De l'unité ontologique à la fracture discursive
.
D'une confidence fortuite à la polyphonie bakhtinienne
L'origine
de ce projet de thèse est une histoire familiale. J'étais étudiante en
lettres lorsque ma mère, au détour d'une conversation, me confie que
Camus a écrit sur mon grand-père et qu'on peut trouver ces documents
dans les Cahiers Albert Camus. Je m'étonne et prends connaissance du
détail de l'affaire. Mon grand-père est le magasinier Mas emprisonné aux
côtés d'Hodent, entraîné dans une fausse accusation de malversation et
de spéculation par ceux-là mêmes qui agissaient dans la seule finalité
de leur profit personnel en modifiant à leur guise le prix du blé fixé
par des amendements du Front Populaire. L'intervention de Camus, jeune
journaliste à Alger Républicain, permet d'éviter l'erreur judiciaire.
Une série de quinze articles est consacrée à ce procès répertorié sous
le nom d'« affaire Hodent ».
Je suis le procès en entendant les voix
des accusés, celle du procureur, celles des avocats, des témoins cités à
la barre et celle de Camus, jeune journaliste passionné et investi dans
la recherche de la vérité. Et, dans ce foisonnement, je m'interroge sur
le pouvoir de la parole, sur la polysémie du langage, ses zones
d'ombre, sur les ambivalences des hommes, sur la foi erronée en une
vérité unique. D'où parle-t-on ? À qui les discours s'adressent-ils ?
Quelle croyance obsolète supposent-ils dans l'unité du sujet parlant et
dans la capacité du langage à restituer une unité originelle ? Je relis
Bakhtine. J'explore l'ouvrage de Dunwoodie qui met en parallèle Camus et
Dostoïevski. Je découvre les influences, les intertextualités. Ma
recherche s'oriente alors vers la polyphonie, vers une réflexion sur le
rapport de l'homme au langage, à l'unité, à la vérité. Le procès
d'Hodent m'y a conduit.
J'entre dans l'ère du soupçon qui est la
marque du XXe siècle. Je lis avec passion L'Anneau de Clarisse de Magris
qui retrace les grandes étapes du désenchantement du monde lié à la
mort de Dieu. Nietzsche prend alors toute la place. Il est au centre
névralgique de cette explosion à la fois jubilatoire et dysphorique. La
foi dans l'unité du sujet n'est plus. L'homme est multiple. Il est une
myriade d'éclats, il est bigarrures et paradoxes dans un monde marqué
par la perte des repères.
Une voix dans le fracas du monde
Camus
s'efforce de faire entendre sa voix dans le fracas du monde et dans la
multitude des voix d'autrui, voix des habitants de Belcourt, voix
silencieuse de la mère, voix autoritaire de la grand-mère, voix des
maîtres qui guident l'enfant, voix des premiers romanciers lus avec
émotion et éblouissement, voix des « grands auteurs », des Classiques,
voix de la Grèce antique et de la Rome latine, voix des philosophes de
l'ère chrétienne, voix du messie qui crie sa déréliction et sa
souffrance de l'incarnation, voix des penseurs solitaires, des créateurs
de concepts, voix des comédiens sur les planches, des amis chaleureux,
des femmes aimées, de celles qui ont trahi, de celles qu'il a trompées
pour dire ailleurs d'autres mots, se nourrir d'autres murmures, voix des
orateurs aux tribunes de l'actualité, voix des maîtres à penser, des
moralisateurs, voix des traîtres, voix des lâches, voix qui se sont tues
à jamais sous les fusillades aveugles qui fauchent sans pitié la
jeunesse, la bravoure. Camus reste vivant après le cataclysme de la
guerre, heureux et honteux, n'ayant plus alors que le témoignage comme
seule justification. Les voix des morts résonnent dans le silence
bruyant de la Libération et la voix de la vengeance est impérieuse avant
de s'adoucir dans l'évidence du pardon et de l'oubli. Il est un homme
labyrinthique qui façonne une œuvre en costume d'Arlequin. Il est un
pantin tournoyant dans les orages du siècle, restituant, jusqu'au
mutisme, les clameurs du siècle. Mais il est aussi un artiste qui ne
renonce jamais totalement à l'exigence d'une voix personnelle, d'une
voix du secret de l'intime, de l'opacité lumineuse du renoncement aux
autres et de l'acceptation de soi comme condition de la création.
Voilà
posée la tension camusienne entre le désir d'unité et d'harmonie, la
course folle vers la fusion avec le monde, l'ardeur consacrée à rétablir
la paix entre les peuples, le respect et la reconnaissance d'autrui
dans son altérité et dans sa mêmeté d'une part, et d'autre part, la
lucidité parfois effarée face à l'éclatement de l'être, à la victoire de
la confusion et du désordre, au règne du paradoxe, de l'aporie, de la
guerre. L'élan enthousiaste ou désespéré vers le désir d'harmonie
s'incarne dans le choix d'être un écrivain et de porter, par les mots
agencés, l'unité de l'homme et du monde. L'écriture tente de lutter
contre l'éclatement, la fragmentation, la diversité. Mais les mots
jaillissent et restituent le désordre, la confusion, la complexité de
l'homme. L'écrivain fait l'expérience dysphorique et vivifiante,
jubilatoire et angoissante de la polyphonie. Par qui suis-je habité
quand je parle ? C'est la question que chaque « sujet parlant » ne peut
manquer de se poser à la suite de Bakhtine ou de Ducrot. Quels échos
résonnent dans une voix, quels dédoublements en abyme habitent l'auteur
qui prend la plume ? Quel chemin peut conduire l'individu vers la
singularité authentique dans le fracas assourdissant des voix d'autrui
qui se mêlent et s'emmêlent? L'uni et l'unique ne sont-ils que des
leurres, des fantômes aveuglés par l'orgueil et l'outrecuidance ?
Comment livrer l'intime sans impudeur ? Comment être à la fois héraut de
son temps, chantre de la justice et « politiquement et affectivement
incorrect » ?
Faut-il chercher un fil conducteur ? Y a-t-il un fil
d'Ariane menant à une vérité ultime ? Il ne semble pas que Camus se soit
jamais imposé cette contrainte. La lecture des Carnets témoigne, malgré
l'évolution programmatique annoncée très tôt par l'auteur, d'une œuvre
qui avance au gré des lectures et des événements et restitue une pensée
vibrante, frémissante, curieuse et avide, toujours en mouvement,
toujours à l'affût d'une nouvelle rencontre, d'un nouvel éblouissement,
toujours à l'écoute de cette palpitation intérieure que ne fait pas
taire la clameur du monde. Ce paradoxe tensionnel et fécond de l'unité
ontologique et de la fracture discursive se retrouve dans les
différentes dimensions de l'œuvre camusienne, dans le rapport à
l'histoire de son temps, dans le désir du chant de l'intime, dans la
volonté de restituer l'authenticité de l'homme dans ce temps qui est le
sien, sur cette terre qu'il a voulue sienne.
Pour, à l'instar de
Camus, ne renoncer à rien, pour réunir tous les paradoxes, pour faire
entendre la multitude des voix, le foisonnement des œuvres, j'ai choisi
de placer mon parcours sous l'œil attentif et bienveillant de trois
figures tutélaires. J'ose espérer que Camus aurait emprunté, non sans
déplaisir, cette route que j'espère inexplorée, qui n'exclut pas les
incursions inattendues, les chemins de traverse, les explorations
imprévues.
Salomon, constructeur du Temple
Ce personnage
biblique recèle en lui les ambitions de l'homme présent dans sa cité,
acteur de son destin et de celui de ses compagnons. Il est le roi d'une
justice immanente, inscrite à hauteur d'homme, évidente car elle
sollicite la vérité du cœur. Il est un roi de sagesse qui règne dans un
temps de paix. Mais on lui attribue également L'Ecclésiaste qui oriente
sa pensée vers une philosophie liée au temps présent et à la perception
aiguë de la précarité. L'ambivalence non contradictoire entre le temps
de l'action et l'évidence de la nécessité de construire d'une part et
d'autre part la conscience d'un absurde lié à la fugacité de la vie rend
compte de la tension de l'œuvre de Camus où le désenchantement
n'entraîne pas la désespérance. La figure de Salomon permet d'envisager
les engagements politiques de Camus, d'observer comment il a contribué à
maintenir debout les fondations de notre civilisation occidentale mise à
mal par la fureur des hommes et la violence des guerres.
Je
distingue trois temps dans cette dimension de l'œuvre. Le premier temps
est un temps de l'engagement dichotomique. Il permet l'émergence d'une
poétique de l'innocence. Camus a la volonté d'édifier un monde
équitable. Il dénonce les injustices dans son reportage sur la Kabylie.
Il fustige les excès d'une Droite sûre de ses droits en choisissant le
ton acerbe du satiriste. Le verbe engagé prend place sur les planches,
trouvant là une autre tribune pour énoncer son désir d'un monde de
justice et dénoncer les vilenies des hommes et des régimes, des partis,
des gouvernements. Il dénonce les tyrannies dans des adaptations
théâtrales – Malraux, Gorki – ou dans des créations collectives –
Révolte dans les Asturies.
Plus tard – c'est le deuxième temps, le
temps de la parole héroïque – il s'engage avec Pia dans la grande
aventure de Combat. Sa parole est édifiante. Il fait entendre la voix de
l'honneur, en appelle à la justice des nations. Il dénonce les
hypocrisies face à l'Espagne franquiste et défend la République en exil.
Il s'afflige du silence des Occidentaux devant la dictature. Il en
appelle au patriotisme dans ses éditoriaux de Combat. Il s'engage contre
l'invasion soviétique en Hongrie. Il poursuit son engagement
journalistique et met en place un théâtre engagé, en Algérie, avec des
moyens de fortune, puis à Paris dans un moment de sa carrière où il a
gagné, par ses romans, ses essais et sa présence à la tribune des
journaux, une vraie notoriété.
Puis vient le temps du doute et du
désenchantement. Camus se trouve dans la nécessité du silence et d'un
retour sur soi. Il s'isole et se marginalise. Il fait l'expérience des
limites de l'efficacité du discours. Il adapte les Possédés de
Dostoïevski. Cette œuvre magistrale et complexe est le miroir des
paradoxes contemporains et d'un climat délétère de manœuvres et de
suspicions, de mensonges et d'hypocrisies. Ses dernières interventions
journalistiques, obtenues par l'habileté et l'opiniâtreté de
Jean-Jacques Servan-Schreiber et la médiation de Jean Daniel, témoignent
d'un accroissement du doute et du désenchantement et cultivent l'art du
décalage, de la marge, de l'inattendu. Camus déconcerte. On ne le
comprend plus.
Orphée, poète de l'absence
Orphée chante
la perte de l'être aimé et charme tous les êtres vivants. C'est la voix
singulière de l'homme qui se fait entendre ici. Non plus celle qui
s'offre à la communauté mais celle qui s'octroie le droit à la
singularité. Camus laisse vibrer la corde sensible du lyrisme, il
s'autorise le désir d'harmonie et de fusion au sein d'une nature
flamboyante et généreuse, pleine de promesses. Il révèle la fascination
féconde pour la tension nietzschéenne entre Apollon et Dionysos et
l'exploration d'une forme nouvelle de poésie au plus près de l'homme. La
lecture du Nietzsche de La Naissance de la Tragédie lui permet de
comprendre la tension féconde entre le beau figé, hiératique, éternel et
l'éclatante fulgurance d'une vie qui ne se saisit que dans l'éclair, le
fugace, le transitoire, le désordre, la folie. L'antique alliance de
l'apollinien et du dionysiaque a permis l'émergence de la tragédie.
Cette lucidité ne laisse guère en repos. Elle est exigence de tous les
instants et ne cesse de contraindre le sujet à s'interroger sur sa place
dans le monde, sur l'origine de la parole, sur l'identité de celui qui
parle et sur la coïncidence entre ce qui est senti, ce qui est pensé et
ce qui est dit. À moins que le verbe n'ait valeur d'authenticité du fait
même qu'il est proféré, sorti de soi. Ces questions hantent Camus qui
s'interroge au cœur même de son œuvre, qui fait de ce questionnement une
matière poétique. Il s'interroge également, sans être le seul dans ce
siècle de guerres, d'hégémonies destructrices et de génocides, dans ce
monde où la bravoure cède le pas à la lâcheté et à l'hypocrisie, sur la
pertinence d'une parole poétique. Les poètes de ce milieu du XXe siècle,
Jabès, Jaccottet, Bonnefoy, Char bien sûr, l'ami intime, n'ont pas
éludé l'horreur de leur temps. Au contraire, ils l'ont regardée avec la
lucidité des artistes et l'ont inscrite au cœur même de leur œuvre sans
renoncer pour autant au réel de la beauté.
Camus poursuit les mêmes
exigences que ses contemporains sur une voie qui est la sienne, sur une
route où il va, solitaire, sombre et solaire, à la croisée des chemins,
dans le clair-obscur des cultures qui se côtoient sans se comprendre.
Ces exigences multiples ne sont pas aporétiques. Je les explore en
écoutant le son envoûtant de la flûte de Dionysos. C'est une musique de
l'insoumission, une musique non régie par le logos. Elle s'approche du
mystère des origines et de l'effroi de la mort, elle est au plus près
des pulsations intimes, du sang qui bat dans les tempes quand il fait
trop chaud ou que l'émotion est trop intense. Elle nous fait entendre
l'aulos de la Grèce antique. Elle est l'accord mineur, la gamme de
l'être mi-homme, mi-dieu, du satyre, de Pan. Mais ce souffle ne saurait
exister sans l'intervention d'Apollon. L'homme jaillit de l'informel
dionysiaque. Il devient un individu. Il se saisit du logos. Il chante la
beauté du monde accompagné du son mélodieux de sa lyre. L'instrument à
cordes remplace l'instrument à vent. La gamme en accord majeur impose sa
puissance et son unité harmonieuse. Le poète est alors celui qui
cherche la vérité et la beauté, l'équilibre et la vérité. Il est celui
qui poursuit l'éternité dans le chant de l'Un retrouvé. Dionysos et
Apollon s'équilibrent, ou plus exactement s'offrent l'un à l'autre le
pouvoir d'exister. J'ai ajouté un dernier chant, un peu inattendu à ces
deux accords premiers, le mineur et le majeur, celui que produit l'arc
d'Ulysse alors même que le héros retrouve son arme et se venge des
prétendants indignes. Ulysse est présent dans l'œuvre de Camus. Il est
l'homme du nostos, l'homme de la nostalgie et de l'exil. Il est celui
qui ne renonce jamais. Il est ce héros à la fois brave et faible,
invincible et vulnérable, fidèle et infidèle. Il est celui qui a renoncé
à l'immortalité que lui offrait Calypso pour retrouver sa femme, son
fils, son royaume. Il fait le choix de la précarité. Il est un homme. Il
est, dans la métaphore musicale, l'accord dissonant dont parle Clément
Rosset, cet accord qui, au contact de l'accord parfait, permet la fugace
révélation de l'harmonie perdue.
Adam, le premier homme.
Placé
sous le signe d'une temporalité inexorable, il est l'homme de la faute
originelle, le père de Caïn, le premier meurtrier, le premier errant. Il
rappelle le poids du réel et de l'irrémédiable. Le roman apparaît comme
le domaine privilégié pour l'expression de la faute. L'ontologique
s'inscrit dans le temporel, le précaire, l'incertain. Je retrouve le
même cheminement qui conduit de l'innocence à l'édification et au
désenchantement – c'est le parcours que j'ai suivi sous l'égide de
Salomon. Je retrouve le désordre fusionnel dionysiaque qui prend ici la
forme de la carnavalisation bakthinienne, le goût de l'unité dans la
tentation épique, et le désir intact de se maintenir au plus près de
l'humaine condition. Les tensions sont les mêmes et s'entrecroisent.
L'art du roman inscrit l'homme dans un temps linéaire. Ce temps, dans
notre tradition judéo-chrétienne, commence avec la faute originelle qui
conduit Dieu à chasser Adam et Ève du paradis où le temps ni la mort
n'existent.
La matière fictionnelle peut être un succédané à
l'effroi face à la mort et à la culpabilité. Le jeune Camus est d'abord
tenté par une forme d'idéalisme. Ses œuvres de jeunesse, influencées par
Bergson et Nietzsche, sont teintées de symbolisme métaphysique,
d'idéalisme et d'onirisme. Mais, peu à peu, les voix des habitants de
Belcourt s'imposent et trouvent un écho plus puissant. L'écriture
s'allège. La phrase se densifie en même temps qu'elle accède à une plus
grande simplicité. La banalité du quotidien devient la matière première
de l'œuvre fictionnelle. Le fait divers devient source de l'inspiration.
La création se déploie dans l'ordinaire et délaisse les marges
oniriques. Camus s'éloigne d'une conception symbolique de la littérature
et d'une approche rousseauiste de l'homme. En réalité, ce parcours
n'est pas chronologique. Camus aborde la question du mal dès ses
premières œuvres. Dans son Mémoire sur Plotin et saint Augustin, il
examine la conception du mal chez les agnostiques puis exprime pour la
première fois l'intérêt qu'il porte au christianisme qui est la religion
de la souffrance et de la mort. C'est ce moment qui cristallise un
imaginaire lié à la souffrance, au sang mais aussi à l'abandon.Une
remise en question de la notion du souverain Bien kantien entraîne Camus
sur les chemins périlleux de l'exploration des zones obscures, des
morts éthiquement inacceptables comme celles des enfants. Il est
l'auteur de La Peste mais aussi du « Renégat », de La Chute. Il est
l'auteur du meurtre gratuit, de cet acte inacceptable et
incompréhensible, dans La Mort heureuse et L'Étranger. Il n'élude pas
les monstruosités de la guerre d'Algérie dans Le Premier homme et
s'immerge dans les affres slaves, depuis sa mise en scène des Frères
Karamazov dans ses jeunes années, jusqu'à celle des Possédés à la fin de
sa vie.
Mais l'importance de Dostoïevski ne doit pas oblitérer la
place capitale de Tolstoï dans la gestation de l'œuvre. La fréquence des
citations de l'auteur de Guerre et Paix montre la très grande fidélité à
cet autre géant de la littérature russe du XIXe siècle. Tolstoï excelle
dans la représentation de l'homme dans le monde, sous son double
aspect, familier et héroïque. Il recherche l'équilibre, la règle,
l'intelligibilité, l'ordonnance, l'organisation, l'agencement limpide,
la structure, la causalité, le déterminisme. Dostoïevski cultive le
désordre, la débauche, la rupture, le bouleversement, la confusion, la
violence, l'excès, l'incohérence, le trouble. Il étonne et ravit dans
son exploration de l'âme humaine. Tolstoï est du côté de l'épopée,
Dostoïevski se situe au cœur de la ménippée. Je trouve là une opposition
fondamentale dans la genèse romanesque camusienne, un paradoxe entre
l'attrait de l'ordre et du monologisme, le plaisir de la sentence, de
l'axiome, le goût de la vérité et de la hauteur de vue – son versant
solaire, son adret apollinien et, d'un autre côté, sa tentation
du désordre fécond, de la polyphonie, son versant obscur, son ubac
dionysiaque.
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