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L’historien Benjamin Stora, spécialiste reconnu de l’histoire
coloniale du Maghreb, et plus particulièrement de l’Algérie (une
vingtaine d’ouvrages), revient avec Les guerres sans fin.
Un historien, la France et l’Algérie. Dans ce livre, entre étude historique et témoignage personnel, paru en août aux éditions Stock, Benjamin Stora « associe une réflexion sur l’écriture de l’histoire et l’engagement de l’historien à une analyse profondément originale des rapports entre la France et l’Algérie », signale son éditeur.
Et de préciser : « Guerre d’indépendance, conflits de mémoire et séquelles post- coloniales, guerre civile algérienne, luttes intestines… des deux côtés de la Méditerranée les effets des combats n’en finissent pas, comme les répliques des tremblements de terre. Les rapports entre l’Algérie et la France sont ensanglantés, passionnés, obsédants, durablement marqués par une conflictuelle proximité.
A distance des passions partisanes, froide par méthode, l’histoire de ces relations tourmentées s’écrit néanmoins à chaud et l’exercice est parfois périlleux. Un jour de juin 1995, Benjamin Stora reçoit des menaces et un petit cercueil en bois dans une grande enveloppe beige. »
En introduction, Benjamin Stora écrit que ce livre est un « retour sur les conditions de ’’fabrication’’ de toutes ces histoires algériennes et maghrébines, par les archives écrites, les témoignages, les images ».
Il explique aussi qu’il se présente comme une suite de La Dernière Génération d’octobre (éditions Stock 2003) « qui racontait essentiellement mon engagement politique de 1968 à 1985. Il s’agit cette fois d’un autre engagement à travers l’écriture de l’histoire de l’Algérie, du Maghreb, de l’immigration algérienne en France ». Et de préciser : « Mais on découvrira au fil des pages que ces deux formes d’engagement ne s’opposent jamais vraiment, elles fonctionnent plutôt en miroir l’une de l’autre »…
« Des histoires doubles donc, qui montrent un historien ‘‘classique’’et un historien engagé, dans le seul temps qui vaille : le présent. Non pas un historien du présent, mais un historien au présent, par dessus tout sensible à la présence de l’histoire, en son lieu actif, vivant, qui est la mémoire. » Quelques pages plus loin, dans un chapitre sur l’Histoire et le rapport à l’origine, Benjamin Stora écrit : « Je me suis souvent demandé d’où venait mon ’’engagement’’ pour cette histoire algérienne.
Le lieu de naissance, au sens large, peut fabriquer une ’’carte d’identité’’, un parcours. Les conditions sociales, matérielles, la pauvreté dans lesquelles j’ai vécu avec mes parents quand j’étais enfant, notamment en France après mon arrivée d’Algérie en 1962, permettent de comprendre le basculement vers des motifs de reconnaissance culturelle, voire de revanche sociale.
Mon engagement politique à la faveur d’une période qui est celle de l’après-mai 68 peut expliquer ensuite mon parcours intellectuel. La terre natale, la misère sociale, l’engagement révolutionnaire, la passion de la recherche historique : comment peut s’organiser un ordre de préférence ? » L’auteur a structuré son ouvrage en quatre parties : Du militant à l’historien (1968 -1978).
Dans cette première partie, on trouve notamment un chapitre sur le choix de Messali Hadj, dont l’étude a inauguré le travail d’historien de l’auteur. La seconde partie intitulée Suivre les pistes biographiques, s’ouvre sur un chapitre consacré à Mohamed Harbi, un passeur. Dans La mémoire et les images, Benjamin Stora aborde notamment les trous et traces de mémoire, la découverte de ’’deux oublis’’. L’Algérie en sang (1991-1995), est le titre de la quatrième partie.
L’auteur, qui conclut son ouvrage par deux chapitres sur un impossible oubli et la communautarisation des mémoires, écrit que l’exil, le passage par l’autre restent décidément des moments nécessaires pour atteindre une position d’où l’on peut voir des deux côtés, tout en n’étant ni d’un côté ni de l’autre. A Camus, auquel il se réfère ici, Benjamin Stora reprend, en annexe du texte d’une conférence qu’il a donnée le 6 octobre 2007 : « Il y a cinquante ans, le prix Nobel était attribué à Albert Camus. »
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Benjamin Stora est l’auteur d’une vingtaine d’ouvrages dont Messali Hadj, pionnier du nationalisme algérien, (Le Sycomore, 1982, Casbah, 1999, Hachette littérature 2004), Dictionnaire biographique de militants nationalistes algériens, 600 portraits (L’Harmattan, 1985), Les Sources du nationalisme algérien. Parcours idéologiques. Origine des acteurs (L’Harmattan, 1988), La Gangrène et l’Oubli. La Mémoire de la Guerre d’Algérie (La Découverte, 1991), La Guerre invisible (Presses de Sciences Po, 2001), Algérie-Maroc, histoires parallèles, Destins croisés (Maisonneuve & Larose, 2002), Les Trois Exils - Juifs d’Algérie (2006, Stock)"
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Par Nadjia Bouzeghrane Le 1er Septembre 2008.
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