Published date: Dimanche 16 octobre 2022 - 11:26 | Last update:5 hours 29 secs ago
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Le drame a choqué toute l’Algérie. Le 26 septembre, en Kabylie, Ryma Anane, 28 ans, enseignante de français, a été attaquée par son voisin alors qu’elle s’apprêtait à prendre le bus pour aller à son travail. Il l’a aspergée d’essence et brûlée vive à l’aide d’un briquet.
La nouvelle s’est répandue très vite sur les réseaux sociaux. Selon des sources locales, l’agresseur a fini par se rendre à la police quelques heures après l’attaque. D’après ses aveux, il aurait agi ainsi parce que la jeune femme avait refusé de se marier avec lui et choisi un autre futur époux.
« Son dos et son cou en flammes, Ryma s’empresse d’aller chercher de l’aide. Arrivée chez elle, elle s’effondre, et bredouille quelques mots : ‘’Il a brûlé mon avenir !’’ », rapporte le site d’information TSA.
Après son transfert à l’hôpital de Tizi Ouzou (Kabylie), les médecins ont jugé que son état nécessitait une prise en charge rapide à l’étranger au regard de la gravité des brûlures (60 % de son corps).
Rapidement, la solidarité s’est organisée à travers les réseaux sociaux et une cagnotte a été lancée pour payer les frais d’un transfert en Europe.
« La famille s’est d’abord tournée vers l’hôpital Saint-Louis à Paris, connu pour son expertise des grands brûlés. D’après le devis consulté par France 24, l’hôpital demandait plus de 316 000 euros pour 70 jours d’hospitalisation en réanimation », relate France 24.
Mais l’établissement n’a pas accepté l’échelonnement de la facture. « Qui peut faire ça ? Cela a retardé la prise en charge de Ryma à l’étranger. Et pendant ces quelques jours, elle aurait pu y passer », témoigne toujours sur France 24 un ami de la victime.
Faute d’avoir pu obtenir un visa pour la France, l’entourage de Ryma s’est tourné vers l’Espagne, qui a accepté de lui en délivrer un. Et grâce à une société d’assistance médicale, ADM international, la famille a pu trouver un hôpital à Madrid qui proposait un devis moins onéreux, avec par ailleurs la possibilité de payer par tranches.
Ryma a donc été transférée en Espagne par avion médicalisé grâce aux efforts de ses proches et des nombreux donateurs en Algérie et à l’étranger. Selon les dernières informations, son état se serait stabilisé.
La cellule de veille indépendante Féminicides Algérie relève qu’une jeune femme, mère de quatre enfants, a été assassinée, brûlée vive, par son époux le 16 avril 2022. Depuis le début de l’année, 32 cas de féminicides ont été recensés par les militantes.
Par
MEE
Published date: Dimanche 16 octobre 2022 - 11:26 | Last update:5 hours 29 secs ago
- De nouvelles expertises vont être diligentées et pourraient conduire à un nouveau procès
France
AA/Nice/Feïza Ben Mohamed
La justice française a accepté, dans une décision rendue ce jeudi, de rouvrir le dossier de l’affaire Omar Raddad, après une requête formulée par son avocate maître Sylvie Noachovitch en novembre, selon une information rapportée par la presse locale.
De nouvelles expertises vont être diligentées et pourraient conduire à un nouveau procès, fait rarissime en France où seuls neuf procès ont été révisés depuis 1945, comme le souligne BFMTV.
Les arguments du jardinier marocain, qui a toujours clamé son innocence, ont donc été entendus par la Cour de cassation, qui accepte à ce stade, de faire de nouvelles analyses.
C’est à la lumière de traces ADN, retrouvées sur l’inscription « Omar m’a tuer » et dont aucune ne lui appartient, qu’Omar Raddad voit sa requête aboutir.
Pour rappel, le jardinier marocain avait été condamné à 18 ans de réclusion criminelle pour le meurtre de son ancienne patronne en 1991 à Mougins (Alpes-Maritimes), sur la base des inscriptions retrouvées sur les lieux du crime et qui le désignaient nommément.
Après sept années passées en prison, il avait pu bénéficier d’une grâce présidentielle partielle octroyée par Jacques Chirac après l’intervention directe du Roi du Maroc, Hassan II.
Il dénonce, depuis toujours, une erreur judiciaire et espère ainsi être définitivement blanchi aux yeux de la justice française, qui l’a condamné en dépit des nombreuses incohérences contenues dans le dossier.
« Il y a cent ans, on condamnait un officier qui avait le tort d'être juif, aujourd'hui on condamne un jardinier parce qu'il a le tort d'être maghrébin », avait déclaré son ancien avocat Maître Jacques Vergès, en 1994.
L'émergence de la Chine a bouleversé le paysage géopolitique et géoéconomique mondial. La Chine est devenue la 2ème puissance économique mondiale, en attendant d'occuper le premier rang au cours de cette décennie. Et ce n'est sans doute qu'un début.
Cette évolution, cette réussite, par son ampleur et sa rapidité, pose de nombreuses questions.
- De quelle évolution parle-t-on et quelles sont ses caractéristiques ?
- Quelles en sont les causes ?
- Pourquoi (si on laisse de côté la singulière prémonition d'Alain Peyrefitte1) les pays occidentaux n'ont-ils pas vu venir ce qui paraît aujourd'hui, rétrospectivement, si facile à comprendre ? Quelles erreurs auraient-ils commises ?
- Comment, par quels moyens, la Chine est-elle parvenu à ce résultat ?
En l'espace de 20 ans.
Son PIB a été multiplié par 11.5, passant de 1 300 Md$ en 2001 à 15 000 Md$ en 2021 (le 2ème au monde après celui des Etats-Unis : 21 000 Md$).
Exportations multipliées par 6.15
2001 : 325 Md$
2021 : 2 000 Md$ (1er exportateur mondial)
Croissance de la valeur des échanges commerciaux en 20 ans.
Chine : +810%
Monde : +180%
Stock d'investissements directs étrangers en Chine
2010-2011 : 600 Md$ 2021 : 2 000 Md$, soit une croissance de plus de 300% en 10 ans.
L'Occident aurait-il été trompé ?
Les Occidentaux se désolent, disent avoir été abusés et se plaignent. Ils auraient été trompés par la Chine qui n'aurait pas respecté les règles sur lesquelles elle s'était engagée.
À titre d'exemple, le quotidien économique Les Echos a publié un article en juillet 2018 portant un titre qui fait figure de réquisitoire, repris en ce mois de décembre par de nombreuses publications en une même protestation, une identique litanie : « Comment la Chine a dupé Américains et Européens à l'OMC ? » (Les Echos, le 9 juillet 2018, Mis à jour le 6 août 2019). Ce quotidien a repris au mot près ce titre dans son édition du 09 décembre 2021.
Les griefs pêle-mêle s'entassent et se répètent : ils accusent la Chine de ne pas avoir fait baisser les droits de douane de 25 à 10% comme elle s'y était engagée. Ils l'accusent aussi d'être une dictature, un régime totalitaire, oppresseur... D. Trump l'avait même accusée d'avoir semé sciemment le nouveau coronavirus dans l'intention de nuire à son pays, d'avoir caché des informations capitales, de tricher, de ne pas respecter les règles de l'OMC, d'endetter l'Afrique pour mieux la dominer... Pas un jour, pas une semaine... ne passe sans qu'une nouvelle accusation, un nouveau réquisitoire ne vienne alourdir un dossier épais mais de moins en moins consistant, de moins en moins crédible, précisément parce qu'il exprime moins des faits qu'une inquiétude réelle. Et cette inquiétude est sans doute authentique et avérée.
Qu'en est-il au vrai ?
COMMENT CELA A-T-IL ÉTÉ POSSIBLE ?
- Le salaire de la cupidité.
Les Occidentaux savaient parfaitement ce qu'ils faisaient et en ont largement tiré parti.
Quel était leur calcul et pourquoi ont-ils fermé les yeux sur ce qui se passait en Chine, comme d'ailleurs sur tout ce qui se passait dans les pays d'accueil de leurs capitaux ?
l Pour le comprendre, un historique s'impose.
En réalité, la partie s'est jouée sur deux plans.
* A la fin des « Trente Glorieuses » (J. Fourastié, Fayard, 1979, 288 p.) au début des années 1970, régnait dans les pays industriels d'Europe de l'ouest et d'Amérique du nord une compétition effrénée autour du partage de la valeur ajoutée entre profits et salaires.
Il serait trop long de décrire tous les aspects, les ruses et stratagèmes utilisés par les uns et les autres pour accaparer la part la plus élevée. Dans un contexte de taux de chômage relativement faible, les salariés disposaient de capacités de négociation plutôt à leur avantage et les entreprises (les propriétaires des moyens de production) usaient de toutes sortes de dispositifs pour réduire la pression ainsi exercée sur elles : l'importation de travailleurs étrangers, le travail des femmes (notamment dans certains métiers et fonctions peu à peu féminisés), l'externalisation de tâches hors du coeur de métier, le recours au PME-PMI, la rationalisation des processus de production avec réduction des indirects... évidemment, l'inflation fut le moyen le plus problématique pour récupérer d'une main, les avantages salariaux concédés de l'autre.
Ce cycle infernal très bien décrit par le néo-zélandais A.-W. Philips dès 1958 ne pouvait continuer à fonctionner que dans la mesure où les produits fabriqués et exportés dans ces conditions conservaient leur compétitivité et un rapport qualité-prix avantageux.
Cela a cessé d'être le cas, par exemple pour la France qui progressivement perdait compétitivité et parts de marché, ayant eu pour principale politique la réduction des salaires et les cotisations (« charges ») associées sur le plan économique et celle des syndicats revendicatifs (et des partis qui les soutiennent), sur le plan politique.
La solution qui a donc été adoptée a été radicale : la délocalisation de l'appareil industriel français (facilitée après sa privatisation2) à fort contenu de main d'oeuvre protégée et à salaires relativement plus élevés, hors des frontières de l'Hexagone.
Il ne restait au salariat, en dehors du tertiaire à très haute valeur ajoutée et à l'industrie de pointe à très haute intensité capitalistique (électronucléaire par exemple), que les entreprises de services (par exemple le tourisme, la restauration, les voyages...) dans des petites unités non ou peu syndiquées, à plus faibles qualifications, la fonction publique, ... et le chômage et son alter ego « ubérisé », c'est-à-dire tous les emplois précaires, externalisés, transformés en prestation de services, rangés dans la catégorie aseptisée, politiquement neutralisée, d'« entreprise individuelle ».
Naturellement, la France n'est pas un pays low cost. Mais comme ses voisins du sud de l'Europe et peut-être plus qu'elle, elle a été entraînée depuis la fin de la dernière guerre dans une « logique low cost » à la fois pour des raisons économiques combinées de manière parfaitement cohérente, des raisons idéologiques et politiques.
Le voisin allemand a fait un autre choix, celui de la compétitivité-qualité qui lui a été plus profitable. Pour constater ce résultat, il suffit d'observer les dévaluations successives de la monnaie française par rapport à celle de l'Allemagne (et celles des pays de la zone mark) et la situation déflationniste française (avec tous ses déficits logiquement induits) depuis l'instauration de l'Euroland qui date à une année près de l'entrée commémorée aujourd'hui de la Chine à l'OMC.
- Tribune de l'Expansion, L. 14 mars 1988
Les Etats-Unis, dans un contexte différent, ont fait un choix déflationniste similaire à celui des Français partis en 1981 dans une logique expansionniste qui s'est très vite retournée contre ses initiateurs qui n'avaient pas bien réalisé l'état de l'économie française et pris les décisions qui s'imposaient en cohérence avec leurs choix3.
Dès l'arrivée de R. Reagan au pouvoir, Washington s'est attaché à démanteler les grandes ensembles industriels, casser toutes les protections accumulées par les travailleurs, les salaires et tous les autres avantages associés.
Le premier mandat de Reagan (1980-1984) a été marqué par une hausse vertigineuse du chômage et des taux d'intérêts ainsi que du dollar. A cette époque l'Amérique avait en face d'elle non la Chine mais le Japon et l'Allemagne dont le commerce taillait des croupières à la compétitivité américaine et creusait ses déficits. Le président américain, inspiré par les Chicago boys monétaristes, a commencé son mandat par un licenciement collectif de 12 000 contrôleurs aériens en août 1981. Auparavant, en Grande Bretagne Mme M. Thatcher avait montré la voie en s'occupant des mineurs et de leurs syndicats.
Le second mandat (1984-1988) a connu au contraire une hausse importante de l'emploi, une baisse rapide du dollar et des taux d'intérêt. Mais avec une différence de taille : les nouveaux emplois créés le furent surtout dans le secteur tertiaire et dans des petites entreprises.
Un slogan a fait flores à l'époque : « small is beautiful », repris abondamment sur les rives européennes de l'Atlantique, surtout en Grande Bretagne thatchérienne et en France. Ces emplois étaient moins bien payés, plus précaires, moins protégés et surtout avec des taux de syndicalisation bien plus faibles, voire nuls.
L'entrée de la Chine dans l'OMC aurait « détruit » environ 2 millions d'emplois aux Etats-Unis et 270.000 en France, accélérant la désindustrialisation, la déflation et accumulé les déficits.
GM et VW produisent plus de véhicules en Chine que dans leurs pays d'origine. Et Renault, d'exportateur est devenu un importateur net de voitures en France. Les importations occidentales de Chine (et les déficits induits) forment la contrepartie logique de cette désindustrialisation.
Entre 2001 et 2019, les importations européennes d'aluminium ont été multipliées par... 39 et celles des équipements pour les transports ont été multipliées par 14. Les Européens ont aussi importé 10 fois plus de machines, 9 fois plus de lits et de papier-bois, 8 fois plus d'acier et fer...
Les hausses sont un peu plus modérées à destination des Etats-Unis : 11,5 fois plus d'aluminium, 9,5 fois plus d'équipement de transports, 7 fois plus de machines...(4)
Corrélativement, les déficits des pays occidentaux avec la Chine ont triplé en 20 ans.
Etats-Unis : -250 Md$
Europe : -180 Md
Cependant, pour avoir une perception exacte de ce phénomène, on ne devrait pas parler d'exportations chinoises. On devrait parler de productions réalisées par les transnationales occidentales en Chine (directement ou sur commande) et de leur acheminement vers l'Europe et les Etats-Unis. Et cela quels que soient la manière avec laquelle la Chine a exploité pour son propre compte les calculs et projets occidentaux.
Cette délocalisation des processus industriels a été délibérée et projetée par les entreprises occidentales vers les pays à bas salaires et en l'occurrence en Chine.
Naturellement, les Chinois ne sont pas neutres et la Chine n'est pas un cadre vide (un « territoire sans maître ») exploitée par les entreprises occidentales. Chacun ses calculs, chacun ses profits.
Comme on le sait, l'Allemagne a fait mieux que résister et a adopté une stratégie parfaitement complémentaire avec celle de la Chine.
- La stratégie allemande.
L'Allemagne eut une stratégie payante : jouer avec les pays de l'Est proches au mieux de ses intérêts. Cela lui a permis de combiner de manière efficace les avantages de coûts salariaux et sociaux plus faibles et de compétences plus élevée. En un mot les ex-PECO ont offert aux industries allemandes un « tiers monde » intra-muros qui cumule compétitivité-qualité et compétitivité-prix.5 L'élargissement de l'Union a été une bénédiction pour elles. Cela a aussi permis, dans une certaine mesure, un développement convergeant de ces économies avec celles des pays plus développés de l'Union Européenne.
Est-ce à ce genre de pacte qui habite la future Europe fédérale à laquelle songerait l'Allemagne ? (6) Une construction géopolitique qui s'éloigne d'une gouvernance collective qui a fait la preuve de ses limites, mais une Union hiérarchisée avec un patron et des sous-patrons, avec des règles. On ne peut participer du pouvoir dans cet ensemble qu'en proportion de son travail, de ses résultats et de ses performances. Très tôt, l'Allemagne est devenue le principal partenaire des pays du groupe de Visegrad(7) (Pologne, Hongrie, la Tchéquie et la Slovaquie). 63,9 millions d'habitants en 2020 (14% de la population de l'UE).
La chute du Mur a fait révélé le paysage européen d'avant 1914 où la culture germanique n'a pas disparu. La langue allemande se situe parmi les langues étrangères les plus parlées et les plus enseignées dans les PGV (groupe de Visegrad), avec un renouveau lié aux investissements allemands dans ces pays.
L'Allemagne consacre pratiquement un quart de son budget de soutien à la langue allemande à l'Europe centrale et orientale. L'allemand est majoritairement enseigné comme première langue étrangère en Hongrie (avec l'anglais) et en Slovaquie ; comme deuxième langue étrangère notamment en République tchèque, en Pologne, en Slovénie, en Roumanie. Ces dernières années, le nombre de personnes qui apprennent l'allemand dans les Instituts Goethe à l'étranger a eu tendance à augmenter. (Statistiques sur la place de l'allemand dans le monde, Goethe Institut - Inter Nationes e.V., Munich, 2002) (8)
- Bilan de cette stratégie : Allemagne = 2/3 des exportations de l'UE vers la Chine.
Si la France, n'ayant réussi ni à produire des biens de très haute qualité, ni à réduire suffisamment ses coûts et ses prix, se retrouve prise en étau entre la compétitivité-prix des pays « émergeants » et la compétitivité-qualité de l'Allemagne. Les entreprises allemandes prospèrent à chaque fois que la Chine et les pays émergeants sont en croissance.
Lorsqu'un patron quelque part dans le monde réussit, y compris aux Etats-Unis ou au Japon, a fortiori en Chine, c'est en Mercedes, en Porsche ou en BMV qu'il exprime, qu'il manifeste sa réussite.
CQFD
- La protection de l'environnement et l'émergence de l'écologie politique.
Le « voyage » des usines constituent la deuxième facette de l'opération. Elles avaient de « bonnes » raisons de partir. Elles avaient aussi de « bonnes » raisons d'arriver.
La désindustrialisation et la délocalisation des usines polluantes allaient dans le même sens qu'une sensibilité croissante de l'opinion publique occidentale pour la protection de l'environnement.
C'était le début de l'écologie politique initiée par le Club de Rome qui alertait contre les dégâts de la croissance sans limite, l'accumulation des déchets et le gaspillage des ressources. Certes, Aurelio Peccei ne faisait pas l'unanimité et a, par la suite, été l'objet de nombreuses polémiques qu'il serait inutile d'aborder ici.(9)
La protection de la nature a un coût. Nier les nuisances, aussi évidentes soient-elles, ne relève pas d'une philosophie, mais d'un calcul économique élémentaire. Débarrassées des contraintes de la production dans les pays occidentaux, elles vont profiter largement des conditions d'accueil de leurs unités industrielles.
Les pays d'accueil vont largement faciliter leur implantation.
- Des salaires très bas
- Pas ou très peu de protections sociales
- Des réglementations du travail et des conditions générales très favorables
- Des travailleurs motivés, disciplinés et, si nécessaire, promptement et efficace ment mis au pas dans des régimes « musclés », « autoritaires »... dont s'accommode fort bien la plupart des entreprises occidentales qui s'y implantent.
- Un souci mineur de l'environnement, en sorte qu'aucune précaution particulière n'est prise pour la protection de la faune, de la flore, des sols, de l'air, des eaux qui subissent toutes sorte de nuisances dans l'indifférence et la compréhension des autorités locales complices.
- Le nombre de Chinois qui effrayait tant les Occidentaux d'être submergés, est une ressource bienvenue pour les entreprises qui s'installent dans ce pays.
- Qui a trompé qui ? Les Occidentaux se seraient-ils dupés tous seuls ?
« L'erreur est d'avoir pu penser qu'en Chine, le capitalisme d'Etat pouvait céder le pas au capitalisme de marché » (Les Echos, juillet 2018, op. cit.)
1.- En 1990. Les Occidentaux étaient fermement convaincus de « la fin de l'histoire », c'est-à-dire de la fin des histoires avec le communisme et le triomphe du capitalisme. Le tour de la Chine devait « rationnellement » suivre celui de l'URSS.
2.- Ils étaient aussi convaincus qu'il était impossible d'adopter un système économique (et ils croyaient que la Chine était sur cette voie), sans adopter le système politique qui allait « naturellement », mécaniquement avec, à savoir la démocratie représentative.
Cela signifiait que le marché des biens sur le plan économique aurait fatalement comme symétrique sur le plan politique le marché des partis politiques soumis à la loi universelle de l'offre et de la demande. A savoir, vendre des idées et des partis comme des savonnettes.
3.- En sorte que faciliter l'entrée de la Chine dans l'OMC, là où l'Etat est un intrus, c'est faciliter la dissolution des entreprises publiques, l'économie collectiviste et, cela coule de source, la disparition progressive du Parti Communiste chinois, terme fatal du processus. C'est à peu près ce point de vue que développe Jean Pisani-Ferry : « Il y a eu une illusion complète dans la foulée de l'effondrement du mur de Berlin. Elle a d'abord été politique. Les dirigeants occidentaux avaient confiance dans le fait que la Chine convergerait vers le modèle occidental, avec la conviction qu'il était impossible de développer une économie sans liberté économique, et que la liberté économique était inséparable de la liberté politique. A terme, beaucoup de gens pensaient que le Parti communiste chinois allait se démocratiser, explique l'économiste. Ensuite, l'illusion a été économique. On a cru que l'adhésion à l'OMC induirait une convergence des systèmes. Personne ne pensait en outre que la Chine atteindrait aussi vite un tel niveau technologique. » (Les Echos, mercredi 08 décembre 2021)
4.- Les conditions de productions offertes par la Chine allaient achever de les convaincre.
En réalité, ces objections, autocritiques et analyses rétrospectives occidentales servies aux opinions occidentales, n'étaient pas de mise lorsque les transnationales ont décidée d'investir en Chine. Ce qui leur importait c'étaient les profits qu'ils pouvaient en tirer.
Les Occidentaux n'ont pas retenu la leçon que leur a administrée le Japon. Ils se sont bercés des mêmes illusions que face aux Japonais à la fin des années 1960 jugés incapables « par nature » d'innovations, de progrès sans la science et la technologie occidentale.
« La R&D, l'intelligence, les brevets, l'innovation... c'est nous.» plastronnaient Européens et Américains convaincus de leur supériorité.
Les Chinois ne seraient au mieux que des copieurs, des imitateurs bas de gamme.
La différence vient de ce que la Chine et le Japon ne sont pas du même gabarit. Examinons brièvement le détail cette comparaison :
Le Japon est un pays qui fait globalement le double de la population française sur la moitié de sa surface. Une nature ingrate (ni énergie ni matières premières d'importance), peu de plaines, archipel volcanique allongé sur plus de 2 000 km, de la froide Hokkaido à la tropicale Okinawa, le Japon est perché sur une subduction entre plaque pacifique et plaque asiatique, menacé à tout moment par des séismes et des tsunamis(10).
Loin de tout, séparé de l'Asie continentale, il l'est aussi de l'Amérique d'Océan Pacifique (8 300 km de San Francisco, 10 800 km de New York) et de l'Union Européenne (14 800 km) par le vaste continent eurasiatique.
A l'inverse de celui du Soleil Levant, l'Empire du Milieu, vaste de 9.5 millions de km², peuplé de près 1.5 milliard d'habitants, est au contact de tout et d'abord de lui-même en ce qu'il dispose d'un marché intérieur qui relativise, aussi cardinal soit son commerce extérieur, désormais mondial, tout chantage qui serait susceptible d'être exercé par les pays importateurs de ses produits.
- Rivalités indo-chinoises.
La comparaison avec l'Inde voisine qui a choisi d'abandonner cette voie débouche sur une fuite des compétences, un accroissement grave des inégalités, un appauvrissement du monde rural11, une urbanisation anarchique dont elle a été relativement préservée, des conflits sociaux, religieux attisés par l'arrivée au pouvoir d'un parti hindouiste intégriste, Bharatiya Janata Party (BJP), qui remet en cause les fondements de la nation indienne telle qu'elle a été proclamée par Gandhi et Nehru dès l'indépendance en 1947.
L'économie indienne est dominée par des dynasties privées tout à la fois innovantes (en lien avec des transnationales occidentales) sur le plan technologique et économique et rétrogrades sur le plan social et politique.
Les assassinats successifs du Mahatma (janvier 1948), de Indira Gandhi (31 octobre 1984) et de son fils Rajiv (21 mai 1991) annonçaient l'incapacité de l'Inde de se défaire d'une conception verticale et cloisonnée de la société indienne. L'« homo hierarchicus » hindouiste cachait en réalité la défense de gros intérêts féodaux fondamentalement rétifs à l'idée d'égalité et de partage des richesses et du pouvoir.(12)
Depuis des années, plus de la moitié des demandeurs de visas d'immigrants qualifiés aux États-Unis viennent d'Inde dont les compétences technologiques sont systématiquement pillées.
Le PDG d'Alphabet, Sundar Pichai, société mère de Google, a été formé en Inde. Il en est de même de Vinod Khosla, cofondateur de Sun Microsystems. D'autres Indiens occupent les plus hauts postes de la tech américaine : Arvind Krishna chez IBM et Nikesh Arora à Palo Alto Networks, ainsi que Satya Nadella à Microsoft et Shantanu Narayen à Adobe. Tous sortis de l'Indian Institute of Technology (IIT) à Bombay (Mumbai).
Le réseau des IIT a été créé en 1950 par le Premier ministre indien, Nehru, afin de doter son pays de diplômés en sciences et en ingénierie hautement qualifiés après l'indépendance en 1947. Comme dans de nombreux pays dépendants, ces compétences servent plus aux pays riches qu'à ceux qui paient très cher leur formation et dont les intérêts commanderaient de les maintenir chez eux ou de les voir y retourner.
- La Chine a adopté une autre stratégie.
D'où la comparaison pertinente entre deux pays de taille équivalente, de conditions identiques au lendemain de la dernière guerre mondiale, mais de sort si dissemblable aujourd'hui.
D'un côté, on a toujours un pays du tiers-monde qui se débat dans les difficultés communes aux pays pauvres incapables d'« émerger » et, de l'autre, un pays « totalitaire » qui a fait passer son économie de l'état d'indigence à celle de première puissance économique, commerciale et technologique du monde (on laissera le soin aux adeptes des Guinness des records, le soin d'affiner leurs calculs en PPA et d'ajuster les projections à la décimale près).
Inde-Chine. (En Md$)
PIB. Inde Chine
2001 : 458 1 300
2020 : 2620 15 000
Exportations Inde Chine
42.3 (en 2000) 325 (2020)
241 (en 2020) 2 000 Md$
(1er exportateur mondial en 2021)
La pandémie n'a pas fait que des malades et des morts en France. Elle a privé l'économie touristique française de précieuses ressources, les dépenses des Chinois qui visitent la France dont le nombre a explosé (715.000 en 2009, 2.2 millions en 2018)(13).
A l'inverse, quel impact économique représenterait la disparition des touristes français qui visitent la Chine ? Un chiffre suffirait à répondre à la question : en 2018 la Chine, dont le tourisme est surtout asiatique, a reçu 15 600 clients français à comparer aux 143 millions de touristes qui visitent la Chine.
- Facteurs du développement chinois.
1.- Le rôle de l'Etat chinois.
La Chine a fait la démonstration qu'un pays peut se développer et devenir une très grande puissance économique, commerciale et technologique sans passer par le marché.
Et parler du développement d'un pays, non de 50 millions d'habitants mais de près de 1.5 milliard, ce n'est pas peu dire, en un temps court d'une trentaine d'années, la performance n'est pas mince. Cela donne à réfléchir...
Elle a subventionné avec de l'argent public ses entreprises d'Etat. Poids des entreprises sous contrôle public dans le PIB chinois : il est passé de 15 à 30% en 10 ans entre 2011 et 2021.
Contrairement aux doctrines libérales, populaires auprès des potaches et des technocrates un peu partout dans le monde depuis l'arrivée au pouvoir de Mme Thatcher en Grande Bretagne (1979) et R. Reagan aux Etats-unis (1980), sans le rôle central de l'Etat chinois sans rien n'aurait pu être accompli. C'est l'architecte et le processeur au coeur de la réussite chinoise.
Un des points décisifs dans la réussite chinoise qui ne pouvait être concevable sans maîtrise technologique, a consisté à systématiquement exiger des transferts de technologies en contrepartie des investissements étrangers chez elles.
L'Etat a consolidé les entreprises publiques, sa diplomatie, sa défense nationale... Tous les pays en font autant, et certains plus que d'autres. Songeons aux moyens tout aussi considérables que les Etats-Unis apportent à leur système militaro-industriel : plus de la moitié des dépenses militaires dans le monde. Songeons aussi aux passerelles entre civil et militaire qui profitent aux deux en permettant de contourner (dans les économies de marché) la sacro-sainte règle de la concurrence « loyale et non faussée ».
L'Etat chinois a mobilisé des moyens considérables et surtout une coordination de l'action aussi bien dans le domaine économique, commercial, technologique, urbanistique...
Ceux qui le lui reprochent sont aussi ceux qui ne respectent les règles que lorsqu'elles sont à leur avantage. C'est le cas par exemple du verrouillage des brevets par le Big Pharma. « Ne jamais engager une guerre que l'on n'est pas sûr de gagner. » « Gagner une bataille avant même de l'avoir entamée », « L'art de la guerre, c'est de soumettre l'ennemi sans combat.... »
Jamais le Chinois Sun Tsu n'a eu autant de succès qu'en Occident où ses préceptes sont enseignés dans les Ecoles de stratégies.
- La puissance est affaire de réseaux géostratégiques.
La puissance technologique ne vaut que par l'espace et le temps que l'on parvient à mettre à son service. A chaque empire dans l'histoire correspond une maîtrise de l'espace-temps spécifique. Il en est ainsi depuis l'empire romain. Au moins.
Lancées en 2013, les Nouvelles Routes de la Soie (Belt and Road Initiative, BRI)14 ont permis aux entreprises chinoises à la fois de réduire leur dépendance stratégique à l'égard des transports internationaux occidentaux qui exercent un pouvoir sur le commerce mondial et une médiation logistique dispendieuse, et de récupérer une partie plus importante de la valeur ajoutée produite par les Chinois. Pour cela, la Chine a lancé 3 100 projets d'infrastructures dans au moins 70 pays dans le monde. L'axe euro-asiatique : Pékin-Moscou-Berlin-Athènes-Rome... auquel on peut ajouter Istanbul, Téhéran... est d'abord la réponse à une contrainte géostratégique de contournement du dispositif américain qui contrôle toutes les mers et océans de la mer de Chine à la Méditerranée.
Ce contrôle est strict assuré par des armadas militaires équipées de pied en cape. Au large de la Chine, c'est la VIIème Flotte du Pacifique qui s'en charge. Dans l'Océan Indien, c'est la Vème Flotte qui prend le relais. Et c'est à la VIème Flotte que revient le soin d'assurer la sécurité du trafic (et autres missions...) qui passe par la mer Rouge et le Canal de Suez. C'est sur ce contrôle que compte l'Amérique pour peser sur la Chine.
C'est pourquoi à ces voies maritimes traditionnelles, la Chine a ajouté deux autres axes de communications :
- Un axe ferré qui part de Wuhan et traverse toute l'Asie continentale jusqu'à Duisburg, sur 11 300 km, en passant par les anciennes République Socialistes Soviétiques, et en recyclant les vieilles « routes de la soie ».
Avantages : le voyage dure 12 à 15 jours, alors que le trajet par bateau au sud dure environ 2 mois sur le double de distance (20 500 km).
Inconvénients : Le coût par train est deux fois plus élevé et la capacité de transport est faible. Il faut 250 trains pour transporter l'équivalent de la charge d'un seul porte-conteneurs.
- Un axe en plein développement : le passage par l'Arctique. Le trajet dure 33 jours sécurisé par les brise-glace russe.
Remarque. Une contrainte est commune à tous ces moyens de transport : l'asymétrie du commerce. Pour optimiser la rentabilité des échanges, il est nécessaire que les trains et les bateaux soient également remplis à l'aller comme au retour. Ce qui n'est que partiellement le cas.
Ces deux nouveaux axes contournent et relativisent le contrôle américain et renforce les liens entre la Chine, la Russie et les pays d'Asie Centrale.
Pour compléter le dispositif, La Chine s'est dotée de son propre réseau de transport de conteneurs. En juillet 2018, est né Cosco de la fusion avec China Shipping en 2016 et de l'achat de OOCL (Orient Overseas Container Line). Cosco se place désormais en 3ème position derrière les occidentaux Maersk et MSC, avec 156 porte-conteneurs avec une capacité totale de 1 194 776 EVP(15).
Cela permet à la Chine d'accéder directement aux matières premières nécessaires à son économie et d'en négocier les conditions et de distribuer directement ses produits sans passer par les intermédiaires occidentaux.
- C'est pourquoi elle a massivement investi en Afrique.
Une mauvaise querelle lui est faite en dénonçant l'endettement des pays africains pour les subordonner aux intérêts chinois. Nous y reviendrons en détail prochainement.
A supposer que cela soit vrai (après tout la Chine a aussi le souci de ses intérêts), ces critiques oublient que c'est l'ordinaire de la pratique occidentale dont les institutions financières (FMI, Club de Paris et de Londres, Banque Mondiale...) pour optimiser l'exploitation des pays en développement et, si nécessaire y dépêcher des troupes pour mettre bon ordre.
- A titre de comparaison
L'Amérique Latine et l'Afrique ont subi des « plans d'ajustement structurels » d'une rigueur extrême qui ont contribué à leur sous-développement. L'endettement est un cycle infernal qu'aggrave le rééchelonnement. Loin d'assurer leur prospérité, ils ont défait les tissus économiques existants et enfoncé les pays qui les sont subits, par l'austérité qui leur a été imposée. L'Argentine, le Brésil, le Chili, le Pérou, l'Algérie... ont payé très cher l'« aide » apportée par les pays occidentaux à leur « prospérité ».(16)
Nous ignorerons délibérément les « conquêtes » coloniales entreprises depuis 1492 et les traites négrières depuis la « controverse de Valladolid » (1550).
3.- D'investie, la Chine devient investisseur.
La Chine organise régulièrement des sommets avec les pays qui accueillent ses investissements et qui participent à ses réseaux commerciaux.
En 2012, elle a fondé un groupe euro-chinois, inscrit dans le cadre des BRI. Un sommet sino-européen « 17+1 » (en direct vidéo) a réuni le mardi 09 février 2021 17 pays d'Europe centrale et des Balkans, dont 11 membres de l'Union européenne (UE). 17
En 2016, l'entreprise chinoise Cosco a racheté le port du Pirée en Grèce. Plus de 15 000 conteneurs y transitent chaque jour, faisant du Pirée le premier port de Méditerranée. Une métamorphose spectaculaire, réalisée en dix ans à peine grâce à la Chine. 2 500 emplois ont été créés. Une bouffée d'oxygène dans cette région où le chômage dépasse parfois 50%.18
Prochaine étape : l'accès direct des entreprises chinoises au bas de filières, aux consommateurs occidentaux, là où les transnationales occidentales réalisent l'essentiel de leurs profits en spéculant sur une valeur ajoutée produite par les travailleurs chinois.
Cette bataille sera difficile. On peut en avoir un aperçu à propos de la réaction américaine au succès de Huawei qui bat à plate couture ses concurrents taiwanais et américains aussi bien sur le plan technologique (5G) que commercial sur le marché des smartphones.
Le développement interne de la Chine lui a permis de disposer d'un marché intérieur à même de le soustraire pour une large part aux contraintes extérieures.
Ce développement, la Chine l'a étendu aux pays voisins, pour consolider son propre commerce, ses marchés et aussi son influence. Exemple du TGV dont la Chine a dévoilé, en juillet 2021, une version roulant en théorie deux fois plus vite qu'un TGV français.
La construction du réseau de train à grande vitesse est un exemple remarquable qui revient l'attention. Depuis l'entrée en service de la ligne Pékin¬Tianjin, en 2008, la Chine a dépensé en moyenne 800 milliards de yuans (111 milliards d'euros) par an pour la grande vitesse.
Fin 2020, le pays comptait 37 900 kilomètres de LGV, dont la moitié a été construite ces cinq dernières années. Elles représentent les deux tiers du réseau mondial.
En 2021, 3 700 kilomètres de plus devaient être inaugurés, soit, en un an, davantage que le total des lignes françaises en opération (2 800 kilomètres). (Le Monde, J. 09 décembre 2021)
Début décembre la Chine et le Laos ont inauguré une liaison ferroviaire commune à grande vitesse.
Les coûts du développement.
Les performances et les résultats obtenus par la Chine pourraient induire en erreur : les progrès réalisés ont coûté très cher à la Chine et aux Chinois.
Pendant de très longues années, ils ont consenti à un labeur dur et mal payé, à ce que leur travail soit exploité largement par les marchands occidentaux qui, seuls, avaient accès au consommateur final occidental.
En vertu de cette spéculation, en vertu de cet abus, les Chinois ne recevaient qu'une part infime de ce que rapportait la vente de leurs produits.
L'ancien directeur général de l'OMC (ancien commissaire européen français au commerce)19 se félicitait de ce que cette part de valeur ajoutée qui revenait aux Chinois (alors que ces biens étaient le produit de leur travail) en représentait une fraction mineure.
Comme de nombreux autres pays du sud dont on a exploité la main d'oeuvre, les richesses naturelles, sur lesquels sont toujours déversées des Himalaya de déchets (Bangladesh, Maldives, Sénégal... Chine)
Au 1er janvier 2021, la législation européenne prévoit d'interdire l'envoi de déchets plastiques non-triés vers des pays plus pauvres, non-membres de l'OCDE. On sait ce qu'il en est des règles de ce type quand il s'agit de les faire respecter dans des pays où il n'existe aucun moyen de les faire appliquer...
En 2018, la Chine avait pris la décision de ne plus être la « poubelle du monde », et ainsi d'interdire purement et simplement le transit de déchets à ses frontières. (Le Figaro, L. 22 janvier 2018).
De nombreux autres pays pauvres ne peuvent se le permettre, soit parce ces déchets et leur recyclage -aussi nuisibles soient-ils pour l'homme et la nature- sont une ressource incontournable, auxquels aucune activité n'est substituable, soit parce que leurs autorités sont corrompues, soit le plus souvent les deux.
La Chine est devenue une puissance. Et, de ce fait même, représente un danger, une menace sur la prospérité et la sécurité des pays occidentaux qui dominent le monde depuis la Chute de Grenade.20
Parmi tous les reproches qui lui sont adressés (cf. plus haut), il y a l'accusation cynique de polluer la planète. Le même genre d'accusations sournoises adressées à l'Allemagne par ses voisins, à propos de son abandon du nucléaire et de l'achat de gaz russe.
Il est vrai que les législations deviennent de plus en plus contraignantes en cette matière en Europe et en Amérique du nord. Les opinions publiques y sont sensibles au point que ce sujet est désormais incarné dans des partis politiques qui ont pignon sur rue.
Mais les manipulations sont au détour de chaque campagne.
Pollutions et jongleries statistiques
L'Occident offre le visage de la vertu.
Depuis 20 ans. La consommation d'énergie aux Etats-Unis baisse de 15% (alors que leur PIB s'est accru de 25%). Mais est-on autorisé à parler de découplage pour autant ?
De 2000 à 2018. Emission totale de CO2 par pays.
France : -16%
Allemagne et Italie : -20%
Etats-Unis : -8%
Chine : +200%
Inde : +150%
Il ne faut pas se contenter de l'empreinte carbone produite en chacun des pays. Il faut intégrer ce qui est produit ailleurs (carbone compris) et qui est importé par les pays occidentaux.
1% de la population mondiale produit 17% de la pollution mondiale. Les riches consomment le plus, polluent en toute impunité et en souffrent le moins.
Avec un voeu pieux : Le découplage est érigé en nécessité universelle : produire plus pour satisfaire les besoins de tous et moins polluer pour protéger la biosphère terrestre.
Emissions de CO2 par habitants (tout compris)
USA : 25 tonnes
France : 11
Chine : 5 (ce qui équivaut aux émissions de la France dans les années 1930.)
Remarque. Le carbone reste 1 siècle dans l'atmosphère.
Le cas des « terres rares » est emblématique. Ces matières premières ne sont pas si rares. Ce qui est rare c'était le pays où les transnationales qui en avaient le besoin pouvaient les transformer et polluer à loisir sans craintes pour les pays vers lesquels ils exportaient des produits finis débarrassés de toutes les nuisances et déséconomies dont ils prenaient soin de ne jamais instruire leurs clients.
Victimes du développement de la Chine.
Les premières victimes sont les pays de la première vague de délocalisation des processus productifs proches des pays industriels qui vont peu à peu cesser de l'être : les pays du sud et de l'est de la méditerranée, le Mexique, les pays d'Amérique Centrale et du reste de l'Amérique Latine, selon leur régime politique et l'« ouverture » de leur économie, aussi bien aux capitaux qu'à leur départ vers (le plus souvent) les havres fiscaux off shore (les îles Caraïbes, anglo-normandes, Gibraltar, Lichtenstein... et même la Suisse, le Luxembourg et certains Etats Etasuniens.21
L'arrivée de la Chine dans la mondialisation va bouleverser ce paysage et annuler les avantages précédents : la distance géographique euclidienne perdra tout avantage comparatif et les pays qui accueillaient les usines dans la phase précédente, vont être peu à peu désertés.
Ce sera le cas des pays cités plus haut : La Turquie, la Tunisie au sud et à l'est de l'Europe et le Mexique, voisin des Etats-Unis. On peut aussi y ajouter certains des ex-pays de l'Est intégrés dans l'économie de marché.
On ne peut comprendre la crise tunisienne (la « révolution du jasmin ») sans la lier à cette évolution qui a fait perdre à la Tunisie l'essentiel de la compétitivité que lui conférait la proximité de l'Europe, concurrencée qu'elle l'a été (et elle l'est toujours) par les pays d'Europe du sud (Italie, Espagne, Portugal, Grèce) qui se sont battus pour conserver leurs parts de marché (quitte à se rapprocher de la Chine, comme c'est le cas de l'Italie et de la Grèce, intégrés dans les BRI), avec le bénéfice que leur confère l'appartenance à l'Union.
Conclusion.
De l'expérience chinoise on peut retenir quelques leçons.
1.- Le sous-développement n'est pas inéluctable. Des hommes décidés, motivés, organisés peuvent, en un temps relativement court (qu'est-ce quelques décennies dans la vie d'une nation ?), assurer à leur population un niveau de vie satisfaisant. Certes, n'est la Chine qui veut.
2.- Contrairement aux idées reçues, le marché n'est pas plus inéluctable que le sous-développement et la subordination. Il a été imposé à la Chine que l'a utilisé à son profit, mais à son corps défendant. Le contrôle de l'accumulation du capital et de sa financiarisation évitent aux Chinois les criantes inégalités observées ailleurs en Occident et l'inqualifiable et insupportable misère que connaissent tous les pays qui ont ouvert imprudemment leurs frontières à la « liberté » marchande et à son corollaire politique, la démocratie représentative extrêmement sélective dans sa représentativité.
Il y a bien sûr le sempiternel mot de W. Churchill égaré entre les moins bons et les mauvais systèmes...
3.- Malgré son développement, la Chine demeure sur ce versant-ci de l'univers. Contrairement au Japon schizophrène écartelé entre mondialisation et confinement féodal insulaire.
4.- Malgré toutes les précautions et la Chine commence à en avoir un réel souci, la consommation de 1.5 milliard d'habitants à un niveau similaire à celui des Européens et des Nord-américains n'est pas tenable. D'autant moins qu'on ne peut (qui le pourrait ?) en exclure les Africains, les Indiens...
Le recyclage, l'économie circulaire, la frugalité de la consommation d'énergie (à ce sujet ce n'est pas la rareté inévitable des ressources fossiles qui pose problème, mais et bien la dissipation d'énergie dans la biosphère) suffiraient-ils à éviter à la planète des processus catastrophiques irréversibles ?
C'est pourquoi le rôle des Etats localement et le multilatéralisme globalement deviennent de plus en plus une impérative nécessité.
Et après ?
Le temps des « conquêtes de l'Ouest » est terminé et nous faisons le pari que les divagations de E. Musk sur le déménagement de l'humanité vers une autre planète n'ont qu'un seul but : améliorer ses performances boursières à très court terme. Nous le comprenons d'autant plus que se profilent à l'horizon des corrections boursières devant lesquelles la « crise de 1929 » sera reléguée au rang de tempête dans un verre d'eau.
Toute la question sera de savoir qui va payer le recyclage des eurodollars et des junk bonds abondamment distribués via toutes les banques de la planète ?
Nous savons que les Russes ont depuis longtemps commencé la conversion de leurs dollars en or et que les Chinois songent à se délester de leurs bons américains, sachant que la dévaluation des créances américaines dévalue ipso facto les contreparties qu'ils possèdent.
Notes
1 - « Quand la Chine s'éveillera... le monde tremblera». Fayard, 1973, 475 p. Même s'il n'entrevoyait pas les réalisations auxquelles est parvenu ce pays aujourd'hui et se contentait d'échafauder une stratégie au service de son pays qui amena le général de Gaulle a reconnaître la Chine communiste en recommandant à Nixon plus tard d'en faire de même, A. Peyrefitte a incontestablement fait oeuvre de politique avisé que la France a cessé de produire depuis longtemps.
2 - La France a connu deux grandes vagues de privatisation. La première, sous E.Balladur (ministre de la privatisationès qualité), lors de la première période de cohabitation, entre 1986 et 1988, et sous le socialiste L. Jospin après la surprenante dissolution de l'Assemblée Nationale par J. Chirac en 1997. Aucun gouvernement n'avait dans l'histoire de France autant privatisé que celui de L. Jospin. (https://www.lemonde.fr, 16 nov. 2009)
3 - Cinq « Visiteurs du soir » (en juillet 1983) pèseront sur un F. Mitterrand indécis pour que le franc soit maintenu au sein du Système Monétaire Européen, avec toutes les conséquences qu'a subi la France jusqu'à ce jour.
4 - Les Echos, V. 10 décembre 2021.
5 - L'Allemagne est le premier investisseur étranger en Hongrie, en République tchèque, en Slovaquie et en Pologne.
6 - Abdelhak Benelhadj : « Europe fédérale, Hamiltonienne ou Allemande ?» Le Quotidien d'Oran, J. 09 décembre 2021.
7 - Né le 15 février 1991, le groupe de Visegrád est aussi appelé Visegrád 4 ou V4 ou triangle de Visegrád. Organisation supra-nationale, PGV a permis à ses membres d'adhérer à l'OTAN et l'UE.
8 - Paris a vu se dégrader la place de la langue française dans les ex-pays de l'est où elle se battait d'égale à égale avec l'anglais. La France préfère l'investissement dans les services. Exemple de la Pologne où, officiellement, la France est depuis 2000 le premier investisseur en Pologne, grâce notamment aux récents investissements de France Télécom, Vivendi, Auchan, Carrefour et Casino. Cependant, l'Agence polonaise pour l'investissement étranger ne comptabilisant que les investissements supérieurs à un million de dollars, ne tient pas compte des nombreux investissements de PME allemandes, qui selon le ministère des Affaires étrangères allemand placent en réalité l'Allemagne au premier rang des investisseurs.Cf. « La présence Allemande en Europe centrale :Rencontre d'intérêts ou politique de conquête ? » Revue Synthèse, n°73, 11 janvier 2003.
9 - On peut lire trois des volumes qui ont été consacrés cette question, publiés chez Fayard.
- 1972. Halte à la croissance ? 214 p.- 1974.
La surchauffe de la croissance. Essai sur la dynamique de l'évolution. 140 p.- 1975. L'heure de la vérité. 137 p.
10 - Cf. la triple catastrophe de Fukushima (mars 2011) : un séisme (de magnitude 9 sur l'échelle de Richter, à 300 km au NE de Tokyo) a entraîné (d'abord des dommages à la centrale nucléaire) un tsunami qui a aggravé l'état de la centrale, provoqué une fusion de son coeur et un rejet de produits radioactifs dans l'océan. Le démantèlement de la centrale ne sera complètement achevé qu'en 2050-2060 au mieux...
11 - Après une longue année de grèves et de protestations des paysans, le gouvernement Modi vient de déclarer l'abandon de son projet de loi concer nant l'agriculture indienne.
12 - Bollywood (l'industrie cinématographique indienne) met en scène cette conception à travers la plupart de ses productions. A titre d 'exemple, on peut citer un film qui a eu beaucoup de succès, par-delà le « sous-continent »: « La famille indienne »de Karan Johar (2001 en Inde, 2004 en France).
13 - Les touristes « Chinois représentent 2,5% de la fréquentation touristique totale, ils sont encore plus lourds' économiquement : avec 4 milliards d'euros de dépenses, ils totalisent 7% de la recette touristique» AFP, Le Figaro, L. 27 janvier 2020.
14 - Concept forgé au XIXesiècle par le géographe Allemand Ferdinand von Richthofen. Il coule de source que les historiques « routes de la soie », voies commerciales parsemées d'oasis et contraintes par les climats et les reliefs, de la Méditerranée aux frontières chinoises, n'ont que peu à voir avec les ré seaux anastomosés que la Chine a tissé au service de son économie et de son commerce. Les Chinois ont raison de le baptiser d'un label plus conforme à leurs objectifs : « Belt and Road Initiative» (BRI) et de s'écarter de l'inclination immodéré des Occidentaux pour les références et les envolées emphatiques.
15 - Unité de mesure de capacité de transport en multiple du volume standard occupé par un conteneur de 20 pieds (i.e. 6 m). Par exemple, un porte-conteneurs 1500 EVP est doté d'une capacitéé quivalente à 1500 conteneurs de 20 pieds.
La standardisation du transport maritime (en opposition aux vraquiers dont la manutention est peu productive) a aussi bénéficié aux autres transports par la connexion des réseaux via les intersections multimodales.
16 - Ce dimanche 12 décembre les Argentins sont descendus en masse dans la rue pour refuser tout accord avec le FMI dont les prescriptions les ont affamés lors des PAS précédents. Les manifestants crient leur désespoir : « La dette est envers le peuple, pas le FMI ». « C'est horrible de voir dans des hôpitaux des enfants au petit ventre gonflé par la faim. Ca existe, aujourd'hui, en Argentine! »,. « Tous les 8-9 ans, cela recommence, on nous vend' au FMI (...) la seule option que je vois est de ne pas payer, mais traquer les capitaux enfuis à l'étranger. Que ceux-là payent! »(AFP D. 12 décembre 2021). Ces slogans pourraient être repris à l'identique dans de nombreux autres pays. A moins de demeurer débitrice perpétuelle, et donc sous contrôle étranger éternel, jamais l'Argentine n'arrivera à s'acquitter de ses 350 Md$ de dette publique. Un simple jeu d'écriture dont les Argentins n'ont pas vu la couleur. Sans compter les fuites de capitaux facilitées par les accords qui facilitent la circulation des capitaux et la liberté des changes. Les défenseurs de la légalisation de l'informel (ex-trabendistes) qui noyautent les rouages de l'Etat en Algérie, exigent tout autant, comme nécessaire à l'investissement étranger et le recyclage des capitaux mal acquis. Le sempiternel projet de privatisation des banques algériennes y participe.
17 - En mai, la Lituanie a quitté cet espace de concertation. Vilnius s'est aligné sur Washington et a repris à son compte toutes les critiques adressées par les Etats-Unis à la Chine. En août, un bureau de représentation de Taïwan a ouvert dans la capitale lituanienne, suscitant une crise diplomatique: la Chine, qui ne tolère que les « bureaux de représentation de Taipei », a rappelé son ambassadeur et renvoyé celui de la Lituanie. (Le Monde, J. 21 octobre 2021).
18 - Franceinfo, L. 26 avril 2021.
19 - Ce « socialiste » français a un parcours singulier. Membre de la direction de l'Institute for East West Studies jusqu'en 1995, dont le président d'honneur est George H. W. Bush, il est également membre du conseil d'administration de ODC (Overseas Development Council - Washington) jusqu'en septembre 1999. De 1996 à 1998 inclus, Pascal Lamy est membre de la branche Europe de la RAND Corporation (RAND Europe Advisory Board). Il a également été président de la commission Prospective du CNPF, futur MEDEF jusqu'en septembre 1999. Il a été à plusieurs reprises membre du bureau du club « élitiste»Le Siècle.
Il a participé très régulièrement à la conférence de Bilderberg (en 2000, 2001, 2003 et 2005), «laboratoire d'idées » réunissant les chefs d'entreprise les plus influents de la planète.
20 - Graham Allison : « Vers la guerre. L'Amérique et la Chine dans le piège de Thucydide?» Tard. O. Jacob, 2019, 408 p. L'auteur explore et renouvelle, au prix d'un recours acrobatique à l'antiquité, le concept belliciste usé jusqu'à la corde, de « guerre préventive ». Ce délire a eu un succès éditorial mondial.
21 - Alain Wisner (1985) : « Quand voyages les usines. Essai d'anthropotechnologie ». Syros, 196 p.
- Pierre Judet (1981) : « Les Nouveaux Pays Industriel ». Editions ouvrières. Coll. Nord-sud. 170 p.
- René-François Bizet (1981) : « Les transferts de technologie ». PUF, QSJ, 1915, 123 p.
Un visiteur de l'exposition "Comment l'extrémisme veut tromper le peuple", le 10 décembre 2021 au Camp des Milles, à Aix-en-Provence
afp.com - Nicolas TUCAT
Stigmatiser certaines populations, se présenter comme seul sauveur face à une crise et une supposée décadence, brouiller les repères: l'exposition "Comment l'extrémisme veut tromper le peuple", qui s'ouvre samedi au Camp des Milles (Bouches-du-Rhône), décrypte les mécanismes de la propagande.
Organisée en collaboration avec le Musée mémorial de l'Holocauste de Washington, cette exposition se focalise sur deux exemples: la propagande des nazis, qui a abouti à l'arrivée au pouvoir d'Adolf Hitler et à l'extermination de millions de Juifs, Roms et opposants durant la Seconde Guerre mondiale, et celle du régime de Vichy en France qui a collaboré avec les nazis.
"Il nous paraissait essentiel dans un lieu comme le Camp des Milles, qui a fonctionné comme un camp d'internement et de déportation sous Vichy, de montrer aussi comment le régime pétainiste a utilisé la propagande et la stigmatisation pour arriver à ses fins antidémocratiques", souligne pour l'AFP Alain Chouraqui, directeur de recherches émérite au CNRS et président de la Fondation du Camp des Milles.
C'est dans cette ancienne tuilerie du sud-est de la France que le régime de Vichy a interné des milliers de Juifs. Quelque 1.800 d'entre eux furent déportés vers les camps d'extermination d'Auschwitz-Birkenau.
Le site avec ses bâtiments en brique rouge, son wagon en bois où défilent les visages des hommes, femmes et enfants assassinés, est aujourd'hui un lieu de mémoire qui accueille des milliers de jeunes pour leur faire découvrir les mécanismes qui font basculer une société vers le totalitarisme et les crimes de masse.
"Le régime de Vichy a aussi déporté de la zone sous son autorité, y compris des juifs dénaturalisés et des enfants nés français", insiste M. Chouraqui.
- Postes radios et graphistes -
Tout en refusant de commenter la polémique autour des propos du candidat d'extrême droite à l'élection présidentielle Eric Zemmour, selon qui Pétain a sauvé des juifs français, M. Chouraqui souligne: "Peu importent les personnes et même les mouvements politiques, ce qui nous importe, ce sont les processus sociétaux qui les portent et les mécanismes de propagande et c'est vrai qu'aujourd'hui nous voyons à l’œuvre des tentatives de déformation ou même d'inversion de la réalité".
Inversion de la réalité, messages simplistes sur fond de crise, désignation de groupes ennemis: des affiches d'époque reproduites dans l'exposition montrent comment les nazis, qui n'avaient que peu d'adhérents au départ, se dépeignent en période de crise économique comme "le dernier espoir" pour les paysans et ouvriers allemands.
Entre 1918 et 1933, ils embauchent des graphistes, vantent la défense de la tradition et raflent 33% des suffrages au Parlement en 1932, score suffisant pour arriver au pouvoir grâce à des alliances.
"Nous montrons les moyens employés par les extrémistes pour être portés au pouvoir avant de mettre à bas la démocratie", relève Bernard Mossé, commissaire de l'exposition française.
Une fois au pouvoir, à partir de 1933, les méthodes se font plus violentes: prise de contrôle des journaux et exclusion de groupes entiers de population.
Et la "propagande", du latin "propagare" - propager, répandre -, prend toute son ampleur.
Le régime nazi encourage ainsi la production de postes radios pour que les foyers puissent entendre la répétition de leurs théories et petit à petit se convaincre, et surtout rester indifférents au sort de ceux qui sont arrêtés, internés, avant d'être exterminés, relève l'exposition.
Dans la partie sur Vichy, un film d'époque montre aussi la propagande en œuvre pour glorifier la milice.
"Les processus qui ont mené au pire sont des processus face auxquels on peut résister", souligne M. Chouraqui, mais à condition de ne pas perdre de vue les repères que les extrémistes tentent de brouiller.
L'exposition se veut donc un "appel à la vigilance", poursuit-il, pour les citoyens qui votent et "doivent réaliser qu'il y a danger pour la démocratie quand certains s'en prennent à la liberté des médias et l'indépendance de la justice".
Mais aussi pour les médias: "alors que selon nos analyses, la France est assez avancée dans un processus qui met la démocratie sur une ligne de crête (...), chaque choix éditorial compte".
IPASA - Les premières neiges de la saison sont venues recouvrir de leur manteau blanc dimanche les hauteurs de Sidi Semiane, à l'ouest de Tipasa, après quatre saisons d'absence, à la grande joie de la population de cette région à vocation agricole.
Les habitants de la ville montagneuse de Sidi Semiane, située à 16 km au Sud-ouest de la ville côtière de Cherchell et à 900 m d'altitude, ont été agréablement surpris, à leur réveil, par les beaux paysages enneigés qu'ils n'ont pu voir depuis quatre ans, a déclaré à l’APS Sofiane. B, un habitant de cette localité.
"La joie a gagné la population de cette région à vocation agricole avec l'arrivée de la poudreuse, augurant une belle saison agricole", a-t-il dit, tout en rappelant que les dernières chutes de neige remontent à l’hiver 2016/2017, alors que la diminution de la neige commençait à se faire sentir depuis 2012, année durant laquelle de fortes chutes de neige ont causé la fermeture des axes routiers.
De belles photos de la région emmitouflée dans son manteau blanc ont été partagées sur les réseaux sociaux, augurant une"bonne saison agricole", a indiqué à l'APS le secrétaire général de la Chambre d'agriculture, Chokri Benchabane.
Pour leur part, les agriculteurs de la wilaya se sont dits particulièrement "optimistes" quant à ces importantes chutes de neige, mais aussi par les appréciables précipitations enregistrées ces dernières semaines, rappelant que Tipasa, qui est une wilaya agricole par excellence, a beaucoup souffert ces dernières années d’un déficit sévère en pluie, ce qui a affecté l'activité agricole.
Limitée au Sud par Arib (wilaya d’Ain Defla), la commune de Sidi Semiane, à l'instar des localités montagneuses de l'Ouest et du Sud, notamment Menaceur et Beni Mileuk, est particulièrement dépendante des activités agricoles traditionnelles, de l’élevage, l’aviculture et l’arboriculture fruitière, notamment les amandiers.
La wilaya de Tipasa enregistre depuis près d'un mois et quotidiennement des rigueurs du climat, qui se traduisent par d'importantes chutes de pluie, à l’origine d’une hausse du volume d'eau emmagasiné par le barrage de Boukerdane (commune de Sidi Amar) en passant de 500.000 M3 à six (6) millions de mètres cubes, selon la direction des ressources en eau.
Les responsables en charge du barrage Kef Eddir de Damous, à l'extrême Ouest de Tipasa, non encore opérationnel, ont, pour leur part, procédé à un lâcher d'eau afin d'éviter toute menace sur la population, en raison du volume d’eau stocké qui a dépassé les 90 millions de M3.
A noter qu’un bulletin spécial (BMS) de l'Office national de météorologie diffusé, hier samedi, a annoncé un niveau d'alerte orange pour un nombre de wilayas, dont Tipasa.
Un nouveau BMS diffusé, dimanche, a annoncé la poursuite des chutes de pluie orageuses.
Avant de devenir un symbole, le 6 décembre 1989, c'était d’abord un jour de fin de session comme les autres, à l’École polytechnique de Montréal. Ce jour-là, des étudiants préparaient leurs derniers examens, livraient leurs derniers exposés, photocopiaient leurs derniers travaux de fin d’année. Des décorations de Noël ornaient la cafétéria, et dehors, une neige mêlée de grésil tombait sur la ville. Et puis, vers 17 h 10, tout a basculé.
Vingt longues minutes
Entre le premier et le dernier coup de feu, il s’est écoulé 20 minutes. Vingt longues minutes où 14 femmes ont été assassinées, et 14 personnes (hommes et femmes) blessées, dans une tuerie qui a traumatisé la société québécoise.
Au deuxième étage de l’immeuble, un homme âgé de 25 ans, Marc Lépine, vêtu d’un jeans bleu et de bottes Kodiak, est assis sur un banc à l’entrée du local du registrariat. Il n’est pas étudiant, même s’il a déjà été inscrit en 1986 et a été vu trois fois dans la semaine précédant le 6 décembre. Il bloque partiellement l’accès au local – les étudiants doivent l’enjamber pour circuler. On le voit fouiller dans un sac de plastique sans en montrer le contenu. Une employée s’approche pour lui demander si elle peut l’aider. Il ne répond pas et quitte les lieux. Il erre un moment, puis se dirige vers une classe.
***
17 h 10
Dans cette classe du deuxième étage, des étudiants en génie mécanique des professeurs Adrian Cernea et Yvon Bouchard écoutent l’exposé d’un camarade. Lépine entre. Il tient une carabine de ses deux mains.
« Tout le monde arrête tout ! »
Il tire un coup de feu au plafond.
« Séparez-vous : les filles à gauche, les gars à droite ! »
Personne ne réagit. Il répète son ordre, d’un ton beaucoup plus autoritaire. Dans l’énervement, garçons et filles se trompent de groupe. L’homme pointe la droite, ordonne aux gars d’aller à droite. C’est le côté où se trouve la porte. De la gauche, il pointe aux filles le fond de la classe.
« OK, les gars, sortez. Les filles, restez là. »
Les gars sortent, mais apparemment pas assez vite au goût de Lépine.
« Grouillez-vous le cul ! »
Les derniers gars sortent en courant. Mais à ce moment, ils croient encore qu’il s’agit d’une blague et que l’homme tire à blanc.
J’ai vu Marc Lépine entrer dans ma classe. Il nous a mis dehors, moi et mes étudiants garçons. Il a tué mes étudiantes. Elles avaient l’âge de ma fille.
Adrian Cernea, ancien professeur à Poly, dans une entrevue à La Presse en 2009
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17 h 10-17 h 15
Lépine reste seul devant les neuf femmes rassemblées dans le fond de la classe. Il s’approche d’elles.
« Savez-vous pourquoi vous êtes là ? »
— Non, répond une étudiante, Nathalie Provost.
— Je lutte contre le féminisme.
— Mais on n’est pas des féministes, réplique Nathalie Provost. On n’a jamais lutté contre des hommes ! »
L’homme se met à tirer de gauche à droite sur le groupe. Une trentaine de balles atteignent les neuf femmes. Trois, dont Nathalie Provost, sont blessées. Six ne se relèveront pas : Hélène Colgan, Nathalie Croteau, Barbara Daigneault, Anne-Marie Lemay, Sonia Pelletier et Annie St-Arneault.
Nous ne sommes pas féministes, seulement des femmes qui veulent gagner leur vie en génie. Nous ne sommes pas des femmes qui descendent sur la place publique pour essayer de prouver qu’elles sont meilleures que les hommes.
L’étudiante Nathalie Provost, de son lit d’hôpital au lendemain de la tuerie, racontant aux journalistes ce qu’elle avait dit au tireur
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17 h 15
Après le carnage dans la première classe, le tireur sort dans le corridor. Il fait feu sur des étudiants dans un local des photocopieuses – un homme et deux femmes sont blessés. Il retourne sur ses pas et entre dans une autre classe. Il regarde le groupe et repère une étudiante dans le fond de la classe. Il vise puis tente de tirer deux coups de feu dans sa direction, mais son arme ne fonctionne pas. Il quitte le local. Il recharge son arme près d’un escalier de secours. Un étudiant qui descend les marches l’entend dire :
« Oh, shit, j’ai pus de balles. »
L’étudiant poursuit son chemin et continue dans le corridor. Il aperçoit alors les trois blessés du local des photocopieuses. Il se retourne vers l’homme, à temps pour le voir relever son arme. Il quitte les lieux en courant.
Le tireur retourne à la classe. La porte est verrouillée. Il tire trois coups de feu sur la poignée, sans succès. Il reprend le corridor, passe près des trois blessés, jusque dans le foyer. Une étudiante arrive de l’escalier mécanique. Il tire sur elle. Blessée, elle se relève et va se réfugier au cinquième étage.
Lépine se trouve alors dans le foyer. Il s’appuie sur un comptoir pour changer le chargeur de son arme. Une étudiante est cachée derrière le comptoir. L’homme l’aperçoit et tente de l’abattre par deux fois, sans l’atteindre.
Il s’est avancé vers moi une première fois, m’a regardée, et a tiré. Il a continué de marcher, puis est revenu vers moi et a tiré de nouveau.
L’étudiante qui était cachée entre deux comptoirs (Le Devoir, 7 décembre 1989)
Une fille suppliait : “Aidez-moi, aidez-moi.” Mais les gens étaient terrifiés. Personne n’osait bouger.
Un étudiant interrogé à la sortie de Poly, le soir du 6 décembre (Radio-Canada)
Le tueur était dans le local d’à côté. J’ai entendu du bruit, comme des coups de feu. On croyait que c’était une farce. Un de mes amis a dit : “Si c’est une farce, elle est bien faite : il y a un corps plein de sang à côté de la photocopieuse.”
Un étudiant de Poly, ami de l’une des victimes (La Presse, 7 décembre 1989)
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17 h 15-17 h 20
Le tireur se promène dans le foyer du deuxième étage, puis dans le café-terrasse, avant de passer devant les services financiers. L’une des employées, Maryse Laganière, son manteau sur le dos et son sac à l’épaule, verrouille la porte – Lépine revient au pas de course pour tenter de l’en empêcher. Par une vitre, il la voit s’éloigner. Il tire sur elle à travers la vitre. Maryse Laganière est touchée mortellement à la tête.
Des appels affluent maintenant au 911. Les ambulanciers essaient de comprendre où se trouve Polytechnique – le campus de l’Université de Montréal est très grand, les étudiants ne connaissent pas l’adresse exacte de leur école.
Je marchais dans le couloir au deuxième étage et j’ai vu un gars sortir. Il a tiré un coup de feu. Deux femmes à côté de moi sont tombées.
Un étudiant de Poly (La Presse, 7 décembre 1989)
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17 h 20-17 h 25
Lépine reprend les escaliers roulants pour descendre à la cafétéria du premier étage. Sitôt arrivé, il tire dans la cafétéria où se trouve une centaine de personnes – Barbara Maria Klucznick, une étudiante en sciences infirmières, est touchée. Le tireur se déplace jusqu’à l’extrémité de la cafétéria, là où se trouve l’espace surnommé « Polyparty ». Anne-Marie Edward et Geneviève Bergeron s’y sont réfugiées, avant d’être abattues. Lépine sort de la cafétéria et retourne au troisième étage. Il tire plusieurs coups de feu dans le corridor – deux hommes et une femme sont blessés.
Les premiers policiers arrivent sur les lieux à 17 h 22, deux minutes avant les ambulances. Le groupe tactique d’intervention (SWAT) est demandé. La police établit un périmètre de sécurité et éloigne la foule.
En nous voyant en train de les aider [les blessés], il a essayé de nous tirer. On s’est couchés par terre et on a fait semblant d’être morts.
Un étudiant à la sortie de Poly, le soir des événements
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17 h 25
Le tireur monte au troisième étage et entre dans une classe. Les étudiants assistent à l’exposé de quatre étudiants en génie métallurgique. Il entre dans le local, fait quelques pas vers l’estrade où se tient Maryse Leclair. Il tire sur elle. Il se retourne vers le reste de la classe et tire sur les premières rangées. Deux étudiantes, Maud Haviernick et Michèle Richard, tentent de s’enfuir par la porte – elles sont abattues. Par la porte arrière de la classe, d’autres ont plus de chance et arrivent à fuir. Le tireur se promène dans la classe et tire sur les étudiants cachés sous les pupitres. Trois sont blessés. Une quatrième, Annie Turcotte, est tuée.
Sur les ondes de la police, les appels des étudiants sont retransmis – ils donnent une description du tireur. Un étudiant suggère de déclencher l’alarme incendie. Une répartitrice l’y autorise. Un policier s’y oppose, mais il est trop tard, l’alarme retentit. Quatorze voitures de police sont dépêchées tout autour de l’école et dans le secteur, mais la confusion règne dans la coordination de l’intervention.
On s’est jetés par terre et pendant cinq minutes, on est restés là à se demander : “Est-ce mon tour ou celui du suivant ?”
Jean-Paul Baïlon, professeur dans la dernière classe visitée par le tireur
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17 h 25-17 h 30
Sur la tribune en avant de la classe, Maryse Leclair est blessée et appelle à l’aide. Le tireur la rejoint. Il sort un poignard et lui donne trois coups de couteau. Puis il dépose son poignard sur le pupitre du professeur, de même que deux boîtes de 20 balles et sa casquette. Une autre boîte de 20 balles est posée sur une chaise en avant de la classe. Il s’assoit sur l’estrade, enlève son manteau qu’il met autour du canon de son arme, puis dit : « Oh shit. » Il se tire une balle dans la tête, la dernière balle du chargeur. Il est 17 h 28 ou 17 h 29, estimera la coroner.
PHOTO PASCAL TESTE, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE
Pierre Leclair, ex-policier du SPVM montrant une photo de sa fille Maryse Leclair qu'il a découverte sans vie à l’École polytechnique lors de l'intervention policière.
En tournant le coin du corridor, j’ai vu ma fille étendue par terre, dans le local. Je l’ai reconnue tout de suite en la voyant. Elle avait les mêmes vêtements que le dimanche précédent, quand elle était venue souper à la maison. Puis j’ai vu son visage. C’était bien elle.
L’ancien policier Pierre Leclair, père de Maryse, qui était de service le soir du 6 décembre
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17 h 30-17 h 35
Les policiers attendent toujours l’arrivée du groupe tactique avant d’entrer. Les étudiants décrivent la présence de blessés un peu partout dans l’école. À 17 h 35, un policier apprend que le tireur se serait suicidé au troisième étage. C’est seulement à ce moment que, sans plus attendre le groupe tactique, sept premiers policiers entrent dans l’immeuble.
Dans l’heure qui suit, les ambulanciers évacueront 14 blessés, hommes et femmes. D’un point de vue médical, aucune des 14 femmes tuées n’aurait pu être sauvée par une arrivée plus rapide des secours, a affirmé la coroner. Dans plusieurs cas, un seul des nombreux projectiles reçus aurait suffi à les tuer.
J’avais l’impression de voir Beyrouth à la télé après une explosion. Du sang, des blessés, des morts.
André Tessier, ancien policier et chef de la division du crime contre la personne
Je veux seulement qu’on fasse également mention des 14 victimes oubliées : celles qui ont survécu.
André Beaulieu, paramédical chez Urgences-santé, dans un plaidoyer pour les blessés
Sources : Rapport de la coroner Teresa Z. Sourour publié en mai 1990, archives de La Presse
En souvenir d’elles
PHOTO TIRÉE DU LIVRE CE JOUR-LÀ, FOURNIE PAR LES ÉDITIONS LA PRESSE
Geneviève Bergeron, 21 ans
Elle aurait pu choisir une carrière artistique, avec ses talents en chant et en clarinette. Mais elle se dirigera finalement vers les sciences. La fille de Thérèse Daviau, l’une des premières femmes élues au conseil municipal de Montréal, était en deuxième année de génie mécanique et vivait en colocation avec sa meilleure amie. « Elle était belle, bonne en tout et, surtout, tellement fine », évoque sa petite sœur, Catherine. « Elle faisait sentir chacun de nous comme important ! Mais elle ne s’en rendait pas compte, c’est ce qui faisait qu’on l’aimait encore plus. »
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Hélène Colgan, 23 ans
« Féministe ? Bien sûr, Hélène l’était. Mais elle n’avait pas le mot écrit dans le front. » Le lendemain de la tuerie, Lilianne Colgan parlait ainsi à la journaliste de La Presse de sa fille qui finissait son parcours de quatre années d’études en génie mécanique. Particulièrement studieuse, la Lavalloise envisageait de poursuivre ses études à la maîtrise. Mais avant tout, elle avait prévu partir quelques jours à la fin de la session en vacances au Mexique avec sa meilleure amie, Nathalie Croteau.
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Nathalie Croteau, 23 ans
Son voyage au Mexique prévu avec Hélène Colgan devait lui procurer une pause avant les trois derniers mois d’études qui lui restaient pour enfin décrocher son diplôme en génie mécanique. La native de Brossard était décrite par ses proches comme entreprenante et très impliquée, notamment dans les cadets de l’air de la ville et à l’école secondaire Antoine-Brossard. Un centre communautaire porte aujourd’hui son nom dans sa ville natale.
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Barbara Daigneault, 22 ans
Elle jouait du piano, du violon, de la contrebasse, mais avait choisi le génie mécanique. Elle était sur le point de terminer ses études, et déjà, elle travaillait comme auxiliaire d’enseignement pour son père, Pierre A. Daigneault, futur doyen des études de premier cycle à l’École de technologie supérieure (ETS). Elle avait un amoureux et vivait avec son petit frère Jean-Christophe dans un appartement de la rue Ontario, d’où elle l’avait salué en partant le matin du 6 décembre. Après sa mort, la famille a créé le Fonds Barbara-Daigneault pour récompenser chaque année une étudiante en génie de l’ETS.
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Anne-Marie Edward, 21 ans
Dans La Presse du 8 décembre 1989, la tante d’Anne-Marie, Huguette Leblanc, confiait à la journaliste : « Je vous le dis. C’était parti pour faire toute une femme. » La liste des passions d’Anne-Marie donne en effet le tournis : kayak, échecs, baseball, soccer, escalade, voile, ski… Résidante de Pierrefonds, elle avait également des racines au Nouveau-Brunswick, d’où était originaire son père. Elle avait entrepris ses études en génie chimique en janvier 1989 après avoir travaillé pendant deux étés chez Monsanto Canada. Après sa mort, sa famille a été au premier rang du combat pour le contrôle des armes à feu. En 2013, le nom d’Anne-Marie a été donné au nouveau pavillon des sciences du collège John-Abbott.
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Maud Haviernick, 29 ans
Si elle était plus âgée que la majorité de ses consœurs de classe, c’est que Maud visait une seconde carrière après avoir travaillé quelques années en design d’intérieur avec une formation qui ne nourrissait pas ses ambitions. « Si je veux être celle qui décide, je n’ai pas le choix. Je dois aller chercher ce diplôme ! » dit-elle à ses proches en choisissant l’École polytechnique. Étudiante en deuxième année en génie des matériaux, elle vivait à Laval avec son conjoint depuis sept ans déjà. Après la mort de Maud, sa sœur Sylvie a piloté pendant quelques années la Fondation des victimes du 6 décembre contre la violence.
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Barbara-Maria Klucznik, 31 ans
Son diplôme en génie, elle l’avait déjà en poche. Titulaire d’une maîtrise en génie économique de l’Université Oskar Lange, en Pologne, Barbara-Maria avait débarqué à Montréal en 1987 avec son mari, Witold Widajewicz. Comme celui-ci étudie en médecine, elle décide de s’inscrire en sciences infirmières à l’Université de Montréal pour être prête à le suivre partout au Québec au terme de ses études. Le soir du 6 décembre, ils prennent leur repas à Poly pour profiter des meilleurs prix sur le campus. Ils se perdent de vue dans la cohue suivant l’entrée du tireur dans la cafétéria. Barbara-Maria est inhumée dans sa ville natale de Wroclaw, en Pologne. Depuis 1990, la faculté des sciences infirmières de l’UdeM décerne une bourse à son nom à une étudiante de deuxième année du baccalauréat qui a un excellent dossier scolaire et qui a besoin de soutien financier.
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Maryse Laganière, 25 ans
Née à Grondines, en Mauricie, Maryse a grandi à Montréal comme petite dernière d’une famille de 13 enfants. Après des études en informatique au collège de Maisonneuve, elle commence à travailler au Service de la recherche scientifique, puis au Service des finances de l’École polytechnique. En 1986, elle accueille un étudiant, Jean-François Larivée, qui vient porter un chèque pour payer ses droits d’inscription. Subjugué, l’étudiant lui fera une cour discrète et assidue. Ils se marient en août 1989 et emménagent rue Bourbonnière, dans Hochelaga-Maisonneuve. Depuis la mort de Maryse, Jean-François Larivée s’est impliqué dans la Fondation des victimes du 6 décembre contre la violence et au sein de PolySeSouvient.
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Maryse Leclair, 23 ans
Une année dans un collège privé trop strict, c’était bien assez pour une ado douée, mais rebelle. En plein milieu des années 80, l’aînée de la famille Leclair débarque dans une polyvalente lavalloise et vit à fond sa passion pour le punk britannique et le courant New Wave. Sa fougue finira par la mener à Poly, où elle se trouvait le 6 décembre 1989, pour terminer sa quatrième année, spécialisation en génie des matériaux. Son nom sera le premier dévoilé au public – son père, le policier Pierre Leclair, responsable des relations avec les médias, l’a trouvée dans la dernière classe visitée par le tireur. Son amoureux de l’époque dit avoir perpétué la mémoire de Maryse en inculquant à ses deux filles l’importance de mener leur vie comme elles le souhaitent, sans se soucier de ce que pensent les autres.
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Anne-Marie Lemay, 22 ans
Il n’y a pas que la médecine pour soigner les gens, s’est dit Anne-Marie Lemay au moment de choisir une carrière. Les ingénieurs conçoivent des équipements mécaniques, des prothèses pour compenser les handicaps. Et c’est pourquoi la Bouchervilloise d’origine a choisi le génie mécanique. Malgré l’exigence des études, Anne-Marie Lemay continue à chanter dans la chorale de son patelin et s’implique dans la vie étudiante de Polytechnique. Son amoureux est dans la même classe qu’elle lorsque le tireur sépare les hommes des femmes. Depuis 1991, un parc situé derrière l’école secondaire de Mortagne, à Boucherville, porte son nom.
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PHOTO TIRÉE DU LIVRE CE JOUR-LÀ, FOURNIE PAR LES ÉDITIONS LA PRESSE
Sonia Pelletier, 28 ans
Native de Saint-Ulric, un village gaspésien au bord du fleuve, Sonia Pelletier était retournée aux études pour décrocher un diplôme en génie mécanique après avoir obtenu un DEC en technique d’architecture. Douée en dessin, en cuisine et en couture, elle vivait avec deux colocs à Montréal et arrivait au terme de ses études. Le 6 décembre 1989, elle avait déjà terminé ses cours, mais s’était rendue à l’école pour entendre les exposés de ses collègues de classe. « Mon père disait : “J’ai beau chercher, je ne lui trouve pas de défaut” », nous racontait en 2014 sa sœur Micheline Pelletier. En juillet dernier, un parc à son nom a été inauguré dans son village natal.
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PHOTO TIRÉE DU LIVRE CE JOUR-LÀ, FOURNIE PAR LES ÉDITIONS LA PRESSE
Michèle Richard, 21 ans
Elle n’y habitait plus depuis quelques années, mais ses amis restés à Lac-Mégantic n’ont jamais oublié « Mimi ». C’est avec elle qu’ils ont fondé la Maison des jeunes quand ils étaient ados. C’est aussi à ses côtés qu’ils ont joué dans la fanfare de la section des cadets. Et même si elle avait déménagé à Montréal avec sa mère et sa sœur au milieu des années 80, elle revenait une ou deux fois par année dans son patelin pour y revoir ses copains. Personne n’a été surpris que cette belle fille brillante choisisse une branche non traditionnelle, le génie métallurgique, pour y faire carrière. Elle devait se fiancer au printemps 1990 avec son amoureux qui se trouvait d’ailleurs dans la même classe qu’elle, le 6 décembre 1989. Après sa mort, sa mère, Thérèse Martin, s’est engagée aux côtés d’autres parents dans la coalition pour le contrôle des armes à feu.
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PHOTO TIRÉE DU LIVRE CE JOUR-LÀ, FOURNIE PAR LES ÉDITIONS LA PRESSE
Annie St-Arneault, 23 ans
Quand la Ville de La Tuque a cherché un lieu à nommer à sa mémoire, elle a choisi la bibliothèque. Parce qu’Annie « aimait la poésie » et qu’elle avait « une grande soif d’apprendre », a rappelé le maire de l’époque. Curieuse et réfléchie, artiste et scientifique, elle a aussi laissé le souvenir d’une camarade au grand cœur, toujours de bonne humeur. Le 6 décembre 1989, elle assistait à son dernier cours avant d’obtenir son diplôme en génie mécanique. Son frère Serge a fait éditer ses poèmes après sa mort et organisé des soirées de poésie à sa mémoire pendant quelques années à La Tuque.
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PHOTO TIRÉE DU LIVRE CE JOUR-LÀ, FOURNIE PAR LES ÉDITIONS LA PRESSE
Annie Turcotte, 21 ans
Partout, tout le temps, Annie était entourée. Au motel de ses parents à Granby, où elle donnait des leçons de natation aux enfants qui y séjournaient. À Montréal, où elle vivait avec ses deux grands frères. Dans les partys, avec tous les enfants qui étaient spontanément attirés vers elle. Avec ses amis, à qui elle donnait des lifts à bord de la voiture dont elle avait rafistolé elle-même le réservoir qui fuyait. Elle avait choisi le génie des matériaux, et s’intéressait à la protection de la nature et de l’environnement. La veille de sa mort, son frère Donald lui avait donné un coup de main pour un travail en physique. Il l’a regardé partir, ému. « J’étais fier de ma petite sœur
Sources : archives La Presse, livre Ce jour-là, par Josée Boileau (Éditions La Presse)
La chanteuse de music-hall qui a fait son entrée au Panthéon a séjourné en Algérie entre les années 1930 et 1950. En sa qualité d’artiste. Mais aussi comme espionne pour le compte du renseignement français durant la Seconde Guerre mondiale. Elle adoptera plus tard deux orphelins : un garçon d’origine kabyle et une fillette de parents pieds-noirs.
Joséphine Baker, entrée au Panthéon ce 30 novembre 2021, n’est pas encore espionne au service de la France libre quand elle débarque pour la première fois en Algérie.
C’est un mardi 1e décembre 1931, journée froide mais ensoleillée, que la vedette du music-hall arrive à Alger avec son mari et deux de ses collaborateurs pour une petite tournée dans les salles de la capitale. Sur le quai de la gare, elle est accueillie par une délégation du Racing universitaire d’Alger, le club omnisports, dont elle est devenue marraine quelques mois plus tôt.
Dans la section foot de ce club où Algériens et Européens évoluent ensemble, un certain Albert Camus a exercé ses talents de gardien de but au sein de l’équipe junior. Joséphine Baker est logée à l’hôtel Saint-Georges, un palais mauresque qui abritera le 10 novembre 1942 la cérémonie de signature du cessez-le-feu entre l’amiral Darlan, ancien chef du gouvernement vichyste, et les Américains, qui venaient de débarquer à Alger.
Le lendemain de son arrivée, Joséphine Baker, accompagnée de son orchestre de musiciens noirs, donne un concert au Majestic (aujourd’hui salle Atlas), dans le quartier de Bab el-Oued. Elle chante notamment « J’ai deux amours », qui a lui a valu un grand succès en France dès la sortie du titre en 1930.
« Honorable correspondante »
Joséphine Baker n’a pas deux amours mais trois : son pays, Paris et Alger. Sa passion pour cette ville, elle la déclame en 1936 dans sa chanson « Nuit d’Alger », qu’elle chante en roulant les r de son accent américain.
Dix ans plus tard, elle y revient, non pas seulement comme chanteuse, mais surtout comme « honorable correspondante » du contre-espionnage français. Janvier 1941, elle arrive à Alger où elle descend cette fois à l’hôtel Aletti, situé à deux pas de la baie d’Alger. L’Algérie est alors sous le contrôle de Vichy.
L’Aletti est déjà mythique pour avoir reçu Charlie Chaplin lors de l’inauguration de l’établissement en 1931. Il maintiendra sa légende en accueillant l’écrivain américain John Steinbeck ou le photojournaliste Robert Capa, qui immortalisera le débarquement des Alliés en Normandie en juin 1944.
Joséphine Baker reste une semaine à l’Aletti avant de rejoindre le Maroc. À Casablanca, elle subit une fausse couche et une lourde opération d’ablation de l’utérus. Elle reste clouée à l’hôpital, où sa chambre devient une succursale du Deuxième bureau, les services de renseignements français.
SES MESSAGES PASSENT INAPERÇUS GRÂCE À UNE ENCRE INVISIBLE SUR SES PARTITIONS MUSICALES
Rétablie, elle reprend la route en 1943, souvent à bord d’une jeep militaire, pour se rendre en Algérie, alors que les troupes vichystes ont perdu la partie. Elle y donne des représentations pour les soldats alliés. Et en profite pour transmettre messages et renseignements à l’occasion de ses déplacements à travers le pays, d’Oran à Alger en passant par Mostaganem et Blida.
Ces messages passent inaperçus grâce à une encre invisible sur ses partitions musicales. Elle travaille sous les ordres de Jacques Aptey, chef du contre-espionnage militaire à Paris, qui l’a recrutée en 1939, avant de rejoindre la résistance à Londres en 1940.
En octobre 1943, celle qu’on surnomme « la perle noire » va être doublement comblée. Elle donne un gala à l’Opéra d’Alger et rencontre son idole, le général de Gaulle, celui qu’elle a décidé de suivre après son appel du 18 juin.
Croix de Lorraine
Pendant l’entracte, l’officier d’ordonnance lui demande de se rendre dans la loge d’honneur du général. Le chef de la France libre lui cède son fauteuil et lui remet une petite croix de Lorraine en or.
Son partenaire sur scène et dans les Folies Bergères, Frédéric Rey, raconte la scène : « Quand elle revient en coulisses, elle tenait son poing crispé sur une petite croix de Lorraine en or… Jamais je ne devais lui voir un visage plus bouleversé. C’était le cadeau du général. Elle ouvrit la main, nous montra le bijou, la gorge si serrée qu’elle ne put articuler une parole. »
Elle quitte Alger peu de temps après ce spectacle, sa voiture se perd dans les montagnes de Kabylie, puis effectue un long périple pour rallier Tunis, d’où débute une longue tournée : Sfax, Le Caire, Tripoli (en Libye), Benghazi, Tobrouk, Alexandrie, Beyrouth, Jérusalem, Tel-Aviv, Haïfa.
Là où elle passe, Joséphine déchaine les passions et collecte des renseignements. À Beyrouth, elle se déleste de la petite croix offerte par De Gaulle dans une vente aux enchères destinée à récolter des fonds pour la résistance.
JOSÉPHINE RECUEILLE BRAHIM ET MARIANNE, DONT LES PARENTS ONT ÉTÉ TUÉS PENDANT LES COMBATS AVEC L’ARMÉE FRANÇAISE
Retour à Alger en mai 1944. Cette fois comme sous-lieutenante de l’armée de l’air de la France libre. Fini les tournées et les spectacles, terminé les tenues de scène affriolantes. Elle est en uniforme au sein de la direction des formations féminines de l’état-major général de l’armée de l’air comme officier de propagande.
Son séjour algérois dure un peu plus de cinq mois. Puis elle regagne la France quelque temps après la libération de Paris en août, pour reprendre ses tournées durant lesquelles elle ne manque pas de chanter « Nuit d’Alger ».
Mère adoptive de plusieurs enfants, elle retourne une fois de plus en Algérie en 1957, en pleine bataille d’Alger. Cette fois, son séjour n’est pas lié à sa vie d’artiste ou à ses états de service comme honorable correspondante. Joséphine recueille deux orphelins, Brahim et Marianne, dont les parents ont été tués pendant les combats avec l’armée française.
Tous deux étaient présents à la cérémonie d’entrée de leur mère au Panthéon. À l’hôtel Saint-Georges d’Alger, la photo de Joséphine Baker trône toujours à l’entrée du bar, à côté de celles de Churchill, Che Guevara, Jean Cocteau, Eisenhower ou encore Albert Camus.
Durant la nuit du 31 novembre 2012, j’étais sur le chemin du retour de chez ma tendre mère, quand, je fus accosté par une inconnue. Sa tête était voilée mais laissait apparaitre quelques mèches de ses cheveux noirs.
Ses yeux étaient un amalgame de gris, de bleu, de noir et de vert. Un nez droit d’une statue antique remontait sa bouche fine mi ouverte, d’où jaillissait un sourire plus sucré que le miel du ciel.
Et je me suis dit que cette femme ne devrait être qu’une fée évadée d’un conte. Ou peut-être une Houri d’un paradis. Elle était là, avec un haïk d’antan qui l’enveloppait et qui la rendait encore plus désirante que toutes les belles et douces princesses que les châteaux des monarques gardaient jalousement.
La dame en question était revenue pour fêter le 1 er novembre de cette année et qui devrait avoir un goût un peu spécial. Sublime, elle avançait avec des pas sûrs. On dirait une biche au milieu d’une oasis. Elle était souriante et l’éclat de son visage rendait le lieu comme un jour sans lune et sans soleil. Son regard n’était qu’une caresse, une invitation à un monde merveilleux et féerique. C’était l’Algérie la Reine de toute l’Afrique.
Elle était revenue à ma ville d’El Khemis pour juste m’inviter à l’accompagner à Alger, où tout le monde l’attendait. Elle avait honte de partir seule à la rencontre de tous ses amants, ses amis et fans. Elle voulait aussi lire un poème et faire passer un message à tous les responsables que toute âme quittera un jour ce monde et que le plus heureux est celui qui gère pas la misère des autres. Elle voulait aussi prévenir les vivants que les martyrs de l’Algérie ne sont pas des morts. Ils sont chez le Maître des deux mondes. Ils sont satisfaits.
La belle Algérie était si élégante dans son kaftan blanc et j’avais la chair de poule en tenant sa main de soie et de velours. Alors, je me suis vite rappelé tous les martyrs qui avaient succombé au charme de cette Reine : L’Emir Abdelkader et son armée. El Mokrani et Cheikh Bouamama. Lala Fatna Nesoumer la tigresse du Djurdjura. Ahmed Bey et tous les héros qui avaient combattu pour elle. J’étais submergé par un flot d’images et je n’avais même pas le temps de reconnaitre toutes les personnes qui défilaient dans ma tête.
Le documentaire inédit commençait par un attroupement de femmes au maquis qui préparaient de la galette et du café pour nos Djenoud. C’étaient des femmes qui avaient cru à l’indépendance et qui avaient contribué à côté des hommes pour l’obtention de notre liberté. Un peu plus loin se tenaient des essaims de Maquisards. J’avais vite reconnu leur chef qui n’était que le Lion Ben Boulaid. Il était si content de cette visite. Le Lion des Aurès avait toujours ce regard vif et cet air d’un père généreux et tendre. Il avait le pouvoir de reconnaitre la douce Algérie. Le grand Ben Boulaid savait que la construction d’un Etat de droit n’était pas une affaire facile et que la satisfaction de tous était un but utopique. En quittant le chef de la révolution nous avions accédé chez d’autres éléments de L’ALN.
En effet, le camp du Tigre Amirouche était juste à la rentrée d’un ravin boisé. Le fabuleux Amirouche était un bel Homme fort et serein. Un personnage digne de respect et d’amour. Il m’avait pris dans ses bras et j’avais vite compris que cet homme était un vrai chef. Avant de quitter ce chef militaire nous avions eu la chance de saluer un autre lion qui n’était que l’unique et le brave colonel El Houas. Le camp voisin était celui d’un homme de ma ville natale : Le colonel Si M’hamed Bougara. Le héros était là, devant moi avec son sourire énigmatique. Le valeureux combattant de mon enfance était devant mes yeux et sans me retenir des larmes échappèrent et mes jambes perdirent le contrôle et j’allais tomber. Heureusement le fabuleux colonel Si Djilali Bounaama était tout près et m’avait aidé à reprendre mon équilibre. J’avais pris mon mal en main et j’avais discuté avec ces deux lions de la wilaya IV.
La nuit tirait les pendules et il fallait voir les autres héros qui attendaient notre visite. A ma sortie de chez mes amis, je me suis retrouvé en face d’une grotte, où se tenait un autre groupe. Je m’étais rapproché sans faire de bruit et c’était vraiment une bonne surprise. C’était le chahid Zabana qui me tendait sa main pour m’éviter un piège. Le sourire comme d’habitude à la bouche et le coran à la main. Le premier guillotiné savait que son sang était répondu sur cette terre et que son nom avait aussi fait le tour du monde. Il était plus connu que son idole Zapata. En nous voyant au seuil de la grotte, Un officier était rapproché de nous pour nous inviter à le suivre à l’intérieur. C’était un certain Djilali Boudernane, le héros de la ville de « mille chahid » : théniet el had de la wilaya de Tissimsilt.
En pénétrant encore plus, grande fut ma surprise, car le chef de ce groupe était Abane Ramdane. Le génie qui avait préparé le congrès de la Soummam et ce dernier venait de m’inviter à venir m’asseoir à côté de lui. Il était si beau et ses paroles étaient buvables telle une tisane au miel. J’avais absorbé ses propos et j’ai vite compris pourquoi ce génie avait tant de jaloux. Il voulait juste que la nouvelle génération sache que son unique vœu était la libération de l’Algérie et que Dieu avait exaucé son vœu. En quittant Abane, un autre officier était là, pour m’aider à passer à un autre endroit un peu mystérieux.
En entrant à la seconde grotte je ne voyais pas bien, mais je savais que deux hommes voulaient me voir. En effet, le colonel Lotfi était là, à m’attendre avec le héros Chaabani. Ils étaient en tenu militaire. Le colonel Chaabani m’avait invité à partager son repas. C’était un Lion fier qui ne reculait devant rien. Il était heureux d’avoir participé à la guerre de libération de son pays. Son ami Lotfi, le sourire à la bouche paraissait très heureux pour la victoire de sa patrie, mais il n’avait rien dit. Quinze minutes plus tard, une jeune femme était venue pour nous emmener voir d’autres responsables. Le premier de ces hommes n’était rien que le fabuleux Larbi Ben M’hidi. Un homme que j’avais rêvé de juste lui dire comment il avait étonné tous les généraux Français. Avec son sourire courtois, il m’avait tiré dans ses bras pour m’avouer que sa force était spirituelle et que sa foi en Dieu était plus forte. Il venait de m’apprendre qu’il était mort sur la table de torture et qu’il avait su battre ses bourreaux qui n’avaient rien gagné de sa mort, sauf la haine et le mépris des Français eux-mêmes. Au fond de la grotte j’avais pu faire la rencontre du reste de la troupe des chouhada : Didouche Mourad, Audin, Ziroud Youcef, Ali la pointe, Issat Idir, mohamed Bouras, Hassiba Ben Bouali, Souidani Boudjemaa, Ali Mellah, Belouazdad,, et d’autres héros connus et d’autres inconnus du grand public. Cette fiction a été inventée pour juste vous renseigner sur notre éloignement du serment fait aux martyrs.
Une imagination qui devrait nous protéger contre la France qui avait juré de nous ruiner tôt ou tard. Cette France qui avait entravé toutes les bonnes démarches que l’Algérie avait entamé pour l’unité des pays maghrébins. Cette France qui avait encouragé Le Maroc à prendre le Sahara Occidental et de n’écouter que sa propre raison. Ce Roi du Maroc qui gagnerait tout s’il avait freiné ses ambitions démesurées. Ce Roi du Maroc aurait l’aide et le soutien de sa sœur ainée l’Algérie. Il ne fallait pas écouter les la voix de la France qui voulait régner au nord de l’Afrique en le divisant. La France qui avait investi en Tunisie et qui avait acheté l’honneur des notables d’une part et en semant son venin au cœur des démunis d’une autre part. Elle voulait que l’Algérie coule après 50 ans. Cette France la revoilà à nos frontières du Sud pour juste commencer une guerre sans fin et que notre pays s’embrase à nouveau et que les avions de l’OTAN viennent pour détruire nos bases de vie sous prétexte de bavures. Ils savent tous que nous sommes riches et ils sont à nos frontières pour nous protéger contre le vent et notre pays doit payer une taxe qui se résume à des milliards de dollars.
C’est la mafia internationale qui menace les pays riches, mais qui ne possèdent pas les armes nucléaires. Il faut prendre en compte que la crise qui touche certains pays d’Europe aura des répercussions sérieuses sur notre pays et les Algériens devraient prendre conscience de ce danger imminent qui nous menace ? Aujourd’hui, nos ennemis tuent nos frères à Ghaza et aucun pays Arabe n’a eu le courage de critiquer ouvertement cet Etat voyou qui assassine des enfants et des femmes. Cependant, tant de pays Arabes étaient pour le renversement du régime Syrien et ils avaient eu l’audace d’armer les enfants d’un même pays pour s’entretuer. On jubile pour le départ du président Syrien, car il est l’ami des Iraniens, mais on oublie ceux qui méritent le soutien et l’aide. Ceux qui mènent une guerre avec des pierres contre des obus de tank. Il est temps pour nous les Arabes de dire non à tous ces faux amis qui ne sont chez nous que pour semer la discorde. Nous avons l’amour de Dieu, car sous nos terres nous avons des trésors. Alors, nous devrions scruter les cieux pour l’installation de nouvelles technologies, telles les énergies éoliennes et solaires.
Nous avons tout pour réussir un essor qui nous mettra à l’abri de nos ennemis qui attendent la moindre faute pour revenir nous coloniser comme ils l’ont fait en 1830. Donc, ce premier novembre 2012 devrait être un événement spécial qui nous rappelle nos fautes et notre égarement du droit chemin. Un rappel qui nous offre la chance d’une révision de notre carte de route. Un retour vers la démocratie réelle et non pas celle du maintien du clanisme et de la répression. Laissons de côté ce sujet écœurant et revenons à cette fameuse nuit et mon aventure avec cette Reine. La douce femme qui m’accompagnait avait assisté à toutes mes rencontres. Elle était si triste et si touchée du film qui venait de passer sous ses beaux yeux. La douce femme ne voulait plus partir sur Alger qui était notre première destination. Elle n’avait pas aimée tous ces dépenses inutiles et qui avaient dénaturé cet événement qui devrait être purement historique pour éveiller le sentiment du patriotisme chez la nouvelle génération. Un événement qui devrait aussi frapper les consciences des hommes qui sont au pouvoir : Qu’est-ce qu’ils ont fait de l’Algérie ? La dame voulait que cet événement touche les cœurs et les esprits. Sans trop tarder, un vent formidable était venu de je ne sais où, pour nous transporter vers un ailleurs. En ouvrant mes yeux, j’ai reconnu l’endroit grâce à ce palmier qui décorait le lieu. Nous étions au Mausolée de Sidi Lakhdar Ouled Ekhlouf à Mostaganem. Je me suis dit que cette femme ne devrait être que Nedjma de Kateb Yacine. Je m’attendais à revoir le nègre protecteur de la tribu des Kelbout. Je me prêtais à voir la forêt du Nador de Guelma et Souk-Ahras.
0Non, Il n’y avait pas de nègre, mais juste une femme nommée Nekhla. Après le diner, la femme qui m’accompagnait avait entendu des appels qui venaient du dehors. Sans un mot, elle était partie. Le lieu était si doux et j’entendais des voix qui lisaient du coran. J’avais pris un livre d’un étalage et sous l’éclat de la lumière d’une bougie je m’étais mis à lire sourate El Moulk. Sans prendre conscience, je m’étais endormi sous l’envoûtement du lieu et je me voyais dans la cour du mausolée avec le maitre des lieux. C’était un homme d’un certain âge et je ne pouvais discerner les contours de son visage, car il y avait comme un éclat auquel je ne pouvais faire face. Le saint homme était venu pour juste m’inviter à revenir me ressourcer chez lui quand je ressentirai le besoin. Il venait de m’apprendre que la Reine qui était avec moi voulait le retour aux sources et aux traditions.
Que l’Algérie souffrait du problème de la défaillance des consciences chez les citoyens. Nous assistons au départ des nobles valeurs. On ne valorise plus le savoir. On n’applique la loi que sur les faibles. Les riches ont tout corrompus. Les menteurs et les escrocs ont pris les postes de commandes, les élites ont pris la fuite et le reste contre la pauvreté mène la lutte. En me réveillant j’avais ressenti le désir pressent d’écrire quelque chose pour apaiser mon chagrin. Je voulais que cette Reine sache l’amour que j’avais pour elle. Tu dois savoir douce Algérie que mon amour vient d’un cœur de chair et que tu restes l’amante, la sœur et la mère. Tu dois Apprendre aussi, que ton amour est plus sucré et plus doux que le miel du ciel. O toi la rose qui ne fait que me fuir ? Cela fait des années que je cherche ta voie, pour juste écouter le timbre de ta voix. Ton silence de musée fait de toi une femme sage, qui tue ses amants de tous les âges. Et oui, tes paroles, douce Algérie ne sont que des parfums cueillis d’un jardin inconnu. Tu es cette histoire de Houri évadée d’un conte et moi tel Homère je la conte à ce merveilleux beau monde qui m’écoute, afin que tu demeures éternelle. Tu es cet amour entre la rosée et la fleur. Tu es cette passion entre une vague et un vieux rocher. Tu es ce langage divin entre les nuages et les monts. Tu es le repos d’une mosquée et la quiétude d’un quai. Tu es cette étoile qui poursuit son chemin sans tenir compte des radotages des envieux. Tu es le soleil d’un jour pluvieux. Je t’ai aimée jeune et je t’aimerai davantage en étant plus vieux.
Dis-moi comment te séduire o toi femme qui me fait tant courir ? J’ai juste envie de te revoir pour te parler de ce soir. Pour juste humer ton parfum de gazelle, sous le regard captivant de tes beaux yeux gris et noirs. J’ai toujours adoré fouiner dans tes notes. Je voulais lire les noms de tous tes amants. Je voulais connaitre les noms de tous les aèdes et de tous les écrivains qui avaient assez de courage pour dénoncer les affres des colons et ensuite les déviations de certains djenoude. Je voulais t’écrire des missives nocturnes pour t’informer des pilleurs de ta fortune. Ceux qui prétendaient êtres tes héritiers et qui avaient dilapidé tes richesses sans relâche et sans pitié. O toi douce Algérie que j’ai tant aimée. Toi l’amante, la sœur et la copine. Mon cœur ne peut retenir l’ampleur de cette douleur. Il ne peut tolérer les cris moqueurs, ni les coups bas d’une poignée de loups débarqués de je ne sais où et qui font la pluie et le beau temps. Tes vrais héros je les connais et je suis fier de les rencontrer dans mes rêves, mes lectures et mes évasions nocturnes. Je connais aussi les noms des lâches et des traitres. J’irai apprendre la critique littéraire, la prose et la poésie chez notre professeur en littérature Hadj Nacer Malika. Pour juste avoir une place au palais du savoir, au moment où les gens d’aujourd’hui font la course derrière l’argent et les bourses. Ils font la queue pour juste dénicher un siège dans une mairie et faire des affaires sur le dos du peuple. Pour toi l’Algérie j’irai me battre avec les géants et je ferai jaillir la lumière du néant. Dis-moi douce Algérie comment te séduire et comment t’aimer aussi fort. Montre-moi comment pardonner à tous ces responsables qui avaient manqué à leur devoir.
Comment faire passer mon respect et mon admiration pour les vrais moudjahine qui avaient tout donné pour ce pays. Douce Algérie, enseigne-moi la voie du pardon afin que mon cœur se vide de toute cette rancune. Montre-moi le chemin de l’oubli et de la réconciliation. Tu sais bien que mon cœur n’est qu’une fleur et que ma tête n’a qu’un secret : celui de t’aimer tout en versant des pleurs. Douce Algérie, qui me laisse solitaire. Douce image charmante et évanouie. Rose parfumée par le vent d’automne, au fil des ères toujours épanouie. Lors que s’enfuit rapidement une sirène, triste, triste est le marin, qui reste seul avec ses douleurs et ses peines, qui s’abandonne à son malheur et chagrin. Souvenir, amer et cruel souvenir. Le grand bonheur fait de tant de tendresse, qui ne devait jamais finir, pleure aujourd’hui sur ma détresse. Demain, j’irai au mont pour parler au ciel. Humble, je me prosternerai. Soumis, devant vous, l’Eternel. Vous le savant, de mes peines et mes cris. L’Unique et le Maître de nos destins. Et pour toi, l’Algérie, je prierai, quand naîtront les beaux matins, et que la brise berce les douces prairies. BOUTARAA- Farid
Des femmes et des dieux : trois femmes ont décidé d’écrire un livre ensemble aux excellentes éditions des Arènes. Elles sont rabbin, imame et pasteure et elles ont abordé tous les sujets qui leur tenaient à cœur. Quelle place pour les femmes dans leurs trois religions, marquées par des siècles de patriarcat ? Peut-on faire une lecture féministe de la Torah, de la Bible ou du Coran ? Comment réagir aux représentations souvent dévalorisantes du corps de la femme ? Comment distinguer ce qui relève du divin et de la tradition ? Qu’est-ce qui est sacré ? Kahina Bahloul, Floriane Chinsky, Emmanuelle Seyboldt étaient présentes l’autre soir sur un plateau télé. Personne ne semble avoir détecté une grande absente et par ailleurs l’ombre d’une présence non captée ni par les projecteurs, ni par les caméras. La grande absente, c’était une femme prêtre, la fille spirituelle de l’apôtre des apôtres, je veux parler de Marie-Madeleine, celle qui selon les Écritures fut le premier témoin de la résurrection du Christ. J’avais mal à ma religion, mal à mon église qui refuse toujours l’ordination des femmes. La présence non captée, c’était celle du Diable. Elle était là, l’ombre du Malin. Elle était radieuse et narquoise. Lucifer savourait son triomphe puisqu’il avait réussi une fois de plus à bannir sa pire ennemie de la communauté des bergers de la religion la plus pratiquée dans le monde. C’était le lendemain d’Halloween. L’air répandait encore une odeur de folklore et de fagot : celle des bûchers de sorcières si souvent allumés par certains bergers gravement dérangés de l’église catholique.
Depuis le 15e et le 17e siècle, depuis la Renaissance qui avait aussi été la sienne, le Diable avait trouvé des alliés parmi certains théologiens qui affirmait que l’ordination des femmes était exclue par le droit canon, et parmi certains médecins qui affirmaient que les femmes sentaient beaucoup plus mauvais que les hommes « parce qu’elles étaient froides et humides, alors que l’homme était chaud et sec ». En 1943, Charles de Gaulle rêvait de faire rédiger une nouvelle déclaration universelle des Droits de l’Homme. Il avait demandé conseil à la philosophe Simone Weil. Celle-ci avait défini un préalable à une nouvelle déclaration des Droits de l’Homme : « L’enracinement », une déclaration des devoirs envers l’être humain. Il est temps de dire à ceux des princes de mon Église qui sont « hors sol » que les devoirs envers l’être humain priment sur les Droits de l’Homme. Les Romains ont crucifié le Christ. Quinze siècles plus tard, l’église catholique a crucifié la femme. Il est grand temps de cesser de clouer les filles d’Ève et de Marie-Madeleine sur le pilori d’une certaine forme d’impureté, d’indignité et d’infamie, comme il est temps de faire de Marie l’intouchée qu’elle n’a jamais été. Mon Église a un devoir envers l’humanité comme envers la femme. En ne le remplissant pas, elle fait le jeu du Diable. C’est ce que rappellent certains prêtres de terrain dans Paroles de prêtres qu’il faut relire attentivement après avoir lu Des femmes et des dieux.
L’événement culturel a été organisé par l’association Le Fort de Cherchell. Avant d’entamer sa conférence qui avait été suivie par un débat, Ahmed Béjaoui tenait à déclarer à l’assistance : «Votre magnifique ville me rappelle de merveilleux moments. Je suis venu en 1968 ici pour animer un forum sur le ciné-club au complexe touristique Mer et Soleil. Cherchell avait abrité un Congrès de cinéastes et documentalistes du monde entier au cinéma Rex. Je venais très souvent avec mon ami Mounir Bouchenaki dans cette ville.»
En 2021, il ne reste aucune trace des deux salles de projection, Rex et Ton Ciné, en plus le complexe touristique Mer et Soleil s’est transformé en un dépotoir, rongé par l’insalubrité, hélas. L’ex-capitale de l’Empire de Juba II est devenu une ville en déliquescence, en lambeaux, agressée par l’incivisme, envahie par les «incultes» qui ont imposé «leur philosophie».
S’agissant de la célébration de la Journée nationale de l’émigration, le conférencier regrette l’absence de documents cinématographiques sur les manifestations du 17 octobre 1961 non seulement à Paris, mais dans les autres villes françaises, en citant au passage la ville de Bordeaux. «Il faut faire le distinguo entre le FLN du passé (avant 1962, ndlr) et celui d’après», dit-il.
L’orateur rappelle qu’en Algérie juste après l’Indépendance, il y avait 435 salles de cinéma. «L’Etat a favorisé la production et non la projection.Il est impossible de parler d’un cinéma sans public, priver le public de cet art et faire disparaître de nos villes les salles de cinéma, cet état des lieux perdure malheureusement», indique-t-il.
Ahmed Béjaoui a relaté le rôle du cinéma durant la guerre de Libération de l’Algérie dans ses livres. Il indique que le système politique du pays colonisateur était dirigé par 03 institutions, pourvu des mécanismes répressifs bien huilés.
Il s’agit de la Présidence de la République, du Premier ministère et de la Police, avec à leurs têtes respectivement, le Général de Gaulle, Michel Debré et Maurice Papon.
Les familles algériennes sorties manifester pacifiquement à Paris pour revendiquer la liberté et l’Indépendance du pays, avaient atrocement été assassinées, jetées à la Seine, battues et torturées par les éléments du sinistre criminel Maurice Papon.
Un crime d’Etat qui n’est toujours pas reconnu par les autorités françaises à ce jour. C’est parce que l’événement historique sanglant avait eu lieu à Paris, que de nombreux médias internationaux avaient réussi à relayer l’information, qui d’ailleurs avait dérangé et mis à mal les dirigeants politiques français de Paris, ville des libertés, de l’égalité et de la fraternité, qui s’est transformée en une capitale des crimes contre l’humanité.
Ce n’était pas le cas des massacres des familles algériennes sous l’occupation au mois de mai 1945 dans leurs villes. Le colonialisme maîtrisait la situation, ce qui explique l’absence des médias. La violence à Paris au mois d’octobre 1961 a terni l’image de la France.
Il n’en demeure pas moins que les manifestations légitimes des populations algériennes du mois de mai 1945, celle du mois de décembre 1960 et enfin celle du mois d’octobre 1961 en France n’avaient pas bénéficié d’une médiatisation intense, pour diverses raisons.
Ahmed Béjaoui a mis l’accent sur le 2ème aspect de la lutte et la résistance du peuple algérien, en l’occurrence l’efficacité de l’action diplomatique, car la résistance et la détermination du peuple algérien avec des moyens militaires dérisoires s’avéraient très inégales, face à l’armada de la 4e puissance militaire de l’OTAN.
M’hamed Yazid et ses compagnons avaient su être créatifs face à l’adversité du colonialisme, mais surtout intelligents, jusqu’à faire entendre la voix du peuple algérien à l’intérieur de l’hémicycle de l’ONU, en dépit des fortes pressions exercées par la France.
La question algérienne était inscrite dans les ordres du jour des réunions aux assemblées générales de l’ONU. Les manifestations en Algérie du mois de décembre 1960 et du mois d’octobre 1961 avaient été déterminantes pour l’Indépendance du pays, grâce à la réalisation des documentaires par les militants algériens.
Le système colonial s’est écroulé. «Est-ce-que le cinéma algérien a repris fidèlement les manifestations du peuple algérien en France et en Algérie, pourquoi a-t-on occulté volontairement ces luttes populaires, pour mettre en avant le zaimisme», s’interroge le conférencier. Le zaimisme a pris le dessus, afin de reléguer les actions du peuple algérien en France et en Algérie, jusqu’à les banaliser, les rendre invisibles.
«La 1re guerre médiatique s’est déroulée en Algérie et non pas ailleurs, en Indochine ou en Irak dit-il, le cinéma doit témoigner uniquement et non pas écrire l’Histoire», précise le cinéaste.
Le conférencier a «jalonné» son intervention très instructive par des anecdotes «croustillantes» relatives aux films réalisés par les cinéastes français, européens et américains, qui avaient soutenu le combat légitime du peuple algérien.
Ahmed Béjaoui a gâté et a enrichi l’assistance, par l’énumération des titres de quelques documentaires et des films sur l’Histoire de l’Algérie, sur la situation sociale et sur la détermination de ses compatriotes durant les années de lutte pour l’Indépendance de leur pays, en France et en Algérie, en mettant l’accent aussi sur le rôle des femmes.
Il avait cité les noms des réalisatrices et réalisateurs issus de parents immigrés, qui étaient en quête de leurs identités. Le cinéma fait réveiller les mémoires.
Le film contribue réellement à susciter le sentiment de nationalisme et de solidarité nationale. Impuissant, l’orateur regrette l’état du cinéma en Algérie : «Il est rentré dans une phase de décrépitude, à la suite des décisions politiques prises dans le passé, dit-il, sans que ces pouvoirs ne proposent les solutions alternatives, après l’abandon des salles, leurs équipements de projection et celui des tournages ajoute-t-il, les cinéastes de la diaspora avaient produit des œuvres cinématographiques, considérées comme étant des chefs d’œuvres». L’ami de Assia Djebar évoque l’importance de l’historiographie dans l’imaginaire populaire.
«Toute cette jeunesse de notre pays qui a porté très haut l’image de l’Algérie comme une nation à l’échelle planétaire, capable de se prendre en charge après son Indépendance, tel que l’avait fait M’hamed Yazid, explique le talentueux cinéaste dans un silence religieux de l’assistance, sommes-nous à présent capables à renouer avec ce passé, et pouvons-nous nous passer de la diaspora pour produire des films de grande qualité, influents et décisifs, qui relatent le glorieux passé de l’Algérie et le combat de son peuple», conclut Ahmed Béjaoui sous une salve d’applaudissement de l’assistance.
En cette période de fin d'un monde (capitaliste), mais pas du Monde, il est de la plus haute importance de se pencher sur la chute de l'Empire romain, et, corrélativement, de l'esclavage, pour comprendre les mobiles du déclin du mode de production esclavagiste, qui a des résonances avec notre époque actuelle marquée par l'effondrement de l'économie, de la «civilisation» de pacotille capitaliste. «Civilisation» la plus gadgétisée de l'Histoire de l'humanité, au sens du terme fixé par le dictionnaire, qui définit le gadget comme une chose (société) artificielle qui plaît plus par sa nouveauté et son originalité que par son utilité, tant elle brille par sa futilité, son artificielle fonctionnalité dictée, non par la satisfaction des besoins (collectifs) pérennes, mais la recherche effrénée de l'intérêt (narcissique et pécuniaire) immédiat. En d'autres termes, le gadget capitaliste, fondé sur le principe de plaisir et l'économie pulsionnelle (et non rationnelle), demeuré fixé, selon la topique freudienne, au stade anal (banal) régi, comme on le sait, par les conduites excrémentielles où les matières fécales (l'argent) constituent le mode essentiel d'échange, n'a aucune utilité sociale étant par essence individuel, autrement dit égocentrique.
Il ne vise pas l'épanouissement social de la communauté, mais la satisfaction primitive et égoïste de quelques élus richissimes, la jouissance débridée d'une minorité parasitaire accapareuse, et non la réjouissance sociale de l'ensemble de la population laborieuse. Pour illustrer notre analyse, nous nous appuierons sur un extrait tiré du livre de Friedrich Engels, «L'origine de la famille, de la propriété privée et de l'Etat».
Afin de souligner, en matière de décadence, les similitudes avec notre époque, j'ai pris la liberté de réactualiser certaines données, mises entre parenthèses.
« Dès les derniers temps de la République, la domination des Romains avait pour but l'exploitation totale des provinces conquises ; l'Empire n'avait pas supprimé cette exploitation, mais, au contraire, il l'avait réglementée. » (À l'instar de la domination impérialiste mondiale actuelle.) « Plus l'Empire déclinait, plus les impôts et les prestations augmentaient, plus les fonctionnaires pillaient et pressuraient sans pudeur. » (Cela rappelle étrangement la dépravation des classes dirigeantes prédatrices contemporaines, responsables du renchérissement des tarifs des matières énergétiques et des produits de première nécessité, et de l'augmentation des taxes spoliatrices, causes de la paupérisation absolue de centaines de millions de personnes.) «Le commerce et l'industrie n'avaient jamais été l'affaire des Romains dominateurs de peuples ; c'est seulement dans l'usure qu'ils avaient surpassé tout ce qui fut avant et après eux.» (Ces dernières décennies, l'Occident décadent, en voie de désindustrialisation accélérée, ne survit que par l'addiction au crédit et la spéculation boursière, autrement dit la financiarisation pathologique de son économie, sur fond d'une consommation compulsive moyennant paiement à tempérament.)
« Ce qui existait et s'était maintenu en fait de commerce sombra sous les exactions des fonctionnaires ; ce qui survécut malgré tout se trouvait en Orient (aujourd'hui en Asie, notamment la Chine, Atelier du monde), dans la partie grecque de l'Empire, qui est en dehors de notre sujet. Appauvrissement général, régression du commerce, de l'artisanat, de l'art, dépeuplement, décadence des villes, retour de l'agriculture à un niveau inférieur-tel fut le résultat final de l'hégémonie mondiale romaine.» (Le constat dramatique de notre présente époque marquée par l'effondrement de l'économie, la faillite de centaines de milliers d'entreprises, la mise au chômage de millions de travailleurs, le retour à des activités archaïques sous contrat précaire.
Aggravés par la désindustrialisation, dans la majorité des pays capitalistes occidentaux pourtant féministes, les emplois précaires de domesticité -aide-soignante, femme de ménage, assistante maternelle, serveuse, caissière-sont devenus les seules activités professionnelles proposées aux nouvelles générations sacrifiées, ces nouvelles femmes prolétaires du tertiaire. Pour compléter le texte d'Engels, il est utile de rappeler que la chute de l'Empire romain s'accompagne d'une diminution de terres cultivées de 30 à 50 % selon les endroits, indice clair d'une baisse de la population dans une proportion identique : l'Italie par exemple passe de 10 millions d'habitants sous Auguste (début de notre ère) à 5 millions.
L'Empire s'effondre sous les effets conjugués de la désagrégation de l'économie et des invasions «barbares», qui envahissent aisément l'Italie en dépit du doublement des effectifs de l'armée, passée de 240 000 hommes sous Auguste à 500 000 sous Constantin le Grand -début du IVe siècle. D'aucuns, notamment au sein de la «galaxie fachosphère», soutiennent que l'Occident - l'Europe - s'effondrera sous l'assaut des invasions migratoires. Au reste, comme à notre époque décadente marquée par l'augmentation exponentielle des dépenses militaires des États payées avec l'argent des contribuables réduits, eux, à la paupérisation absolue, la plus grande partie des ressources fiscales de l'Empire romain est consacrée au budget de la défense, au détriment des autres secteurs d'activité réduits à la portion congrue. Notamment l'enseignement public, sacrifié, entraînant la disparition des lettres, des arts, de l'architecture. On assiste en effet à la régression de l'usage de l'écrit. Dans cet Empire déclinant, seules les aristocrates peuvent encore se payer des précepteurs privés pour l'instruction de leurs progénitures, sans oublier les milieux ecclésiastiques. Du VIIème siècle jusqu'au XIème, il n'y aura plus aucun auteur laïc en Occident. De même, les routes ne sont plus entretenues ; les échanges commerciaux sont perturbés, entraînant une dépopulation des villes : Rome passe de 1 million d'habitants à 20 000 au lendemain de la chute de l'Empire - fin du VIème. Le niveau de vie de la glorieuse époque romaine - 1er et IIe siècle - ne sera retrouvé qu'au XIVe siècle. De même, avec la baisse des recettes fiscales enregistrée dès le début du Vème siècle, l'Etat est dans l'impossibilité de payer ses soldats, contribuant à la dislocation de l'Empire. Aussi, il n'y aura plus d'armée permanente payée par l'Etat avant le XVe siècle.)
Liban: préfiguration de la future société mondiale
«L'agriculture, branche de production essentielle dans tout le monde antique, l'était redevenue plus que jamais.» (Ce qui risque d'advenir prochainement : le retour forcé à la terre : c'est déjà le cas au Liban où de nombreuses personnes sont contraintes de retourner dans leur village pour s'adonner à l'agriculture. À cet égard, il est utile de souligner que le Liban, pays autrefois appelé la Suisse du Moyen-Orient, aujourd'hui précipité dans la paupérisation absolue, est en voie de se transformer en Yémen, Éthiopie, pays ravagés par la famine. L'effondrement du système éducatif est imminent. Comme c'est le cas déjà de son système de santé sinistré. Nul doute, le Liban est la préfiguration du futur immédiat réservé à l'ensemble des pays. Nous entrevoyons à l'échelle internationale les préludes apocalyptiques de l'avenir immédiat avec l'exemple du Liban en proie à l'effondrement de son économie.
C'est la pire crise économique au monde depuis 1850, selon la Banque mondiale. « La crise économique et financière est susceptible de se classer parmi les 10, voire les trois épisodes de crise les plus graves au niveau mondial depuis le milieu du XIXe siècle », indiquait la Banque mondiale dans un rapport publié le 1 juin 2021. Sa monnaie a perdu 85% de sa valeur, son économie s'est contractée de plus de 20% en 2020. « Sous réserve d'une incertitude extraordinairement élevée, le PIB réel devrait se contracter de 9,5% supplémentaires en 2021 », selon la Banque mondiale, obérant tout espoir de reprise économique.
Plus de 75% des Libanais vivent en dessous du seuil de pauvreté national, sans revenus, sans électricité, sans chauffage, sans eau, sans essence, sans médicaments, sans soins, sans éducation nationale, sans culture, sans possibilité de voyager faute de visa, autrement dit, ils sont enterrés vivants - sort qui attend la majorité de la population mondiale, déjà largement paupérisée du fait de la contraction de ses revenus et du renchérissement des prix des matières énergétiques et produits de première nécessité.
Autre phénomène observé au Liban, rappelant étrangement la débandade des armées romaines, la dislocation de l'armée libanaise en proie à une hémorragie de ses effectifs. En effet, l'institution militaire, assaillie par la plus grave crise financière du Liban, assiste à la désertion de milliers de soldats, décampés en raison des conditions économiques désastreuses, de la modicité de leur solde - passée de 800 dollars à 40 dollars du fait de la dépréciation de la monnaie libanaise. Le gouvernement ne peut plus payer son armée. L'armée libanaise déguenillée est réduite à vivre de colis alimentaires et de soutien médical, autrement dit d'assistanat.
Aujourd'hui, la dévaluation monétaire a fait fondre les salaires en livres libanaises des soldats, mais également le budget de l'institution militaire, menaçant sa capacité opérationnelle. Dernier rebondissement : par crainte d'une dislocation totale de l'armée, et, corrélativement, de l'effondrement du pays, les États-Unis envisagent de verser directement les soldes à la troupe pour maintenir à flot cette institution militaire de plus en plus désertée.
Le même phénomène sévit au sein de la police. En outre, nombre de soldats et policiers doivent cumuler d'autres emplois pour arrondir leur misérable salaire.
Autre signe symptomatique de la régression sociale, pour ne pas dire de décadence de la société libanaise : les femmes, du fait de la cherté de la vie provoquée par l'hyperinflation, du dérèglement de leurs conditions sociales générées par l'hémorragie financière et la fuite des capitaux, n'ont plus les moyens de s'acheter des serviettes hygiéniques (passées, en fonction des marques, de 2 dollars avant la crise à 20 dollars aujourd'hui). Alors chaque mois, durant leur période menstruelle, les femmes recourent à de vieux chiffons, voire, pour les mamans, aux couches de leur bébé.)
« En Italie, les immenses domaines (latifundia) qui, depuis la fin de la République, couvraient presque tout le territoire, avaient été exploités de deux façons. Soit en pâturages, où la population était remplacée par des moutons ou des bœufs, dont la garde n'exigeait que peu d'esclaves ; soit en villas, où une foule d'esclaves faisaient de l'horticulture en grand, tant pour le luxe du propriétaire que pour la vente sur les marchés urbains. Les grands pâturages s'étaient maintenus et sans doute même agrandis ; les domaines des villas et leur horticulture avaient dépéri du fait de l'appauvrissement de leurs propriétaires et du déclin des villes. » (C'est l'avenir immédiat des grandes agglomérations capitalistes en butte à la faillite des petits patrons, à la déconfiture des classes moyennes, à la paupérisation généralisée de la classe ouvrière et des couches populaires, du fait de la contraction des salaires et de l'incontrôlable inflation.) « L'exploitation des latifundia, basée sur le travail des esclaves, n'était plus rentable ; mais, à cette époque, c'était l'unique forme possible d'agriculture en grand. » (Comme depuis des décennies l'économie productive n'est plus rentable du fait de la baisse tendancielle des profits induite par la modernisation de l'appareil de production et la réduction de la masse salariale, la diminution drastique de celle-ci entraînant la baisse de la consommation, accentuant la crise, la fermeture d'entreprises, en résumé la désindustrialisation). « La petite culture était redevenue la seule forme rémunératrice.» (Actuellement remplie par la sphère spéculative, unique source de profits des grands capitalistes réduits à boursicoter au lieu d'investir leurs capitaux dans la production réelle : en pleine période de pandémie marquée censément par une grave crise économique, les Bourses n'ont jamais été aussi florissantes, le CAC 40 battant son record historique de hausse, clôturant à plus 7000 points.)
«L'une après l'autre, les villas furent morcelées en petites parcelles et remises à des fermiers héréditaires qui payaient une certaine somme, ou à des partiarii, gérants plutôt que fermiers, qui recevaient pour leur travail un sixième ou même seulement un neuvième du produit annuel. Mais, dans la plupart des cas, ces petites parcelles de terre furent confiées à des colons qui, en échange, payaient chaque année une somme fixe, étaient attachés à la glèbe et pouvaient être vendus avec leur parcelle ; ils n'étaient pas, à vrai dire, des esclaves, mais ils n'étaient pas libres non plus, ne pouvaient pas se marier avec des femmes de condition libre, et leurs unions entre eux n'étaient pas considérées comme des mariages pleinement valables, mais, ainsi que celles des esclaves, comme un simple concubinage (contubernium). Ils furent les précurseurs des serfs du Moyen Age. » (À l'instar des salariés actuels au statut précarisé, réduits soit à travailler dans des conditions dignes du XIXe siècle, en contrat déterminé - de quelques jours à quelques semaines maximum -, avec des salaires considérablement abaissés et aléatoires, soit définitivement transformés en sans réserves, en surnuméraires, des « masses en trop», autrement dit en chômeurs.)
«L'antique esclavage avait fait son temps.» (On pourrait aisément écrire : le capitalisme a fait son temps! Il se meurt, aidons-le à périr, avant qu'il nous engloutisse avec lui, nous précipite dans l'obscurantisme pour mille cinq cents ans.)
« Ni à la campagne dans la grande agriculture, ni dans les manufactures urbaines, il n'était plus d'un rapport qui en valût la peine - le marché, pour ses produits, avait disparu.» (Comme s'amorce actuellement la disparition du paysage urbain les magasins, les centres commerciaux - désertés par la clientèle impécunieuse, mais également du fait des pénuries, de l'inflation -, les locaux professionnels - induits par le télétravail -, les sociétés - fermées pour cause de faillite -, les voitures - devenues chères à entretenir, faute de moyens financiers pour s'acheter l'essence hors de prix -, pour certains définitivement, prémices de la future société en déclin désertée par le consumérisme. Les villes vont se transformer en cimetières économiques, charniers sociaux, cloaques culturels. Les mégalopoles en nécropoles. Comme l'avait écrit prophétiquement Marx dans le Manifeste du Parti communiste : « Chaque crise détruit régulièrement non seulement une masse de produits déjà créés, mais encore une grande partie des forces productives déjà existantes elles-mêmes. Une épidémie qui, à toute autre époque, eût semblé une absurdité, s'abat sur la société, - l'épidémie de la surproduction. La société se trouve subitement ramenée à un état de barbarie momentanée ; on dirait qu'une famine, une guerre d'extermination lui ont coupé tous ses moyens de subsistance ; l'industrie et le commerce semblent anéantis. Et pourquoi ? Parce que la société a trop de civilisation, trop de moyens de subsistance, trop d'industrie, trop de commerce. Les forces productives dont elle dispose ne favorisent plus le régime de la propriété bourgeoise ; au contraire, elles sont devenues trop puissantes pour ce régime qui alors leur fait obstacle ; et toutes les fois que les forces productives sociales triomphent de cet obstacle, elles précipitent dans le désordre la société bourgeoise tout entière et menacent l'existence de la propriété bourgeoise. Le système bourgeois est devenu trop étroit pour contenir les richesses créées dans son sein. - Comment la bourgeoisie surmonte-t-elle ces crises ? D'un côté, en détruisant par la violence une masse de forces productives ; de l'autre, en conquérant de nouveaux marchés et en exploitant plus à fond les anciens.
A quoi cela aboutit-il ? A préparer des crises plus générales et plus formidables et à diminuer les moyens de les prévenir. Les armes dont la bourgeoisie s'est servie pour abattre la féodalité se retournent aujourd'hui contre la bourgeoisie elle-même.)
« Mais la petite culture et le petit artisanat, à quoi s'était réduite la gigantesque production des temps florissants de l'Empire, n'avaient pas de place pour de nombreux esclaves.» (Comme aujourd'hui les entreprises n'ont plus assez d'activité à offrir aux centaines de millions de travailleurs, réduits de force au chômage.) «Il n'y avait plus place, dans la société, que pour des esclaves domestiques et les esclaves de luxe des riches. » (C'est ce qui va se produire : le retour de la domesticité, comme il a survécu jusqu'à aujourd'hui dans les monarchies du Golfe et du Maroc, et certaines régions du monde, où des centaines de milliers de personnes sont réduites en esclavage domestique pour servir de valetailles aux princes arabes ou aux familles richissimes.)«Mais l'esclavage agonisant suffisait encore pour faire apparaître tout travail productif comme travail d'esclave, indigne de Romains libres, - et chacun, maintenant, avait cette qualité. De là vint, d'une part, le nombre croissant des affranchissements d'esclaves superflus, devenus une charge et, d'autre part, le nombre croissant, ici des colons, là des hommes libres tombés dans la gueusaille - verlumpt -» (comparables aux poor whites des États-Unis.)
Le salariat ne paye plus, c'est pourquoi il faut lui donner congé
«Le christianisme est tout à fait innocent de la disparition progressive de l'antique esclavage.» (Comme le pauvre coronavirus est tout à fait innocent de l'effondrement actuel de l'économie capitaliste. Coronavirus qu'il conviendrait de remercier, à qui il faudra dresser une stèle commémorative, car il aura fait prendre conscience à l'humble humanité exploitée et opprimée de la nécessité d'abattre ce virus létal : le capitalisme.)
« Il l'a pratiqué pendant des siècles dans l'Empire romain et, plus tard, il n'a jamais empêché le commerce d'esclaves auquel se livraient les chrétiens, ni celui des Allemands dans le Nord, ni celui des Vénitiens en Méditerranée, ni, plus tard encore, la traite des nègres. » (Les coronavirus ont toujours existé mais ils n'ont jamais fait effondrer l'économie ni provoqué la mort d'une civilisation.) « L'esclavage ne payait plus, et c'est pourquoi il cessa d'exister. » (Le salariat ne paye plus, c'est pourquoi il a fait son temps, donc il est impératif de lui donner congé.) «Mais l'esclavage agonisant laissa son dard empoisonné; le mépris du travail productif des hommes libres.» (Comme avec le déclin du capitalisme dominé par l'immense classe moyenne et petite bourgeoise contemporaine qui méprise le travail d'usine, les tâches prolétariennes : aussi ces deux classes parasitaires sont-elles incapables d'offrir un projet émancipateur du fait de leur inutilité économique et futilité politique. Avec la crise sanitaire du Covid-19, le monde a appris que nous pouvions nous passer de ces classes parasitaires. En revanche, il a mesuré l'importance des ouvriers au sein de la production essentielle à la survie de la société, seuls salariés à avoir maintenu leur activité durant les confinements en raison de leur vitale nécessité économique - les fameux Premiers de Cordée.
En effet, en dépit des risques de contamination encourus du fait de l'absence d'équipements de protection médicaux, ces salariés, appelés «travailleurs de la deuxième ligne» - ouvriers, caissières, boulangers, chauffeurs, agents d'entretien, les premiers étant les personnels soignants -, avaient continué d'apporter à la population les services indispensables à la vie quotidienne, contribué à maintenir l'activité économique.)
« Là était l'impasse sans issue dans laquelle le monde romain était engagé. » (Comme aujourd'hui, aussi longtemps que la petite bourgeoisie impose son calendrier politique, son idéologie réactionnaire, sa prééminence organisationnelle, sa domination directionnelle, en politique comme lors des grèves ouvrières et des révoltes sociales, aux dépens du prolétariat, actuellement totalement soumis, toujours à la traîne de cette classe petite bourgeoise parasitaire).
« L'esclavage était impossible au point de vue économique ; le travail des hommes libres était proscrit au point de vue moral. Celui-là ne pouvait plus, celui-ci ne pouvait pas encore être la base de la production sociale. Pour pouvoir y remédier, il n'y avait qu'une révolution totale. » (Pour paraphraser Friedrich Engels : il n'y a qu'une révolution totale pour en finir avec le capitalisme et son système basé sur le salariat, autrement dit l'esclavage contractuel, sur l'enrichissement d'une minorité - les 1% - et l'appauvrissement de la majorité du peuple - les 99% du prolétariat mondial, aujourd'hui menacé de famine, c'est-à-dire de mort.)
Durant la nuit du 31 novembre 2012, j’étais sur le chemin du retour de chez ma tendre mère, quand, je fus accosté par une inconnue. Sa tête était voilée mais laissait apparaitre quelques mèches de ses cheveux noirs.
Ses yeux étaient un amalgame de gris, de bleu, de noir et de vert. Un nez droit d’une statue antique remontait sa bouche fine mi ouverte, d’où jaillissait un sourire plus sucré que le miel du ciel.
Et je me suis dit que cette femme ne devrait être qu’une fée évadée d’un conte. Ou peut-être une Houri d’un paradis. Elle était là, avec un haïk d’antan qui l’enveloppait et qui la rendait encore plus désirante que toutes les belles et douces princesses que les châteaux des monarques gardaient jalousement.
La dame en question était revenue pour fêter le 1 er novembre de cette année et qui devrait avoir un goût un peu spécial. Sublime, elle avançait avec des pas sûrs. On dirait une biche au milieu d’une oasis. Elle était souriante et l’éclat de son visage rendait le lieu comme un jour sans lune et sans soleil. Son regard n’était qu’une caresse, une invitation à un monde merveilleux et féerique. C’était l’Algérie la Reine de toute l’Afrique.
Elle était revenue à ma ville d’El Khemis pour juste m’inviter à l’accompagner à Alger, où tout le monde l’attendait. Elle avait honte de partir seule à la rencontre de tous ses amants, ses amis et fans. Elle voulait aussi lire un poème et faire passer un message à tous les responsables que toute âme quittera un jour ce monde et que le plus heureux est celui qui gère pas la misère des autres. Elle voulait aussi prévenir les vivants que les martyrs de l’Algérie ne sont pas des morts. Ils sont chez le Maître des deux mondes. Ils sont satisfaits.
La belle Algérie était si élégante dans son kaftan blanc et j’avais la chair de poule en tenant sa main de soie et de velours. Alors, je me suis vite rappelé tous les martyrs qui avaient succombé au charme de cette Reine : L’Emir Abdelkader et son armée. El Mokrani et Cheikh Bouamama. Lala Fatna Nesoumer la tigresse du Djurdjura. Ahmed Bey et tous les héros qui avaient combattu pour elle. J’étais submergé par un flot d’images et je n’avais même pas le temps de reconnaitre toutes les personnes qui défilaient dans ma tête.
Le documentaire inédit commençait par un attroupement de femmes au maquis qui préparaient de la galette et du café pour nos Djenoud. C’étaient des femmes qui avaient cru à l’indépendance et qui avaient contribué à côté des hommes pour l’obtention de notre liberté. Un peu plus loin se tenaient des essaims de Maquisards. J’avais vite reconnu leur chef qui n’était que le Lion Ben Boulaid. Il était si content de cette visite. Le Lion des Aurès avait toujours ce regard vif et cet air d’un père généreux et tendre. Il avait le pouvoir de reconnaitre la douce Algérie. Le grand Ben Boulaid savait que la construction d’un Etat de droit n’était pas une affaire facile et que la satisfaction de tous était un but utopique. En quittant le chef de la révolution nous avions accédé chez d’autres éléments de L’ALN.
En effet, le camp du Tigre Amirouche était juste à la rentrée d’un ravin boisé. Le fabuleux Amirouche était un bel Homme fort et serein. Un personnage digne de respect et d’amour. Il m’avait pris dans ses bras et j’avais vite compris que cet homme était un vrai chef. Avant de quitter ce chef militaire nous avions eu la chance de saluer un autre lion qui n’était que l’unique et le brave colonel El Houas. Le camp voisin était celui d’un homme de ma ville natale : Le colonel Si M’hamed Bougara. Le héros était là, devant moi avec son sourire énigmatique. Le valeureux combattant de mon enfance était devant mes yeux et sans me retenir des larmes échappèrent et mes jambes perdirent le contrôle et j’allais tomber. Heureusement le fabuleux colonel Si Djilali Bounaama était tout près et m’avait aidé à reprendre mon équilibre. J’avais pris mon mal en main et j’avais discuté avec ces deux lions de la wilaya IV.
La nuit tirait les pendules et il fallait voir les autres héros qui attendaient notre visite. A ma sortie de chez mes amis, je me suis retrouvé en face d’une grotte, où se tenait un autre groupe. Je m’étais rapproché sans faire de bruit et c’était vraiment une bonne surprise. C’était le chahid Zabana qui me tendait sa main pour m’éviter un piège. Le sourire comme d’habitude à la bouche et le coran à la main. Le premier guillotiné savait que son sang était répondu sur cette terre et que son nom avait aussi fait le tour du monde. Il était plus connu que son idole Zapata. En nous voyant au seuil de la grotte, Un officier était rapproché de nous pour nous inviter à le suivre à l’intérieur. C’était un certain Djilali Boudernane, le héros de la ville de « mille chahid » : théniet el had de la wilaya de Tissimsilt.
En pénétrant encore plus, grande fut ma surprise, car le chef de ce groupe était Abane Ramdane. Le génie qui avait préparé le congrès de la Soummam et ce dernier venait de m’inviter à venir m’asseoir à côté de lui. Il était si beau et ses paroles étaient buvables telle une tisane au miel. J’avais absorbé ses propos et j’ai vite compris pourquoi ce génie avait tant de jaloux. Il voulait juste que la nouvelle génération sache que son unique vœu était la libération de l’Algérie et que Dieu avait exaucé son vœu. En quittant Abane, un autre officier était là, pour m’aider à passer à un autre endroit un peu mystérieux.
En entrant à la seconde grotte je ne voyais pas bien, mais je savais que deux hommes voulaient me voir. En effet, le colonel Lotfi était là, à m’attendre avec le héros Chaabani. Ils étaient en tenu militaire. Le colonel Chaabani m’avait invité à partager son repas. C’était un Lion fier qui ne reculait devant rien. Il était heureux d’avoir participé à la guerre de libération de son pays. Son ami Lotfi, le sourire à la bouche paraissait très heureux pour la victoire de sa patrie, mais il n’avait rien dit. Quinze minutes plus tard, une jeune femme était venue pour nous emmener voir d’autres responsables. Le premier de ces hommes n’était rien que le fabuleux Larbi Ben M’hidi. Un homme que j’avais rêvé de juste lui dire comment il avait étonné tous les généraux Français. Avec son sourire courtois, il m’avait tiré dans ses bras pour m’avouer que sa force était spirituelle et que sa foi en Dieu était plus forte. Il venait de m’apprendre qu’il était mort sur la table de torture et qu’il avait su battre ses bourreaux qui n’avaient rien gagné de sa mort, sauf la haine et le mépris des Français eux-mêmes. Au fond de la grotte j’avais pu faire la rencontre du reste de la troupe des chouhada : Didouche Mourad, Audin, Ziroud Youcef, Ali la pointe, Issat Idir, mohamed Bouras, Hassiba Ben Bouali, Souidani Boudjemaa, Ali Mellah, Belouazdad,, et d’autres héros connus et d’autres inconnus du grand public. Cette fiction a été inventée pour juste vous renseigner sur notre éloignement du serment fait aux martyrs.
Une imagination qui devrait nous protéger contre la France qui avait juré de nous ruiner tôt ou tard. Cette France qui avait entravé toutes les bonnes démarches que l’Algérie avait entamé pour l’unité des pays maghrébins. Cette France qui avait encouragé Le Maroc à prendre le Sahara Occidental et de n’écouter que sa propre raison. Ce Roi du Maroc qui gagnerait tout s’il avait freiné ses ambitions démesurées. Ce Roi du Maroc aurait l’aide et le soutien de sa sœur ainée l’Algérie. Il ne fallait pas écouter les la voix de la France qui voulait régner au nord de l’Afrique en le divisant. La France qui avait investi en Tunisie et qui avait acheté l’honneur des notables d’une part et en semant son venin au cœur des démunis d’une autre part. Elle voulait que l’Algérie coule après 50 ans. Cette France la revoilà à nos frontières du Sud pour juste commencer une guerre sans fin et que notre pays s’embrase à nouveau et que les avions de l’OTAN viennent pour détruire nos bases de vie sous prétexte de bavures. Ils savent tous que nous sommes riches et ils sont à nos frontières pour nous protéger contre le vent et notre pays doit payer une taxe qui se résume à des milliards de dollars.
C’est la mafia internationale qui menace les pays riches, mais qui ne possèdent pas les armes nucléaires. Il faut prendre en compte que la crise qui touche certains pays d’Europe aura des répercussions sérieuses sur notre pays et les Algériens devraient prendre conscience de ce danger imminent qui nous menace ? Aujourd’hui, nos ennemis tuent nos frères à Ghaza et aucun pays Arabe n’a eu le courage de critiquer ouvertement cet Etat voyou qui assassine des enfants et des femmes. Cependant, tant de pays Arabes étaient pour le renversement du régime Syrien et ils avaient eu l’audace d’armer les enfants d’un même pays pour s’entretuer. On jubile pour le départ du président Syrien, car il est l’ami des Iraniens, mais on oublie ceux qui méritent le soutien et l’aide. Ceux qui mènent une guerre avec des pierres contre des obus de tank. Il est temps pour nous les Arabes de dire non à tous ces faux amis qui ne sont chez nous que pour semer la discorde. Nous avons l’amour de Dieu, car sous nos terres nous avons des trésors. Alors, nous devrions scruter les cieux pour l’installation de nouvelles technologies, telles les énergies éoliennes et solaires.
Nous avons tout pour réussir un essor qui nous mettra à l’abri de nos ennemis qui attendent la moindre faute pour revenir nous coloniser comme ils l’ont fait en 1830. Donc, ce premier novembre 2012 devrait être un événement spécial qui nous rappelle nos fautes et notre égarement du droit chemin. Un rappel qui nous offre la chance d’une révision de notre carte de route. Un retour vers la démocratie réelle et non pas celle du maintien du clanisme et de la répression.
Laissons de côté ce sujet écœurant et revenons à cette fameuse nuit et mon aventure avec cette Reine. La douce femme qui m’accompagnait avait assisté à toutes mes rencontres. Elle était si triste et si touchée du film qui venait de passer sous ses beaux yeux. La douce femme ne voulait plus partir sur Alger qui était notre première destination. Elle n’avait pas aimée tous ces dépenses inutiles et qui avaient dénaturé cet événement qui devrait être purement historique pour éveiller le sentiment du patriotisme chez la nouvelle génération. Un événement qui devrait aussi frapper les consciences des hommes qui sont au pouvoir : Qu’est-ce qu’ils ont fait de l’Algérie ? La dame voulait que cet événement touche les cœurs et les esprits. Sans trop tarder, un vent formidable était venu de je ne sais où, pour nous transporter vers un ailleurs. En ouvrant mes yeux, j’ai reconnu l’endroit grâce à ce palmier qui décorait le lieu. Nous étions au Mausolée de Sidi Lakhdar Ouled Ekhlouf à Mostaganem. Je me suis dit que cette femme ne devrait être que Nedjma de Kateb Yacine. Je m’attendais à revoir le nègre protecteur de la tribu des Kelbout. Je me prêtais à voir la forêt du Nador de Guelma et Souk-Ahras.
0Non, Il n’y avait pas de nègre, mais juste une femme nommée Nekhla. Après le diner, la femme qui m’accompagnait avait entendu des appels qui venaient du dehors. Sans un mot, elle était partie. Le lieu était si doux et j’entendais des voix qui lisaient du coran. J’avais pris un livre d’un étalage et sous l’éclat de la lumière d’une bougie je m’étais mis à lire sourate El Moulk. Sans prendre conscience, je m’étais endormi sous l’envoûtement du lieu et je me voyais dans la cour du mausolée avec le maitre des lieux. C’était un homme d’un certain âge et je ne pouvais discerner les contours de son visage, car il y avait comme un éclat auquel je ne pouvais faire face. Le saint homme était venu pour juste m’inviter à revenir me ressourcer chez lui quand je ressentirai le besoin. Il venait de m’apprendre que la Reine qui était avec moi voulait le retour aux sources et aux traditions.
Que l’Algérie souffrait du problème de la défaillance des consciences chez les citoyens. Nous assistons au départ des nobles valeurs. On ne valorise plus le savoir. On n’applique la loi que sur les faibles. Les riches ont tout corrompus. Les menteurs et les escrocs ont pris les postes de commandes, les élites ont pris la fuite et le reste contre la pauvreté mène la lutte. En me réveillant j’avais ressenti le désir pressent d’écrire quelque chose pour apaiser mon chagrin. Je voulais que cette Reine sache l’amour que j’avais pour elle. Tu dois savoir douce Algérie que mon amour vient d’un cœur de chair et que tu restes l’amante, la sœur et la mère. Tu dois Apprendre aussi, que ton amour est plus sucré et plus doux que le miel du ciel. O toi la rose qui ne fait que me fuir ? Cela fait des années que je cherche ta voie, pour juste écouter le timbre de ta voix. Ton silence de musée fait de toi une femme sage, qui tue ses amants de tous les âges. Et oui, tes paroles, douce Algérie ne sont que des parfums cueillis d’un jardin inconnu. Tu es cette histoire de Houri évadée d’un conte et moi tel Homère je la conte à ce merveilleux beau monde qui m’écoute, afin que tu demeures éternelle. Tu es cet amour entre la rosée et la fleur. Tu es cette passion entre une vague et un vieux rocher. Tu es ce langage divin entre les nuages et les monts. Tu es le repos d’une mosquée et la quiétude d’un quai. Tu es cette étoile qui poursuit son chemin sans tenir compte des radotages des envieux. Tu es le soleil d’un jour pluvieux. Je t’ai aimée jeune et je t’aimerai davantage en étant plus vieux.
Dis-moi comment te séduire o toi femme qui me fait tant courir ? J’ai juste envie de te revoir pour te parler de ce soir. Pour juste humer ton parfum de gazelle, sous le regard captivant de tes beaux yeux gris et noirs. J’ai toujours adoré fouiner dans tes notes. Je voulais lire les noms de tous tes amants. Je voulais connaitre les noms de tous les aèdes et de tous les écrivains qui avaient assez de courage pour dénoncer les affres des colons et ensuite les déviations de certains djenoude. Je voulais t’écrire des missives nocturnes pour t’informer des pilleurs de ta fortune. Ceux qui prétendaient êtres tes héritiers et qui avaient dilapidé tes richesses sans relâche et sans pitié. O toi douce Algérie que j’ai tant aimée. Toi l’amante, la sœur et la copine. Mon cœur ne peut retenir l’ampleur de cette douleur. Il ne peut tolérer les cris moqueurs, ni les coups bas d’une poignée de loups débarqués de je ne sais où et qui font la pluie et le beau temps. Tes vrais héros je les connais et je suis fier de les rencontrer dans mes rêves, mes lectures et mes évasions nocturnes. Je connais aussi les noms des lâches et des traitres. J’irai apprendre la critique littéraire, la prose et la poésie chez notre professeur en littérature Hadj Nacer Malika. Pour juste avoir une place au palais du savoir, au moment où les gens d’aujourd’hui font la course derrière l’argent et les bourses. Ils font la queue pour juste dénicher un siège dans une mairie et faire des affaires sur le dos du peuple. Pour toi l’Algérie j’irai me battre avec les géants et je ferai jaillir la lumière du néant. Dis-moi douce Algérie comment te séduire et comment t’aimer aussi fort. Montre-moi comment pardonner à tous ces responsables qui avaient manqué à leur devoir.
Comment faire passer mon respect et mon admiration pour les vrais moudjahine qui avaient tout donné pour ce pays. Douce Algérie, enseigne-moi la voie du pardon afin que mon cœur se vide de toute cette rancune. Montre-moi le chemin de l’oubli et de la réconciliation. Tu sais bien que mon cœur n’est qu’une fleur et que ma tête n’a qu’un secret : celui de t’aimer tout en versant des pleurs. Douce Algérie, qui me laisse solitaire. Douce image charmante et évanouie. Rose parfumée par le vent d’automne, au fil des ères toujours épanouie. Lors que s’enfuit rapidement une sirène, triste, triste est le marin, qui reste seul avec ses douleurs et ses peines, qui s’abandonne à son malheur et chagrin. Souvenir, amer et cruel souvenir. Le grand bonheur fait de tant de tendresse, qui ne devait jamais finir, pleure aujourd’hui sur ma détresse. Demain, j’irai au mont pour parler au ciel. Humble, je me prosternerai. Soumis, devant vous, l’Eternel. Vous le savant, de mes peines et mes cris. L’Unique et le Maître de nos destins. Et pour toi, l’Algérie, je prierai, quand naîtront les beaux matins, et que la brise berce les douces prairies.
BOUTARAA- Farid