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« Un attentat sanglant », « Terrorisme en Algérie », « Bombes humaines à Alger »… Que de titres qui pourraient décrire l’atroce réalité d’un pays que nous aimons tant, un pays dont les immenses richesses naturelles auraient dû en faire un eldorado, un pays « où coulent le lait et le miel ». Les derniers attentats sont, nous l’espérons avec ferveur, les derniers soubresauts d’une guerre civile qui a fait cent mille morts. On a fait l’erreur, dans les années 80, d’engager le pays dans un processus démocratique alors qu’il était loin de pouvoir en assumer les conséquences car trop de braises couvaient au sein de la population, trop de conflits latents et les partis politiques n’ont fait que refléter et exprimer ces divisions ethniques, religieuses, régionales… Les dirigeants de cette époque ont commis l’erreur tragique d’autoriser un parti politique qui se réclamait de la religion pour gouverner, le F.I.S de sinistre mémoire, qui remplissait les stades de foules haineuses et hurlantes, fracturant pour longtemps la société algérienne. On ne peut impunément souffler sur les braises de la discorde durant des années, sous couvert de démocratie, et s’étonner de récolter guerres civiles et attentats. Je voudrais rendre hommage aux dizaines d’intellectuels, de journalistes, d’écrivains massacrés par des assassins sans gloire qui voulaient éradiquer la sève de l’intelligence et du savoir pour plonger l’Algérie dans les ténèbres du fanatisme et de l’intolérance. Le sang versé de ces martyrs doit insuffler en nous le courage de résister à toutes ces pulsions qui cherchent à entraver notre marche vers la raison et la piété véritable.
Nous devons tirer les leçons de cette expérience démocratique algérienne et de ses conséquences désastreuses pour comprendre les erreurs à ne pas faire. La démocratie exige une longue et lente pédagogie. Il ne s’agit pas d’obéir à un formalisme juridique, il faut qu’elle s’exerce dans les faits pour le plus grand bonheur des citoyens, elle est donc, par delà le cadre stricte juridique, un état de conscience. On ne naît pas démocrate mais on le devient par l’éducation, par la compréhension et le respect des institutions républicaines.
Avant de prétendre à la démocratie, et cela vaut pour tous les pays dits émergents, on peut même ajouter pour la majorité des pays développés qui se flattent à tort de l’être car leurs criantes et honteuses inégalités sont la preuve de leurs immenses lacunes démocratiques, il faut auparavant construire une république digne de ce nom, instaurer des institutions républicaines aptes à assurer un Etat de droit et surtout insuffler un esprit citoyen à tous les membres de la société pour construire une véritable cohésion nationale basée sur la solidarité et qui ne consiste pas simplement à se réunir pour encourager son Equipe Nationale, mais à aimer son pays, à être nourri par un esprit patriotique.
Comment construire une nation sinon en insufflant un idéal à sa jeunesse, un idéal qui peut la mobiliser et lui éclairer son avenir. Une seule idée peut soulever d’enthousiasme notre jeunesse, celle d’un Maghreb uni et fraternel. Tout comme l’idée européenne a été le moteur du développement pour les pays européens, le Maghreb est une espérance qu’il est temps de concrétiser. Bien sûr, il faut être pragmatique et ne pas s’illusionner en pensant que cela peut se réaliser d’un trait de plume entre dirigeants, mais il est urgent à présent de comprendre et de dépasser les blocages qui gèlent la coopération maghrébine, les méfiances, les rancunes, les atavismes multiples hérités d’une Histoire trop souvent conflictuelle.
Bâtir le Maghreb exige beaucoup d’humilité et en même temps d’être habité par une formidable conviction, une foi capable de déplacer des montagnes. Il faut savoir que les échanges économiques entre les cinq pays du Maghreb sont dans leur globalité à hauteur de 2%. Ce chiffre n’est-il pas une aberration lorsqu’on connaît les immenses potentialités inhérentes à chaque pays ? Par exemple, une information que je viens de découvrir : le produit tunisien exporté en Algérie est taxé de telle manière qu’il est plus cher que le produit européen. Est-ce que cela est concevable et comment en est-on arrivé là ? N’est-il pas temps d’insuffler une véritable coopération économique en érigeant la préférence maghrébine qui encouragerait les échanges entre nos pays. Il faut se rappeler que l’Europe a commencé par un accord économique : la Communauté du charbon et de l’acier qui lentement a évolué, avec des hauts et des bas, vers la construction de l’Europe qui n’est pas, plus de cinquante plus tard, une Europe politique.
C’est cela qu’il faut comprendre et accepter, il ne s’agit pas pour l’instant de constituer un Maghreb politique mais uniquement un Maghreb économique qui impulserait nos échanges économiques en profitant à tous, chaque pays conservant ses prérogatives politiques, son système politique, sa diplomatie, sa défense…Seul le marché maghrébin peut donner de l’amplitude à nos industries et à nos usines pour grandir et conquérir des marchés de par le monde, le Maghreb comme tremplin pour nos entreprises car il ne faut pas se leurrer, seul le développement économique nous donnera les armes pour lutter contre les extrémismes qui nous menacent. Nous pouvons dès demain relancer notre coopération si nous avons la conviction que l’idée maghrébine est pour nous la seule voie de salut, une coopération encore une fois essentiellement économique basée sur la franchise et la fraternité qui ferait l’affaire de tous.
Notre lyrisme naturel, à nous Méditerranéens, nous engagerait à vouloir tout de suite un Maghreb politique et une fusion des peuples ; c’est cela qui est déraisonnable car il faut lentement bâtir des liens sociaux, culturels et humains comme des cousins que l’Histoire a éloignés et qui réapprennent à se connaître. Qui mieux que des liens seulement économiques pour commencer à ériger la belle ambition d’un Maghreb uni qui est notre espérance profonde… ? Pourquoi ne pas commencer aussi par des échanges d’étudiants pour que nos futures élites soient éduquées dans l’amitié et dans la fraternité à l’image d’ « Eramus » qui se pratique entre les pays européens depuis des années et qui porte ses fruits… ? Un projet d’échanges entre étudiants maghrébins que l’on peut appeler : « Ibn Khaldoun », du nom de ce génie maghrébin qui fait l’honneur de notre pensée avec l’avantage de posséder une langue qui nous est commune.
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Foued Zaouche ฟ ห ก . Le Maghreb en apesanteur . L'Union du Maghreb Arabe (UMA), lancée à la fin des années 80, n'est pas allée jusqu'au bout du désir intégrationniste des peuples. Les institutions mises en place ressemblent plutôt à une... coquille vide ! Force est de constater que l'électroencéphalogramme demeure désespérément plat ou presque ! par Hichem Ben Yaïche ด เ ๆ |
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