre 1955 des…. Nous pouvons penser que 13 500 d’entre eux étaient automatiquement destinés à l’Afrique du Nord où ils avaient déjà effectué leur service actif [15](15)SHAT, 2R100/1, Libération du contingent 1953/2,10 février 1955., et donc que 16 845 rappelés y ont été envoyés au sein d’unités de marche constituées à cette fin. Nous pouvons distinguer trois catégories de disponibles : ceux qui, ayant effectué leur service actif en Afrique du Nord, y ont été renvoyés individuellement, ceux affectés en Afrique du Nord au sein d’unités de renfort et ceux qui, rappelés en métropole ou en Allemagne, y sont restés pendant toute la durée de leur rappel.
11Une recherche approfondie des troubles survenus en France métropolitaine à l’occasion du rappel sous les drapeaux de 1955 nous a permis de recenser qua-rante-sept actes de protestation des soldats du contingent 1953/2. Trente-six d’entre eux impliquent des rappelés de l’armée de Terre, cinq des rappelés de l’armée de l’Air et six des rappelés de la Marine. Onze gares [16](16)Gares de l’Est, Lyon et Montparnasse à Paris, Valence, Bourges,…, onze casernes [17](17)Casernes de Rouen, Perpignan, Dupleix à Paris, Rueil-Malmaison,…, trois forts [18](18)Forts de Nogent-sur-Marne, Provins, Vincennes., quatre camps militaires [19](19)La Courtine, Souge, Frileuse, Ruchard., trois bases aériennes [20](20)Reims, Saint-Dizier, Chambéry., deux bases aéronavales [21](21)Lann-Bihoué et Lanveoc-Poulmic. et deux ports [22](22)Toulon et Marseille. sont touchés. Nous présenterons ici les caractéristiques principales de ce mouvement en nous appuyant sur quelques exemples qui nous semblent significatifs et représentatifs des différentes formes de protestation. Nous distinguons ainsi trois catégories d’actes d’indiscipline en fonction des moyens utilisés par les rappelés : les manifestations, lorsqu’ils s’expriment par la seule parole, les désobéissances, lorsqu’il y a refus d’accomplir les ordres donnés, et les incidents, lorsque des voies de fait sont commises contre l’encadrement ou le matériel.
Cris et chants séditieux
12Tout au long de la période, des soldats expriment leur mécontentement en criant des slogans ou en chantant. C’est par cette forme de protestation qu’est signé « l’acte de naissance » du mouvement. L’Humanité rapporte que, le 1er septembre 1955,2 000 rappelés rassemblés à la gare de l’Est, en attente de leur départ pour l’Allemagne, manifestent de 16 heures jusqu’au départ des trains à 23 heures 45. Retentissent alors les cris de « La quille ! La quille ! » et « On ne veut pas partir en Algérie ! » [23](23)« 2 000 “rappelés” manifestent à la gare de l’Est »,…. Si la réalité de cette manifestation et a fortiori l’effectif des protestataires avancé sont à considérer avec prudence car on n’en trouve mention dans aucune autre des sources consultées, nous pouvons constater que, quelques jours seulement après le rappel, les caractéristiques du mouvement qui va se développer dans les semaines qui suivent sont décrites par L’Humanité. En effet, les cris de « La quille ! », « Nous ne voulons pas partir ! », « Nous ne partirons pas ! », résonnent durant les mois de septembre et octobre dans les casernes, les gares, sur les champs de manœuvre, lors du transport de troupes en train ou en camion.
13S’il faut bien sûr considérer avec précaution ces manifestations dont on ne trouve la trace que dans L’Humanité, l’usage de « cris séditieux » est régulièrement signalé dans les sources militaires, ce qui atteste que des rappelés se sont bien distingués bruyamment, notamment lors de leur départ pour l’Afrique du Nord. Les autorités militaires restent cependant discrètes sur le contenu de ces « cris séditieux » qu’elles attribuent aux rappelés. Le terme le plus fréquemment employé par les rappelés qui manifestentestsansdouteceluide « Laquille ! ». Cette expression nefaitpasàelle seule du soldat qui l’emploie un protestataire, cependant son utilisation répétée tout au long des mois de septembre et octobre et le fait qu’elle intervienne dans un contexte de désordres militaires permettent de penser qu’elle rejoint ici les « cris séditieux » et relève de ce que Jean-Charles Jauffret nomme « la quille protestation », différente de « la quille résignation » beaucoup plus caractéristique du contingent envoyé en Algérie [24](24)J.-Ch. JAUFFRET, Soldats en Algérie..., op. cit., p. 227-233.. Lorsque des rappelés poussent ce cri dès leur arrivée dans les casernes, lors de manifestations au moment de départs, notamment pour l’Afrique du Nord, nous pouvons penser qu’ils n’expriment pas seulement le traditionnel mécontentement résigné provoqué par l’appel sous les drapeaux et le service militaire. La quille des manifestations des rappelés apparaît comme l’expression du sentiment d’avoir déjà fait le temps dû à la nation lors du service actif et l’exigence d’une « libération immédiate ».
14Le 13 octobre à Toulon et à Marseille, lors de leur transport en camions, des rappelés du 405e RAA entonnent L’Internationale d’après l’état-major de l’armée de Terre [25](25)SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents… quand l’article de L’Humanité [26](26)« Manifestations à Marseille et Toulon à l’embarquement de 3… fait état du chant de La Marseillaise. Nous ne savons pas lequel de ces deux hymnes est effectivement repris par les rappelés du 405e RAA. L’Humanité peut leur attribuer La Marseillaise pour mettre en avant, vis-à-vis de l’opinion, la dimension patriotique de cette manifestation, et plus généralement du mouvement des rappelés, et ainsi gommer une expression par trop antimilitariste, jugée beaucoup moins consensuelle. Le ministère de la Défense nationale, quant à lui, peut leur attribuer L’Internationale pour insister, « en interne », sur la menace communiste dans l’armée et sur la dimension « antinationale » de la protestation. Ce « renversement idéologique » est révélateur des enjeux politiques que suscite le mouvement chez les deux forces – le Parti communiste et l’institution militaire – qui y sont les plus attentives.
Désobéissances et absences irrégulières
15Nous qualifions de désobéissances l’ensemble des moments où la protestation des rappelés s’exprime par un refus ou une tentative de refus d’obéir aux ordres, ou par l’exécution tardive ou indisciplinée des tâches à accomplir.
16On relève notamment, le 20 septembre 1955, un important mouvement de désobéissance sur la base aéronavale de Lann-Bihoué à Lorient où 100 marins refusent « d’assurer le quart de nuit » [27](27)SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents…. Cet acte est tenu par le chef du service de sécurité de la Défense nationale et des forces armées comme l’un des trois « cas d’indiscipline » les plus graves, avec ceux de la gare de Lyon et de Rouen, impliquant des rappelés en 1955 [28](28)SHAT, 2T129/6, Réunion du comité interministériel d’action….
17Des mouvements de troupes pour l’Afrique du Nord sont perturbés par des refus d’embarquer. C’est le cas du départ pour le Maroc du 13e Régiment d’artillerie (RA) de Bourges. Paul Lutigner, un ancien rappelé de ce régiment, témoigne qu’environ 300 rappelés, encadrés par les CRS, ont refusé [29](29)Ce témoin ne se souvient plus de la date exacte de cet…, en gare de Bourges, de monter dans le train pendant cinq ou six heures, jusqu’à ce que les CRS parviennent à les embarquer en les poussant [30](30)Entretien avec Paul Lutigner.. En revanche, Paul Lutigner dément [31](31)Idem. les protestations attribuées par L’Humanité à des rappelés du 13e RA à l’approche de ce même départ : un refus, le 10 octobre 1955, de se lever avant 8 heures en réaction à l’annonce de leur départ pour l’Afrique du Nord, une manifestation dans les rues de Bourges le 11 octobre, et un acte de désobéissance le 12 octobre où ils quittent la caserne pour rejoindre leur famille [32](32)« Les départs de troupes pour l’Afrique du Nord s’accélèrent,….
18Les absences illégales s’observent à plusieurs reprises tout au long de la période. Dans la nuit du 30 septembre au 1er octobre 1955, au camp de Souge près de Bordeaux, 163 rappelés du 1er bataillon du 403e RAA sortent du camp sans autorisation pour rendre visite à leur famille avant leur départ pour l’Afrique du Nord et manquent à l’appel [33](33)SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents…. Le 3 octobre, à la base aérienne de Chambéry, une centaine de rappelés reviennent de permission avec un ou deux jours de retard [34](34)Ibid.. Le 12 octobre à Hyères, une trentaine de rappelés du 405e RAA sont signalés en « absence irrégulière » [35](35)Ibid.. Ces soldats qui quittent sans autorisation leur caserne, pour se rendre en ville ou pour embrasser leur famille avant un départ, puis reviennent quelques heures plus tard, ou rentrent de permission avec un ou deux jours de retard, s’accordent eux-mêmes ce à quoi ils estiment avoir droit et que l’institution ne veut pas leur donner.
19Le rappel et le départ pour l’Afrique du Nord semblent donc dans ces cas plus ou moins intégrés et acceptés, les rappelés quittent collectivement les casernes non pas dans la perspective de refuser la mobilisation ou l’envoi en Afrique du Nord, mais afin d’obtenir d’ultimes instants de liberté. Les enquêtes menées par le ministère de la Défense nationale sur les 1 300 « disponibles n’ayant pas rejoint leurs corps » précisent que cinquante-huit de ces rappelés [36](36)922 enquêtes ont abouti et 320 sont en cours à la date de… sont considérés comme insoumis, et que les déserteurs sont au nombre de quatre [37](37)SHAT, 2R100/3, Fiche au sujet des disponibles réfractaires et…. Les voies radicales de l’insoumission et de la désertion apparaissent donc comme marginales. Les manquements les plus importants à la discipline surviennent lors d’actions directes visant à entraver la marche des opérations.
Incidents
20Le 6 septembre 1955, à Auxerre, avant le départ du 4e Bataillon d’infanterie (BI) pour le camp militaire du Valdahon (Doubs) situé à la frontière suisse, des rappelés sortent au café, une patrouille les ramène, une dizaine d’entre eux se livrent alors à « des actes de vandalisme sur la literie et l’ameublement » [38](38)SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents…. Le ministère de la Défense nationale fait état d’une « manifestation bruyante avec bris de matériel » [39](39)Ibid., dans la nuit du 7 au 8 septembre, à la base aérienne de Saint-Dizier (Haute-Marne). D’après Maurice Lassard, un acteur de l’incident, tous les rappelés présents sur la base, 5 000 selon lui, se sont révoltés. Les soldats, qui s’attendent à partir pour l’Allemagne, sont rassemblés en rangs dans la cour où ils apprennent leur départ pour l’Algérie. Les rangs se brisent et, avec les baïonnettes des fusils qui viennent de leur être distribués, ils cassent toutes les vitres de la base. Encadrés par des CRS, ils sont embarqués dans la nuit en train pour Marseille et protestent pendant le trajet. Envoyés au camp Sainte-Marthe près de Marseille ils font de nouveau « un peu de chahut » avant de prendre le bateau pour l’Algérie [40](40)Entretien avec Maurice Lassard.. Si l’on suit ce témoignage, cet acte de protestation aurait réuni le plus grand nombre de rappelés et causé le plus de dégâts matériels. Ce témoignage n’a cependant pas pu être recoupé avec d’autres sources, le tableau du ministère de la Défense nationale ne détaillant pas l’ampleur de l’incident [41](41)SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents….
21Le 9 septembre au camp de Frileuse (Seine-et-Oise) [42](42)Ibid., la veille de leur départ à 4 heures du matin pour le Maroc, des soldats « de la 54/1, de la 54/2 et des disponibles » [43](43)« Ce qui se passe dans les casernes. Au 93e RI (camp de… du 93e Régiment d’infanterie (RI) lacèrent et arrachent dans le réfectoire des affiches vantant « les charmes touristiques des voyages en Algérie et au Maroc » [44](44)Ibid. et provoquent des « dégâts sur le parcours du combattant » [45](45)SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents…. Le 26 septembre, au camp de Ruchard (Indre-et-Loire), « 150 disponibles [du deuxième bataillon du 342e RI] forcent les portes des locaux disciplinaires » [46](46)Ibid.. Le 10 octobre 1955 à Marseille, quatre-vingt dix rappelés de la Marine se livrent à une « tentative d’obstruction lors du départ en AFN » [47](47)Ibid.. Le moyen d’action utilisé n’est pas précisé mais le terme employé permet de penser que les rappelés se sont opposés physiquement à leur départ.
22L’obstruction au moyen du signal d’alarme des trains, expérimentée le 11 septembre à la gare de Lyon, constitue le moyen le plus fréquemment utilisé pour protester, sans doute en raison de la simplicité du geste à accomplir, de son efficacité immédiate et de l’anonymat dont bénéficient ceux qui l’emploient. Le 15 septembre, entre Bondy et Le Raincy, un train en provenance de la gare de l’Est est ainsi arrêté en pleine voie, entre 13 heures 30 et 14 heures [48](48)« À Noisy », L’Humanité, 17 septembre 1955, p. 6.. Ce type d’action se multiplie au cours du mois d’octobre. Le 4 octobre 1955, des rappelés du premier bataillon du 403e RAA manifestent de cette manière entre Bordeaux et Marseille. Le ministère de la Défense nationale fait état d’une centaine de soldats qui poussent des « cris séditieux » et tirent le signal d’alarme [49](49)SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents…. Le 5 octobre, en gare de Tulle, le signal d’alarme d’un train transportant des rappelés du troisième bataillon du 342e RI est tiré, tandis que des militants de la CGT distribuent des tracts aux soldats [50](50)Ibid. Le document ne contient pas d’information sur une…. Le 7 octobre, entre Saincaize-Meauce (Nièvre) et Moulins (Allier), une centaine de soldats du deuxième bataillon du 65e RI sont impliqués dans le déclenchement du signal d’alarme [51](51)Ibid.. Un incident similaire, auquel s’ajoutent des tirs d’armes à feu, a lieu le 8 octobre à Miramas (Bouches-du-Rhône) lors du transport du premier bataillon du 12e Régiment d’artillerie coloniale (RAC) [52](52)Ibid.. Le 17 octobre, les rappelés du 404e RAA de Valence s’en servent à leur tour lors d’une action d’ampleur [53](53)J.-Ch. JAUFFRET, « Le mouvement des rappelés en 1955-1956 »,….
Rouen, caserne Richepanse : paroxysme et singularité
23C’est à Rouen, les 6 et 7 octobre 1955, que se déroule l’incident majeur du mouvement des rappelés de 1955. Il est provoqué par les soldats du deuxième bataillon de marche du 406e RAA, composé majoritairement de rappelés, cantonnés dans la caserne Richepanse, sur la rive gauche de Rouen où se concentre une forte population ouvrière. Le 6 octobre, une compagnie de commandement et des services (CCS) et un bataillon de marche du 406e RAA doivent partir dans la soirée pour l’Afrique du Nord. Les troubles commencent à partir de 15 heures, des soldats expriment leur mécontentement dans le réfectoire et des chambrées sont saccagées. Vers 16 heures, des soldats se rendent devant la grille de la porte d’entrée principale de la caserne et chantent une chanson intitulée Le 406 ne partira pas [54](54)Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du… dont le texte provient, d’après Jean Meaux, d’un tract de l’UJRF (Union de la jeunesse républicaine de France, organisation de jeunesse du PCF) qu’il a introduit dans la caserne [55](55)Entretien avec Jean Meaux.. Des rappelés sortent de la caserne. Dans la soirée, cinq camions transportant des hommes de la CCS tentent de quitter la caserne, 100 à 150 soldats les empêchent de passer en renversant la guérite de la sentinelle devant la porte et en lançant des pierres. Les camions dirigés vers une autre porte sont stoppés de nouveau.
24Les troubles reprennent le lendemain 7 octobre à partir de midi. De nombreux soldats sortent et entrent en contact avec des civils à proximité de la caserne. Le maire communiste de Petit-Quevilly, Martial Spinneweber, leur rend visite. Des gendarmes et des gardes mobiles interviennent pour faire rentrer les soldats dans la caserne : « ce fut le début des bagarres [56](56)Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du…. »
25Un tract de la section de Petit-Quevilly du PCF, distribué entre 17 heures et 18 heures, appelle la population à soutenir l’action des rappelés [57](57)AN, BB 18 4306, Rapport du procureur général près la cour…. La CGT appelle à des arrêts de travail. A partir de 18 heures, 2 000 à 3 000 civils se regroupent aux abords de la caserne et lancent des projectiles. Des CRS et des policiers arrivés en renfort interviennent en utilisant des grenades lacrymogènes pour disperser la foule et faire rentrer les soldats à l’intérieur de la caserne. De violents affrontements éclatent opposant les civils aux forces de l’ordre [58](58)Ibid.. Des rappelés montés sur le toit de la caserne les insultent, leur jettent des pierres et des tuiles.
Au cours de ces événements, sept gradés et agents de police furent blessés. On a compté vingt-sept blessés parmi les gradés et les hommes des CRS [59](59)Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du….
27Entre 23 heures 30 et minuit, le calme revient, les civils se dispersent et les rappelés regagnent leurs chambrées. Le 8 octobre, à 2 heures du matin, les rappelés du bataillon de marche quittent la caserne encadrés par les gendarmes et sont dirigés vers le camp de Sissonne (Aisne). Ils partent ensuite de Reims, par avion, pour le Maroc.
28Cet incident concentre plusieurs éléments qui lui confèrent une dimension inédite : le nombre élevé de participants, environ 300 soldats, les vingt-deux meneurs signalés par le ministère de la Défense nationale – dix-huit d’entre eux, dont onze rappelés, sont inculpés de « révolte militaire » [60](60)SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents… –, chiffre le plus important de toutes les actions recensées, le soutien actif de civils et enfin le niveau de violence opposé aux ordres donnés.
29Les extraits du procès des dix-huit meneurs mentionnent des insultes contre l’encadrement : « Vous les gendarmes, il y a assez longtemps que vous me faites chier [...], bandes de salauds, fainéants, pourris ». Un rappelé « vu un fusil à la main et coiffé d’un casque » menace « d’aller chercher des cartouches pour “descendre les officiers qui l’embêtaient” »; un autre braque un pistolet-mitrailleur sur un brigadierchef en déclarant « s’il était chargé tu serais déjà mort », tandis qu’un autre est armé d’une barre de fer [61](61)Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du…. Des gendarmes et un adjudant-chef sont bousculés et frappés. Cet événement, notamment la journée du 7 octobre avec les affrontements entre civils et CRS, peut être qualifié d’émeute.
Un bilan quantitatif
30Ces actes d’indiscipline constituent une perturbation sérieuse du fonctionnement de l’institution militaire et de la mobilisation pour l’Afrique du Nord. Bien que les rappelés qui y participent soient minoritaires, leur nombre semble considérable pour un mouvement de soldats.
31Nous dénombrons 2 330 rappelés protestataires [62](62)1 300 protestataires dans l’armée de Terre pour un total de 51… en additionnant les chiffres de participants comptabilisés par le ministère de la Défense nationale et près de 6 000, dont un tiers pour la seule manifestation de la gare de l’Est que nous considérons avec prudence, en additionnant les effectifs donnés par L’Humanité. Le nombre de protestataires recensés pour l’ensemble des actions [63](63)Nous ne prenons pas en compte dans ces estimations le nombre de… représente entre 3,5 % – d’après les chiffres du ministère de la Défense nationale – et 9 % – d’après les chiffres de L’Humanité – de l’ensemble des disponibles du contingent 1953/2 rappelés sous les drapeaux [64](64)Nous réalisons cette estimation en considérant que les….
3230 345 rappelés de l’armée de Terre ont été envoyés en Afrique du Nord. Si nous prenons uniquement en compte les actions de rappelés de l’armée de Terre dont la destination explicitement mentionnée est l’Afrique du Nord, nous obtenons 1 000 participants d’après le ministère de la Défense nationale et 3 000 d’après L’Humanité. Selon ces estimations approximatives, entre 3,3 % et 9,8 % des rappelés de l’armée de Terre envoyés en Afrique du Nord sont impliqués dans des troubles. Ce pourcentage est plus important si nous considérons que seuls les 16 845 rappelés de l’armée de Terre envoyés en renfort en Afrique du Nord au sein de groupes ou de bataillons de marche sont des protestataires potentiels, puisque les autres, ayant effectué leur service actif en Afrique du Nord, y sont dirigés individuellement et n’ont donc pas l’occasion de se livrer à des protestations collectives en métropole. D’après les chiffres du ministère de la Défense nationale, 5,9 % des rappelés de l’armée de Terre envoyés en renfort en Afrique du Nord ont protesté et, d’après ceux de L’Humanité, ce pourcentage s’élève à 17,8 %.
33Confrontées au développement des actes d’indiscipline et à leur médiatisation par la presse communiste, quelles stratégies les autorités concernées – armée, ministères de la Défense nationale et de l’Intérieur – mettent-elles en œuvre ?
Chape de plomb et répression
34Le ministère de la Défense nationale reconnaît publiquement les seuls incidents de la gare de Lyon et de la caserne Richepanse. L’incident de la gare de Lyon s’étant déroulé dans un lieu public et celui de Rouen ayant impliqué 2 000 à 3 000 civils, il apparaît qu’il aurait été difficile pour le ministère de nier leur existence. La manifestation des soldats du 405e RAA le 13 octobre 1955 fait également l’objet d’une communication à la presse. Alors qu’en interne les autorités reconnaissent son existence [65](65)SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents…, le ministère de la Défense nationale adresse à la presse un communiqué pour démentir « formellement les informations selon lesquelles un détachement militaire ayant quitté Hyères le 13 octobre, à destination de Marseille, en vue de son embarquement pour l’Afrique du Nord, aurait manifesté à son passage à Toulon en chantant L’Internationale » [66](66)« Les rappelés n’ont pas manifesté à Toulon, affirme le…. Ce communiqué témoigne de la volonté d’éviter la propagation d’informations sur les protestations de rappelés; le ministère de la Défense nationale nie un événement qui a réellement eu lieu et qui, d’après L’Humanité, a été vu par de nombreux civils [67](67)« Contre la politique de force en Afrique du Nord, un mouvement….
35Malgré les recommandations des Renseignements généraux qui préconisent, afin d’éviter le développement de la protestation, de poursuivre les journaux qui relatent de manière favorable les actions de rappelés [68](68)SHAT, 2T129/6, Conférence au ministère de l’Intérieur, 19…, le ministère de la Défense nationale ne systématise pas cette stratégie de plaintes pour publication de fausses nouvelles ou pour provocation de militaires à la désobéissance. Le 11 octobre 1955, le procureur général près la cour d’appel de Toulouse propose de poursuivre le quotidien régional communiste, Le Patriote du Sud-Ouest, pour provocation de militaires à la désobéissance dans un article du 5 octobre 1955, « faisant l’apologie » d’une manifestation de rappelés. Le 9 novembre 1955, le ministère de la Défense nationale lui répond qu’il « n’estime pas opportun d’engager des poursuites » [69](69)AN, BB18/4306, Rapport du procureur général près la cour…. Face à la médiatisation des actions de rappelés par la presse communiste, le ministère de la Défense nationale se contente, dans la plupart des cas, d’observer le silence, peut-être parce que la multiplication des plaintes pourrait leur donner un écho supplémentaire et attester le développement d’un véritable mouvement de protestation, susceptible d’inspirer d’autres soldats.
36L’ampleur et la nature de la répression militaire contre les rappelés restent difficiles à connaître. Lorsqu’un incident se produit, l’autorité militaire cherche tout d’abord à en identifier les meneurs, et s’emploie à les isoler. S’ils n’ont pas pu être détectés sur le moment par l’encadrement, le service de sécurité de la Défense nationale et des forces armées procède à des enquêtes. Après l’incident impliquant des rappelés du 406e RAA à Rouen, quinze soldats, sur vingt-deux meneurs détectés, seront condamnés à soixante jours de prison dont quinze de cellule à l’issue des enquêtes menées au Maroc [70](70)SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents….
37L’action disciplinaire s’étend cependant au-delà des seuls rappelés les plus actifs. Le 5 octobre 1955, le général de corps d’armée commandant la IXe Région militaire (Marseille) indique à l’état-major de l’armée de Terre qu’il « prescrit aux chefs d’être attentifs au moindre symptôme et de sanctionner fermement toute velléité d’indiscipline » [71](71)SHAT, 2T129/6, Synthèse trimestrielle du général de corps…. A la date du 22 octobre 1955, alors que seuls vingt-cinq meneurs [72](72)Il s’agit des vingt-deux meneurs du 406e RAA et de trois… ont pu être recensés, on dénombre, en plus des condamnations frappant les soldats du 406e RAA, quatre-vingt-quatre « punitions » [73](73)SHAT, 2R100/3, Fiche sanctions contre des disponibles, 22… prononcées : quarante-neuf rappelés sont cassés de leur grade, neuf sont rétrogradés, sept sont mutés, un sous-officier est mis aux arrêts de rigueur pendant vingt-cinq jours, cinq soldats sont condamnés à soixante jours de prison [74](74)Cet état des peines de prison ne mentionne pas les…, douze à quarante-cinq jours, et un à trente jours [75](75)SHAT, 2R100/3, Fiche sanctions contre des disponibles, 22….
38Le recours à la justice militaire reste en revanche exceptionnel. Il semble que quatre actes d’indiscipline aient suscité des demandes de traduction devant un tribunal militaire [76](76)Les protestations impliquant des soldats du 401e RAA survenus…. Ce mode de répression est en effet beaucoup plus complexe que l’action disciplinaire immédiate. Dix-huit soldats, onze rappelés, six appelés et un militaire d’active, du 406e RAA sont inculpés de « révolte militaire ». Ils comparaissent après leur retour à la vie civile [77](77)A l’exception du militaire d’active qui se trouve encore au…, devant le tribunal permanent des forces armées de Paris. Neuf d’entre eux sont arrêtés le 24 janvier 1956 [78](78)S. LALOYER, « La révolte des rappelés de la caserne… et passent quelques semaines à la prison de Fresnes [79](79)Entretien avec Jean Meaux.. Le 3 juillet 1956, le juge d’instruction écarte l’inculpation de « révolte militaire » car les faits reprochés ont été commis sans arme alors que la détention d’arme est un élément constitutif d’un tel délit [80](80)Archives personnelles de Jean Meaux, Ordonnance de non-lieu et…. Cette longue procédure aboutit finalement à la relaxe de la moitié des inculpés [81](81)Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du…. L’attitude des autorités, qui considèrent la révolte des rappelés comme révélatrice d’une crise du moral et de la discipline à résorber, par l’action psychologique notamment [82](82)Sur la mise en œuvre et le développement de l’action…, bien plus que comme une atteinte majeure à la défense nationale qu’il faudrait réprimer en utilisant l’appareil de la justice militaire, nous pose la question de la signification du mouvement.
Le sens d’une révolte
39Alors que les rappelés sont victimes de l’intensification de la répression en Algérie, qu’ils agissent et s’expriment souvent à l’occasion de leur départ pour l’Afrique du Nord, les protestations à caractère anticolonialiste sont rares. Des mots d’ordre anticolonialistes semblent n’avoir été criés que lors de l’incident de la gare de Lyon le 11 septembre 1955. Un rapport du préfet de police de Paris fait état de « cris hostiles à l’intervention au Maroc » [83](83)Archives de la préfecture de police de Paris, Rapport du préfet… et Le Parisien libéré du slogan « Le Maroc aux Marocains ! » [84](84)P. THORAVAL, « 400 disponibles refusent de prendre le train….
40La comparaison de deux actes de protestation, la messe en l’église Saint-Séverin à laquelle se rendent des soldats du 401e RAA et l’incident de la caserne Richepanse, et l’étude du profil des rappelés les plus virulents lors de celui-ci semblent indiquer que la radicalité du discours des rappelés ne s’accorde pas avec la violence des moyens employés pour empêcher leur départ. Le 29 septembre, à l’initiative de quatre meneurs, entre 200 et 300 soldats du 401e RAA [85](85)SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents…, appelés, rappelés et maintenus, assistent à une messe en l’église Saint-Séverin (Ve arrondissement de Paris) célébrée « Pour la paix et pour le repos des âmes mortes des deux côtés » [86](86)« Des militaires assistent à une messe et distribuent un tract…. Ils y diffusent un texte affirmant leurs différentes sensibilités : « Croyants et incroyants, chrétiens et communistes, juifs et protestants », et exprimant leur angoisse et leur honte « d’avoir à servir par la violence une cause [...] contraire à tous les principes chrétiens, à tous les principes de la Constitution française, au droit des peuples à pouvoir disposer d’eux-mêmes ». Ils formulent un point de vue d’opposition résolue à la guerre en Afrique du Nord, publié par France-Observateur [87](87)« L’appel de Saint-Séverin », France-Observateur, 6 octobre…. Cette élaboration et l’assistance collective à une messe semblent démontrer que cet acte a nécessité une organisation et une concertation entre certains rappelés ainsi qu’une orientation anticolonialiste, chrétienne et communiste, commune à de nombreux protestataires. Il s’agit de la protestation dont le contenu et le retentissement comportent la dimension politique la plus affirmée du mouvement des rappelés [88](88)Pour une analyse plus détaillée de cette action et de son… en même temps que l’une des plus pacifiques [89](89)Les soldats de ce régiment se livrent à d’autres actes….
41En revanche, l’opposition violente des rappelés du 406e RAA à leur départ ne s’accompagne, à notre connaissance, d’aucune expression collective contre le colonialisme et la guerre en Afrique du Nord. Lors du procès des dix-huit meneurs, l’action de deux rappelés du 406e RAA, dont Jean Meaux, est bien présentée comme animée par un but politique. Un rappelé, brigadier-chef, journaliste dans le civil, est décrit comme « jugeant utile d’agir activement ou par une action psychologique, dans le but de retarder l’éventuel départ en Afrique du Nord, tout comme lors des événements survenus à la gare de Lyon » [90](90)Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du…. Jean Meaux est quant à lui présenté comme « étant personnellement opposé au départ de militaires pour l’Afrique du Nord », et ayant « tenu des propos teintés de politique » [91](91)Ibid.. Cependant le compte rendu du procès atteste que ces deux rappelés politisés ne se sont livrés à aucun acte violent alors que parmi ceux qui protestent le plus vigoureusement figurent des soldats susceptibles d’être particulièrement affectés par le rappel et l’envoi en Afrique du Nord. Sur les dix-huit inculpés de « révolte militaire », six sont mariés, quatre d’entre eux sont pères de famille au moment des faits et parmi les rappelés les plus actifs se trouvent deux anciens pupilles de la nation [92](92)Les pupilles de la nation sont les enfants dont le père est… – en principe exemptés d’envoi en Afrique du Nord – ainsi que deux orphelins [93](93)Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du….
42Si le mécontentement, les doutes sur le bien-fondé de l’action de la France en Afrique du Nord, l’envie « d’en finir » le plus vite possible et l’irritation face à une discipline perçue comme arbitraire sont des sentiments communs à bon nombre de soldats de la guerre d’Algérie, seuls les rappelés, en 1955 et 1956, exprimeront cet état d’esprit par des actions collectives d’ampleur. L’orientation anticolonialiste, bien qu’elle soit présente chez certains soldats, n’apparaît pas comme déterminante pour expliquer la protestation des rappelés. En revanche, les aspects moraux, la rupture avec l’environnement familial et affectif, et matériels, l’interruption de l’activité professionnelle notamment, constituent des facteurs plus déterminants pour expliquer cette protestation.
43Ce mouvement procède d’une révolte face à une contrainte perçue comme injuste et injustifiée, révolte qui éclate le plus souvent et le plus violemment au moment même où le rappel prend une dimension irréversible, à l’approche du départ pour l’Afrique du Nord, ce qui lui confère alors, implicitement, un sens politique. Des soldats refusent de monter dans des trains, s’opposent aux gradés et aux gendarmes, saccagent du matériel et des locaux militaires, retardent des opérations d’acheminement des troupes, alors qu’ils sont justement appelés à accomplir des opérations de « maintien de l’ordre ». Leurs actions constituent alors une forme d’entrave au conflit auquel ils sont destinés, dans la mesure où elles nuisent à la discipline militaire et à la cohésion nationale particulièrement requises dans un contexte de guerre.
La mémoire de l’événement
44Alors que cet épisode a laissé peu de traces, il convient de s’interroger sur la place des rappelés de 1955 dans la mémoire de la guerre d’Algérie.
45Dans les années qui suivent, ce mouvement est essentiellement revendiqué par les « porteurs de valises » et les réseaux de soutien aux réfractaires pour qui la révolte des rappelés en 1955, comme en 1956, représente l’occasion perdue d’un mouvement de masse contre la guerre d’Algérie. Le retentissement politique et militaire du rappel de 1956 contribue, en outre, à « donner l’avantage » aux rappelés de 1956 sur ceux de 1955 dans la mémoire de la guerre d’Algérie. Décidé par le gouvernement de Front républicain – avec à sa tête le socialiste Guy Mollet – dont la campagne électorale promettait la fin des hostilités, ce second rappel est perçu comme révélateur du consensus politique sur la question de la « pacification de l’Algérie ». Il concerne un nombre presque deux fois plus élevé de disponibles et constitue l’un des symboles de l’utilisation massive du contingent. Les missions qu’accomplissent les rappelés de 1956 marquent l’entrée des jeunes français dans une guerre qui s’intensifie [94](94)L’embuscade de Palestro le 18 mai 1956 au cours de laquelle une…. Le mouvement de protestation que suscite le rappel de 1956, aux mois de mai et juin, s’avère d’une plus grande ampleur que celui de 1955 et bénéficie d’un engagement de la population civile, au-delà des forces politiques et syndicales [95](95)AN, Centre des archives contemporaines, 19880206, art. 20…. Des rappelés de 1956 sont parmi les premiers à rapporter les pratiques de l’armée française – tortures et exécutions sommaires – auxquelles ils ont assisté en Algérie [96](96)« Dossier Jean Müller », Les Cahiers du Témoignage chrétien,…. Des témoignages d’anciens rappelés de 1956 figurent également en bonne place dans les publications dont l’ambition est de retranscrire la mémoire des soldats du contingent [97](97)Notamment : J.-P. VITTORI, Nous, les appelés d’Algérie, Paris,…. L’histoire des rappelés de 1956 se trouve ainsi intégrée dans la mémoire des anciens combattants en Algérie d’une part et d’autre part dans celle de l’opposition à la torture et à la guerre, mémoires qui font défaut aux rappelés de 1955.
Notes
- (1)
J.-Ch. JAUFFRET, Soldats en Algérie (1954-1962). Expériences contrastées des hommes du contingent, Paris, Autrement, 2000, p. 29-45; J.-Ch. JAUFFRET, « Le mouvement des rappelés en 1955-1956 », in M. HARBI et B. STORA (dir.), La Guerre d’Algérie. 1954-2004, la fin de l’amnésie, Paris, Robert Laffont, 2004, p. 133-160; T. QUEMENEUR, « Les manifestations de “rappelés” contre la guerre d’Algérie (1955-1956) ou Contestation et obéissance », Revue française d’histoire d’Outre-mer, t. 88, deuxième semestre 2001, p. 407-427.
- (2)
Notamment les dossiers du cabinet du ministre de la Défense nationale (série R) et de l’état-major de l’armée de Terre (série T) concernant le « moral des disponibles » déposés au Service historique de l’armée de Terre (SHAT). La consultation des Journaux de marches et opérations et des rapports sur le moral des unités touchées par des actes de protestation, également conservés au SHAT, nous a été dans la plupart des cas refusée. Les archives des brigades et compagnies de gendarmerie susceptibles d’être intervenues lors de troubles ne sont actuellement pas communicables par le Service historique de la gendarmerie nationale.
- (3)
Les archives de la préfecture de Police de Paris conservent des dossiers sur deux actions (l’incident de la gare de Lyon du 11 septembre 1955 et l’assistance de rappelés à la messe « pour la paix » en l’Église Saint-Séverin le 29 septembre 1955) et les dossiers de la série F7 (ministère de l’Intérieur) des Archives nationales, notamment ceux des Renseignements généraux, abordent le mouvement des rappelés à travers l’activité du Parti communiste sur la question.
- (4)
Nous utilisons des dossiers du ministère de la Justice déposés aux Archives nationales (série BB18) concernant les plaintes pour « provocations de militaires à la désobéissance » qui portent sur des procès contre des civils impliqués dans des actions de soutien aux rappelés et contiennent également des informations sur l’attitude des soldats et des autorités militaires; ainsi que des documents de la justice militaire issus des archives personnelles de Jean Meaux, un ancien rappelé du 406e RAA.
- (5)
Archives nationales, F 1a 4812, Ministère de l’Intérieur, Rapport du directeur général de la Sûreté nationale relatif à la situation des forces de maintien de l’ordre transmis au secrétaire général du ministère de l’Intérieur, 24 novembre 1954.
- (6)
Le terme de « disponibles » fait référence à la situation militaire des soldats du contingent à l’issue de leur service actif. Ils se trouvent en effet placés en « disponibilité », une période de trois ans durant laquelle ils peuvent être rappelés sous les drapeaux. Les hommes touchés par ce décret sont donc désignés par les termes de « disponibles », de « rappelés » ou encore de « disponibles rappelés ».
- (7)
Décret du 24 août 1955 portant rappel des disponibles des classes 1952/4 et 1953/1, Journal officiel, 25 août 1955, p. 8514.
- (8)
AN, C 15062, Assemblée nationale, Procès-verbaux des séances de la commission de la Défense nationale, Séance du 15 septembre 1955.
- (9)
Décret du 28 août 1955 tendant au maintien sous les drapeaux des hommes du premier contingent 1954, Journal officiel, 29-30 août 1955, p. 8641.
- (10)
Ils suivaient le sort du contingent 1954/1 et devaient normalement être libérés le 1er novembre 1955.
- (11)
SHAT, 19T105/2, Réunion de l’état-major de l’armée de Terre au sujet des possibilités d’utilisation des disponibles du dernier demi-contingent rappelé sous les drapeaux, 23 août 1955.
- (12)
Ibid.
- (13)
AN, C15062, Procès-verbal de la séance de la commission de la Défense nationale du 15 septembre 1955.
- (14)
SHAT, 1H1374/2, Situation à la date du 1er décembre 1955 des effectifs stationnés en Afrique du Nord.
- (15)
SHAT, 2R100/1, Libération du contingent 1953/2,10 février 1955.
- (16)
Gares de l’Est, Lyon et Montparnasse à Paris, Valence, Bourges, Bourg-Saint-Maurice, Béziers, Tulle, Moulins, Miramas, Toulouse-Matabiau.
- (17)
Casernes de Rouen, Perpignan, Dupleix à Paris, Rueil-Malmaison, Vincennes, Istres, BrivelaGaillarde, Coblence, Commercy, Auxerre et Valence.
- (18)
Forts de Nogent-sur-Marne, Provins, Vincennes.
- (19)
La Courtine, Souge, Frileuse, Ruchard.
- (20)
Reims, Saint-Dizier, Chambéry.
- (21)
Lann-Bihoué et Lanveoc-Poulmic.
- (22)
Toulon et Marseille.
- (23)
« 2 000 “rappelés” manifestent à la gare de l’Est », L’Humanité, 2 septembre 1955, p. 1.
- (24)
J.-Ch. JAUFFRET, Soldats en Algérie..., op. cit., p. 227-233.
- (25)
SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents connus à la date du 29 octobre 1955.
- (26)
« Manifestations à Marseille et Toulon à l’embarquement de 3 000 soldats et rappelés pour l’Afrique du Nord », L’Humanité, 14 octobre 1955, p. 4.
- (27)
SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents connus à la date du 29 octobre 1955.
- (28)
SHAT, 2T129/6, Réunion du comité interministériel d’action psychologique, 20 octobre 1955.
- (29)
Ce témoin ne se souvient plus de la date exacte de cet événement, qui est intervenu selon lui environ un mois après son rappel au début du mois de septembre.
- (30)
Entretien avec Paul Lutigner.
- (31)
Idem.
- (32)
« Les départs de troupes pour l’Afrique du Nord s’accélèrent, le mécontentement grandit dans l’armée », L’Humanité, 15 octobre 1955, p. 4.
- (33)
SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents connus à la date du 29 octobre 1955.
- (34)
Ibid.
- (35)
Ibid.
- (36)
922 enquêtes ont abouti et 320 sont en cours à la date de rédaction du document.
- (37)
SHAT, 2R100/3, Fiche au sujet des disponibles réfractaires et déserteurs, sans date mais probablement postérieure au 22 octobre 1955.
- (38)
SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents connus à la date du 29 octobre 1955.
- (39)
Ibid.
- (40)
Entretien avec Maurice Lassard.
- (41)
SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents connus à la date du 29 octobre 1955.
- (42)
Ibid.
- (43)
« Ce qui se passe dans les casernes. Au 93e RI (camp de Frileuse) », L’Humanité, 17 septembre 1955, p. 6.
- (44)
Ibid.
- (45)
SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents connus à la date du 29 octobre 1955.
- (46)
Ibid.
- (47)
Ibid.
- (48)
« À Noisy », L’Humanité, 17 septembre 1955, p. 6.
- (49)
SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents connus à la date du 29 octobre 1955.
- (50)
Ibid. Le document ne contient pas d’information sur une éventuelle concertation entre rappelés et syndicalistes et ne précise pas le contenu du tract distribué.
- (51)
Ibid.
- (52)
Ibid.
- (53)
J.-Ch. JAUFFRET, « Le mouvement des rappelés en 1955-1956 », art. cit., p. 140-141.
- (54)
Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du greffe de la cour d’appel de Paris, arrêt du 21 mars 1957. Jean Meaux, rappelé du 406e RAA, fait partie des dix-huit soldats inculpés de « révolte militaire ». Il a passé deux mois à la prison régimentaire de Casablanca, puis, après sa libération, seize jours à la prison de Fresnes au début de son procès devant le tribunal permanent des forces armées en janvier 1956.
- (55)
Entretien avec Jean Meaux.
- (56)
Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du greffe de la cour d’appel de Paris, arrêt du 21 mars 1957.
- (57)
AN, BB 18 4306, Rapport du procureur général près la cour d’appel de Rouen au ministre de la Justice sur l’information ouverte à Rouen à la suite des incidents survenus à la caserne Richepanse, 9 janvier 1957.
- (58)
Ibid.
- (59)
Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du greffe de la cour d’appel de Paris, arrêt du 21 mars 1957.
- (60)
SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents connus à la date du 29 octobre 1955.
- (61)
Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du greffe de la cour d’appel de Paris, arrêt du 21 mars 1957.
- (62)
1 300 protestataires dans l’armée de Terre pour un total de 51 500 rappelés, 670 dans l’armée de l’Air pour un total de 12 000 rappelés, et 360 dans la Marine pour un total de 2 650 rappelés.
- (63)
Nous ne prenons pas en compte dans ces estimations le nombre de 5 000 participants avancé par Maurice Lassard pour l’acte de Saint-Dizier, qui porterait à 47 % le taux de rappelés protestataires dans l’armée de l’Air.
- (64)
Nous réalisons cette estimation en considérant que les effectifs du contingent 1953/2 sont de 66 150 hommes.
- (65)
SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents connus à la date du 29 octobre 1955.
- (66)
« Les rappelés n’ont pas manifesté à Toulon, affirme le ministre de la Défense nationale », Le Monde, 16-17 octobre 1955, p. 5.
- (67)
« Contre la politique de force en Afrique du Nord, un mouvement qu’aucun communiqué gouvernemental ne peut démentir », L’Humanité, 17 octobre 1955, p. 5.
- (68)
SHAT, 2T129/6, Conférence au ministère de l’Intérieur, 19 septembre 1955.
- (69)
AN, BB18/4306, Rapport du procureur général près la cour d’appel de Toulouse au ministère de la Défense nationale sur un article intitulé « Tout au long du trajet Bordeaux-Marseille, 600 jeunes soldats manifestent leur colère » publié dans Le Patriote du Sud-Ouest du 5 octobre, 11 octobre 1955.
- (70)
SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents connus à la date du 29 octobre 1955.
- (71)
SHAT, 2T129/6, Synthèse trimestrielle du général de corps d’armée commandant la IXe Région militaire transmise à la section « moral » de l’état-major de l’armée de Terre, 5 octobre 1955.
- (72)
Il s’agit des vingt-deux meneurs du 406e RAA et de trois soldats impliqués dans la protestation de l’église Saint-Séverin du 29 septembre 1955.
- (73)
SHAT, 2R100/3, Fiche sanctions contre des disponibles, 22 octobre 1955.
- (74)
Cet état des peines de prison ne mentionne pas les condamnations à des jours de cellule.
- (75)
SHAT, 2R100/3, Fiche sanctions contre des disponibles, 22 octobre 1955.
- (76)
Les protestations impliquant des soldats du 401e RAA survenus au fort de Nogent entre le 1er et le 3 octobre, les cris séditieux et le déclenchement du signal d’alarme par des rappelés du 403e RAA lors de leur trajet entre Marseille et Bordeaux le 4 octobre, les incidents de Rouen et un refus d’obéissance au 10e RA de Vannes le 8 octobre.
- (77)
A l’exception du militaire d’active qui se trouve encore au Maroc au moment de son procès.
- (78)
S. LALOYER, « La révolte des rappelés de la caserne Richepanse », Le Fil rouge, revue de l’Institut CGT d’histoire sociale de Seine-Maritime, hiver 2001, p. 17.
- (79)
Entretien avec Jean Meaux.
- (80)
Archives personnelles de Jean Meaux, Ordonnance de non-lieu et de renvoi devant le tribunal permanent des forces armées de Paris, 3 juillet 1956.
- (81)
Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du greffe de la cour d’appel de Paris, arrêt du 21 mars 1957.
- (82)
Sur la mise en œuvre et le développement de l’action psychologique à l’issue du mouvement des rappelés de 1955 puis en prévision du rappel de 1956 voir M.-C. et P. VILLATOUX, « Le 5e Bureau en Algérie », in J.-Ch. JAUFFRET et M. VAÏSSE (dir.), Militaires et guérilla dans la guerre d’Algérie, Bruxelles, Éditions Complexe, 2001, p. 405.
- (83)
Archives de la préfecture de police de Paris, Rapport du préfet de police au général commandant la IIe Région aérienne sur les incidents survenus en gare de Lyon, 12 septembre 1955.
- (84)
P. THORAVAL, « 400 disponibles refusent de prendre le train pour l’Afrique du Nord », Le Parisien libéré, 12 septembre 1955, p. 1 et 7.
- (85)
SHAT, 2R100/3, Tableau récapitulatif des différents incidents connus à la date du 29 octobre 1955.
- (86)
« Des militaires assistent à une messe et distribuent un tract protestant contre leur envoi en AFN », Le Monde, 1er octobre 1955, p. 2.
- (87)
« L’appel de Saint-Séverin », France-Observateur, 6 octobre 1955, p. 10.
- (88)
Pour une analyse plus détaillée de cette action et de son contenu voir T. QUEMENEUR, « La messe en l’église Saint-Séverin et le “dossier Jean Müller”. Des chrétiens et la désobéissance au début de la guerre d’Algérie (1955-1957) », Bulletin de l’IHTP, premier semestre 2004, p. 94-106.
- (89)
Les soldats de ce régiment se livrent à d’autres actes (manifestations, absences irrégulières), toujours sans violence, que nous n’aborderons pas ici.
- (90)
Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du greffe de la cour d’appel de Paris, 21 mars 1957.
- (91)
Ibid.
- (92)
Les pupilles de la nation sont les enfants dont le père est mort pour la France.
- (93)
Archives personnelles de Jean Meaux, Extrait des minutes du greffe de la cour d’appel de Paris, 21 mars 1957.
- (94)
L’embuscade de Palestro le 18 mai 1956 au cours de laquelle une section de rappelés est presque entièrement massacrée marque profondément l’opinion publique française.
- (95)
AN, Centre des archives contemporaines, 19880206, art. 20 (liasse 1), ministère de l’Intérieur, Direction centrale de la Police judiciaire, Propagande antimilitariste, Manifestations de militaires rappelés en Algérie, entraves à la marche des trains, émeutes, 1956.
- (96)
« Dossier Jean Müller », Les Cahiers du Témoignage chrétien, février 1957, réalisé à partir des lettres d’un rappelé mort au combat; Des rappelés témoignent, brochure publiée en mars 1957 par le Comité de résistance spirituelle ; R. BONNAUD, « La paix des Nementchas », Esprit, avril 1957, p. 580-592; G. MATTÉI, « Jours kabyles », Les Temps modernes, juillet-août 1957, p. 138-139.
- (97)
Notamment : J.-P. VITTORI, Nous, les appelés d’Algérie, Paris, Stock, 1977; Fédération nationale des anciens combattants d’Algérie (FNACA), Ils avaient 20 ans dans les djebels, Paris, FNACA, 1989, recueil de témoignages réalisé par la FNACA, principale association d’anciens combattants de la guerre d’Algérie; B. TAVERNIER et P. ROTMAN, La Guerre sans nom : appelés et rappelés pendant la guerre d’Algérie, 1954-1962, Paris, Le Seuil, 1992, dont il existe également une version filmée.
https://www.cairn.info/revue-le-mouvement-social-2007-1-page-45.htm
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