Le long de vos rampes de lancement
II fait déjà si froid
sous les saules blancs…

mais on entend toujours
au concert des mésanges
ce grand avertissement :
monté du fond des âges :
« au faîte de la démocratie
pend l’enseigne de l’armurier »
et dans le sein des dieux
pèsent les larmes sur le soleil couchant

Qui croyait en ce monde
qu’à dépeindre vos libertés ensanglantées
les mots eux-mêmes seraient rougis

Contre le jeu de vos armes
nous avons celui des mots
jusqu’à la quintessence du poème
guetté par la descente
autant que la danse du phénix

Nous avons sur la poutre l’hirondelle
et sous l’ondée de paille
les peurs de vos héros
repentis d’inculture

VOUS AVEZ LES BOMBES
NOUS AVONS LES MOTS

Vous vous épuisez d’habileté
dans vos sciences du désespoir
Nous errons à l’aventure du verbe
comme un vaisseau libéré de ses haleurs

Vous recherchez des preuves
quand il en est
où elles ne se parlent plus
ne s’entendent plus
ne s’offrent plus au verbe

qu’il est enfin purifié d’elles

En ces temps maudits de vos encombres
vous usez de noms de jouets
pour enfanter la guerre
commettre dans les cours vos crimes d’école

mais nos enfants de leurs prunelles sages
ne demandent que le vert du jardin
sans abri

NOUS AVONS DES MOTS
d’un pouvoir transcendant
QUI DE VOS BOMBES
détruisent l’argutie

A la beauté qu’exhale leur envol
sans seconde
les mots de plein ciel
s’épanouissent dans l’espace
de vos nids d’armes
détruits
sans que vous puissiez jamais suivre
leurs traces

Ils versent en secret
tout au long de vos fers
dans le mutisme de vos geôles
le souffle des mélanges
des croisées de sens
étrangers les uns les autres

Ils savent de vos terrorisantes certitudes
effacer les demeures

VOUS AVEZ DES BOMBES démocrates
NOUS AVONS DES MOTS tisserands d’herbes folles
vous avez les bombes de vos morales punitives
nous avons les mots du poème levant
vous larguez des deuils
nous lançons des respirations
vous enterrez les fleurs
nous berçons leur pistil
VOUS AVEZ LES BOMBES
NOUS AVONS LES MOTS
qui pour vous
plus rien ne signifieront
A vous plus rien
ne diront

Se pourrait-il que l’histoire
manque encore ses seuils ?

 

PHILIPPE TANCELIN

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Last-prayer-