Cinquante ans après l’indépendance, «Libération» a déambulé dans les rues de la capitale algérienne à la recherche des vestiges de la colonisation française.
Que reste-t-il d’un pays quand ce pays a disparu ? Des immeubles, des gestes, des mots. Cinquante ans après l’indépendance algérienne, la France est partout et nulle part dans Alger, cette ville à la lumière sans touristes. Elle niche comme une villégiature sensible, oubliée, telles ces villas Brise des Alpes, Mascotte ou Les vertes feuilles qu’on repère dans les avenues embouteillées et serpentines des collines d’Alger, et dont les noms seuls évoquent la Côte d’Azur ou un séjour en altitude pour colon tuberculeux. Il existe également des restaurants baptisés Le Mouflon d’or, La Bressane, L’Etoile du Berry, où le mouton cohabite avec la crème brûlée et où la convivialité algéroise, arrosée ou non, se déploie du potage au «p’tit dessert». Près du square Bressant, au bord de la mer, le café Le Tantonville a également gardé son nom et son allure, comme un décor non entretenu. Les Algérois y boivent leur café en terrasse. C’est sale, c’est beau. Aucune femme parmi les clients. Un écriteau signale qu’il y a le wi-fi.
Le Théâtre national (1853). (Photo AFP)
«Le français, c’est notre klaxon»
La langue résiste aux injonctions politiques et les mots, à la façon des lézards, jaillissent ici des fissures de l’arabisation manquée. «La langue, dit Saïd, ingénieur devenu photoreporter, pour moi, elle était, mais elle a disparu. Douze ans d’études en arabe, et je suis incapable de l’écrire. Un beau ratage ! Le français, tout dépend de la première fois. Je le parle avec ceux avec qui je l’ai toujours parlé.»
Saïd a grandi sur les hauteurs d’Alger, dans le quartier Télemly. On le rejoint par l’avenue Télemly, que nul n’appelle Krim-Belkacem (un héros du FLN étranglé avec sa cravate à Francfort, en 1970, par les services de Boumédiène) en passant sous l’Aérohabitat, une extraordinaire barre en suspension qu’on franchit comme l’arche dominant un pont-levis. L’édifice, datant de 1955, symbolise les années populaires du style Le Corbusier. Le père de Saïd a 65 ans, il peine à s’exprimer en arabe. Son fils a appris le français comme première langue vivante à l’école, mais il pense que cette langue disparaît : «Il suffit de voir les tirages des journaux en arabe et en français pour le comprendre.» Son ami Yacine, concepteur de sites internet, parle peu l’arabe, «parce que les gens le parlent vraiment trop mal. Le français s’est glissé dans nos lacunes, comme les mots "klaxon" et "circulation". Le français, c’est notre klaxon.» On l’entend sonner partout en ville, en particulier par les adverbes, «bien sûr», «forcément», «rien», et, comme le signale une étudiante kabyle en souriant, «normal» et «normalement», «des mots qu’on ne dit pas en arabe, je ne sais pas pourquoi».
Il n’y a guère qu’à l’Ecole supérieure de journalisme, fondée voilà deux ans, qu’on enseigne indifféremment dans les deux langues. Amira, 20 ans, licenciée en anglais et fille d’une grande famille algérienne, y étudie. C’est par une petite histoire qu’elle décrit son rapport à la littérature française : «J’ai rencontré une femme qui a été élevée dans l’avarice conjuguée à de la pauvreté. Aujourd’hui, vieille et mère de quatre hommes qui ont réussi et qui habitent dans des pays différents, elle continue de vivre comme quand elle avait 5 ou 6 ans. Elle donne l’impression de s’être figée dans le temps, et chaque fois que je la rencontre, j’imagine Balzac assis à son bureau et écrivant l’histoire d’Eugénie Grandet en pensant à cette femme.»
Sur la rue Didouche-Mourad, ex-rue Michelet. (Photo Zohra Bensemra. Reuters)
Du Corbusier à Fernand Pouillon
Le français a une façon de fleurir bien à lui, à la fois vivante et surannée, comme chez Mehdi, étudiant en commerce qui assure le parler avec sa tante, médecin, laquelle, dit-il brusquement, «parle très bien la langue de Molière», avant de lui répondre au téléphone dans un arabe orné de mots français. «Je ne sais pas comment ni pourquoi les mots me viennent», résume-t-il, ravi, après avoir raccroché.
Mehdi a grandi dans le quartier de Hussein Dey, très islamiste pendant la décennie noire (1991-2001), où l’on croise encore de nombreux barbus. Mais, «quand on veut donner rendez-vous, le point de repère est l’hôpital Parnet, et on dit "à Parnet".» L’une de ses meilleures amies avait 12 ans quand son père a été décapité sous ses yeux. Les tueurs mirent la tête dans un sac et dirent à la gamine de rapporter le tout chez elle. Depuis, elle a émigré au Canada.
Lui-même avait 10 ans quand sa professeure de français de primaire, Mlle Saad, a été tuée par les islamistes sur le chemin des écoliers : «C’était une bonne professeure. Elle avait 40 ans, portait des jupes, des talons hauts, des cheveux tirés, elle était célibataire et elle se foutait d’eux. Mais ce n’est pas d’abord pour ça qu’ils l’ont tuée : la vraie raison est qu’elle avait un frère dans la police qui était particulièrement craint.» Il n’a jamais lu Camus, mais se propose de le faire. On trouve ici des petits folios et des éditions pirates. Le vocabulaire postcolonial reflète l’architecture coloniale : les mots français vivent dans la phrase arabe mal fabriquée, la vie arabe s’est installée dans les murs français décrépits.
Commençons par le centre, grand laboratoire de l’architecture française. Dans son Dictionnaire amoureux de l’Algérie (Plon), Malek Chebel rappelle que, du Corbusier à Fernand Pouillon, «il n’est pas un architecte un tant soit peu imaginatif ou carrément fou qui, dans les années 60 et 70, n’ait eu envie de récréer le paysage algérien à son image et selon ses caprices.» Mais la recréation francophile d’Alger avait débuté, sur le modèle haussmannien, à la fin du XIXe siècle, par le centre.
Place de l'émir Abdelkader, ex-place d’Isly, (Photo Zohra Bensemra. Reuters).
Le programme de rénovation de la ville a commencé fin 2009 avec la rue d’Isly, célèbre pour la fusillade du 26 mars 1962 et pour l’attentat du Milk Bar (30 septembre 1956). Tout le monde continue de l’appeler ainsi. La place d’Isly est devenue celle de l’Emir-Abdelkader, mais à côté de la librairie du Tiers-Monde, l’une des plus importantes d’Alger, le Milk Bar existe toujours sous le même nom. On y mange d’excellentes pâtisseries et on peut boire un café en terrasse, face à la statue de l’émir au sabre levé. La rue d’Isly débute derrière la Grande Poste, que personne n’appelle autrement. Depuis novembre dernier, la première ligne de métro ouverte a d’ailleurs un arrêt «Grande Poste». Le prix du billet est de 50 dinars (50 centimes d’euro). La ligne est trop brève, trop chère, pour ne pas être symbolique.
La rénovation du centre historique avance lentement, au rythme des souvenirs. La Grande Poste date de 1913. Le père et l’oncle de Khaled Mahiout, menuisier dans la haute casbah, participèrent à la création de son extraordinaire décor néomauresque. Ils avaient appris le travail du bois avec les pères blancs. Réputé, Khaled a pour client le ministère de la Culture et quelques grandes familles. Le chêne, le hêtre viennent de France ; le cèdre, du Liban ou d’ici. Son fils travaille également dans l’échoppe. Il a participé à la restauration récente de la basilique Notre-Dame-d’Afrique. Datant de 1872, elle est située à l’ouest de la ville, en altitude, sur un promontoire. Les soirs de foot, les jeunes Algérois s’assemblent sur l’esplanade. De là, ils peuvent voir le match qui se déroule dans un stade situé quelques centaines de mètres plus bas.
Dans la Casbah (Photo Louafi Larbi. Reuters)
La ruelle et la vie de Khaled le menuisier semblent extraordinairement paisibles ; mais il n’y a plus beaucoup d’artisans autour de lui. Les lieux sont aussi crasseux, vétustes, encombrés d’ordures et sublimes que dans les descriptions d’Eugène Fromentin. De 1846 à 1853, le peintre-écrivain français effectue trois voyages en Algérie. Il aime marcher dans la casbah. Un jour, dans une ruelle ascendante et voisine, la rue Darfour, il tombe sur un brodeur : «Il était là, propre, paisible, souriant à son travail, avec un écheveau d’or passé autour de ses oreilles, et découpait attentivement avec un canif des arabesques dans un rond de parchemin. Sa petite lampe en cristal était suspendue par un fil de fer fixé au plafond, à la hauteur de son œil, et pour mieux y voir, il avait posé sur un escabeau, encore plus près de lui, une petite bougie de cire verte et rouge qui touchait à sa fin. Devant lui, dans un vase de terre à long goulot, trempaient deux tiges d’une plante qui ressemble à un petit lis avec une faible odeur d’oranger et qu’on appelle misk-romi. De temps en temps, il interrompait son travail, regardait ses fleurs et se penchait en avant pour les sentir.»
Ne réveiller ni les vivants ni les morts
Il ne faut guère de temps pour retrouver la rue Darfour, que les riverains connaissent encore sous ce nom, même si elle s’appelle désormais Mohamed-Goumri, un héros quelconque que nul ne semble capable d’identifier. Pendant la décennie noire, la plupart des échoppes ont fermé. Les artisans ne sont pas revenus. Il en reste pourtant un, tout en haut, assis au fond de sa boutique. Le temps est passé, avec révolution et guerre civile, mais il ressemble au brodeur de Fromentin. Avec une carte de visite et une adresse internet. Hachemi ben Mira est dinandier, il travaille le cuivre et l’argent, comme son père et son grand-père. Ils vendaient à des grossistes, lui ne vend qu’au détail, à partir de matériaux de récupération. A-t-il songé à partir ? «Non. Ma famille est de la casbah. Pourquoi serais-je allé ailleurs ?» Il parle en arabe et on ne saura pas ce qu’il a vécu. On dit que l’auteur de la Peste, quand il était en panne d’inspiration, aimait venir par ici. Peut-être s’installait-il un peu plus haut, au Café des sports, le café où venait Marcel Cerdan. Le toit s’est effondré, reste le mur extérieur avec ses trois mosaïques d’époque : un boxeur, un footballeur, un cycliste. Un arbre a poussé à l’intérieur.
En redescendant, nous croisons un ancien émir du GIA (Groupe islamique armé), gracié à l’occasion du processus de paix. C’est bien ici qu’eurent lieu les deux batailles d’Alger : celle contre les Français, celle contre les islamistes. La seconde fut la plus longue et la plus sanglante. «Un jour, se souvient Ahmed, notre guide né ici, des gens jouaient là-bas aux dominos. Un groupe d’islamistes est arrivé, ils ont sorti une main d’un sac et ils l’ont déposée sur les dominos. J’étais là.» Ahmed a une quarantaine d’années et travaille pour la mairie. Il a vu ici des corps découpés, des ouvriers ukrainiens égorgés, et il en parle, comme beaucoup d’autres, avec un calme étrange, comme s’il ne fallait réveiller ni les vivants ni les morts. Quand les islamistes avaient massacré quelques conscrits, il allait vivre ailleurs pendant quelque temps, pour éviter les représailles de l’armée. En 1991, il voulut partir se battre en Irak contre les Américains, comme beaucoup de ses amis de la casbah. Il avait les contacts, mais le voyage coûtait 2 000 euros : «Si je les avais eus, j’aurais sans doute fichu ma vie en l’air. Ils m’auraient arrêté au retour et je serais peut-être devenu islamiste.» Pendant les années noires, Ahmed ne montait presque jamais dans la haute casbah.
La Grande Poste, édifice de style néomauresque datant de 1913 (Photo AFP)
La mosquée des chrétiens
La rue Marengo, que tout le monde appelle encore ainsi, délimite le haut et le bas. C’est là qu’est né «M. Roger Hanin», un homme que l’inspecteur Navarro a rendu aussi célèbre que son origine : tout le monde ici regarde la télé française. L’immeuble a été construit sur un bain maure, toujours en activité, auquel on accède par la rue en contrebas. L’acteur revient de temps à autre, dit-on, et apprécie la célèbre pâtisserie Chez Mokhtar, dont le patron est son sosie. A côté d’elle, une vitrine indique qu’ici «on perce les oreilles sans douleur». En face, il y a la mosquée Ketchaoua, qui a subi le même destin que celle de Cordoue sous les rois catholiques : de 1832 à 1962, elle devint la cathédrale Saint-Philippe. C’est pourquoi on l’appelle toujours la mosquée des chrétiens. Non loin, cette publicité : «Buvez Slim, le citron qui prime.»
Vêtu de noir, la barbe teinte comme celle du prophète, l’ancien émir descend la ruelle en silence, avec son cabas noir rempli de légumes. Il s’occupe désormais de toilettes publiques : «C’est le genre de travail que l’Etat leur a donné», dit un fonctionnaire. A quelques mètres, dans la rue Porte-Neuve, il y a un champ de ruines. C’est l’immeuble où s’étaient retranchés les islamistes en 1994. L’armée le fit sauter avec les hommes dedans. On lit encore sur un mur debout : «Vive GIA». Quelques mètres plus loin se trouve la maison où mourut en 1957 Ali la Pointe, héros du FLN, pendant la bataille d’Alger. Le site est signalé. Un peu plus bas, on passe devant un «dortoire». Il y en a plein la casbah. Ce sont des sous-hôtels où les paysans, venus de l’intérieur pour travailler, dorment, à dix par chambre, pendant tout leur séjour, parfois éternel. Des chansons d’Aznavour jaillissent de chez un peintre.
Et voici la rue de la Lyre, où une pâtisserie fut longtemps tenue par une Française appelée la «roumia», que notre guide traduit par «romaine» mais qui signifie plutôt la chrétienne. A côté est né le réalisateur Alexandre Arcady. Deux cours en enfilade, sales et détruites, servent de puits de lumière aux immeubles. Dans la seconde, il y avait naguère une dizaine d’artisans : leurs échoppes sont fermées par des cadenas. Reste un unique tailleur, travaillant dans 3 mètres carrés. Dans cette cour et jusqu’aux années noires, dit-il, des acteurs venaient répéter dans l’après-midi, avant de jouer le soir, un peu plus bas, à l’Opéra d’Alger. Ici ne vivent plus que «des simples». Les balcons intérieurs ont été murés à la brique, de manière à créer des pièces supplémentaires.
L'entrée de la Grande Poste. (Photo Zohra Bensemra. Reuters)
Revenons au centre-ville. Le premier immeuble du programme de rénovation se trouve en face de la Grande Poste, au 64, au-dessus de la Banque nationale d’Algérie et de la boutique L’habillement qui parle. Il date de 1901 et on le voit de loin, c’est pourquoi on a commencé par lui. Il a le style haussmannien raffiné du quartier. Parfois, à partir du quatrième étage, on a ajouté, dans les années 20, deux ou trois étages de style Art déco, tout aussi beaux, et dont les rondeurs puissantes rappellent la mer si proche, et le naufrage qui a suivi. Devant la Grande Poste, un ancien journaliste du quotidien El Moudjahid («Notre Pravda, mais moi, je n’y faisais pas de politique. Jamais de politique !») vend des livres d’occasion pour quelques euros : des critiques de Brunetière, datant de la même année que l’édifice ; une Psychologie du peuple français, par un certain Alfred Fouillée, de 1898. On y lit que «avec la belle humeur, nous avons l’espoir facile, la confiance en nous, en tous et en tout» et que «la volonté, chez le peuple français, a conservé le caractère explosif, centrifuge et rectiligne qu’elle avait déjà chez les Gaulois». «1898, très bonne affaire !» résume l’ancien journaliste algérien.
Boulevard Anatole-Algérie
L’un des plus beaux immeubles du quartier, au début de la rue d’Isly, date de 1896. Contrairement à la plupart des autres, il est entretenu par les habitants. Des cariatides de bronze dominent l’entrée du double escalier. On a volé les flambeaux des statues, puis on les a retrouvés. Une vieille femme, qui habitait sur les hauteurs de la ville, au Clos-Salembier, s’est installée ici à l’indépendance. Elle avait 20 ans : «Mon beau-frère était dans la police. Il nous a prévenus, nous avons défoncé les portes, nous sommes entrés. Mais ensuite, hein, nous avons payé aux Français ! J’ai encore les papiers…»
Elle n’a pas oublié le Clos-Salembier, et c’est en récitant les noms des rues qu’elle s’en souvient : rue des Roses, rue des Marguerites, etc. Ce sont des noms français, mais détachés de leur histoire française. Un savant dirait des phonèmes. Une blague résume cette ambiguïté. Entre la grande mosquée et la mer, au pied de la casbah, il existe ainsi un boulevard Anatole-France, officiellement rebaptisé Amilcar-Cabral, le révolutionnaire guinéen qui disait : «Les chrétiens vont au Vatican, les musulmans à La Mecque, et les révolutionnaires à Alger.» Il mourut assassiné. Certains disent qu’on a rebaptisé le boulevard Anatole-Algérie. C’est une blague algérienne, dite en français.
Le front de mer avec, au fond en blanc, l’hôtel Aleti (Photo HZ. AFP)
A l’est du splendide jardin d’Essai, dont l’édification a débuté en 1832 et qui n’a rouvert que depuis trois ans, le quartier populaire de Belcourt n’a jamais perdu son nom. C’est là que Camus a grandi. Les premiers mois, en 1914, sa mère et lui habitaient au 17 de la rue de Lyon. L’immeuble actuel date des années 20. En s’éloignant, on longe un long terrain vague bouclé, que les gens d’ici appellent le Titanic. A l’intérieur, un centre commercial jamais achevé sert de refuge, la nuit, à des trafics de toutes sortes. Les trous ouverts dans les murs sont régulièrement cimentés.
Camus a grandi un peu plus loin, au 93 de la rue. Il y avait de son temps tout un tas d’échoppes ; il y en a toujours autant. La rue de Lyon est un marché bon marché. La maison de Camus n’a qu’un étage. On y accède par un rez-de-chaussée au vieux carrelage élégant, reconverti en boutique. Un petit homme affecté d’un léger strabisme répare et vend des portables. Comme la plupart des riverains, il dit ne pas connaître d’Albert Camus. Mais, contrairement à eux, il ment. Il n’y a aucune plaque au nom de l’écrivain.
Camus et camion
Celui qui nous a indiqué la bonne adresse ne savait pas que Camus était écrivain et l’appelait M. Bernard Camus. Un autre, plus âgé, a confondu Camus et camion, pour nous indiquer l’ancien emplacement des usines Berliet. Le petit vendeur de portables est le frère cadet du propriétaire de la maison, un homme aux yeux clairs nommé Mokhtar, qui finit par descendre, le corps couvert de plâtre : «Nous sommes en travaux, vous ne pourrez pas visiter.» Sa famille entière est là, et on n’entre pas dans les foyers algériens. Il parle très bien français. Il est «technicien en électricité industrielle». Son père, infirmier, s’est installé ici en 1963 et y vit toujours, avec sa descendance, dans les sept pièces. «Du temps de Camus, dit Mokhtar, il y avait trois familles, un juif et deux Français.» La chambre de Camus, tout au bout du couloir, est au-dessus d’un rideau de fer jaune. Mokhtar reçoit quelquefois des visites, «des Japonais, des Américains, et même la femme de cet ancien Premier ministre espagnol…» Il croit que c’est Felipe González. Le dernier visiteur, en juin, était une ancienne pied-noir du quartier. Sa famille avait ici une bijouterie. Mokhtar n’a jamais rien lu de Camus, mais son père si, et il n’aime pas quand les journalistes lui tendent un piège en lui disant par exemple, d’un air naïf, qu’ils ont déjeuné la semaine dernière avec l’écrivain : «Comme si mon père ne savait pas qu’il est mort en 1961 !»
Camus est mort le 4 janvier 1960 sur une route de l’Yonne. Quelques mois avant notre visite, en janvier à Dréan (ex-Mondovi, sur la côte Est de l’Algérie), l’ambassadeur de France a déposé une plaque à l’endroit où Camus est né. La maison a été détruite. A sa place, il y a aussi un vendeur-réparateur de portables. Le wadi («maire») voulait qu’on grave : «Ici est né Albert Camus…» Mais «ici» n’existant plus, la France corrigea d’un vague : «Ici a vécu Albert Camus…», ce qui n’est pas plus vrai. Les négociations ont été compliquées, aucun ministre algérien n’était présent. Depuis la célèbre phrase tronquée de 1957 - «Je préfère ma mère à la justice» -, la réputation de Camus est officiellement suspendue. La cérémonie fut brève, mais mobilisa, sur le parcours, un bon millier de policiers. Puis le wadi fit visiter aux Français la ferme piscicole locale, avant de demander, pour finir, s’ils pouvaient l’aider à obtenir ce qu’il souhaite élever par-dessus tout : des crocodiles.
La rue de Lyon longe une colline en pente dure où se trouve, à cent mètres, la rue Darwin. Le romancier algérien de langue française Boualem Sansal y a grandi. Son dernier roman, publié en 2011, s’intitule justement Rue Darwin (Gallimard). Pour lui, le quartier n’a guère changé. De Constantine où il se trouve, il écrit : «Les petites traces de la France sont toujours là pour ceux qui voient avec leurs propres yeux, elles font partie de la ville, de son histoire, de ses gènes, et donc de la mémoire et de l’imaginaire de chacun. Elles sont autant visibles pour les autres, mais eux voient avec des prismes, ils regardent ces traces comme les bribes incohérentes d’une histoire survenue sur une autre planète. Ils ne sont pas spécialement antifrançais, au contraire ils iraient bien vivre en France et tout de suite, ils ont été orientés de cette façon, ils ont au demeurant le même regard absent sur les petites traces ottomanes d’Alger, ou les traces arabes, byzantines, romaines, et même, ce qui est plus étrange, berbères. D’une manière générale, ils ne vivent pas dans leur histoire, mais seulement à côté.»
Le monument des Martyrs (photo Reuters).
«Darwin s’appelle Darvin»
Nous cherchons en vain la rue Darwin, jusqu’au moment où le visage d’un habitant s’éclaire : «Ah ! Vous voulez dire la rue Darvin ! Ici, Darwin s’appelle Darvin ! Eh bien, vous y êtes presque !» Dans le roman de Sansal, Yazid, le narrateur, revient sur les lieux et retrouve la «petite favela» où il a passé son enfance : «La rue Blasselle prenait perpendiculairement sur la rue de Lyon, l’épine dorsale de Belcourt, et montait en pente douce, puis, vertigineusement, pour aller s’accrocher tout là-haut à la rue Darwin, en son point médian. […] Darwin formait une corniche, surplombant la terre et la mer, ce qui lui a donné ce petit air hautain.» Il ajoute que, pour y accéder, «les très vieux y passaient beaucoup de temps, à la montée comme à la descente…»
C’est le cas du vieil homme que nous croisons par hasard, grand et droit, revenant de la rue de Lyon avec quelques courses. Un ami à lui, diplomate de retour de La Mecque, l’attend devant chez lui. Il lui a rapporté de l’eau bénite. Le vieil homme nous invite pour une séance de remémoration improvisée qui va durer quelques heures. Il a 83 ans. C’est un avocat historique du FLN. En 1962, il a été ministre de Ben Bella, qu’on vient juste d’enterrer, et il a vite démissionné : «Comme dit Chevènement, un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne.» Chevènement : une trace de la France en Algérie. Il semble ici aussi apprécié, selon les générations, que Chirac, Zidane ou Frank Ribéry. «Mais, complètent plusieurs Algérois, on n’aime pas beaucoup Rachid Taha, parce qu’on croit qu’il est homosexuel, ni Enrico Macias, à cause de son soutien à Israël.» Notre hôte - appelons-le «H.» - ne souhaite pas que son nom soit cité : «Je ne veux que la paix et retourner à Dieu.» Il tape sur le Coran qui se trouve près de lui, sur un vieux guéridon. C’est sa lecture principale. Il aimait aussi Dostoïevski, comme son voisin Camus, mais Camus, depuis la phrase de 1957, il ne l’aime plus : «Pour moi, ça s’arrête à l’Etranger.»
De sa vie, de sa langue, il dit : «Je suis entre le marteau et l’enclume. Je suis de culture française, et je rejette tout l’acquis pour conserver l’inné. J’ai fait un lavage de cerveau en lisant le Coran il y a vingt ans dans la traduction du père de Dalil Boubakeur, le recteur de la Grande Mosquée de Paris.» Désormais, il le lit en arabe. Il rappelle une phrase dite à Louis Joxe, chargé des affaires algériennes et de la négociation des accords d’Evian, par un dirigeant du FLN : «Le plus grand crime que vous ayez commis, c’est que je ne peux m’adresser à vous dans ma langue.» Et il pleure lorsqu’il évoque sa visite en tant qu’avocat, en 1956, aux premiers condamnés à mort du FLN. Dans le grand salon, les portraits de ses ancêtres, une grande famille, le contemplent parmi les vieux meubles français. Il sert du Coca Light. A sa gauche, un piano : «Mon père adoptif me l’a offert. Je faisais mes gammes avec Mme Château. Je ne sais toujours faire que ça. Pas de Lettre à Elise, pas de sonate ! J’allais jouer dans la rue avec les autres et en rentrant je recevais une raclée mémorable ! Je suis un enfant de Belcourt ! Mais j’ai appris le latin.» Sa maison protégée, immense, avec jardin en terrasses, a été bâtie en 1890 par un pied-noir, qui la revend en 1934 au père de H. De la terrasse, au-delà du citronnier, on voit la mer.
Dans la décennie noire, quand tout se dégrade et s’ensanglante, on propose à H. une villa dans un quartier mieux protégé. Il refuse. C’est ici qu’il a grandi. «A l’école de la rue Darwin, nous étions douze Algériens. Je suis le seul à avoir fait des études secondaires. Ensuite, au lycée Théophile-Gautier, il n’y avait que cinq Arabes pour 800 élèves. On nous traitait de bougnoules, de troncs de figuier, de bicots, de ratons, de melons, parce qu’il n’y en a qu’un sur dix qui est bon. Je suis devenu avocat et je suis allé au FLN.» Sa vie défile comme entre vie et mort, dans cette demeure au luxe élégant et vieilli, où les objets de la colonie côtoient la calligraphie arabe. Plus tard, il conclut : «Les pieds-noirs n’ont pas digéré l’indépendance, et nous n’avons pas digéré le colonialisme.» Quelques jours plus tôt, à l’occasion des funérailles de Ben Bella, Kamel Daoud, le chroniqueur du Quotidien d’Oran, écrivait : «Pourquoi il n’y a rien après la mort pendant la vie ? Pas du côté de Dieu, mais celui des Algériens. Ben Bella est mort et ont tous dit [sic] que c’est dommage car l’homme a emporté notre histoire en nous laissant seulement la sienne et celle de Bouteflika et lui. Et après ? Rien. On continue. Cette faculté algérienne d’aller de l’avant vers l’arrière de l’histoire est étonnante.»
Dehors, il pleut. De chez H., si on baisse la tête, on voit la mer ; si on la lève, on voit le Monument des Martyrs. Derrière ce monument, il y a trois cités. Elles ont été construites dans les années 50, en urgence, à l’occasion du Plan de Constantine. Diar Echems, la «cité du soleil», date de 1957-58. Ce sont des barres qu’on dirait en état de guerre, un bidonville que les autorités vident peu à peu. Dans les immeubles déserts, tout a disparu, des tuyaux aux encadrements de fenêtres. Trois familles résistent, sans eau ni chauffage, car les grands enfants ne savent pas où aller. A l’entrée de la cité, deux hommes nous apostrophent en arabe : «N’allez pas plus loin sans nous, vous aurez des problèmes.» Il y a eu des émeutes ici en 2010 - au moment où les relogements ont commencé. On n’aime pas les autorités, on n’attend rien des journalistes.
Palmiers et paraboles
Les deux hommes nous installent dans l’une des trois épiceries restantes (avec une boulangerie et une pharmacie). C’est un réduit que son propriétaire voudrait reconvertir en logement : il habite chez ses parents, sa femme chez les siens. Les deux hommes vont à la pêche aux habitants, méfiants, parfois agressifs. La plupart vivent à dix ou plus dans une seule pièce. Les balcons, comme chez Alexandre Arcady, ont été murés et reconvertis en chambres. Il reste 300 familles, à qui nul ne dit rien. Le Soleil est au sommet de rues en pente, du sommet on doit voir la mer. En contrebas, il y a une Villa des fleurs.
Diar-es-Saâda, la «cité du bonheur», a été bâtie par Fernand Pouillon en 1954. On dirait une belle cité bretonne par temps solaire, hérissée de palmiers et de paraboles. La pierre, couleur de pain, vient des carrières de Marseille. On l’appelle «la pierre qui pleure». Un homme de 60 ans, chauve, né ici, se souvient qu’au début «il y avait le chauffage central, mais il y a longtemps que la chaudière ne marche plus». Les arbres ont été plantés par les habitants, «les plus jeunes ; les autres sont comme nous, ils ont leur âge…» Il raconte que les pieds-noirs faisaient des bals sur la place centrale, entre les palmiers, où sont garées quelques voitures, puis, avec un petit sourire, il ajoute : «Vous voyez cette tour ? A l’indépendance, je les ai vus jeter par les fenêtres les télévisions, les frigidaires, les machines à laver, tout ce qu’ils avaient, pour qu’on ne puisse pas en profiter.»
Ampleur fantomatique et charme décati
Du haut de la tour, au loin, un bâtiment blanc domine l’ouest du port : c’est l’ancien hôtel Aletti, devenu l’hôtel Safir. Avec le Saint-Georges, c’est l’un des palaces algérois de la colonie. Il en conserve l’ampleur fantomatique et le charme décati. Aletti père l’a inauguré en 1930. Le décorateur s’appelait Lavallière. La star invitée pour l’occasion était Charlie Chaplin. Georges Brassens, François Mitterrand, Jacques Chirac ou les généraux putschistes de 1961 sont descendus ici avant l’indépendance. Dans les bureaux de la direction, une coupure de presse de 1955 montre l’actrice Suzy Delair, recevant «une plaquette de l’orphelinat mutualiste de la police».
Déclaré bien vacant en 1962, l’hôtel Aletti est nationalisé, mais conservera son nom pendant vingt ans. On l’appelle toujours ainsi. Che Guevara, Patrice Lumumba sont ses hôtes à la grande époque révolutionnaire. Pendant la décennie noire, sa place centrale fait qu’il est réquisitionné. Il devient le camp retranché des parlementaires algériens. Depuis, il se relève difficilement.
L’Algérie fait peur aux touristes, certains directeurs étaient corrompus. Le petit-déjeuner reste épouvantable, mais la salle à manger, avec ses hauteurs staliniennes et sa vue sur le port, fait passer le goût du café. Il arrive que des cafards grimpent le long des grands rideaux orange. On leur sourit en écoutant de la musique classique. Les 150 chambres, qui communiquent entre elles pour faire éventuellement appartements, ne sont pas toujours propres, mais leur style et leurs balcons Art déco font passer outre. Le personnel est aimable. Les prix, raisonnables. Les clients oublient de fermer la double porte des deux ascenseurs sublimes, le personnel grimpe et descend les escaliers pour les refermer. L’Aletti est une splendeur de l’Art déco et l’un des lieux les plus fascinants d’Alger.
François Hollande côtoie Roger Hanin
L’actuel directeur, Sami Djilali, né à Bougie en 1956, est en place depuis 2003. C’est un grand homme apparemment austère, réservé. Il fait visiter nonchalamment le passé de l’hôtel : son ancien casino, avec un perchoir pour les inspecteurs de jeux, et l’escalier majestueux qui ouvrait sur la mer, aujourd’hui fermé. Un gigantesque Poséidon de 1950, peint et ciselé sur un miroir vieilli, domine la salle de jeu. Un saint Georges terrassant le dragon protège le bar Art déco, très cosy dans ses tons bruns, et qui donne également sur la mer. Un couloir ouvre sur l’ancienne discothèque et, au-dessus, l’ex-restaurant Chantecler. Rien n’a encore été rénové. L’Aletti est suspendu à son passé comme un lustre au plafond écaillé.
Le second palace colonial, l’hôtel Saint-Georges, dit El-Djazaïr, est situé sur les hauteurs de la ville. Il a été restauré dans son style néomauresque. Sur les murs du bar, en noir et blanc, des photos des clients populaires, pêle-mêle, algériens et français. François Hollande côtoie Roger Hanin, juste sous Luis Fernandez. Plus loin, on remarque Charles Aznavour, Samy Naceri, Jean-Pierre Foucault, PPDA, Jean-Claude Brialy, Bertrand Delanoë, Alexandre Arcady, Smaïn, Béatrice Dalle et Gad Elmaleh. Les grands écrivains sont à l’entrée, dans les courants d’air. Ils sont tous morts.
La librairie des Beaux-Arts, située dans le centre, est l’une des plus anciennes d’Alger. Elle est minuscule, sur deux étages unis par un vieil escalier de bois. On dit que Camus venait s’installer sur les marches pour corriger ses articles. Elle a été fondée par Pierrette Lazerges, qui créera plus tard, à Aix-en-Provence, la librairie Vents du Sud. Elle laisse les Beaux-Arts après l’indépendance au catalan Joaquim Grau, que tout le monde appelait Vincent. Des islamistes le descendent sur le pas de la porte le 21 février 1994
Un texte, avec sa photo, rappelle sa vie et les circonstances de sa mort. C’était une forte personnalité, qui prêtait les livres et écoutait du jazz. Depuis, la librairie a été régulièrement menacée de fermeture par les hausses de loyer. En avril, il était de nouveau question qu’elle disparaisse. Malika Sadeg, la Kabyle volubile qui s’en occupe et qui aime Alphonse Daudet, fermait la porte à clé pour éviter que la propriétaire des murs ne vienne faire un scandale, «c’est une folle et c’est son habitude.» Elle pleure légèrement quand elle parle de la mort de Vincent et du destin de la librairie, puis elle rit parce que la vie continuera.
Comme partout ailleurs, on ne trouve pas ici les livres de l’un des plus grands auteurs algériens de langue française, le défunt Kateb Yacine. Le Seuil, son éditeur méfiant, refuse de vendre les droits. C’est un effet pervers de la décolonisation et c’est un peu comme si l’on ne trouvait pas en France les Misérables ou Voyage au bout de la nuit. Que vend Malika ? «Beigbeder, celui-là, c’est la folie. Il y a aussi la Belge, Nothomb. D’Ormesson est très demandé. Attali, c’est pas ma tasse de thé, mais on me le demande. Et Michel Onfray est venu ici. Il est allé voir la maison de Camus.» Les livres du «géopolitologue» Pascal Boniface sont là comme ailleurs, luisant dans le vide éditorial ambiant, mais elle fait la grimace et dit qu’ils ne se vendent pas. Quant à Camus, «c’est la coqueluche, il est algérien quand même !» Sur le mur d’en face, à côté d’une photo où il apparaît en compagnie de Jules Roy et d’Edmond Charlot, il y a une citation de l’Eté : «En ce qui concerne l’Algérie, j’ai toujours eu peur d’appuyer sur cette corde intérieure qui lui correspond en moi et dont je connais le chant aveugle et grave.»
Le site archéologique de Tipaza, situé à 69 kilomètres à l’ouest d’Alger. (Photo Zohra Bensemra.Reuters)
Dans l’Eté, il y aussi un texte de 1952, intitulé «Retour à Tipasa». Camus aimait ce site archéologique, situé à 69 kilomètres à l’ouest d’Alger. Une nouvelle autoroute y conduit, longeant la mer et traversant les cités construites par ces invisibles fourmis qui fascinent les Algériens et que sont les Chinois. Tipasa, ou Tipaza, est un petit port à côté duquel se trouvent des ruines romaines et chrétiennes datant du IIe siècle après J.-C.
Camus a écrit deux fois sur ces lieux. Le premier texte, «Noces à Tipasa», date de 1937 ; le second est «Retour à Tipasa». Entre les deux, la jeunesse est partie et la guerre a passé. Une stèle a été faite, un an après la mort de l’écrivain, par son ami le sculpteur Louis Bénisti. Elle se trouve sur la colline ouest du site, isolée, face à la mer. C’est un bloc rectangulaire pas très haut, d’une pierre dure et ocre. On y a gravé : «Je comprends ici ce qu’on appelle gloire : le droit d’aimer sans mesure. Albert Camus.» Ces mots sont tirés de «Noces à Tipasa». L’écriture est à peine lisible. Elle disparaît dans le crépi de la pierre, comme les ruines dans le paysage, comme la France dans les traces qu’elle a laissées.
Les jeunes Algériens viennent ici flirter, rêver, se baigner, comme au temps de Camus. Un groupe d’étudiantes aux cheveux couverts est venu étudier et dessiner les ruines sur du papier quadrillé. La plupart ne connaissent pas l’écrivain. Au printemps 1958, Camus retourne une dernière fois à Tipasa. Dans ses Carnets, il écrit : «Je mourrai et ce lieu continuera de distribuer plénitude et beauté. Rien d’amer à cette idée. Mais au contraire sentiment de reconnaissance et de vénération.» Et, dans Retour à Tipasa : «Oui, il y a la beauté et il y a les humiliés. Quelles que soient les difficultés de l’entreprise, je voudrais n’être jamais infidèle ni à l’une ni aux autres.»
.
Par PHILIPPE LANÇON
Les commentaires récents