Clovis et Francine le jour de leur mariage./ Photo Le Petit Bleu
Soixante ans c’est une vie entière ou presque. Soixante ans séparent la mort de Clovis Creste, décédé en Algérie en 1958, et le décès le 23 août dernier, à 92 ans, de Francine, sa femme. Mercredi à Lafox, le couple se retrouve pour être incinéré selon les volontés de la défunte.
« La mort les avait séparés, mais jamais l’amour. » Dans la voix d’Hélène leur fille, l’émotion d’un enfant qui a vu son père partir. « Il est mort pour la France. » Le 29 octobre 1958, le sergent-chef Creste est inhumé une première fois dans l’Oranais, à Chleff. Il avait 31 ans, les honneurs militaires lui sont rendus et il est décoré de la Légion d’honneur à titre posthume.
Lors de la première inhumation de Clovis, en Algérie./ Photo Le Petit Bleu
Rapatriées par l'armée
D’une vieille boîte en fer que sa mère conservait, Hélène a extrait une image douloureuse des obsèques de son père en Algérie. Deux inhumations « avec ma mère, nous sommes revenues grâce à mon oncle. » Jean Charaire est à l’époque antiquaire en ville. « La famille s’est cotisée pour lui permettre de venir nous chercher. Ma mère et moi nous avons été rapatriées par l’armée française. » Plus d’un an après, le cercueil de Clovis Creste revient en France.
Le 12 décembre 1959, il est inhumé au cimetière Gaillard. « Auparavant » détaille encore sa fille, « il y avait eu une cérémonie officielle avec le préfet, le maire d’Agen et le député. » C’est la deuxième inhumation du soldat Creste. Les anciens combattants lui rendent un dernier hommage au cours d’une cérémonie qui emprunte le boulevard Carnot de cette fin des années 1950.
Lors de la deuxième inhumation de Clovis, en 1959 à Agen/. Photo Le Petit Bleu.
Chaque semaine sur sa tombe
La guerre d’Algérie continue, Francine Creste vit désormais à Agen, où elle et son maris se sont unis en octobre 1951. « Chaque semaine, ma mère fleurissait la tombe de mon père. Elle voulait être incinérée alors j’ai fait exhumer le corps de mon père pour qu’il repose dans un cercueil en bois et qu’une célébration commune l’unisse une dernière fois à ma mère. » Comme en 1959 lors des deuxièmes obsèques du sergent-chef Creste à Agen, des associations d’anciens combattants veulent lui rendre hommage. Il sera double car Francine, veuve de guerre « est restée très fidèle à sa mémoire et elle restait présente auprès des associations. »
Francine encore ne s’est jamais remariée. « Pour ma mère, mon père était mort la veille. Moi je fais un double deuil mercredi. » Née au Sénégal au gré du parcours militaire de Clovis, sa fille parle d’un « amour inouï, fusionnel. À la mort de mon père, ma mère s’est fermée. » Le couple, se souvient Hélène, s’est rencontré à l’Eldorado, un lieu de nuit d'Agen, en 1948.
Le bleu et le blanc pour elle
« C’était à l’occasion d’une permission. » Francine est restée trente ans à la crèche Ducourneau. Hélène assiste mercredi à l’inhumation de son père, la troisième, la dernière. « J’étais trop jeune à l’époque de sa mort. » Avant le crématorium, une cérémonie religieuse en l’église Saint-Christophe de Lafox. Un drapeau tricolore pour lui, du blanc et du bleu pour elle.
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