du 08-07-1835 au 22-10-1837
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Les désastres de la Macta eurent un sombre retentissement en France; on s’indignait qu’un brave général, pour soutenir l’honneur français, eût été obligé, avec deux mille cinq cents hommes, de combattre le seul ennemi que la France eusse alors en Algérie, tandis que le gouverneur général commandait à près de vingt-cinq mille hommes; on s’indignait surtout qu’après tant de sacrifices, ladomination fût encore si peu avancée. Quinze mois d’une guerre équivoque dans l’ouest avaient séparé les populations du centre, et un seul revers rendait le courage aux plus humbles ennemis. De toutes parts, le fanatisme se réveillait, et, sous le titre de prince des fidèles (Emir-el-Moumenhim), ou de protecteur de la religion, Abd-el-Kader était maintenant accueilli par elles avec enthousiasme. De Médéa à Tlemcen, les villes et les tribus semblaient ne pas vouloir reconnaître d’autre chef; Blida même ne nous redoutait plus, et acceptait un hakem envoyé par lui; si Koleah résistait encore à l’élan général, son apparente soumission provenait surtout du voisinage menaçant des camps de Douera et de Mahelma.
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En présence d’une situation si déplorable, les plaintes contre le gouvernement se renouvelaient avec d’autant plus de force qu’il s’était solennellement engagé à quitter cette marche tortueuse qui, pendant quatre années, avait fait douter de la conservation de la conquête. La commission d’Afrique venait de se prononcer; le ministère lui-même, n’osant pas se mettre en hostilité avec elle, avait proclamé, du haut de la tribune, que la France n’abandonnerait jamais la colonie. Que fallait-il penser d’une conduite si peu en harmonie avec de telles promesses ?
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Pour se soustraire à ces reproches malheureusement trop fondés, le ministère se décida à donner une satisfaction éclatante à l’opinion publique; il nomma le maréchal Clausel gouverneur général; c’était assez dire qu’il voulait avoir raison de l’émir et venger la défaite de la Macta. Alors toutes les espérances se tournèrent vers celui qui avait donné tant de gages de son dévouement à la colonie. Le voyage que le maréchal avait fait en Algérie pendant l’année 1833, pour étudier, pour juger l’état du pays, inspirait la plus grande confiance aux colons. Ils pensaient tous que, cette fois, il joindrait aux admirables qualités qu’il avait montrées en 1830 un système d’administration mûri par l’étude et la réflexion. Malgré l’épidémie qui commençait déjà à exercer ses ravages, la population d’Alger se porta en masse au-devant du gouverneur et le salua par d’unanimes acclamations. En France, cependant, cette ovation si caractéristique ne fit que suspendre les attaques des ennemis de la colonisation, toujours habiles à saisir les moindres circonstances qui pouvaient nuire à son développement; le choléra leur servit, cette fois, de prétexte pour faire ajourner l’expédition contre Abd-el-Kader.
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Pendant plus de trois mois qu’il resta à Alger, en attendant les renforts qu’on lui avait promis, le maréchal Clausel chercha sans beaucoup de succès à établir des beys à Cherchell et dans la province de Tittery. Il s’aperçut alors combien l'influence française était déchue sous la triste administration de son prédécesseur et s’occupa des moyens de la relever. Enhardis par l’impunité, les Hadjoutes avaient repris le cours de leurs brigandages; ils venaient égorger les postes jusque sur le massif d’Alger; mais un ennemi plus à craindre encore, Sidi-ben-M’Barack, l'ancien aga, et maintenant bey de Miliana pour Abd-el-Kader, s’était montré dans la plaine avec des forces considérables. Le maréchal réunit environ quatre à cinq mille hommes, les seules troupes dont il pût disposer, et se porta contre le lieutenant de l’émir; il le battit sur tous les points et le refoula jusque dans les montagnes. En revenant, il parcourut le territoire occupé par les Hadjoutes, et détruisit tout ce qu’il rencontra de cabanes et de cultures; quant aux habitants ils avaient, comme à l’ordinaire, pris la fuite . Cette petite expédition, quoique insignifiante dans ses résultats matériels, produisit sur les Arabes l’effet qu’en attendait le maréchal; ils apprirent que le gouvernement était entre des mains fermes, qui savaient faire respecter l'autorité.
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Malgré les agressions de quelques tribus, le général Monck-d’Uzer se maintenait solidement à Bône. Le maréchal avait d’abord voulu abandonner Bougie; mais pensant que cette retraite pouvait donner un nouvel essor à l’esprit entreprenant des Kabyles et fournir des ressources à Abd-el-Kader, il jugea plus convenable de s’y maintenir; on ajouta donc quelques ouvrages au corps de la place, et avec ce secours le colonel Larochette en répondit. A Oran, le général d’Arlanges, qui avait remplacé le général Trézel, était réduit à l’inaction par l’extrême faiblesse de la garnison, et recevait, sans sortir de ses retranchements, les attaques et les insultes des tribus ennemies. Cependant, comme c’était de ce point que devait partir l’expédition méditée contre Abd-el-Kader, des renforts ne tardèrent pas à y arriver.
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