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Face à la détermination et à l'héroïsme des Algériens
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Il y a tout juste 47 ans, le 22 avril 1961, un groupe de généraux français, qui comptaient parmi les plus célèbres officiers de l’armée coloniale, tentèrent un coup d’Etat militaire, à Alger, encouragés par l’organisation terroriste OAS, de triste mémoire. Retour rapide sur ce sombre épisode de l’impérialisme français.
Six longues années étaient passées depuis le déclenchement de la Révolution du 1er Novembre 1954, considérée comme l’une des plus grandes luttes de libération du XXe siècle. Le peuple algérien, agrippé à son idéal et sous la conduite du Front de libération national (FLN) et de son prolongement militaire, l’Armée de libération nationale (ALN), continuait le combat, sûr de la victoire finale et toute proche.
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Un militantisme de longue haleine et ininterrompu
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Quand eurent lieu les tragiques événements du 8 mai 1945, dans les principales villes et agglomérations de l’Est algérien, un chef militaire français qui avait conduit en partie les atroces opérations de répression contre les civils algériens, avait averti ses responsables politiques qu’«il leur assurait la paix pour dix ans seulement». Il ne croyait pas si bien dire, ce militaire dont la vision prémonitoire s’est avérée juste et auquel l’avenir a donné pleinement raison. Car, loin de se décourager, malgré la perte en peu de jours de 45 000 braves innocents (les sources françaises citent le chiffre dérisoire de quelques centaines «seulement» de tués), les Algériens étaient revenus à la charge, de nouveau, plus déterminés que jamais à s’affranchir du joug colonial.
L’administration coloniale, sûre d’elle, voulait jeter de la poudre aux yeux avec le fameux statut de 1947 pour séduire l’élite du peuple. Elle organisa ainsi, sous l’ère du gouverneur (socialiste de surcroît) Naegelen les élections locales ou pour l’Assemblée algérienne les plus truquées qu’on puisse voir (malgré l’existence de deux collèges). Les services de renseignements (plusieurs et spécialisés) surveillaient tout avec beaucoup de vigilance et de façon constante. Ils comptaient sur un très nombre de traîtres, d’indicateurs et de «taupes» pour s’informer des activités nationalistes des militants des partis algériens. Les formations politiques nationalistes, à cette époque-là, étaient les suivantes. D’abord, le Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD), héritier de l’Etoile nord-africaine, et présidé par le vieux leader Messali Hadj, bientôt dépassé par les événements d’une part, et par les jeunes responsables de la deuxième génération (Aït Ahmed, Boudiaf, Ben Bella, Ben M’hidi, et leurs compagnons).
Il y avait également l’Union démocratique pour le manifeste algérien (UDMA) de Ferhat Abbas qui abandonnait peu à peu ses thèses assimilationnistes pour des positions plus radicales. L’Association des Oulémas, fondée en 1931, entreprenait une action réformatrice en profondeur en direction des masses et était dirigée par cheikh Bachir El Ibrahimi, vieux compagnon du savant Abdelhamid ben Badis, décédé le 16 avril 1940. Complétait ce tableau, le Parti communiste algérien dont la création remontait à l’année 1937, juste après l’arrivée du Front populaire de Léon Blum au pouvoir, en France. Il comptait dans ses rangs aussi bien des éléments européens que des Algériens. Cette formation politique ne croyait pas à l’idée d’indépendance mais elle était plutôt convaincue que la libération du pays passait, d’abord, par l’acquisition de la classe ouvrière de ses droits et de son affranchissement de l’exploitation capitaliste.
En 1953, alors que le monde entier était secoué par les luttes de libération un peu partout, et que des divergences très graves minaient les relations entre les blocs de l’Ouest et de l’Est et que les conflits armés liés à la guerre froide faisaient craindre une troisième guerre mondiale destructrice, en Algérie, une crise interne profonde secouait le parti de Messali Hadj. En effet, ce dernier était en désaccord avec le comité central qui lui reprochait sa gestion du parti et sa conduite des affaires ainsi qu’un certain immobilisme qui bloquait complètement l’évolution du MTLD. Las des querelles internes, de jeunes militants issus de l’Organisation spéciale (OS, créée en 1947) qui devait conduire le soulèvement armé à cette date, entreprirent de mettre en place une troisième tendance résolument décidée à regrouper tous les courants nationalistes et déclencher la lutte armée. C’est le Comité révolutionnaire pour l’unité et l’action (CRUA), qui a vu le jour en juillet 1954, pour devenir au lendemain de la Révolution le Front de libération national (FLN) qui a conduit le pays vers l’indépendance après sept ans et demi de lutte implacable et de combats acharnés sur tous les plans (politique, militaire, diplomatique, de la propagande…).
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L’embrasement et les tentatives d’étouffer la Révolution
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Cet article n’ayant pas la prétention de relater l’évolution de la glorieuse lutte de libération du peuple algérien, contentons-nous d’évoquer la réaction des milieux colonialistes qui furent totalement surpris par la spontanéité et la simultanéité des actions qu’a connues le pays. Le cours des événements leur échappait complètement malgré les puissants potentiels économiques, militaires et diplomatiques dont disposait la France et qu’elle avait mis en pratique pour étouffer la lutte armée algérienne. Dès le début, ses dirigeants déclaraient qu’«il n y avait qu’une seule France de Dunkerque à Tamanrasset», et que «la France était chez elle en Algérie et elle le restera»…
D’innombrables et de sordides complots ont été fomentés, de scabreuses opérations «psychologiques» étaient savamment montées en laboratoire par les services secrets pour détruire de l’intérieur l’organisation de l’Armée de libération nationale (ALN), de puissants moyens militaires et logistiques étaient mis à la disposition des chefs militaires pour «pacifier» le pays. En vain. D’autre part, de 100 000 soldats, en 1954, les effectifs militaires montèrent rapidement à 500 000, vers 1956, pour atteindre 800 000 aux débuts de 1960. Les meilleures troupes de l’armée française (l’une des plus puissantes du monde mais cela ne l’a pas empêché de mordre la poussière durant la guerre d’Indochine devant les valeureux Vietnamiens) furent engagées sous la conduite d’officiers de haut niveau et à la compétence avérée et qui se targuaient d’être des spécialistes de la «guerre révolutionnaire» (car ayant combattu – avec le piteux résultat qu’on sait -- le communisme en Asie du Sud-Est). Il serait superflu se s’étendre sur toutes les tentatives inutiles et toutes vouées à l’échec tentées par l’Etat impérialiste français pour mettre à genoux le peuple algérien plus déterminé que jamais à continuer le combat libérateur jusqu’à l’indépendance.
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Le 13 mai 1958 et le retour du général de Gaulle
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Les ultras et les partisans de «l'Algérie française», avaient organisé un simulacre de révolte, le 13 mai 1958 au forum à Alger, contre le gouvernement de la Quatrième République croyant qu'avec l'arrivée au pouvoir du général de Gaulle ils allaient concrétiser leurs rêve de garder l’Algérie française, rêve qui s’est aussitôt évanoui face aux succès militaires, politiques et diplomatiques enregistrés par la Révolution. Cette situation a contraint de Gaulle à opérer un recul progressif par rapport à ses premières intentions, notamment après son discours du 14 juin 1960 --- dans lequel il invitait le Front de libération national à la table des négociations -- et qui fut interprété comme une trahison par les colons et les militaires extrémistes.
Envahis par l'inquiétude, ils créèrent, le 16 juin 1960, le Front de l'Algérie française (ou FAF) qui fut utilisé par les autorités françaises comme un moyen de pression dans toutes les occasions de discussion avec le FLN. Ses ramifications s'étaient étendues jusqu'au fin fond du territoire français où Jean-Marie Le Pen (ancien parachutiste qui a participé à la bataille d’Alger) avait fondé le Front national pour l'Algérie française. La colère et le ressentiment des éléments irréductible au sein de la classe politique, de l’armée ou de la population pied-noir, s'accentua davantage après le discours prononcé par la «Grande Zohra» (sobriquet utilisé par les Européens d’Algérie pour désigner de Gaulle), le 4 novembre 1960, évoquant l'idée d'une «Algérie algérienne».
Après le référendum de janvier 1961 en sa faveur, le fondateur de la Cinquième République avait obtenu le feu vert pour poursuivre sa politique tendant à faire sortir la France du «bourbier algérien».Il entreprit de dissoudre le Front de l'Algérie française, expulsa la plupart des chefs activistes qui «grenouillaient» à Alger, et expurgea l'armée et les appareils de sécurité des éléments rebelles adversaires à ses orientations politiques et à sa conduite des affaires publiques. En réaction, des chefs de l'opposition prirent l'Espagne comme base arrière pour organiser leurs rangs et planifier leurs actions pour contrer de Gaulle et mettre la pression sur lui afin de lui faire abandonner sa politique soit disant «d’abandon de l’Algérie française». Dans ce cadre, une réunion de coordination tenue secrète eut lieu dans la capitale espagnole, Madrid, groupant les principaux chefs ultras qui avaient participé activement aux événements qu’a connus le régime français (la rébellion du 13 mai 1958 et la semaine des barricades, le janvier 1960, entre autres). Ces rencontres avaient regroupé, principalement, Jean-Jacques Susini, le chef des étudiants pieds-noirs, et Pierre Lagaillarde, un parachutiste notoire qui avait tenté de fomenter une rébellion anti-de Gaulle au début de l’année 1960. D’autres éléments, chauds partisans de la présence française en Algérie, étaient présents à cette réunion entourée du secret absolu et qui aboutit à la création de l’Organisation armée secrète (OAS) le 10 février 1961.
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26-04-2008
Mihoubi Rachid
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